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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_232/2024  
 
 
Arrêt du 26 avril 2024  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. le Juge fédéral Kneubühler, Président. 
Müller et Merz. 
Greffière : Mme Tornay Schaller. 
 
Participants à la procédure 
1. A.A.________ et B.A.________,, 
2. C.C.________, 
3. D.C.________, 
4. E.E.________, 
5. F.E.________, 
6. G.G.________, 
7. H.G.________, 
8. I.________, 
9. J.________, 
10. K.________, 
tous représentés par Maître Paul Hanna et Yannick Fernandez, avocats, 
recourants, 
 
contre  
 
1. L.________ SA, 
2. M.________ SA, 
toutes les deux représentées par Me Mark Muller, avocat, 
intimées, 
 
Département du territoire du canton de Genève, Office des autorisations de construire, Service des affaires juridiques, case postale 22, 1211 Genève 8. 
 
Objet 
Autorisation de construire, décision incidente 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre administrative, du 27 février 2024 (ATA/257/2024 - A/2597/2022-LCI). 
 
 
Faits :  
 
A.  
L.________ SA et M.________ SA (ci-après: les constructrices) sont copropriétaires de la parcelle n° 1'179 de la commune de Chêne-Bougeries, d'une surface de 1'808 m 2, située en 5 e zone à bâtir au sens de l'art. 19 al. 3 de la loi genevoise d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT; RS/GE L 1 30).  
Par décision du 15 juillet 2021 (DD 113'119), le Département du territoire du canton de Genève (ci-après: le Département) a délivré l'autorisation de construire sur cette parcelle six villas à très haute performance énergétique, avec garage souterrain et couvert à vélos; cette demande avait été déposée en novembre 2019. 
Le 15 février 2022, les constructrices ont déposé un projet modifié afin de répondre à certains griefs des opposants. Elles ont requis du Département la reprise du dossier DD 113'119 en vue du prononcé d'une nouvelle décision et le maintien du numéro de dossier DD 113'119 "afin que la nouvelle décision conserve tous les droits liés au dépôt de la demande en novembre 2019". 
Par décision du 15 juin 2022, le Département a reconsidéré sa décision DD 113'119 et délivré l'autorisation de construire DD 113'119 RE. 
B.A.________ et A.A.________, D.C.________ et C.C.________, F.E.________ et E.E.________, H.G.________ et G.G.________, I.________, J.________ et K.________ ont interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance du canton de Genève (ci-après: TAPI) contre la décision du 15 juin 2022. Par jugement du 22 juin 2023, le TAPI a admis le recours par substitution de motifs, a annulé la décision du 15 juin 2022 et a donné acte aux recourants que l'autorisation de construire délivrée le 15 juillet 2021 avait été annulée. 
 
B.  
Les constructrices ont formé recours auprès de la Chambre administrative de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) contre le jugement du 22 juin 2023. Par arrêt du 27 février 2024, celle-ci a admis le recours, annulé le jugement du 22 juin 2023 et renvoyé la cause au TAPI pour nouvelle décision au sens des considérants. Elle a jugé que le TAPI n'aurait pas dû entrer en matière sur le grief d'une violation de l'art. 72 de la loi genevoise sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI; RS/GE L 5 05) car les recourants ne disposaient pas de la qualité pour recourir sur ce point; la cause était renvoyée au TAPI pour examen des autres griefs. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, B.A.________ et consorts demandent principalement au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt du 27 février 2024 en ce sens que le recours est rejeté et que le jugement du 22 juin 2023 est confirmé. Ils concluent subsidiairement à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la Cour de justice pour nouvelle décision au sens des considérants. Ils requièrent aussi l'octroi de l'effet suspensif. 
Il n'a pas été demandé de réponses. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont adressés. 
 
1.1. La voie du recours en matière de droit public est ouverte, la décision attaquée ayant été rendue dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF).  
 
