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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_178/2023  
 
 
Arrêt du 2 août 2023  
 
Ire Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Muschietti et van de Graaf. 
Greffier : M. Vallat. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Youri Widmer, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton du Valais, 
rue des Vergers 9, case postale, 1950 Sion 2, 
intimé. 
 
Objet 
Abus d'autorité; présomption d'innocence, 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour pénale II, du 19 décembre 2022 (P1 20 71). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 22 juillet 2016, vers 13h50, les agents de la Police intercommunale des Deux Rives (ci-après: PIDR) B.________ et A.________ sont intervenus sur la terrasse de la boulangerie C.________, à U.________, pour interpeller D.________, lequel avait exhibé un couteau dans cet établissement public et y semait le trouble. Lors de cette intervention, les deux policiers lui ont, à plusieurs reprises, demandé de payer sa consommation, puis de rentrer à son domicile qui se trouvait non loin de là. L'intéressé, qui était fortement alcoolisé (2,23 o/oo), n'a pas obtempéré à ces ordres et a refusé de quitter les lieux, sans se montrer menaçant, ni exhiber son couteau. Il s'est approché des agents à deux reprises et ces derniers l'ont repoussé du plat de la main. Après quelques minutes de discussion et comme il ne réagissait pas aux sommations qui lui étaient adressées, B.________ a décidé de le menotter. Il a alors attrapé son bras droit et l'a amené au sol par une clé de poignet, avant de lui menotter le poignet droit, malgré sa résistance. Dans le même temps, A.________ a saisi le bras gauche de D.________. Comme ce dernier persistait à garder ce bras plaqué le long de son corps, cet agent lui a fait, dans un premier temps, une compression avec son pouce derrière l'oreille au niveau du sommet de la mâchoire. Cette manoeuvre n'ayant pas eu l'effet escompté, il lui a asséné trois coups de genou énergiques et consécutifs dans le flanc gauche puis, avec l'aide de son collègue, a réussi à lui menotter le poignet gauche. Il a alors effectué une fouille de sécurité et saisi le couteau à cran d'arrêt que D.________ avait mis dans la poche gauche de son short. Lorsque les agents l'ont amené vers leur véhicule, D.________ a chuté au sol.  
Il ressort du rapport du 6 juin 2017 relatif à l'examen clinique le 26 juillet 2016, établi par la Dresse E.________, cheffe du Service de médecine légale de l'Hôpital du Valais, que D.________ présentait le jour des faits diverses lésions corporelles, notamment des fractures de certaines côtes gauches (de la 3e à la 8e au niveau de l'arc antérieur, et de la 5e à la 8e au niveau de l'arc latéral), avec emphysème sous-cutané associé, sans pneumothorax ou hémothorax visibles radiologiquement. D.________ a été hospitalisé du 22 juillet au 8 août 2016 à l'Hôpital de Sion, puis du 8 au 22 août 2016 au Centre valaisan de pneumologie à Crans-Montana. 
 
A.b. Par jugement du 17 août 2020, la Juge suppléante des districts de Martigny et de St-Maurice a acquitté A.________ et rejeté les prétentions civiles.  
 
B.  
Saisie par D.________, par jugement du 19 décembre 2022 la Cour pénale II du Tribunal cantonal du Valais a partiellement admis l'appel, avec suite de frais et indemnités. Acquittant A.________ du chef d'accusation de lésions corporelles simples (ch. 1), elle l'a reconnu coupable d'abus d'autorité et condamné à 30 jours-amende à 80 fr. le jour (ch. 2), avec sursis pendant 2 ans (ch. 3). Les prétentions civiles de D.________ ont été rejetées (ch. 4). 
 
