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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_508/2023  
 
 
Arrêt du 24 janvier 2024  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et M. les juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Ryter. 
Greffière : Mme Joseph. 
 
Participants à la procédure 
Syndicat X.________, 
représenté par Me Romain Jordan, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Département des institutions et du numérique (DIN), rue de l'Hôtel-de-Ville 14, 1204 Genève, 
intimé. 
 
Objet 
Autorisation d'usage des feux bleus pour la 
police communale; déni de justice, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de 
la République et canton de Genève, Chambre administrative, du 11 juillet 2023 (ATA/752/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le Syndicat X.________ est une association (art. 105 al. 2 LTF). Selon ses statuts, il a pour buts de défendre et améliorer les conditions de travail et sociales de ses membres, de sauvegarder les intérêts généraux, de travailler activement à faire aboutir ses revendications et d'entretenir une franche et cordiale camaraderie entre ses membres, toute discussion politique ou religieuse étant proscrite dans les assemblées (art. 2). Peuvent faire partie du Syndicat les membres du personnel en uniforme du corps des polices municipales des communes genevoises, les retraités ainsi que les membres du personnel en civil qui est employé par les corps des polices municipales des communes genevoises (art. 3). 
Lors d'une réunion regroupant notamment les représentants du Syndicat et le Conseiller d'État de la République et canton de Genève en charge du Département de la sécurité, de la population et de la santé (aujourd'hui Département des institutions et du numérique; ci-après: le Département) qui aurait eu lieu le 12 novembre 2020, la question du bénéfice du "feu bleu" pour les polices municipales du canton aurait été abordée et le Conseiller d'État aurait reconnu qu'il y avait lieu de traiter de cette problématique. 
Par courriel du 13 janvier 2021, le Syndicat X.________ a pris contact avec le Secrétaire général adjoint du Département pour lui remettre une analyse juridique, qui n'a pas été jointe à la procédure, "démontrant la voie possible et assez simple pour autoriser le 'feu bleu' aux polices municipales". Le Secrétaire général a indiqué lui donner rapidement une réponse. 
A plusieurs reprises, le Syndicat X.________ a sollicité une réponse. Par courriel du 19 novembre 2021, le Secrétaire général adjoint a indiqué que le Conseil d'État avait récemment décidé que la question de la police de proximité serait traitée à son niveau, dans le cadre du groupe de travail institué par le protocole conclu entre l'Association Y.________ et lui-même. 
Après plusieurs courriels de relance, le Syndicat s'est adressé, par courrier du 28 janvier 2022, au Conseiller d'État en charge du Département, en le priant formellement d'ouvrir une procédure visant à faire constater que les services de police municipale dans le canton de Genève (art. 105 al. 2 LTF) avaient droit au "feu bleu". 
Plusieurs autres échanges de courriels ont eu lieu entre mars 2022 et septembre 2022, le Secrétariat général du Département ainsi que l'Association Y.________ répondant aux demandes du Syndicat. Ce dernier a notamment informé le Secrétariat général par courriel du 9 mai 2022 que, s'il ne devait pas recevoir de réponse concrète, il déposerait un recours pour déni de justice formel. 
 