1.2. Selon l'art. 90 LTF, le recours est ouvert sans restriction contre les décisions finales, soit celles qui mettent définitivement un terme à la procédure, qu'il s'agisse d'une décision sur le fond ou d'une décision qui clôt l'affaire pour un motif tiré des règles de la procédure (ATF 149 II 170 consid. 1.2; 146 I 36 consid. 2.1).  
Lorsqu'elles ne portent pas sur la compétence ou la récusation (art. 92 LTF), les décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours si elles sont susceptibles de causer un préjudice irréparable ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (art. 93 al. 1 LTF). Cette réglementation est fondée sur des motifs d'économie de procédure: en tant que cour suprême, le Tribunal fédéral doit en principe ne s'occuper qu'une seule fois d'une affaire, et ce à la fin de la procédure (ATF 149 II 170 consid. 1.3; 142 II 363 consid. 1.3). 
 
1.3. L'arrêt attaqué ne met pas un terme à la procédure d'autorisation de construire puisque le dossier est renvoyé au TAPI pour examen des autres griefs. Il s'analyse ainsi comme une décision de renvoi. De telles décisions revêtent en règle générale un caractère incident et, sous réserve de celles qui tombent dans le champ d'application des art. 92 et 93 LTF, ne sont pas susceptibles d'être attaquées immédiatement alors même qu'elles tranchent de manière définitive certains aspects de la contestation (ATF 144 V 280 consid. 1.2). Elles sont toutefois tenues pour finales lorsque le renvoi a lieu uniquement en vue de son exécution par l'autorité inférieure sans que celle-ci ne dispose encore d'une liberté d'appréciation notable pour la décision qu'elle doit rendre (ATF 149 II 170 consid. 1.9; 147 V 308 consid. 1.2 145 III 42 consid. 2.1).  
En l'occurrence, la cause est renvoyée au TAPI pour examen des autres griefs. Sur l'ensemble de ces points, le TAPI dispose d'une latitude de jugement suffisante pour lui reconnaître un rôle plus important que celui de simple exécutant de l'arrêt de renvoi. Le litige ne porte pas plus sur un projet de grande ampleur et les questions qui sont à trancher suite à l'arrêt de renvoi ne revêtent pas une importance de principe telle qu'elle justifierait d'entrer en matière sur le recours nonobstant son caractère incident (cf. ATF 142 II 20 consid. 1.4). 
Les recourants soutiennent que l'arrêt du 27 février 2024 a mis fin à la procédure en ce qui concerne le grief de violation de l'art. 72 LCI relatif aux vues droites, de sorte qu'il faudrait considérer qu'il constitue matériellement une décision finale. Ils perdent cependant de vue que le fait qu'un aspect du litige a été tranché définitivement ne suffit pas pour permettre un recours immédiat devant le Tribunal fédéral. L'arrêt attaqué ne peut par conséquent pas être qualifié de décision finale au sens de l'art. 90 LTF et de la jurisprudence. 
 
1.4. La Cour de céans ne pourrait donc entrer en matière sur le recours que si les conditions alternatives de l'art. 93 al. 1 let. a et b LTF étaient réalisées, s'agissant d'une décision qui n'entre pas dans le champ d'application de l'art. 92 LTF.  
 
1.4.1. Si l'on excepte quelques situations particulières non réalisées en l'occurrence (cf. ATF 136 II 165 consid. 1.2; 135 II 30 consid. 1.3.4), le préjudice irréparable visé à l'art. 93 al. 1 let. a LTF doit être de nature juridique et ne pas pouvoir être ultérieurement réparé par une décision finale favorable à la partie recourante (cf. ATF 149 II 170 consid. 1.3; 147 III 159 consid. 4.1). Il incombe au recourant d'alléguer et d'établir la possibilité que la décision incidente lui cause un tel dommage, à moins que celui-ci ne fasse d'emblée aucun doute (ATF 141 IV 284 consid. 2.3).  
Les recourants voient un préjudice irréparable en ce qu'ils ne pourront plus contester la question de l'art. 72 LCI dans le reste de la procédure, soit devant la Cour de justice ou devant le Tribunal fédéral. Ils ne peuvent être suivis. En effet, les recourants pourront attaquer le nouveau jugement du TAPI s'il devait leur être défavorable auprès de la Cour de justice puis, en dernier ressort, recourir contre l'arrêt rendu par cette juridiction auprès du Tribunal fédéral; ils pourront à cette occasion aussi attaquer l'arrêt cantonal incident du 27 février 2024. L'admission du recours mettrait fin au préjudice allégué inhérent à l'arrêt incident de renvoi. 
 