B.a. En bref, ce jugement auquel on renvoie pour le surplus (sous réserve de ce qui a été exposé ci-dessus (consid. A.a) et de ce qui sera discuté en droit), a retenu en se fondant sur les conclusions du rapport médical du 6 juin 2017 que la causalité entre les coups de genou et les lésions thoraciques n'était pas établie, ces dernières étant davantage compatibles avec "l'hypothèse d'une chute et/ou une mise à terre qu'avec le fait d'avoir reçu un ou plusieurs coup/s de genou contre l'hémi-thorax/flanc gauche".  
 
B.b. Quant à l'abus d'autorité, A.________ avait agi en sa qualité d'agent de la PIDR. Compte tenu de l'état d'ivresse avancé de D.________ et du fait qu'il était en possession d'un couteau à cran d'arrêt, c'est à juste titre que les agents (après avoir tenté durant une dizaine de minutes de négocier pour le convaincre de payer sa consommation et de quitter les lieux) avaient entrepris de le menotter pour l'emmener au poste. En outre, vu son attitude, en particulier sa résistance active à son arrestation, c'est à juste titre que B.________ l'avait amené au sol afin de pouvoir le maîtriser plus facilement et que A.________ avait tenté une compression avec son pouce derrière la mâchoire de l'intéressé afin que celui-ci donne son bras gauche. Tel n'était en revanche pas le cas des trois coups de genou portés au flanc gauche. Le fait que D.________ continue à résister malgré la compression aurait dû alerter A.________ et le conduire à adopter d'autres techniques de déstabilisation et de contrôle au moyen des mains, des pieds, d'un spray au poivre ou d'un bâton de police, ces choix s'imposant d'autant plus que l'un des deux agents était parvenu à maîtriser D.________. Allongé sur le côté, le poignet droit menotté dans le dos et le bras gauche plaqué le long du corps, ce dernier ne représentait plus, au moment où A.________ avait porté les trois coups, un réel danger pour les policiers et rien ne permettait de formuler la moindre critique à l'encontre de la manière d'agir de B.________. Les coups de genou constituaient ainsi un moyen disproportionné, ce qui conduisait à considérer que A.________ avait abusé des pouvoirs inhérents à sa fonction.  
 
C.  
Par acte du 1er février 2023, A.________ recourt en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement sur appel du 19 décembre 2022. Il conclut avec suite de frais et dépens des procédures cantonales et fédérale, principalement, à la réforme de cette décision dans le sens de son acquittement. A titre subsidiaire, il demande le renvoi de la cause à la cour cantonale. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dans le recours en matière pénale, le Tribunal fédéral est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), sous les réserves découlant des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de l'arbitraire dans la constatation des faits (sur cette notion, v. ATF 145 IV 154 consid. 1.1). Il en va ainsi notamment du contenu de la pensée (ATF 135 IV 152 consid. 2.3.2). Le principe in dubio pro reo, n'a pas de portée plus large que l'art. 9 Cst. lorsqu'il est invoqué à l'appui de telles critiques (ATF 145 IV 154 consid. 1.1; 143 IV 500 consid. 1.1). Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs ainsi que, de manière plus générale, tous ceux qui relèvent de la violation de droits fondamentaux, que s'ils sont invoqués et motivés par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), soit s'ils ont été expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée. Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 145 IV 154 consid. 1.1).  
 
