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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_470/2023  
 
 
Arrêt du 22 février 2024  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Haag. 
Greffier : M. Parmelin. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Frédérique Riesen, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
Service des automobiles et de la navigation du 
canton de Vaud, avenue du Grey 110, 1014 Lausanne. 
 
Objet 
Retrait du permis de conduire, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif 
et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 18 juillet 2023 (CR.2023.0010). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 16 novembre 2021, A.________ a été impliqué dans un accident de la circulation à Montreux, lors d'une manoeuvre de dépassement d'une trottinette électrique. Selon le rapport de police du 11 décembre 2021, il a heurté la conductrice de la trottinette avec le rétroviseur droit de son véhicule, entraînant la chute de celle-ci, qui a été blessée au front et qui a subi des hématomes à l'oeil gauche, au côté gauche de la mâchoire ainsi qu'aux deux genoux. 
 
B.  
Par ordonnance pénale du 19 janvier 2022, le Préfet du district de la Riviera-Pays d'Enhaut a retenu que A.________ avait circulé au volant d'un véhicule avec inattention et avait causé un accident suite à un dépassement sans égard au véhicule dépassé, violant les art. 35 al. 3 de la loi fédérale sur la circulation routière (LCR; RS 741.01) ainsi que les art. 3 al. 1 et 10 al. 2 de l'ordonnance sur les règles de la circulation routière (ORC; RS 741.11). Il l'a condamné à une amende de 400 fr. pour violation simple des règles de la circulation routière au sens de l'art. 90 al. 1 LCR. Cette ordonnance n'a pas été contestée et est entrée en force. 
 
C.  
Le 19 juillet 2022, le Service des automobiles et de la navigation du canton de Vaud a informé A.________ qu'il envisageait de prononcer une mesure de retrait du permis de conduire à son encontre en raison de l'infraction commise le 16 novembre 2021, à Montreux. 
Invité à se déterminer, A.________ a nié avoir heurté la conductrice de la trottinette avec son rétroviseur en la dépassant, imputant la perte d'équilibre de celle-ci au revêtement de la route, qui présentait des aspérités, et au manque de concentration de l'intéressée, qui téléphonait en roulant. Il contestait également le rapport de police en tant qu'il mettait en doute la vitesse de 10 km/h qu'il avait annoncée. La présence d'une tache de sang au milieu de la voie de circulation démontrait qu'il avait laissé suffisamment de place à la conductrice de la trottinette lors de son dépassement. Les déclarations de la lésée ne le désignaient au surplus pas comme responsable de l'accident. Il demandait en conséquence qu'il soit renoncé au prononcé d'une mesure administrative. 
Par décision du 16 septembre 2022, le Service des automobiles et de la navigation a retiré le permis de conduire de A.________ pour une durée d'un mois en application de l'art. 16b al. 2 let. a LCR
Le 23 janvier 2023, le Service des automobiles et de la navigation a confirmé sa décision sur réclamation de A.________. Si la faute pouvait encore être qualifiée de légère, la mise en danger était en revanche moyennement grave puisqu'un accrochage avait eu lieu et que la conductrice de la trottinette avait été blessée et emmenée en ambulance. La durée du retrait correspondait au minimum légal et ne pouvait être réduite. 
La Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud a confirmé cette décision sur recours de A.________ au terme d'un arrêt rendu le 18 juillet 2023. 
 
D.  
Par acte du 14 septembre 2023, A.________ forme un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral contre cet arrêt en concluant à son annulation et à ce qu'aucune mesure administrative ne soit prononcée à son encontre. 
Le Tribunal cantonal a renoncé à se déterminer sur le recours et se réfère aux considérants de son arrêt. L'Office fédéral des routes conclut au rejet du recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
La voie du recours en matière de droit public, au sens des art. 82 ss LTF, est en principe ouverte contre une décision prise en dernière instance cantonale au sujet d'une mesure administrative de retrait du permis de conduire, aucune des exceptions mentionnées à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Le recourant est particulièrement atteint par la décision attaquée, qui confirme le retrait de son permis de conduire pour une durée d'un mois; il a un intérêt digne de protection à son annulation. Il a donc qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF. Les autres conditions de recevabilité du recours sont réunies, de sorte qu'il convient d'entrer en matière. 
 
2.  
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir constaté les faits pertinents de manière inexacte et en violation du droit en retenant que le Service des automobiles et de la navigation s'est fondé à juste titre sur l'état de fait retenu dans l'ordonnance pénale pour rendre sa décision et en rejetant les mesures d'instruction requises. Il ne pouvait lui être fait grief de ne pas avoir fait opposition à cette ordonnance dès lors qu'elle ne donnait aucune indication quant à la possible ouverture d'une procédure administrative ultérieure. N'étant ni juriste ni assisté d'un avocat, il ignorait que l'autorité administrative s'estimerait liée par les faits retenus par le Préfet et statuerait sur la base du dossier pénal, sans procéder à des mesures d'investigation complémentaires. Le manque de transparence de l'autorité pénale lui a donné la fausse impression que l'affaire était de peu de gravité et qu'elle ne donnerait lieu à aucune autre procédure. 
 
