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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
7B_72/2023, 7B_73/2023  
 
 
Arrêt du 29 avril 2024  
 
IIe Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Abrecht, Président, 
Koch, Hurni, Kölz et Brunner, Juge suppléant, 
Greffier : M. Tinguely. 
 
Participants à la procédure 
7B_72/2023 
A.________, 
représenté par Me Myriam Fehr-Alaoui, avocate, 
recourant, 
 
et 
 
7B_73/2023 
B.________, 
représenté par Me Adrien Gabellon, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la Confédération, 
Guisanplatz 1, 3003 Berne, 
intimé. 
 
Objet 
Actes exécutés sans droit pour un État étranger (art. 271 ch. 1 CP); principe nulla poena sine lege, droit international de l'entraide, etc., 
 
recours contre l'arrêt de la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral du 12 décembre 2022 (CA.2022.19). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 22 juin 2022, la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral a condamné A.________ et B.________ pour actes exécutés sans droit pour un État étranger (art. 271 ch. 1 CP) à des peines pécuniaires de 30 jours-amende - dont le montant a été fixé respectivement à 130 fr. et à 340 fr. -, avec sursis pendant 2 ans. 
 
B.  
Statuant par arrêt du 12 décembre 2022 sur les appels formés par A.________ et B.________, la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral a confirmé le jugement du 22 juin 2022 en tant que les précités étaient condamnés pour actes exécutés sans droit pour un État étranger. Elle l'a en revanche réformé s'agissant des peines infligées à A.________ et B.________, qui ont été fixées respectivement à 15 jours-amende, à 150 fr., avec sursis pendant 2 ans, et à 30 jours-amende, à 230 fr., avec sursis pendant 2 ans. 
En substance, la Cour d'appel a retenu les faits suivants. 
 
B.a. Le 3 avril 2018, à U.________ (Italie), C.________, domicilié à V.________ (FR), a commis une infraction à la législation italienne sur la circulation routière en pénétrant dans une zone à trafic limité avec son véhicule immatriculé dans le canton de Fribourg (n°xxx).  
En novembre 2018, la Commune U.________ ( Comune U.________) a notifié une contravention à C.________, qui, à réception, a payé l'amende y afférente (120 fr. 40, soit l'équivalent de 102.94 EUR) par bulletin de versement rouge.  
 
B.b.  
 
B.b.a. D.________ SA (ci-après: D.________), dont le siège était à W.________ (VD) jusqu'en août 2022, puis à X.________ (VD) depuis lors, est une société anonyme active, au regard de son but social mentionné au Registre du commerce, dans les domaines "des renseignements commerciaux et économiques, du recouvrement de créances et des remises de commerce".  
Depuis 2005, B.________ est le directeur de la société, alors que, depuis 2009, A.________ en est le sous-directeur. Entre août 2018 et mars 2021, ce dernier a en particulier exercé comme responsable de la section recouvrement de D.________. 
 
B.b.b. Le 2 mars 2020, D.________ a adressé à C.________, à son domicile fribourgeois, un courrier auquel était annexé un bulletin de versement orange portant sur un montant de 542 fr. 35. Le courrier, qui faisait référence à l'infraction commise le 3 avril 2018 à U.________, avait au surplus la teneur suivante:  
 
"Hiermit informieren Wir Sie, dass wir von der Gläubigerin beauftragt wurden, die obengennante Forderung einzutreiben, welche zuständig für das einkassieren der Unbezahlte Geldstrafen für Verkehrsdelikten in Italien ist. 
Bis heute hat die Gläubigerin Comune di Torino - Polizia Municipale keine Zahlung für die obenstehende Forderung erhalten. Wir bitten Sie, die verfallene Rechnung von CHF 542.35 bis zum 14.03.2020 mittels beiliegendem Einzahlungsschein zu überweisen. 
Sollten Sie per Rate zahlen oder einen Teil oder die ganze Forderung bestreiten, dann bitten wir Sie, dies innert der gleichen Frist schriftlich mitzuteilen mit Angabe Ihrer Referenznummer. Sie können uns entweder per Post schreiben oder per Email an folgende Adresse: collect@lausanne.creditreform.ch." 
 
