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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_884/2023  
 
 
Arrêt du 5 mars 2024  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président, Bovey et De Rossa. 
Greffière : Mme Achtari. 
 
Participants à la procédure 
A.________ Ltd, 
représentée par Me Claude Ramoni et Me Monia Karmass, 
recourante, 
 
contre  
 
1. Office cantonal des poursuites de Genève, rue du Stand 46, 1204 Genève, 
2. B.________, 
représenté par Me Nicolas Pozzi, avocat, 
intimés. 
 
Objet 
séquestre (sûretés), 
 
recours contre la décision de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites, du 9 novembre 2023 (A/2446/2023-CS DCSO/479/23). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Par ordonnance du 18 novembre 2020, le Tribunal de première instance de Genève (ci-après: tribunal de première instance) a ordonné le séquestre au préjudice de B.________ de trois immeubles lui appartenant, sis sur la commune de U.________. Le séquestre, ordonné en application de l'art. 271 al. 1 ch. 6 LP sur requête de la société britannique A.________ Ltd, portait sur une créance alléguée de 1'358'384 fr. plus intérêts au taux de 5% l'an à compter du 30 octobre 2020.  
L'Office cantonal des poursuites du canton de Genève (ci-après: office) a exécuté le séquestre le jour même par l'envoi au Registre foncier d'un avis d'inscription de restrictions du droit d'aliéner sur les trois immeubles mentionnés dans l'ordonnance de séquestre. 
Dans le cadre de la poursuite subséquente, n° xxx, une commination de faillite a été notifiée le 16 mars 2022 au poursuivi. 
 
A.b. Par requête adressée le 6 avril 2023 au tribunal de première instance, A.________ Ltd, se fondant sur cette commination de faillite et faisant valoir que le montant réclamé n'avait pas été payé, a sollicité que la faillite de B.________ soit déclarée en application de l'art. 166 LP.  
Par jugement du 15 mai 2023, le tribunal de première instance a toutefois décidé de surseoir à statuer sur cette requête de faillite au motif que, le 2 mai 2023, le débiteur avait déposé une demande de sursis concordataire. 
Le 13 septembre 2023, A.________ Ltd a saisi le tribunal de première instance d'une requête en révocation du sursis concordataire et en prononcé immédiat de la faillite, laquelle est en cours d'instruction. 
 
A.c. Pour sa part, B.________ a saisi le tribunal de première instance, le 28 février 2023, d'une demande en annulation de la poursuite n° xxx, laquelle est également en cours d'instruction.  
 
B.  
 
B.a.  
 
B.a.a. Par courriel adressé le 10 juillet 2023 à l'office, B.________ a invité celui-ci à fixer le montant des sûretés devant être fournies afin d'obtenir la libre disposition des biens séquestrés, au sens de l'art. 277 LP.  
 
B.a.b. Par décision du 20 juillet 2023, l'office a invité B.________, une fois sa décision entrée en force, à lui verser un montant de 1'912'278 fr. au titre de sûretés au sens de l'art. 277 LP, après quoi l'inscription du séquestre auprès du Registre foncier serait radiée et le montant reçu consigné.  
 
B.b.  
 
B.b.a. Par acte adressé le 25 juillet 2023 à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: chambre de surveillance), A.________ Ltd a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre la décision du 20 juillet 2023.  
Par lettre du 23 août 2023, après que l'office et le débiteur se sont exprimés, la chambre de surveillance a informé les parties que, sous réserve d'éventuelles mesures d'instruction complémentaires, l'instruction de la cause était close. 
Par courrier du 13 septembre 2023, A.________ Ltd a sollicité la suspension de la procédure de plainte. Elle a exposé à cet égard avoir requis et obtenu le prononcé par le tribunal de première instance de mesures superprovisionnelles faisant interdiction à B.________ de disposer des immeubles séquestrés, y compris en fournissant à l'office des sûretés au sens de l'art. 277 LP, et ordonnant l'inventaire de ses biens; la validité de la décision de l'office dépendant de l'issue de la procédure de mesures provisionnelles, il convenait avant de statuer d'attendre qu'elle se termine. 
Par courrier adressé le 20 octobre 2023 à la chambre de surveillance, A.________ Ltd a derechef requis la suspension de la procédure de plainte jusqu'à droit jugé dans la procédure de mesures superprovisionnelles et provisionnelles qu'elle avait engagée. 
 
B.b.b. Par décision du 9 novembre 2023, la chambre de surveillance a préalablement rejeté la requête de suspension de la procédure de plainte formée le 13 septembre 2023, puis, au fond, a rejeté la plainte du 25 juillet 2023.  
 