2.1. En principe, l'autorité administrative statuant sur un retrait du permis de conduire ne peut pas s'écarter des constatations de fait d'un jugement pénal entré en force. La sécurité du droit commande en effet d'éviter que l'indépendance du juge pénal et du juge administratif ne conduise à des jugements opposés, rendus sur la base des mêmes faits (ATF 139 II 95 consid. 3.2; 137 I 363 consid. 2.3.2). L'autorité administrative ne peut s'écarter du jugement pénal, dont elle doit en principe attendre la reddition (ATF 119 Ib 158 consid. 2c/bb), que si elle est en mesure de fonder sa décision sur des constatations de fait inconnues du juge pénal ou qui n'ont pas été prises en considération par celui-ci, s'il existe des preuves nouvelles dont l'appréciation conduit à un autre résultat, si l'appréciation à laquelle s'est livré le juge pénal se heurte clairement aux faits constatés, ou si le juge pénal n'a pas élucidé toutes les questions de droit, en particulier celles qui touchent à la violation des règles de la circulation (ATF 139 II 95 consid. 3.2). Cela vaut non seulement lorsque le jugement pénal a été rendu au terme d'une procédure publique ordinaire au cours de laquelle les parties ont été entendues et des témoins interrogés, mais également, à certaines conditions, lorsque la décision a été rendue à l'issue d'une procédure sommaire, même si la décision pénale se fonde uniquement sur le rapport de police. Il en va notamment ainsi lorsque la personne impliquée savait ou aurait dû prévoir, en raison de la gravité des faits qui lui sont reprochés, qu'il y aurait également une procédure de retrait de permis. Dans cette situation, la personne impliquée est tenue, en vertu des règles de la bonne foi, de faire valoir ses moyens dans le cadre de la procédure pénale, le cas échéant en épuisant les voies de recours à sa disposition. Elle ne peut pas attendre la procédure administrative pour exposer ses arguments (ATF 123 II 97 consid. 3c/aa; arrêts 1C_738/2021 du 1 er décembre 2022, 1C_91/2021 du 27 juillet 2021 consid. 2.1 et 1C_81/2021 du 14 juin 2021 consid. 3.1).  
 
2.2. Il est exact que le recourant n'a aucun antécédent en matière de circulation routière et que l'ordonnance pénale ne mentionnait pas que la sanction pénale prononcée était indépendante d'une éventuelle mesure administrative ni qu'il devait faire opposition s'il entendait contester les faits; ces éléments ne sont toutefois pas à eux seuls décisifs pour faire échec à l'application de cette jurisprudence, qui réserve l'hypothèse où les circonstances de l'infraction, voire les conséquences de celle-ci, devaient amener le conducteur fautif à envisager qu'il s'expose à une mesure de retrait de son permis de conduire. Tel est précisément le cas en l'occurrence où l'infraction reprochée au recourant dans l'ordonnance pénale, non contestée et entrée en force, a provoqué un accident, la conductrice de la trottinette ayant chuté et s'étant blessée. Il importe peu que le recourant ait ignoré la gravité exacte des lésions occasionnées.  
En tant qu'il retient que le recourant ne pouvait pas raisonnablement penser qu'il échapperait à toute mesure administrative alors qu'il était condamné sur le plan pénal pour une infraction ayant entraîné un accident ayant occasionné des blessures d'une certaine gravité, l'arrêt attaqué est conforme à la jurisprudence précitée et ne viole pas le droit fédéral. Le recourant ne saurait arguer de sa méconnaissance du système légal ou du fait que l'ordonnance pénale ne faisait aucune mention d'une éventuelle procédure administrative de retrait du permis de conduire. L'art. 16 al. 2 LCR prévoit en effet qu'une infraction aux prescriptions sur la circulation routière entraîne le retrait du permis de conduire ou un avertissement lorsque la procédure prévue par la loi fédérale du 18 mars 2016 sur les amendes d'ordre (LAO; RS 341.1) n'est pas applicable; l'auteur d'une infraction qui a fait l'objet d'une ordonnance pénale et n'a pas été sanctionné par une simple amende d'ordre devrait ainsi savoir qu'il va faire l'objet d'une mesure de retrait de son permis de conduire, ce d'autant que la police et les autorités pénales ont l'obligation, en vertu de l'art. 104 al. 1 LCR, de notifier aux autorités compétentes toute infraction pouvant entraîner une mesure prévue dans la présente loi (cf. arrêt 1C_589/2021 du 5 mai 2022 consid. 2.2). La conformité du système de la double procédure pénale et administrative en matière de répression des infractions aux règles de la circulation routière au principe de l'interdiction de la double peine a au surplus été constatée par le Tribunal fédéral dans un arrêt rendu le 26 septembre 2011 et publié aux ATF 137 I 363 et confirmé par la Cour européenne des droits de l'homme (arrêt Rivard contre Suisse du 4 octobre 2016, Requête n° 21563/12, §§ 23 ss). 
La cour cantonale n'a donc pas fait preuve d'arbitraire ou d'un excès de formalisme en considérant que le recourant aurait dû contester l'ordonnance pénale s'il ne partageait pas le constat de l'autorité préfectorale selon lequel il avait causé un accident à la suite d'un dépassement effectué sans égard au véhicule dépassé. 
 
