Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_572/2022  
 
 
Arrêt du 19 octobre 2022  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président, Escher et Bovey. 
Greffière : Mme Achtari. 
 
Participants à la procédure 
1. A.A.________, 
2. B.A.________, 
3. C.A.________, 
tous les trois représentés par Me Yves Auberson, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Office des poursuites du Lac, 
Hallwylstrasse 12, 3280 Morat. 
 
Objet 
plainte LP, beneficium excussionis realis (art. 41 al. 1bis LP), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, Chambre des poursuites et faillites, du 12 juillet 2022 (105 2022 67). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 12 avril 2022, l'Office des poursuites du Lac a fait notifier le commandement de payer n° xxx, établi à la requête de l'État de Fribourg, représenté par le Service cantonal des contributions, au représentant de la communauté héréditaire de D.________, composée de A.A.________, B.A.________et C.A.________. Opposition totale y a été fait.  
Le commandement de payer porte notamment sur une créance d'impôt cantonal sur les gains immobiliers, suite à un échange de parties de biens-fonds du Registre foncier de la Commune de U.________en 2019, dont l'art. yyy qui appartenait alors à A.A.________, B.A.________et C.A.________. 
 
A.b. Il ressort du registre foncier qu'une hypothèque légale a été inscrite sur l'art. yyy du Registre foncier de la commune de U.________, conformément à l'art. 217 de la loi sur les impôts cantonaux directs (LICD; RSF 631.1) et que A.A.________, B.A.________et C.A.________ n'en sont plus propriétaires.  
 
B.  
Par arrêt du 12 juillet 2022, la Chambres des poursuites et faillites du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg a rejeté la plainte contre le commandement de payer n° xxx déposée par A.A.________, B.A.________ et C.A.________, lesquels se prévalaient du beneficium excussionis realis (art. 41 al. 1 bis LP) et sollicitaient l'annulation de cet acte.  
 
C.  
Par acte posté le 25 juillet 2022, A.A.________, B.A.________et C.A.________ interjettent un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral contre cet arrêt. Ils concluent à sa réforme, en ce sens que le commandement de payer n° xxxest annulé. En substance, ils se plaignent de la violation de l'art. 41 al. 1 bis LP.  
Invités à se déterminer sur le recours, tant l'office que l'autorité de surveillance y ont renoncé. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours a été déposé dans le délai légal (art. 100 al. 2 let. a cum 46 al. 1 let. b LTF) à l'encontre d'une décision finale (art. 90 LTF), prise en matière de poursuite pour dettes et de faillite (art. 72 al. 2 let. a LTF) par une autorité de surveillance statuant en dernière (unique) instance cantonale (art. 75 al. 1 et 2 LTF). Il est ouvert sans égard à la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. c LTF). Les recourants, qui ont succombé en instance cantonale, ont qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF).  
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF); cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4 et la référence). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée par le recourant (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF; ATF 147 I 73 consid. 2.1; 146 III 303 consid. 2; 144 II 313 consid. 5.1; 142 III 364 consid. 2.4).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF).  
 
3.  
 
3.1. L'autorité de surveillance a jugé que les propriétaires du bien-fonds grevé de l'hypothèque légale n'étant pas les débiteurs de l'impôt, la collectivité devait chercher à obtenir le paiement de la part des débiteurs personnellement avant de s'en prendre au gage. Partant, c'était à juste titre que l'État de Fribourg avait poursuivi la communauté héréditaire de D.________ par voie de saisie et le commandement de payer devait être confirmé.  
 