B.c. Le 18 mars 2020, C.________ a dénoncé D.________ ainsi que la Commune U.________ au Ministère public de la Confédération (MPC), sollicitant de celui-ci l'ouverture d'une instruction pénale pour actes exécutés sans droit pour un État étranger.  
 
C.  
A.________ et B.________ forment chacun un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 12 décembre 2022 (causes 7B_72/2023 et 7B_73/2023). Ils concluent principalement à sa réforme dans le sens de leur acquittement. A titre subsidiaire, ils concluent à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la Cour d'appel pour nouvelle décision. 
Invités à se déterminer, le Ministère public de la Confédération et la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral renoncent à présenter des observations. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les deux recours formés dans les causes 7B_72/2023 et 7B_73/2023, qui sont rédigés en termes identiques, ont pour objet la même décision et ont trait au même complexe de faits. Il y a donc lieu de joindre les causes et de les traiter dans un seul arrêt (art. 71 LTF et 24 al. 2 PCF). 
 
2.  
Dirigés contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue par la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral (art. 80 al. 1 LTF), les recours sont recevables comme recours en matière pénale au sens des art. 78 ss LTF. Les recourants A.________ et B.________, qui ont pris part à la procédure devant l'autorité précédente et ont un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée, ont la qualité pour agir au sens de l'art. 81 al. 1 LTF. Les recours ont pour le surplus été déposés en temps utile (art. 100 al. 1 LTF), si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière. 
 
3.  
Les recourants contestent leurs condamnations pour actes exécutés sans droit pour un État étranger au sens de l'art. 271 ch. 1 CP. Outre une violation de cette disposition, ils invoquent également une violation du principe nulla poena sine lege (art. 1 CP).  
 
3.1. Une peine ou une mesure ne peut être prononcée qu'en raison d'un acte expressément réprimé par la loi (art. 1 CP). Le principe de la légalité ( nulla poena sine lege) est aussi ancré expressément à l'art. 7 CEDH et se déduit des art. 5 al. 1, 9 et 164 al. 1 let. c Cst. (ATF 144 I 242 consid. 3.1.2; 143 II 297 consid. 9.5). Ce principe est violé lorsque quelqu'un est poursuivi pénalement en raison d'un comportement qui n'est pas visé par la loi; lorsque l'application du droit pénal à un acte déterminé procède d'une interprétation de la norme pénale excédant ce qui est admissible au regard des principes généraux du droit pénal; ou si quelqu'un est poursuivi en application d'une norme pénale qui n'a pas de fondement juridique (ATF 144 I 242 consid. 3.1.2). Le principe s'applique à l'ensemble du droit pénal. Il n'exclut pas une interprétation extensive de la loi à la charge du prévenu (ATF 138 IV 13 consid. 4.1).  
La loi doit être formulée de manière telle qu'elle permette au citoyen de s'y conformer et de prévoir les conséquences d'un comportement déterminé avec un certain degré de certitude dépendant des circonstances (ATF 144 I 242 consid. 3.1.2; 141 IV 179 consid. 1.3.3). L'exigence de précision de la base légale ne doit cependant pas être comprise d'une manière absolue. Le législateur ne peut pas renoncer à utiliser des définitions générales ou plus ou moins vagues, dont l'interprétation et l'application sont laissées à la pratique. Le degré de précision requis ne peut pas être déterminé de manière abstraite. Il dépend, entre autres, de la multiplicité des situations à régler, de la complexité ou de la prévisibilité de la décision à prendre dans le cas particulier, du destinataire de la norme, ou de la gravité de l'atteinte aux droits constitutionnels. Il dépend aussi de l'appréciation que l'on peut faire, objectivement, lorsque se présente un cas concret d'application (ATF 139 I 72 consid. 8.2.1; 138 IV 13 consid. 4.1; arrêt 6B_280/2022 du 14 avril 2023 consid. 8.1). 
 
3.2.  
 