2.3. Au demeurant, la cour cantonale a procédé à sa propre appréciation des faits et des éléments du dossier. Elle a jugé que les explications et les photographies produites par le recourant ne permettaient pas de s'écarter de l'ordonnance pénale et du rapport de police sur lequel elle est fondée. Aucun des éléments soulevés n'était de nature à remettre en question les circonstances de l'accident telles que décrites dans leur rapport par les agents de police, à savoir que le recourant avait heurté avec son véhicule la conductrice de la trottinette lors de son dépassement. Il était certes possible que le revêtement défectueux de la chaussée ait amené la conductrice à faire un écart sur la gauche, juste avant que le recourant ne la dépasse ou au début de sa manoeuvre de dépassement, puisqu'il l'aurait vue tourner son guidon sur la gauche. Elle n'aurait toutefois pas été heurtée par le véhicule conduit par le recourant si ce dernier avait été attentif et pris toutes les précautions nécessaires pour la dépasser, en particulier s'il avait tenu compte du fait qu'une personne circulant sur un véhicule léger à deux roues est susceptible de se déplacer su la gauche de la voie de circulation pour garder son équilibre (cf. BUSSY/RUSCONI/ JEANNERET/KUHN/MIZEL/MÜLLER, Code suisse de la circulation routière commenté, 4 e éd., 2015, n° 2.22 ad art. 35 LCR). La présence d'une tache de sang au milieu de la voie de circulation, dont la distance exacte par rapport au bord de la chaussée n'avait pas été mesurée, ne remettait pas en cause le déroulement de l'accident tel que décrit par les agents de police après que ceux-ci ont constaté l'état des véhicules et entendu les deux personnes impliquées. Les déclarations du recourant faites immédiatement après l'accident, selon lesquelles il aurait vu la conductrice de la trottinette s'appuyer contre sa voiture, puis chuter, ne suffisaient pas à douter du fait qu'elle aurait été préalablement heurtée par la voiture du recourant, vraisemblablement par son rétroviseur, ce qui l'aurait déséquilibrée, puis fait tomber.  
En tant qu'il retient que le recourant a heurté la conductrice de la trottinette pour expliquer le fait constaté par la police que le rétroviseur de son véhicule a été rabattu, le raisonnement de la cour cantonale échappe au grief d'arbitraire. Elle pouvait en déduire que le recourant n'avait pas voué toute son attention à l'égard de cette usagère de la route lors de sa manoeuvre de dépassement en ne tenant pas suffisamment compte du risque qu'elle pouvait dévier de sa trajectoire et retenir qu'il avait commis une infraction aux prescriptions sur la circulation routière au sens des art. 16a ss LCR
Au surplus, le recourant ne conteste pas la qualification de la faute et de la mise en danger retenue par le Service cantonal des automobiles et de la navigation et confirmée par la cour cantonale dans l'hypothèse où une infraction devait être retenue à son encontre. Il ne développe aucune argumentation visant à démontrer que la mise en danger aurait été jugée à tort moyennement grave. A ce propos, on observera que l'autorité administrative n'était pas liée par le jugement pénal qui a retenu une infraction simple au sens de l'art. 90 al. 1 LCR (ATF 139 II 95 consid. 3.2; arrêt 1C_135/2022 du 24 août 2022 consid. 2.4); dans la mesure où l'inattention fautive du recourant avait provoqué un accident ayant entraîné des lésions de peu de gravité, il n'était pas critiquable de ne pas avoir qualifié la mise en danger de légère, mais de moyennement grave. Quant à la durée du retrait du permis de conduire, fixée à un mois, elle correspond au minimum légal en cas d'infraction moyennement grave (cf. art. 16b al. 2 let. a LCR) et est conforme au droit fédéral. 
 
3.  
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours. Conformément à l'art. 66 al. 1 LTF, les frais de justice sont à la charge du recourant qui succombe. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire du recourant, au Service des automobiles et de la navigation et à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud, ainsi qu'à l'Office fédéral des routes. 
 
 
Lausanne, le 22 février 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
Le Greffier : Parmelin