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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_498/2023  
 
 
Arrêt du 11 décembre 2023  
 
IIIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Parrino, Président, Stadelmann et Scherrer Reber. 
Greffier : M. Bleicker. 
 
Participants à la procédure 
Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, 
avenue du Général-Guisan 8, 1800 Vevey, 
recourant, 
 
contre  
 
A.________, 
représenté par PROCAP, 
Service juridique pour personnes avec handicap, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité (révision), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 19 juin 2023 (AI 150/21 - 168/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________, né en 1972, est titulaire d'un certificat fédéral de capacité (CFC) d'employé de commerce. Il a subi un accident de la circulation routière le 28 septembre 1996. Le cas a été pris en charge par la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA). Il a travaillé en dernier lieu comme collaborateur import/export à plein temps du 1 er avril 2011 au 30 avril 2018.  
En arrêt de travail depuis le 28 novembre 2016, il a déposé une première demande de prestations de l'assurance-invalidité le 7 mars 2017. L'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: l'office AI) a versé à son dossier l'avis des docteurs B.________, spécialiste en médecine interne générale (du 30 mars 2017), et C.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie (notamment du 6 juin 2017). Il a ensuite mis en place une mesure d'intervention précoce de l'assurance-invalidité sous la forme d'un "job coaching" du 31 octobre 2017 au 30 septembre 2018 (rapport du 11 octobre 2018) et a pris en charge une allocation d'initiation au travail (du 1 er octobre 2018 au 31 mars 2019). L'assuré a travaillé - il convient de compléter sur ce point l'arrêt cantonal (art. 105 al. 2 LTF) - à 100 % comme "logistic coordinator" du 24 mai au 30 juin 2018, à 80 % du 2 juillet au 30 septembre 2018 et à 70 % du 1 er octobre 2018 au 31 mars 2019. Le 1 er mai 2019, il a débuté une activité de responsable transport et vente à 40 % auprès de D.________ SA (puis à 50 % dès le 1 er novembre 2019). Par décision du 18 septembre 2019, l'office AI a octroyé à l'assuré une demi-rente d'invalidité du 1 er novembre 2017 au 30 septembre 2018.  
 
A.b. Le 13 février 2020, A.________ a fait valoir une dégradation de son état de santé, indiquant qu'il ne pouvait pas assumer un taux d'activité supérieur à celui de 50 %. L'office AI a versé à son dossier l'avis du docteur E.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie (des 30 janvier 2020, 16 avril 2020, 2 septembre 2020 et 11 décembre 2020). Puis, en se fondant sur l'avis du docteur F.________, médecin auprès de son Service médical régional (SMR; du 17 février 2021), il a rejeté la demande du 13 février 2020 (décision du 4 mars 2021).  
 
B.  
L'assuré a déféré la décision du 4 mars 2021 à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud et produit un avis des docteurs G.________, spécialiste en neurologie (du 8 novembre 2021) et E.________ (du 16 mars 2022). La cour cantonale a mis en oeuvre une expertise judiciaire. Dans un rapport du 9 janvier 2023, la doctoresse H.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, a diagnostiqué - avec répercussion sur la capacité de travail - un état de stress post-traumatique, une modification durable de la personnalité après une expérience de catastrophe, un syndrome post-commotionnel, un trouble dépressif récurrent, épisode actuel moyen avec syndrome somatique, et un status post traumatisme craniocérébral survenu lors d'un accident de la circulation routière le 28 septembre 1996. Selon l'experte, l'assuré présentait une capacité de travail de 50 % depuis début 2016 et de 30 % "actuellement", moyennant des conditions adaptées à ses limitations fonctionnelles (home office, travail à son rythme, sans trop de stimulations). L'office AI a déposé les observations du médecin de son SMR (du 27 janvier 2023). Statuant le 19 juin 2023, la cour cantonale a admis le recours et réformé la décision du 4 mars 2021 en ce sens que l'assuré est mis au bénéfice d'une demi-rente de l'assurance-invalidité à compter du 1er août 2020. Elle a pour le surplus renvoyé la cause à l'office AI afin qu'il procède conformément aux considérants du présent arrêt et mis les frais de l'expertise judiciaire à la charge de l'office AI. 
 