2.  
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir minimisé la portée de ce que D.________ (déjà alcoolisé) avait déclaré le matin-même à son domicile alors que le recourant y était intervenu à deux reprises, soit qu'il disposait d'un pistolet 9 mm et voulait s'en servir contre ses voisins syriens. Cette autorité aurait aussi fait abstraction de ce que les autres policiers n'avaient pas participé à l'intervention litigieuse. Les deux interventions du matin ne pourraient être qualifiées d'insignifiantes. La cour cantonale aurait aussi omis de mentionner les deux appels reçus par le recourant de la Centrale d'engagement, qui auraient permis de se convaincre de l'état (terrorisée et craignant légitimement pour sa vie) dans lequel se trouvait la voisine ayant fait appel à la police. Quant à l'intervention de l'après-midi, le recourant oppose à l'état de fait de la décision entreprise celui retenu en première instance. Il affirme que la cour cantonale aurait fait fi de la résistance opposée par D.________ lors de la prise de son bras gauche, le recours graduel à la force n'étant dû qu'au comportement de l'interpellé. Il serait également étonnant que le visionnement des images de la caméra de surveillance conduise à deux versions ou deux appréciations des faits radicalement différentes. Celle de la cour cantonale violerait le principe in dubio pro reo. La cour cantonale aurait ignoré les aptitudes sportives de D.________ qui aurait pratiqué la boxe. Elle aurait opéré une appréciation défavorable au recourant et erronée en retenant qu'il n'y avait pas réellement de danger. En résistant au menottage, c'est D.________ qui aurait contraint le recourant à procéder à une compression puis, faute de succès, à "procéder" aux coups de genou. Il ressortirait de la vidéo que ce n'était qu'ensuite des coups de genou (portés à intervalles suffisamment longs pour que D.________ puisse donner son bras avant qu'un autre coup soit asséné) que le recourant avait pu se saisir du bras gauche de son adversaire. Se présentant comme un policier chevronné, au bénéfice d'excellents certificats de travail, le recourant "s'étonne" que la cour cantonale ait pu juger qu'il aurait dû se comporter différemment et user d'autres moyens de contrainte alors que sa demande d'une expertise par un spécialiste de l'académie de police avait été rejetée. Le recourant infère de tout ce qui précède que la décision entreprise serait particulièrement choquante tant dans sa motivation que ses conclusions.  
 
2.1. Saisie d'un appel portant notamment sur l'abus d'autorité, la cour cantonale était appelée à se prononcer sur ce point (art. 404 al. 1 CPP), soit en l'absence de vice de procédure à rendre un nouveau jugement (art. 408 et 409 CPP) avec plein pouvoir d'examen (art. 398 al. 2 CPP). Le recourant oppose dès lors vainement l'appréciation des deux autorités cantonales. Ses développements, qui reviennent pour le surplus en grande part, à opposer à l'appréciation de la cour cantonale la sienne en rediscutant l'ensemble de la matière probatoire, sont de nature essentiellement appellatoires. Ainsi, en particulier, lorsqu'il "s'étonne" d'une appréciation portée par la cour cantonale. Ils sont irrecevables dans cette mesure. On peut, dès lors, se limiter à relever ce qui suit.  
 