1.4.2. Les recourants prétendent enfin que l'admission du recours permettrait d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (art. 93 al. 1 let. b LTF). La recevabilité du recours contre un arrêt incident en application de l'art. 93 al. 1 let. b LTF suppose quant à elle non seulement que l'admission du recours puisse conduire immédiatement à une décision finale, exigence qui serait remplie en l'occurrence, mais également que cette décision permette d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse. Pour que cette dernière condition soit remplie, il faut que la procédure probatoire, par sa durée et/ou par son coût, s'écarte notablement des procédures habituelles (arrêt 4A_506/2022 du 20 juin 2023 consid. 1.1.1 et les arrêts cités). L'art. 93 al. 1 let. b LTF doit être appliqué de façon stricte, dès lors que le recours immédiat se conçoit comme une exception et que l'irrecevabilité d'un tel recours ne porte pas préjudice aux parties, qui peuvent contester la décision incidente en même temps que la décision finale (art. 93 al. 3 LTF; ATF 144 III 253 consid. 1.3). Il incombe à la partie recourante d'établir, si cela n'est pas manifeste, qu'une décision finale immédiate permettrait d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse; cette partie doit indiquer de manière détaillée, en particulier, quelles questions de fait sont encore litigieuses et quelles preuves, déjà offertes ou requises, doivent encore être administrées, et en quoi celles-ci entraîneraient une procédure probatoire longue et coûteuse (ATF 134 II 137 consid. 1.3.3; 133 III 629 consid. 2.4.2).  
Les recourants se contentent en l'occurrence d'affirmer que la procédure serait longue car elle a commencé en novembre 2019 et que la Cour de justice (éventuellement aussi le Tribunal fédéral) serait vraisemblablement saisie par la partie succombante. Ils font valoir que la procédure serait coûteuse en raison de la nouvelle instruction du TAPI et des recours à venir. Partant, ils n'établissent pas que le TAPI devra ordonner une procédure probatoire prenant un temps considérable et exigeant des frais importants au sens de l'art. 93 al. 1 let. b LTF. Tout complément d'instruction entraîne nécessairement des frais et un prolongement de la procédure; cela ne suffit pas pour ouvrir le recours immédiat auprès du Tribunal fédéral. Si l'administration des preuves doit se limiter à entendre les parties, à leur permettre de produire des pièces et à procéder à l'interrogatoire de quelques témoins, un recours immédiat n'est pas justifié. Il en va différemment s'il faut envisager une expertise complexe ou plusieurs expertises, l'audition de très nombreux témoins ou encore l'envoi de commissions rogatoires dans des pays lointains (arrêt 1C_77/2024 du 13 février 2024 consid. 1.5 et les arrêts cités). 
 
1.5. Il s'ensuit que l'arrêt attaqué ne peut pas faire l'objet d'un recours immédiat au Tribunal fédéral.  
 
2.  
Le recours doit par conséquent être déclaré irrecevable selon la procédure simplifiée prévue par l'art. 109 al. 1 LTF, aux frais des recourants qui succombent (art. 65 et 66 al. 1 et 4 LTF). La requête d'effet suspensif devient ainsi sans objet. 
Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens aux intimées qui n'ont pas été invitées à se déterminer. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
La requête d'effet suspensif est sans objet. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge des recourants. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des recourants, au Département du territoire et à la Chambre administrative de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 26 avril 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
La Greffière : Tornay Schaller