B.  
Le 8 décembre 2022, le Syndicat X.________ a formé un recours pour déni de justice auprès de la Chambre administrative de la Cour de justice (ci-après: Cour de justice), concluant au constat du déni de justice commis par le Conseiller d'État en charge du Département et au renvoi de la cause à celui-ci en lui ordonnant, sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP, de rendre, dans les dix jours suivant le prononcé de l'arrêt, une décision sujette à recours reconnaissant le bénéfice de l'utilisation du "feu bleu" par les agents de la police municipale. 
Par arrêt du 11 juillet 2023, la Cour de justice n'est pas entrée en matière sur le recours pour déni de justice interjeté le 8 décembre 2022. Elle a laissé la question de la qualité pour recourir du Syndicat ouverte, estimant que le recours devait être déclaré irrecevable pour d'autres motifs. En substance, la Cour de justice a retenu que le Syndicat ne disposait pas d'un droit à obtenir la décision litigieuse et que le droit individuel des agents de police municipale à bénéficier du feu bleu n'était pas non plus établi. Elle a également retenu que les conditions posées par la disposition de la loi cantonale sur la procédure administrative permettant d'obtenir une décision pour acte matériel illicite, que le recourant invoquait, n'étaient pas remplies. Elle a enfin précisé que la question de l'usage du "feu bleu" par les agents de police municipale était une question organisationnelle, qui n'était pas susceptible de contrôle judiciaire. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, le Syndicat X.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt de la Cour de justice. Il conclut principalement à ce que la décision soit réformée en ce sens que le déni de justice commis par le Conseiller d'État en charge du Département de la santé et de la sécurité soit constaté et qu'il soit ordonné à la Conseillère d'État en charge du Département des institutions et du numérique, sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP, de rendre, dans les 10 jours suivant le prononcé de l'arrêt, une décision sujette à recours reconnaissant le bénéfice de l'utilisation du "feu bleu" par les agents de la police municipale. Subsidiairement, il conclut à ce que la cause soit renvoyée à la Cour cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants. 
La Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. 
Le Conseil d'État conclut, dans ses observations du 20 octobre 2023, au rejet du recours. Le Syndicat X.________ a répliqué le 8 novembre 2023. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 148 I 160 consid. 1; 147 I 333 consid. 1). 
 
1.1. Le recours en matière de droit public a été déposé contre l'arrêt de la Cour de justice déclarant irrecevable le recours formé par le Syndicat X.________ à l'encontre du refus du Conseiller d'État en charge du Département de rendre une décision sujette à recours concernant l'utilisation du "feu bleu" par les agents de la police municipale (recours pour déni de justice formel).  
Le recours porte sur une décision finale (art. 90 LTF) d'une autorité judiciaire supérieure ayant statué en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) et rendue dans une cause de droit public (art. 82 al. 1 let. a LTF) qui ne tombe pas sous le coup d'une clause d'exception de l'art. 83 LTF, de sorte qu' a priori le recours en matière de droit public est ouvert. En outre, il a été déposé en temps utile compte tenu des féries (art. 46 al. 1 let. b et 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art. 42 LTF).  
 
1.2. Le recourant, constitué en association au sens des art. 60 ss CC, est une personne morale dotée de la personnalité juridique. Reste à examiner spécifiquement la question de sa qualité pour recourir, telle que délimitée par l'art. 89 LTF.  
 
1.2.1. Le Syndicat X.________ ne peut fonder sa qualité pour recourir sur l'art. 89 al. 2 let. d LTF. En effet, aucune loi fédérale spéciale ne lui accorde un droit de recours.  
 
1.2.2. La qualité pour recourir des associations qui ne peuvent se prévaloir d'un droit de recours fondé sur une disposition spécifique du droit fédéral doit être analysée sur la base de l'art. 89 al. 1 LTF (cf. ATF 142 II 80 consid. 1.4; arrêts 1C_499/2021 du 28 octobre 2021 consid. 2; 1C_38/2015 du 13 mai 2015 consid. 3.1).  
Selon l'art. 89 al. 1 LTF, a qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a); est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué (let. b) et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (let. c). 
Il incombe à la partie recourante d'alléguer les faits propres à fonder sa qualité pour agir lorsqu'ils ne ressortent pas à l'évidence de la décision attaquée ou du dossier de la cause (art. 42 al. 1 et 2 LTF; ATF 145 I 12 consid. 1; 133 II 249 consid. 1.1; arrêts 1C_283/2021 du 21 juillet 2022 consid. 3.2.1; 1C_499/2021 du 28 octobre 2021 consid. 2). 
 