2.2. La cour cantonale n'a pas ignoré les deux interventions du matin et que le recourant en avait conçu de la crainte ou tout au moins une certaine appréhension. Elle ne les a pas taxées d'insignifiantes non plus. Elle a cependant relevé que lors de la première le ton était demeuré courtois et que lors de la deuxième aucune menace n'avait été proférée contre le recourant ou à l'égard d'autres policiers. La menace de se servir d'une arme n'avait du reste pas paru suffisamment sérieuse pour que les policiers s'en alarment particulièrement, ce qui ressortait des déclarations de F.________ (agente venue en soutien du recourant lors de la seconde intervention du matin) et du rapport administratif établi par la police cantonale le 26 juin 2020 (jugement sur appel, consid. 4.1.5 et 4.1.6 p. 9 s.). La cour cantonale a, du reste, aussi souligné à ce propos que selon B.________, D.________ n'avait manifesté aucune intention de s'attaquer physiquement à lui ou à son collègue, notamment pas avec le couteau qu'il savait être en sa possession (jugement sur appel, consid. 4.1.3 p. 9). Que le voisin ou la voisine de D.________ ait pu être alarmé, voire terrorisé, en apprenant que celui-ci détenait une arme à feu et menaçait de s'en servir ne renseigne que peu sur la réaction qui pouvait être attendue du recourant, qui se présente comme un policier chevronné. La cour cantonale n'a pas non plus simplement "fait fi" de la résistance opposée par D.________ lors de la prise de son bras gauche. Elle a exposé que cette résistance ne ressortait pas de la vidéo de surveillance et que l'on n'y voyait pas non plus le recourant utiliser le poids de son corps pour faire plier ce même bras (jugement sur appel consid. 4.1.4 p. 9). Elle a toutefois tenu pour établi qu'une fois D.________ au sol, le recourant avait tenté d'attraper son poignet gauche mais qu'il avait résisté et ne s'était pas plié aux sommations (jugement sur appel consid. 4.1.6 p. 10). La circonstance que D.________ a pu pratiquer la boxe n'apparaît, en outre, pas déterminante, rien n'indiquant que le recourant aurait pu avoir connaissance de cette pratique sportive lors de l'intervention soit avant qu'elle lui soit révélée par le dossier de la cause.  
Pour le surplus, si le recourant a bien requis que l'avis d'un spécialiste des techniques policières soit demandé afin de déterminer la proportionnalité de son comportement, cette réquisition de preuve a été rejetée par le ministère public au motif qu'il s'agissait d'une question de droit (ordonnance du 20 avril 2020; dossier cantonal p. 231), puis par le juge de première instance pour le même motif (dossier cantonal p. 335) ainsi que par la direction de la procédure d'appel (ordonnance du 5 septembre 2022; dossier cantonal p. 554), sans que cette demande ait été réitérée à l'audience d'appel (procès-verbal de l'audience du 13 septembre 2022; dossier cantonal p. 566). Il s'ensuit que le moyen est irrecevable faute d'épuisement des voies de droit cantonales (art. 80 al. 1 LTF; arrêt 6B_161/2022 du 15 février 2023 consid. 1). Il résulte de ce qui précède que même supposé recevable, l'argumentaire du recourant ne serait, de toute manière, pas de nature à démontrer que la décision entreprise reposerait sur un état de fait insoutenable et serait arbitraire dans son résultat. 
 
3.  
Les griefs développés par le recourant en relation avec l'application de l'art. 312 CP reposent exclusivement sur les moyens de fait qui viennent d'être examinés ainsi que sur l'affirmation qu'il aurait eu les mains occupées au moment d'asséner les coups de genou, ce qui l'aurait empêché de faire usage d'un spray au poivre ou d'un bâton tactique, que D.________ aurait alors été appuyé contre un mur et que son unique intention en portant les coups avait été de menotter le dernier cité et de procéder à son interpellation mais non d'abuser de son statut de policier. 
La cour cantonale n'a cependant pas tenu pour établi que le recourant avait les mains occupées au moment déterminant (jugement sur appel, consid. 4.1.4 p. 9). Elle a, par ailleurs, jugé qu'en portant trois coups de genou dans le flanc gauche du plaignant pour qu'il lui donne son bras gauche alors même qu'il savait, ou devait savoir, qu'il ne représentait plus une réelle menace pour lui et son collègue compte tenu du fait qu'il était immobilisé au sol, la main droite menottée dans le dos et le bras gauche plaqué le long de son corps, A.________ avait, à tout le moins, accepté l'éventualité de nuire à D.________ en usant à son encontre de moyens excessifs qui ne s'imposaient pas au vu des circonstances. Il n'y a rien d'insoutenable dans ce raisonnement. Les brefs développements du recourant, qui sont de même nature que ceux précédemment examinés n'imposent pas non plus au Tribunal fédéral de s'écarter des faits établis souverainement par la cour cantonale, singulièrement en ce qui concerne ce que le recourant a pu savoir et accepter. On peut, dès lors, se limiter à renvoyer à la motivation en droit de la décision entreprise, qui ne prête pas le flanc à la critique, tant en ce qui concerne la qualification de l'infraction que la quotité et les modalités de la peine infligée, que le recourant ne discute pas non plus. 
 
4.  
Le recourant succombe. Il supporte les frais de la procédure (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour pénale II. 
 
 
Lausanne, le 2 août 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
Le Greffier : Vallat