C.  
L'office AI forme un recours en matière de droit public contre cet arrêt dont il demande l'annulation. Il conclut à la confirmation de la décision du 4 mars 2021. Le recours est assorti d'une requête d'effet suspensif. 
L'assuré conclut au rejet du recours, dans la mesure où il est recevable, et s'en remet à justice s'agissant de la requête d'effet suspensif. L'Office fédéral des assurances sociales renonce à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les arrêts de renvoi constituent en principe des décisions incidentes car ils ne mettent pas fin à la procédure. Toutefois, lorsque l'autorité à laquelle la cause est renvoyée ne dispose plus d'aucune marge de manoeuvre parce que le renvoi ne porte que sur l'exécution (par simple calcul) des injonctions de l'autorité de recours, l'arrêt constitue matériellement une décision finale au sens de l'art. 90 LTF (ATF 145 III 42 consid. 2.1; 144 V 280 consid. 1.2 et les références). Tel est le cas en l'espèce, de sorte que la voie du recours en matière de droit public est ouverte. 
 
2.  
Le recours en matière de droit public peut être formé notamment pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), que le Tribunal fédéral applique d'office (art. 106 al. 1 LTF), n'étant limité ni par les arguments de la partie recourante, ni par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral fonde son raisonnement sur les faits retenus par la juridiction de première instance (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte (c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst.; ATF 148 V 366 consid. 3.3 et les références) ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). 
 
3.  
Compte tenu des motifs et conclusions du recours, est litigieux le droit de l'intimé à une demi-rente de l'assurance-invalidité compter du 1 er août 2020, tel que décidé par l'autorité précédente, ensuite de la nouvelle demande déposée le 13 février 2020. A cet égard, l'arrêt attaqué expose de manière complète les dispositions légales et les principes jurisprudentiels - dans leur version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2021 (modification de la LAI du 19 juin 2020 [Développement continu de l'AI; RO 2021 705]), déterminantes en l'espèce (ATF 148 V 174 consid. 4.1) -, relatifs à la notion d'invalidité (art. 7 et 8 al. 1 LPGA en relation avec l'art. 4 al. 1 LAI), à son évaluation (art. 16 LPGA et art. 28a LAI) et à la révision (art. 17 al. 1 LPGA). Il suffit d'y renvoyer.  
 
4.  
 
4.1. En se fondant sur les conclusions de l'expertise judiciaire du 9 janvier 2023, la juridiction cantonale a retenu que l'assuré présentait une capacité de travail maximale de 50 %, ouvrant droit à une demi-rente de l'assurance-invalidité dès le 1 er août 2020, soit six mois après le dépôt de la demande du 13 février 2020. Les premiers juges ont considéré que l'expertise judiciaire du 9 janvier 2023 - dont ils ont reproduit de larges extraits - était entièrement convaincante quant à la description de l'évolution de l'état de santé de l'assuré dans le temps, des limitations fonctionnelles et de la capacité de travail résiduelle exigible. En particulier, la doctoresse H.________ avait indiqué que l'interprétation du médecin du SMR, selon laquelle les symptômes de l'assuré étaient uniquement subjectifs, ne tenait pas compte de l'impact de ces mêmes symptômes sur tous les domaines de la vie (social, professionnel, familial et affectif). Ainsi, si l'assuré avait pu tant bien que mal, à force de travail et de stratégies, compenser l'atteinte organique subie le 28 septembre 1996 pendant vingt ans, deux événements banals survenus en 2015 et 2016 avaient décompensé psychologiquement un état de stress post-traumatique sous-jacent, avec une rigidification de la personnalité prenant valeur de modification durable de la personnalité, et des décompensations dépressives successives par épuisement de ses ressources psychiques (en 2016, en 2021 et actuellement). Le tableau clinique avait par ailleurs évolué de manière défavorable parce que les aspects de personnalité dysfonctionnels se rigidifiaient avec le temps, ceci en raison de traits de personnalité narcissique, de la chronicité des atteintes, de l'épuisement et de la perte d'espoir de l'assuré dans une amélioration possible. A force de lutter et de s'épuiser à la tâche et de ne pas parvenir à répondre à ses propres exigences, à force de se heurter à des séquelles neuropsychologiques qui ne s'amélioraient pas, l'assuré vivait des moments d'effondrement dépressif caractérisés par une thymie abaissée, une importante fatigue, une péjoration de son irritabilité avec l'augmentation de son impulsivité et de sa conflictuabilité, un besoin accru de s'isoler, des débordements de rage contre lui-même ou autrui, des ruminations constantes, des envies de mourir sans idéation suicidaire franche, une anhédonie et une aboulie.  
Pour le surplus, dans la mesure où l'experte faisait valoir une aggravation de la situation de l'assuré survenue après le prononcé de la décision du 4 mars 2021, qui délimitait le cadre temporel de son examen, la juridiction cantonale a transmis la cause à l'office AI comme objet de sa compétence. 
 