3.2.1. L'art. 271 ch. 1 CP réprime d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire - et, dans les cas graves, d'une peine privative de liberté d'un an au moins - notamment quiconque, sans y être autorisé, procède sur le territoire suisse pour un État étranger à des actes qui relèvent des pouvoirs publics.  
Le bien juridique protégé par cette disposition est la souveraineté de la Suisse, soit en particulier le pouvoir de celle-ci de réserver l'exécution de tout acte étatique à ses propres institutions (ATF 148 IV 66 consid. 1.4.1 et les références citées). 
 
3.2.2. Est ainsi prohibé, au regard de l'art. 271 ch. 1 CP, tout acte - réalisé en Suisse dans l'intérêt d'un État étranger - qui, selon son but et sa nature, se caractérise comme une activité officielle, relevant de la puissance publique. Ce qui est déterminant, c'est l'acte en lui-même et non le statut de la personne - fonctionnaire, mandataire ou simple auxiliaire - qui l'accomplit (ATF 148 IV 66 consid. 1.4.1 et les références citées; 114 IV 128 consid. 2b).  
 
3.2.3. A teneur du texte légal, l'infraction concerne uniquement celui qui commet un acte officiel prohibé "sans y être autorisé". Une éventuelle autorisation a pour effet d'exclure la typicité de l'infraction et ne constitue dès lors pas, à proprement parler, un motif justificatif (MARKUS HUSMANN, Basler Kommentar, Strafrecht, 4e éd., 2019, n° 78 ad art. 271 CP; FISCHER/RICHA, Commentaire romand, Code pénal II, 2017, n° 38 ad art. 271 CP). Selon l'art. 31 al. 1 de l'ordonnance sur l'organisation du gouvernement et de l'administration (OLOGA; RS 172.010.1), c'est, d'une manière générale, aux Départements fédéraux et à la Chancellerie fédérale qu'il revient de délivrer les autorisations visées par l'art. 271 ch. 1 CP (cf. également ATF 148 IV 66 consid. 1.4.1).  
 
3.3. En l'espèce, les recourants reconnaissent qu'en soi, le courrier de D.________ adressé le 2 mars 2020 à C.________, au domicile suisse de ce dernier, s'inscrivait dans la perspective de l'encaissement d'une amende, soit d'une créance de droit public, infligée par la Police municipale ( Polizia municipale) de la Commune U.________ en vertu du droit pénal italien en matière de circulation routière, de sorte que l'envoi de ce courrier constituait bien un acte relevant des pouvoirs publics, accompli en l'occurrence en Suisse dans l'intérêt d'un État étranger.  
Les recourants soutiennent en revanche que, dans la mesure où D.________, agissant sur mandat de la Commune U.________, s'est limitée à solliciter de C.________ un paiement volontaire de l'amende, en dehors de toute procédure d'exécution forcée, son acte était conforme au droit suisse de l'entraide judiciaire internationale en matière pénale. Ils se prévalent à cet égard de l'art. 68 al. 2 de la loi fédérale sur l'entraide pénale internationale (EIMP; RS 351.1), de l'art. 30 al. 2 de l'ordonnance sur l'entraide pénale internationale (OEIMP; RS 351.11) ainsi que de l'Accord entre la Suisse et l'Italie en vue de compléter la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 et d'en faciliter l'application (RS 0.351.945.41). 
 
3.4.  
 