3.2. Les recourants se plaignent de la violation de l'art. 41 al. 1 bis LP. Ils exposent que le bénéfice de discussion réelle appartient au débiteur également dans le cas où le droit de gage s'exerce sur l'immeuble d'un tiers, et que, pour les hypothèques légales garantissant les créances de droit public, le droit cantonal peut exclure ce bénéfice dans cette situation, mais que l'art. 217 LICD ne l'a pas prévu. Ils ajoutent que si le principe de proportionnalité peut amener la collectivité publique à ouvrir d'abord une poursuite ordinaire contre le débiteur de sa créance, en lieu et place d'une poursuite en réalisation de gage, tel ne peut plus être le cas après que le débiteur a fait usage de son droit au bénéfice de discussion réelle. Ainsi, suite à leur plainte, l'autorité de surveillance n'avait plus la possibilité d'user d'un quelconque pouvoir d'appréciation mais devait reconnaître la priorité du droit du débiteur de se prévaloir du bénéfice de discussion réelle.  
 
4.  
Le litige porte sur le droit du débiteur poursuivi de se prévaloir du bénéfice de discussion réelle lorsque il n'est plus propriétaire de l'immeuble grevé d'une hypothèque légale garantissant une créance de droit public. 
 
4.1. En vertu de l'art. 41 al. 1bis LP, lorsqu'une poursuite par voie de saisie ou de faillite est introduite pour une créance garantie par gage, le débiteur peut exiger - lorsqu'il n'y a pas renoncé conventionnellement (ATF 120 III 105 consid. 1; arrêt 7B.249/2003 du 7 janvier 2004 consid. 2 et les références, publié in Pra 2004 n° 103 p. 583) -, par la voie de la plainte des art. 17 ss LP, que son créancier se désintéresse d'abord sur l'objet du bien remis en gage (au sens de l'art. 37 LP; ATF 129 III 360 consid. 1) avant de le faire sur tous ses autres biens (ATF 140 III 180 consid. 5.1.4; arrêt 5A_295/2012 du 9 octobre 2012 consid. 4.1, publié in Pra 2013 n. 46 p. 354 et SJ 2013 I p. 417).  
Il n'y a pas d'intérêt public à ce que le créancier gagiste fasse valoir son droit de gage dans une poursuite en réalisation de gage, de sorte que le préposé - même s'il avait connaissance d'un droit de gage - ne pourrait pas ouvrir d'office une poursuite en réalisation de gage (ATF 84 III 67 [69]; ACOCELLA, in Basler Kommentar, SchKG I, 3ème éd., 2021, n° 17 ad art. 41 LP; JENT-SØRENSEN, in Kurzkommentar SchKG, 2 ème éd., 2014, n° 9 ad art. 41 LP).  
Même si un tiers est devenu titulaire ultérieurement de l'objet grevé, le poursuivi peut se prévaloir du beneficium excussionis realis (ATF 61 III 31 [36: à moins que le tiers ne soit déclaré en faillite]; 35 I 496 [497]; arrêt C.431/1985 du 19 mars 1986 consid. 2b [à moins qu'il soit poursuivi par le propriétaire du gage]; ABBET, L'hypothèque légale en garantie des créances de droit cantonal, in Not@lex 2017 p. 135 ss [145]; A COCELLA, op. cit., n° 21 ad art. 41 LP; GILLIÉRON, in Commentaire de loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, art. 1-88, 1999, n° 21 et 28 ad art. 41; RIGOT, in Commentaire romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 10 ad art. 41 LP).  
Il existe des cas où le débiteur ne peut pas invoquer l'exception du bénéfice de discussion réelle. Il en va ainsi lorsque, pour les hypothèques légales garantissant des créances de droit public, le droit cantonal exclut la faculté pour le débiteur de renvoyer le créancier à faire valoir d'abord son droit de gage ou accorde au créancier celle de promettre au tiers propriétaire de ne prétendre à la réalisation du droit de gage qu'après avoir tenté de se désintéresser sur le patrimoine du débiteur (ATF 84 III 67 [70]; ACOCELLA, op. cit., n° 27 ad art. 41 LP; GILLIÉRON, op. cit., n° 37 ad art. 41 LP; JENT-SØRENSEN, op. cit., n° 14 ad art. 41 LP; RIGOT, op. cit., n° 13 ad art. 41 LP).  
Il en va également ainsi si le créancier prouve que le gage lui a été constitué comme sûreté subsidiaire ( beneficium excussionis personalis). Cette exception est surtout pertinente pour les gages grevant les biens d'un tiers. Dans ce cas, il est souhaitable que les parties conviennent d'une responsabilité subsidiaire. Le créancier et le tiers propriétaire du gage peuvent ainsi convenir, soit lors de la constitution du gage soit ultérieurement, avec ou sans le consentement du débiteur, que le créancier devra tenter d'obtenir satisfaction par la voie d'une poursuite ordinaire avant de faire réaliser le gage (ATF 84 III précité [69]; 77 III 3 consid. 2; 73 III 13 [16]; 68 III 131 [134]; arrêt 7B.196/1997 du 12 septembre 1997 consid. 2; ACOCELLA, op. cit., n° 23 ad art. 41 LP).  
 