C.  
Par acte posté le 20 novembre 2023, A.________ Ltd interjette un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral contre cette décision. Elle conclut principalement à sa réforme, en ce sens que la décision de l'office est annulée et qu'interdiction est faite à B.________ de fournir des sûretés pour obtenir la radiation du séquestre des trois immeubles, sous menace de la peine d'amende prévue à l'art. 292 CP, et, subsidiairement, à l'annulation de la décision cantonale et au renvoi de la cause à l'autorité de surveillance. En substance, elle se plaint de la violation de l'art. 277 LP et de celle des art. 8 et 9 Cst. 
Des observations au fond n'ont pas été requises. 
 
D.  
Par ordonnance du 10 janvier 2024, l'effet suspensif a été octroyé au recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF), rendue dans le cadre d'une procédure de séquestre, soit en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 72 al. 2 let. a LTF en lien avec l'art. 19 LP), par une autorité cantonale de surveillance statuant en dernière (unique) instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF). La voie du recours en matière civile est ainsi ouverte, indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. c LTF). Le recours a par ailleurs été interjeté dans le délai (art. 100 al. 2 let. a LTF) par une partie qui a succombé dans ses conclusions prises devant l'autorité précédente et a un intérêt digne de protection à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (art. 76 al. 1 LTF). 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée par le recourant ("principe d'allégation", art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 142 I 155 consid. 4.4.3).  
 
3.  
L'autorité de surveillance a jugé que l'office avait fixé le montant des sûretés de manière à ce qu'il couvrît la créance invoquée en poursuite, augmentée des frais de poursuite et des intérêts prévisibles. Dans la mesure où la plaignante soutenait que les sûretés auraient dû être fixées à un montant supérieur à celui de la créance qu'elle faisait valoir, augmentée des frais et intérêts prévisibles, son argumentation était contraire à la jurisprudence. En conséquence, le montant des sûretés requises devait être confirmé. 
Ensuite, elle a considéré que la possibilité que l'actif initialement séquestré, mais remis à la libre disposition du débiteur moyennant fourniture de sûretés, ne pût être représenté au moment de l'ouverture de la faillite n'était pas un risque contre lequel il faudrait se prémunir, mais une conséquence naturelle du système mis en place par le législateur. Il n'y avait pas lieu à cet égard de faire une distinction selon la probabilité et l'imminence d'une déclaration de faillite, en tout état difficiles à estimer. Elle a aussi rappelé que, dans l'application même de l'art. 277 LP, l'office ne disposait d'aucun pouvoir d'examen: si le débiteur versait les sûretés fixées - et non contestées par voie de plainte ou confirmées par l'autorité de surveillance - l'office n'avait d'autre choix que de remettre les actifs visés à la libre disposition du débiteur. En conséquence, les arguments de la plaignante quant au risque que les actifs séquestrés n'existassent plus au moment du prononcé de la faillite du débiteur étaient mal fondés, étant précisé que les créanciers bénéficiaient de moyens pour se prémunir du risque de disparition des biens, tels l'inventaire conservatoire de l'art. 162 LP ou l'action révocatoire des art. 285 à 288 LP. 
 
4.  
Se fondant sur l'ATF 129 III 391, la recourante soutient que, dès que les conditions nécessaires pour requérir la faillite sont remplies, le débiteur ne peut plus utiliser la faculté offerte par l'art. 277 LP. Le créancier doit en effet pouvoir requérir la faillite sans devoir se laisser opposer une demande de libération fondée sur cette norme par le débiteur. Or, elle avait déposé une requête la faillite le 6 avril 2023 sur laquelle le juge avait sursis à statuer en raison de la demande de sursis concordataire que le débiteur avait déposée le 2 mai 2023. En conséquence, l'art. 277 LP était inapplicable. 
La recourante ajoute que l'art. 277 LP ne s'applique pas lorsque le débiteur a requis un sursis concordataire provisoire. En effet, en vertu de l'art. 298 LP, le débiteur perd le pouvoir de disposer de ses biens, qui est surveillé par le commissaire et est soumis à l'autorisation du juge. Or, en l'occurrence, le débiteur avait sollicité un sursis concordataire le 2 mai 2023 et il n'avait toujours pas été statué à ce sujet, alors que le sursis ne pouvait pas dépasser quatre mois et n'était prolongeable que d'autant, de sorte qu'il bénéficiait d'un sursis occulte. Il appartenait donc à l'autorité de surveillance d'appliquer les règles du sursis dont le débiteur bénéficie dans les faits et de retenir que cette mesure privait le débiteur de la libre disposition de ses biens, de sorte que l'art. 277 LP ne s'appliquait pas. 
 
5.  
La question qui se pose est celle de savoir si le débiteur dont la faillite a été requise peut encore demander que les biens séquestrés soient libérés contre la fourniture de sûretés en application de l'art. 277 LP
 
5.1.  
 