3.4.1. Il est reconnu que les actes exécutés sur territoire suisse en conformité avec le droit de l'entraide judiciaire internationale - que ce soit en matière civile, pénale ou administrative - sont ipso facto réputés avoir été "autorisés" au sens de l'art. 271 ch. 1 CP, et ce au-delà de l'existence d'une autorisation au sens de l'art. 31 al. 1 OLOGA (cf. consid. 3.2.3 supra; H USMANN, op. cit., n° 82 ad art. 271 CP FISCHER/RICHA, op. cit., n° 38 ad art. 271 CP; YOLANDA MCGOUGH, Verbotene Handlungen für einen fremden Staat, Eine Analyse des Straftatbestands nach Art. 271 StGB, Zurich, 2017, p. 138).  
En particulier, s'il faut déduire du droit fédéral en matière d'entraide pénale internationale que la notification directe en Suisse d'actes judiciaires depuis l'étranger constitue en soi un acte officiel, une telle notification est cependant admise pour autant qu'elle soit prévue par un traité international ou que le Conseil fédéral l'autorise (cf. art. 68 al. 2 EIMP; HUSMANN et MCGOUGH, loc. cit.). Aussi, en vertu de l'art. 30 OEIMP, édicté par le Conseil fédéral en vertu de la délégation, les actes (à l'exception des citations à comparaître) destinés à des personnes domiciliées en Suisse qui ne font pas l'objet de la procédure pénale étrangère peuvent leur être notifiés directement par la poste (al. 1); de même, les actes de nature pénale qui concernent des contraventions à des prescriptions sur la circulation routière peuvent être notifiés directement par la voie postale à leur destinataire en Suisse (al. 2). 
En revanche, sous réserve de l'art. 38 OEIMP - qui vise, moyennant le respect de différentes conditions, le cas, non pertinent en l'espèce, où le jugement étranger vise plusieurs infractions dont certaines ont été commises en Suisse -, la législation fédérale en matière d'entraide pénale internationale ne prévoit pas la possibilité de faire exécuter directement en Suisse la peine prononcée par un jugement pénal étranger. Ainsi, sous réserve également d'éventuelles conventions internationales (cf. art. 1 ch. 1 EIMP), il appartient à l'État étranger de procéder par la voie prévue par les art. 94 ss EIMP, lesquels impliquent notamment un contrôle des autorités suisses en amont de l'exécution ( exequatur), contrôle pour lequel sont entre autres pertinents le principe de la double incrimination (cf. art. 94 al. 1 let. b EIMP), l'absence de prescription selon le droit suisse au moment de la condamnation (art. 95 al. 1 let. a et b EIMP) et le caractère exécutoire de la condamnation aux frais uniquement s'ils sont dus à l'État (art. 95 al. 2 EIMP).  
 
3.4.2.  
 
3.4.2.1. Par la ratification de la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale (RS 0.351.1; ci-après: la CEEJ), conclue le 20 avril 1959 sous l'égide du Conseil de l'Europe, les Parties contractantes, parmi lesquelles figurent la Suisse et l'Italie, se sont engagées à s'accorder mutuellement, selon les dispositions de la CEEJ, l'aide judiciaire la plus large possible dans toute procédure visant des infractions dont la répression est, au moment où l'entraide est demandée, de la compétence des autorités judiciaires de la Partie requérante (art. 1 ch. 1 CEEJ). La CEEJ ne s'applique toutefois pas à l'exécution des décisions d'arrestation et des condamnations ni aux infractions militaires qui ne constituent pas des infractions de droit commun (cf. art. 1 ch. 2 CEEJ).  
 
3.4.2.2. La Suisse et l'Italie ont conclu, le 10 septembre 1998, un Accord en vue de compléter la CEEJ et d'en faciliter l'application (RS 0.351.945.41; entré en vigueur par échange de note le 1er juin 2003; ci-après: l'Accord CEEJ Suisse-Italie).  
L'art. II ch. 2 let. b de l'Accord CEEJ Suisse-Italie prévoit ainsi que l'entraide judiciaire entre les deux États est également accordée pour les procédures relatives à l'exécution d'une peine ou d'une mesure. Le champ d'application de la CEEJ étant élargi aux procédures relatives à l'exécution de peines dans les relations entre la Suisse et l'Italie, la procédure d'entraide telle que prévue par la CEEJ (cf. spéc. art. 14 ss CEEJ) et par l'Accord CEEJ Suisse-Italie est applicable dans ce cadre. Le juge de l'entraide a dès lors l'obligation d'accorder la coopération aux conditions fixées par ce traité (cf. Office fédéral de la justice [OFJ], L'entraide judiciaire internationale en matière pénale, Directives, 9e éd., 2009 [ci-après: les Directives OFJ], ch. 1.4.2.1.2 p. 12, document consulté le 29 février 2024 à l'adresse https://www.rhf.admin.ch/rhf/fr/home/strafrecht/ wegleitungen.html). 
Cela dit, ni la CEEJ ni l'Accord CEEJ Suisse-Italie ne prévoient de disposition spécifique s'agissant de la mise en oeuvre de l'entraide en matière d'exécution de condamnations pénales. En application du principe de faveur, le droit interne, soit l'EIMP, est applicable (cf. art. 1 al. 1 EIMP). La Suisse ne peut néanmoins pas refuser l'entraide pour un motif fondé sur son droit interne alors que ce motif ne figure pas dans le traité qui la lie à un autre État (soit par exemple le refus de l'entraide pour les cas de peu d'importance [art. 4 EIMP]; cf. Directives OFJ, ibidem).  
 