4.2. En l'espèce, sur la base de l'état de fait de l'arrêt attaqué, aucune des exceptions précitées qui serait pertinente dans le cas concret n'est réalisée, de sorte que les débiteurs de la créance fiscale pouvaient soulever avec succès l'exception du bénéfice de discussion réelle. L'autorité cantonale a méconnu le système du droit de gage dont l'effet spécifique permet de faire réaliser le bien grevé, indépendamment du débiteur de la créance garantie. Contrairement à ce qu'elle semble soutenir, il n'y a pas de disproportion à devoir rechercher le tiers détenteur du gage, qui se verra au demeurant notifier un commandement de payer (art. 153 al. 2 let. a LP), si le débiteur soulève l'exception de l'art. 41 al. 1bis LP. Il revient aux parties, notamment à l'acquéreur de l'immeuble grevé, de se montrer prudentes lorsque les dettes garanties par un gage immobilier ne sont pas encore payées par le débiteur. L'auteur sur lequel l'autorité de surveillance s'est appuyée ne soutient pas que, en matière d'hypothèque légale en garantie de créances de droit cantonal, le débiteur ne pourrait pas se prévaloir de l'exception de l'art. 41 al. 1bis LP lorsque le gage est propriété d'un tiers. Tout en relevant qu'elle a le choix et que le débiteur peut dans tous le cas se prévaloir de l'exception précitée, il invite seulement la collectivité publique à " au moins chercher à obtenir le paiement de la part du débiteur avant de s'en prendre au gage " lorsque le propriétaire de celui-ci n'est pas débiteur de la créance de droit public (ABBET, op. cit., p. 145).  
Il suit de là que le grief de violation de l'art. 41 al. 1 bis LP doit être admis.  
 
5.  
En définitive, le recours est admis. Le chiffre I de l'arrêt attaqué est réformé en ce sens que la plainte de A.A.________, B.A.________et C.A.________ est admise et le commandement de payer notifié à ceux-ci par l'Office des poursuites du district du Lac dans la poursuite n° xxxest annulé. Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge de l'État de Fribourg, qui succombe dans un litige où son intérêt patrimonial était en cause (art. 66 al. 1 et 4 LTF). Il versera en outre aux recourants, qui ont procédé avec l'assistance d'un avocat, une indemnité à titre de dépens d'un montant total de 2'000 fr. (art. 68 al. 1 et 4 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis. Le chiffre I de l'arrêt attaqué est réformé en ce sens que la plainte de A.A.________, B.A.________et C.A.________ est admise et le commandement de payer notifié à ceux-ci par l'Office des poursuites du district du Lac dans la poursuite n° xxxest annulé. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge de l'État de Fribourg. 
 
3.  
L'État de Fribourg versera aux recourants, créanciers solidaires, une indemnité à titre de dépens d'un montant de 2'000 fr. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux recourants, à l'Office des poursuites du Lac et à la Chambre des poursuites et faillites du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg. 
 
 
Lausanne, le 19 octobre 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : Achtari