1.2.3. Selon la jurisprudence, l'intérêt digne de protection consiste dans l'utilité pratique que l'admission du recours apporterait à la partie recourante en lui évitant de subir un préjudice de nature économique, idéale, matérielle ou autre que la décision attaquée lui occasionnerait. Il implique que la partie recourante soit touchée de manière directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grandes que la généralité des administrés. L'intérêt invoqué, qui peut être un intérêt de fait, doit se trouver dans un rapport étroit, spécial et digne d'être pris en considération avec l'objet de la contestation (ATF 137 II 40 consid. 2.3; arrêts 1C_283/2021 du 21 juillet 2022 consid. 3.2.1; 1C_499/2021 du 28 octobre 2021 consid. 2). Un intérêt public purement indirect ou exclusivement général, sans que la personne ne soit elle-même dans un rapport suffisamment étroit avec le litige, ne suffit pas à lui conférer la qualité de partie (ATF 142 II 80 consid. 1.4.1; 139 II 279 consid. 2.2; arrêt 1C_283/2021 du 21 juillet 2022 consid. 3.2.1).  
 
1.2.4. Une association jouissant de la personnalité juridique est autorisée à former un recours en matière de droit public en son nom propre lorsqu'elle est touchée dans ses intérêts dignes de protection au sens de la jurisprudence précitée. De même, sans être elle-même touchée par la décision entreprise, une association peut être admise à agir par la voie du recours en matière de droit public (nommé alors recours corporatif) pour autant qu'elle ait pour but statutaire la défense des intérêts dignes de protection de ses membres, que ces intérêts soient communs à la majorité ou au moins à un grand nombre d'entre eux et, enfin, que chacun de ceux-ci ait qualité pour s'en prévaloir à titre individuel (ATF 145 V 128 consid. 2.2; 142 II 80 consid. 1.4.2; arrêt 1C_499/2021 du 28 octobre 2021 consid. 2). En revanche, elle ne peut prendre fait et cause pour l'un de ses membres ou pour une minorité d'entre eux (ATF 142 II 80 consid. 1.4.2; 133 V 239 consid. 6.4; arrêts 1C_283/2021 du 21 juillet 2022 consid. 3.2.1; 1C_499/2021 du 28 octobre 2021 consid. 2).  
 
1.2.5. Le recourant a participé à la procédure de sorte que la première des conditions de l'art. 89 al. 1 LTF est remplie.  
 
1.2.6. Pour ce qui est des autres conditions, il convient de relever que la Cour de justice a examiné la qualité pour recourir du Syndicat X.________ au Tribunal cantonal, en vertu des dispositions de la procédure administrative genevoise applicables. Elle a présenté l'art. 60 al. 1 de la loi [de la République et canton de Genève] du 12 septembre 1985 sur la procédure administrative (LPA GE; rs/GE E 5 10), dont l'une des conditions est le fait - pour le recourant - d'avoir un intérêt personnel digne de protection à l'annulation ou la modification de la décision, indiquant que cette notion correspond aux critères exposés à l'art. 89 al. 1 let. c LTF.  
La Cour de justice a précisé que, d'après l'art. 3 des statuts du recourant, les membres du personnel en uniforme, seuls susceptibles d'être utilisateurs du "feu bleu", ne constituaient qu'une partie des effectifs du Syndicat. Elle a ajouté que le recourant n'avait pas démontré que la majorité ou un grand nombre de ses membres serait touché par la prise de décision qu'il exige. À cet égard, il n'avait ni détaillé la composition, ni la qualité ni encore la répartition de ses membres entre personnel en uniforme, personnel en civil, actif ou retraité, des catégories précitées. Dès lors, la Cour de justice a conclu qu'il était douteux que la majorité des membres du Syndicat X.________ ait qualité pour recourir à titre individuel, d'une part, et que les intérêts d'une grande majorité des membres du Syndicat soient touchés, d'autre part. La Cour de justice a encore précisé que le recourant n'avait pas non plus précisé et documenté que l'organe compétent en son sein aurait pris la décision d'entamer la démarche tendant à l'obtention d'une décision quant au bénéfice du "feu bleu", voire d'intenter le recours pour déni de justice du 8 décembre 2022. La question de la qualité pour recourir a toutefois été laissée ouverte, le recours ayant été déclaré irrecevable pour d'autres motifs. 
 