3.5. En l'espèce, la nature du courrier du 2 mars 2020, et en particulier sa portée au regard du droit de l'entraide judiciaire internationale en matière pénale, prêtent à discussion.  
 
3.5.1. La Cour d'appel a rappelé pour sa part que, comme on l'a vu (cf. consid. 3.4.2 supra), le droit de l'entraide judiciaire internationale ne permettait pas à l'Italie de procéder directement, sur le territoire suisse, à l'exécution d'un jugement pénal rendu par ses autorités. Or, en tant qu'il avait trait à l'encaissement d'une amende infligée par une autorité communale italienne et entrée en force, le courrier litigieux s'inscrivait bien dans le cadre de l'exécution d'un jugement pénal étranger.  
Il fallait en particulier se référer à la terminologie employée dans le courrier en question (soit notamment "Forderung einzutreiben", "verfallene Rechnung"), qui correspondait à celle de la loi sur les poursuites pour dettes et la faillite (LP; RS 281.1), de sorte que l'envoi de cet écrit par les recourants devait être compris comme étant le "premier pas" de l'exécution forcée en Suisse de l'amende prononcée en Italie (cf. arrêt attaqué, consid. 1.4.3 p. 15 et consid. 1.4.4.4 p. 18). 
Il s'ensuivait que le courrier du 2 mars 2020, envoyé par les recourants à un résident suisse hors de toute procédure d'exequatur au sens des art. 94 ss EIMP, tombait bien sous le coup de l'art. 271 ch. 1 CP (cf. arrêt attaqué, consid. 1.4.4.7 et 1.4.5 p. 19 s.). 
 
3.5.2. Au-delà de l'approche adoptée par la Cour d'appel, le courrier du 2 mars 2020 est toutefois également susceptible d'être perçu comme s'inscrivant dans le prolongement de la notification initiale de la contravention, notification qui avait été valablement effectuée en Suisse par la Commune U.________.  
Une telle notification doit en effet être tenue pour conforme au droit de l'entraide judiciaire internationale en matière pénale et doit donc être considérée comme "autorisée" sous l'angle de l'art. 271 ch. 1 CP. On rappellera ainsi que la Suisse a renoncé à une part de sa souveraineté en la matière, acceptant en particulier que des contraventions étrangères à des prescriptions sur la circulation routière - comme en l'espèce - puissent être notifiées directement par la poste à leur destinataire en Suisse (cf. art. 30 al. 2 OEIMP). La possibilité d'une telle notification directe est également prévue par l'Accord CEEJ Suisse-Italie en tant qu'il prévoit, à son art. XII ch. 1, que "tout acte de procédure et toute décision judiciaire en matière pénale peuvent être adressés directement par la voie postale aux personnes qui se trouvent sur le territoire de l'autre État". 
Cela étant relevé, on ne voit pas qu'il serait exclu, pour l'autorité étrangère procédant à la notification autorisée en Suisse d'une contravention en matière de circulation routière, de communiquer ses coordonnées bancaires ou de proposer un paiement en ligne, de sorte à permettre au destinataire de la contravention, qui n'entend par hypothèse pas s'y opposer, de régler immédiatement l'amende de son propre gré - à l'instar de ce que prévoit dans un contexte similaire l'art. 6 al. 1 de la loi sur les amendes d'ordre (LAO; RS 314.1) - et ainsi de lui éviter de devoir se rendre à l'étranger pour y procéder, voire de risquer un paiement majoré ou un séquestre de son véhicule lors d'un prochain séjour dans l'État étranger en question. C'est d'ailleurs ce qui a été fait en l'espèce, la Commune U.________ ayant communiqué ses coordonnées bancaires lors de l'envoi initial de la contravention, en novembre 2018, ce qui n'a apparemment pas suscité de critiques du Ministère public. 
Dans ce contexte, le courrier du 2 mars 2020 pourrait dès lors encore être interprété comme un "courrier de rappel" par lequel la Commune U.________ entendait réitérer, par l'intermédiaire de sa mandataire D.________, et dans la prolongation de la notification initiale, sa proposition de paiement volontaire de l'amende, sans qu'en dépit des termes utilisés et de la majoration substantielle du montant à payer - qui est passé de quelque 100 fr. à plus de 500 fr. -, le courrier ait déployé un effet coercitif. Il ne ressort d'ailleurs pas de l'arrêt attaqué qu'à un quelconque moment, une procédure d'exécution forcée aurait été introduite par D.________ ou sa mandante, ni même qu'une telle démarche aurait été envisagée. D'ailleurs, contrairement à l'appréciation de l'instance précédente, la lettre du 2 mars 2020 ne se réfère pas à des notions propres au droit de la poursuite pour dettes. Le recouvrement ("eintreiben") d'une créance doit ainsi être distingué de la poursuite ("betreiben") d'une telle créance au sens de la LP. Le terme "verfallen" ("échu") n'a quant à lui pas de rapport spécifique avec cette loi. 
 