5.1.1. Aux termes de l'art. 277 LP, les biens séquestrés sont laissés à la libre disposition du débiteur à charge de les présenter en nature ou en valeur en cas de saisie ou de déclaration de faillite et de fournir à cet effet des sûretés. Celles-ci doivent être fournies par dépôt, par cautionnement solidaire ou par une autre sûreté équivalente.  
Le but poursuivi par l'art. 277 LP est d'alléger la situation du débiteur coopérant (ATF 116 III 35 consid. 3b). Celui-ci retrouve la libre disposition de ses biens dans la mesure où il fournit des sûretés équivalentes aux objets séquestrés. Il peut disposer des biens séquestrés à sa guise. En cas de séquestre d'un immeuble, l'application de l'art. 277 LP conduit à radier la restriction du pouvoir de disposer annotée au registre foncier (ATF 116 III 35 consid. 3c; STOFFEL/CHABLOZ, in Commentaire romand, LP, 2005, n° 1 s., 7 ad art. 277 LP).  
Le débiteur n'est pas libéré pour autant des obligations qui découlent pour lui du séquestre. Ces obligations prennent une autre forme, à savoir celle de représenter les biens en nature ou en valeur le moment venu. Le séquestre comme tel est dès lors maintenu (arrêt 5P.472/2004 du 23 février 2005 consid. 2), mais le créancier a uniquement le droit d'être satisfait par la garantie au cas où les objets ne seraient plus présents au moment de la saisie (ATF 120 III 89 consid. 4a). Les sûretés de l'art. 277 LP garantissent ainsi que les biens séquestrés en nature ou en valeur pourront être saisis dans la poursuite consécutive au séquestre ou tomberont dans la masse active en cas de faillite. La garantie remplacera les biens séquestrés si ceux-ci ne devaient pas être représentés lors de la saisie ou de l'ouverture de la faillite (ATF 108 III 103 consid. 1a; STOFFEL/CHABLOZ, op. cit., n° 2 ad art. 277 LP).  
 
5.1.2. Une fois les objets séquestrés saisis dans la poursuite en validation de séquestre (art. 279 LP), une libération selon l'art. 277 LP n'est plus possible (ATF 129 III 391 consid. 3; 120 III 89 consid. 4b; KREN KOSTKIEWICZ, in SK Kommentar, 4 ème éd., 2017, n° 1 ad art. 277 LP; MEIER-DIETERLE, in Kurzkommentar SchKG, 2 ème éd., 2014, n° 3 ad art. 277 LP; REISER, Arrest in Theorie und Praxis, in BlSchK 2015 p. 169 ss [184]; STOFFEL/CHABLOZ, op. cit., n° 3 ad art. 277 LP). Cela vaut même si la requête a été formée avant la saisie mais que celle-ci a été exécutée par la suite, avant qu'il soit statué sur la requête en libération fondée sur l'art. 277 LP (ATF 129 précité consid. 3).  
 
5.2. En l'espèce, la recourante se trompe sur le sens de la précision apportée à l'ATF 129 III 391 à propos du moment auquel la requête en libération selon l'art. 277 LP est déposée. Contrairement à ce qu'elle soutient, le Tribunal fédéral n'a pas retenu que l'art. 277 LP n'entrait plus en considération dès que les conditions nécessaires à la continuation de la poursuite en validation du séquestre étaient remplies. Il a seulement précisé que le créancier peut réclamer la saisie des biens séquestrés même si une demande de libération du débiteur est pendante et que, si cette saisie est exécutée, l'art. 277 LP n'entre alors plus en considération et dite demande doit être rejetée. Partant, même à supposer que cette jurisprudence devrait s'appliquer par analogie à la faillite, celle-ci n'ayant pas encore été prononcée en l'espèce, ni même l'inventaire des biens (art. 162 LP) ordonné, il en découle que c'est à bon droit que l'autorité de surveillance a considéré que l'art. 277 LP était encore applicable.  
Quant à l'argument de la recourante selon lequel le sursis concordataire provisoire empêcherait également l'application de l'art. 277 LP, il n'est pas pertinent puisqu'un tel sursis n'a pas été prononcé et que l'autorité de surveillance n'était pas compétente pour le faire. 
Il suit de là que le grief de violation de l'art. 277 LP doit être rejeté. Les griefs constitutionnels que la recourante soulève ne visant qu'à appliquer par analogie au débiteur soumis à la faillite la jurisprudence rendue en matière de saisie, que la recourante n'a pas comprise correctement, ils sont sans portée. 
 
6.  
En définitive, le recours est rejeté. Les frais judiciaires, arrêtés à 10'000 fr., sont mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Aucuns dépens ne sont dus ni à l'office qui agit dans le cadre de ses fonctions, ni à l'intimé n° 2, qui n'a pas été invité à répondre au fond et dont les conclusions sur effet suspensif n'ont pas été suivies (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 10'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 5 mars 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : Achtari