1.2.7. Au vu de ces considérations, le recourant ne pouvait pas faire l'économie de démontrer précisément sa qualité pour agir devant le Tribunal fédéral (cf. supra consid. 1.2.2 in fine). Or, dans son mémoire de recours, le Syndicat X.________ s'est contenté d'expliquer ce qui suit : "le recourant, dont les membres sont des agents de la police municipale qui sont en droit d'utiliser le "feu bleu", dispose d'un intérêt juridique et digne de protection manifeste". Puis, dans sa réplique du 8 novembre 2022, il a indiqué que le Syndicat "représente les intérêts de personnes qui ont un droit à bénéficier du feu bleu". Il n'est ainsi pas clair de savoir si le recourant se prévaut, devant le Tribunal fédéral, de son propre intérêt digne de protection, en tant que personne morale, ou si elle dépose un recours corporatif.  
 
1.2.8. Le Tribunal fédéral constate d'abord que le recourant n'invoque pas clairement que la qualité pour agir devrait lui être reconnue parce qu'il serait - en tant qu'association - directement touché dans ses intérêts propres et dignes de protection de la même manière qu'un particulier (cf. ATF 142 II 80 consid. 1.4). A ce titre, l'état de fait de l'arrêt entrepris ne permet pas de retenir que le Syndicat vise un but qui lui serait propre (cf. arrêt 8C_779/2015 du 8 août 2016 consid. 4.4.1 et 4.4.2). On ne voit pas non plus qu'il disposerait de véhicules susceptibles d'être équipés de "feux bleus". En ce sens, il ne peut pas se prévaloir d'un intérêt personnel digne de protection.  
 
1.2.9. En outre, le recourant ne prétend pas clairement - et a fortiori ne démontre pas - qu'il remplirait les conditions du recours corporatif. En effet, il n'a donné aucune indication sur le nombre de ses membres et sur leur situation par rapport à l'usage de véhicules susceptibles d'être dotés de "feux bleus", dans leur travail quotidien. Dès lors, il n'est pas possible, pour le Tribunal de céans, d'admettre que la majorité ou à tout le moins un grand nombre des membres sont personnellement touchés par l'absence de décision à ce sujet.  
 
1.2.10. Il convient de relever que ce point est indépendant de savoir si, en ce domaine, un droit à une décision existe, question qui relève du fond, mais qui exige, pour être traitée, que le syndicat recourant remplisse les exigences de l'art. 89 LTF.  
 
Ainsi, faute pour le recourant d'avoir démontré à satisfaction de droit les éléments propres à fonder sa qualité pour former recours, alors que cela ne ressortait à l'évidence pas de la décision de la Cour de justice ni du dossier, le recours en matière de droit public est irrecevable. 
 
1.3. La voie du recours constitutionnel subsidiaire est également fermée. En effet, les exigences de motivation de la qualité pour recourir qui découlent de l'art. 42 LTF valent tant pour le recours en matière de droit public que pour le recours constitutionnel subsidiaire. En outre, la qualité pour recourir en vertu de l'art. 115 LTF est plus stricte que celle de l'art. 89 LTF, la première disposition exigeant un intérêt juridique à recourir, alors que la seconde se contente d'un intérêt digne de protection. Par conséquent, l'association n'ayant pas démontré les éléments propres à fonder sa qualité pour former recours en vertu de l'art. 89 LTF, elle ne saurait être admise à agir en vertu de l'art. 115 LTF.  
 
2.  
 
2.1. Au vu de ce qui précède, le recours doit être déclaré irrecevable.  
 
2.2. Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF).  
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr. sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative. 
 
 
Lausanne, le 24 janvier 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
La Greffière : M. Joseph