3.5.3. Aussi, en l'absence d'une réponse qui pourrait être déduite de manière suffisamment claire et précise du droit de l'entraide judiciaire internationale, il subsiste une incertitude quant au caractère "autorisé" de l'envoi du courrier litigieux selon que celui-ci soit abordé sous le prisme de la notification directe - permise en Suisse - d'un jugement italien portant sur une contravention en matière de circulation routière (cf. consid. 3.5.2 supra) ou sous celui de l'exécution directe - proscrite en Suisse - d'un tel jugement (cf. consid. 3.5.1 supra).  
En tout état, et sans qu'il y ait matière à examiner plus avant la licéité du courrier litigieux, il apparaît qu'une condamnation des recourants au titre de l'art. 271 ch. 1 CP se heurte au principe de la légalité (art. 1 CP), dont on rappelle qu'il exige notamment que la loi soit formulée de manière telle qu'elle permette au justiciable de prévoir les conséquences d'un comportement déterminé avec un certain degré de certitude (cf. consid. 3.1 supra). 
 
3.5.4. Les considérations qui précèdent conduisent à l'acquittement des recourants, sans qu'il y ait par ailleurs matière à examiner si les actes accomplis par D.________, sur mandat de la Commune U.________, pouvaient leur être imputés personnellement.  
 
3.6. Au surplus, on relèvera que, compte tenu des exigences découlant de la maxime d'accusation (cf. art. 9 CPP), et en particulier au regard des ordonnances pénales rendues par le Ministère public le 8 juillet 2021, tenant lieu d'actes d'accusation (art. 356 al. 1 CPP), la cause n'a pas à être abordée sous l'angle d'une éventuelle tentative de contrainte (art. 181 CP), voire d'extorsion et chantage (art. 156 CP) ou encore d'abus d'autorité (art. 312 CP), qui aurait été commise par les recourants ou par une quelconque autre personne.  
 
4.  
Au vu de ce qui précède, les recours doivent être admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle rende une nouvelle décision. 
Les recourants obtiennent gain de cause avec l'assistance de mandataires professionnels et ont donc droit à des dépens à la charge de la Confédération (art. 68 al. 1 LTF). Il ne sera pas perçu de frais judiciaires (art. 66 al. 1 et 4 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Les causes 7B_72/2023 et 7B_73/2023 sont jointes. 
 
2.  
Les recours sont admis. L'arrêt de la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral du 12 décembre 2022 est annulé et la cause est renvoyée à cette autorité pour nouvelle décision. 
 
3.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4.  
Une indemnité de dépens, fixée à 3'000 fr., est allouée au recourant A.________. 
 
5.  
Une indemnité de dépens, fixée à 3'000 fr., est allouée au recourant B.________. 
 
6.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral. 
 
 
Lausanne, le 29 avril 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Abrecht 
 
Le Greffier : Tinguely