4.2. Invoquant une violation de l'art. 17 al. 1 LPGA et des règles relatives à la révision, l'office recourant reproche à la juridiction cantonale d'avoir examiné la cause comme s'il s'agissait d'une première demande de prestations. Dans la mesure où seul le taux d'incapacité de travail divergeait de celui fixé par les autres médecins, il fait valoir que l'experte judiciaire avait procédé à une nouvelle appréciation d'un même état de fait, ce qui ne pouvait nullement constituer un motif de révision.  
 
4.3. Dans sa réponse du 3 novembre 2023, l'intimé considère que l'arrêt attaqué est sans équivoque, les constatations de l'expertise judiciaire démontrant à satisfaction une péjoration de son état de santé (au sens de l'art. 17 al. 1 LPGA).  
 
5.  
 
5.1. Lorsque l'administration entre en matière sur une nouvelle demande, comme en l'espèce, elle doit traiter l'affaire au fond et vérifier que la modification du degré d'invalidité rendue plausible par l'assuré est réellement intervenue (examen "allseitig"; ATF 141 V 9 consid. 2.3; MEYER/REICHMUTH, Rechtsprechung des Bundesgerichts zum Bundesgesetz über die Invalidenversicherung IVG, 4 e éd. 2023, n° 120 ad art. 30 LAI). Lorsque les faits déterminants pour le droit à la rente se sont modifiés, le degré d'invalidité doit être fixé à nouveau sur la base d'un état de fait établi de manière correcte et complète, sans référence à des évaluations antérieures de l'invalidité (ATF 141 V 9 consid. 6.1 et les références citées).  
 
5.2. A l'inverse de ce que soutient l'office AI, il résulte en l'espèce des rapports médicaux sur lesquels les premiers juges se sont fondés un changement important des circonstances propres à influencer le degré d'invalidité de l'intimé. Il ressort en particulier de l'avis du docteur E.________ du 2 septembre 2020 que l'intimé avait surévalué ses capacités en travaillant à plus de 50 %, ce qui avait conduit à des périodes d'épuisement, à une intensification des troubles neuropsychologiques et à un renforcement de son trouble de la personnalité. S'il a tenté de reprendre son activité habituelle à un taux d'activité de 80 % lors de la première demande de prestations, l'intimé a rapidement connu sur un plan objectif - et non pas uniquement subjectivement - une péjoration importante de son état de santé. Le Tribunal cantonal a donc procédé à raison a un nouvel examen du droit aux prestations sans se référer à la précédente procédure qui avait abouti à une rente limitée dans le temps.  
 
5.3. Finalement, l'office AI ne discute nullement les conclusions de l'expertise judiciaire concernant la capacité de travail de l'intimé. Dans ces conditions, dans la mesure où le degré d'invalidité de l'intimé devait être fixé à nouveau sur la base d'un état de fait établi de manière correcte et complète, sans référence à des évaluations antérieures de l'invalidité, il n'y a pas lieu de s'écarter du résultat de l'appréciation des preuves des premiers juges.  
 
6.  
Pour le surplus, c'est en vain que l'office recourant conteste également la mise à sa charge du coût de l'expertise judiciaire. Etant donné qu'il a renoncé à mettre en oeuvre une évaluation médicale indépendante de la capacité de travail de l'intimé, la juridiction cantonale n'avait d'autre choix que d'ordonner une expertise judiciaire pour trancher entre les avis du médecin du SMR et ceux du psychiatre traitant. Aussi, en présence d'une instruction insuffisante, les frais de l'expertise judiciaire ne constituent pas des frais de justice (au sens de l'art. 69 al. 1 bis LAI), mais des frais relatifs à la procédure administrative au sens de l'art. 45 LPGA qui devaient être pris en charge par l'assurance-invalidité (ATF 139 V 496 consid. 4.3-4.4 et les références).  
 
7.  
Le recours, mal fondé, doit être rejeté. 
Le présent arrêt rend sans objet la demande d'effet suspensif déposée par l'office recourant. 
 
8.  
Succombant, l'office recourant doit supporter les frais de justice afférents à la présente procédure (art. 66 al. 1, 1 ère phrase, LTF). L'intimé a droit à une indemnité de dépens (art. 68 al. 1 LTF).  
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le recourant versera à l'intimé la somme de 2'800 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 11 décembre 2023 
 
Au nom de la IIIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Parrino 
 
Le Greffier : Bleicker