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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_494/2023  
 
 
Arrêt du 2 février 2024  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Merz. 
Greffier : M. Parmelin. 
 
Participants à la procédure 
Association A.________, 
Association B.________, 
recourantes, 
 
contre  
 
Chargée de communication de l'Ordre judiciaire vaudois, Secrétariat général de l'Ordre judiciaire vaudois, route du Signal 8, 1014 Lausanne. 
 
Objet 
Loi sur l'information; accès à des documents officiels, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif 
et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 16 août 2023 (GE.2023.0115). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Aux termes de l'art. 14 al. 1 de la loi vaudoise sur les impôts directs cantonaux sur les impôts directs cantonaux du 4 juillet 2000 (LI; BLV 642.11), les époux qui vivent en ménage commun répondent solidairement du montant global de l'impôt. 
Le 14 avril 2023, l'Association A.________ et l'Association B.________ ont adressé au Tribunal cantonal une demande fondée sur la loi cantonale du 24 septembre 2002 sur l'information (LInfo; BLV 170.21) visant à obtenir : 
 
"- une liste de toutes les affaires qui ont été portées, entre 2010 et 2020, devant le Tribunal de première instance et devant le Tribunal cantonal par des personnes séparées ou divorcées appelées en solidarité des dettes fiscales de leur (ex-) conjoint (e) en application de l'art. 14 de la loi vaudoise du 4 juillet 2000 sur les impôts directs cantonaux (LI; BLV 642.11), en mentionnant la référence attribuée à chacune des affaires, l'année, les montants (avec intérêts) réclamés, et en précisant le code postal et le sexe (h/f) des personnes concernées; 
- l'indication de l'éventuel recours devant le Tribunal fédéral pour chacune des affaires ayant été portées, entre 2010 et 2020, devant le Tribunal cantonal et dans lesquelles celui-ci a fait application de l'art. 14 al. 1 LI, en précisant la référence attribuée à chaque recours; 
- une copie anonymisée de chacun (e) des décisions, des prononcés, des arrêts qui ont été rendus entre 2010 et 2020 par le Tribunal de première instance et par le Tribunal cantonal à l'encontre de personnes séparées ou divorcées appelées en solidarité des dettes fiscales de leur (ex-) conjoint (e) en application de l'art. 14 LI, en mentionnant la référence attribuée à chacune des affaires, l'année, les montants (avec intérêts) réclamés, et en précisant le code postal et le sexe (h/f) des personnes concernées". 
Le 15 avril 2023, ces mêmes associations ont adressé aux dix offices des poursuites du canton de Vaud une requête tendant à l'obtention des documents suivants: 
 
"- une liste anonymisée de tous les actes de poursuite notifiés entre 2010 et 2021 (commandement de payer, ordonnance de séquestre de compte bancaire, de biens immobiliers, mobiliers ou autres biens, hypothèque légale, certificat d'insuffisance de gage, saisie sur salaire ou tout autre acte de poursuite) qui ont comme cause de l'obligation la solidarité fiscale fondée sur l'art. 14 LI, en mentionnant expressément l'année, les montants (avec intérêts) réclamés, le code postal et en précisant si ces actes de poursuite ont été adressés à l' (ex-) épouse ou à l' (ex-) époux; 
- pour les années 2017, 2018, 2019, 2020 et 2021, une copie caviardée de chaque acte de poursuite ayant pour cause de l'obligation la solidarité fiscale fondée sur l'art. 14 LI, en prenant soin de permettre d'identifier si le poursuivi est "Madame" ou "Monsieur" (cf. exemples en annexe); 
- une copie caviardée de tout acte de saisie sur salaire ayant pour cause de l'obligation la solidarité fiscale fondée sur l'art. 14 LI, en prenant soin de permettre d'identifier si le poursuivi est l' (ex-) épouse "Madame" ou l' (ex-) époux "Monsieur". 
Par décision du 16 mai 2023, la Chargée de communication de l'Ordre judiciaire vaudois a rejeté ces demandes aux motifs qu'elles portaient sur des millions de documents, que le travail occasionné pour y répondre serait manifestement disproportionné et qu'il entraverait l'accomplissement des tâches ainsi que le fonctionnement des tribunaux et des offices de poursuite concernés. 
La Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours déposé par les associations requérantes contre cette décision au terme d'un arrêt rendu le 16 août 2023. 
 
B.  
Par acte du 16 septembre 2023, l'Association A.________ et l'Association B.________ forment un recours en matière de droit public contre cet arrêt, dont elles demandent la réforme en ce sens que leurs demandes d'accès sont admises et que le dossier est renvoyé à la Chargée de communication de l'Ordre judiciaire vaudois en vue de la transmission des documents et informations requis. Elles concluent subsidiairement à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la Chargée de communication de l'Ordre judiciaire vaudois pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Le Tribunal cantonal conclut au rejet du recours. La Chargée de communication de l'Ordre judiciaire vaudois a renoncé à se déterminer et se réfère aux considérants de l'arrêt attaqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
L'arrêt rendu par la Cour de droit administratif et public porte sur le refus de donner suite à une demande d'accès à des documents en mains d'autorités judiciaires et de services administratifs fondée sur la LInfo. Il s'agit par conséquent d'une cause de droit public au sens de l'art. 82 let. a LTF. Les recourantes ont participé à la procédure devant l'instance précédente et ont un intérêt digne de protection à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause pour nouvelle décision, de sorte que la qualité pour recourir doit leur être reconnue (art. 89 al. 1 LTF). Le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF). Ses conclusions, qui tendent en substance à la reconnaissance d'un droit d'accès aux informations et documents en question, sont recevables au regard de l'art. 107 LTF
La Cour de droit administratif et public a constaté que la décision de la Chargée de communication de l'Ordre judiciaire vaudois était définitive (cf. art. 24 LInfo) et que, partant, le recours était irrecevable en tant que l'une et l'autre se rapportaient à la transmission des arrêts rendus entre 2010 et 2020 par le Tribunal cantonal en application de l'art. 14 LI. Elle a précisé que les recourantes pouvaient librement accéder aux arrêts du Tribunal cantonal, lesquels sont publiés sur le site de l'Etat de Vaud (www.vd.ch/themes/justice/jurisprudence-et-lois/ jurisprudence-du-tribunal-cantonal-et-du-tripac), et qu'une recherche par mot-clé ou par article de loi leur permettra d'accéder aux arrêts dans lesquels il est fait application de cette disposition. De même, si l'arrêt en cause a fait l'objet d'un recours fédéral, elles pouvaient également le consulter sur le site internet du Tribunal fédéral (www.bger.ch). Les recourantes ne s'en prennent aucunement à ces aspects de l'arrêt attaqué, qui ne font dès lors pas l'objet du litige. 
Sous cette réserve, il sied d'entrer en matière sur le recours. 
 
2.  
Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF); il n'examine cependant la violation de droits fondamentaux que si ce grief a été invoqué et motivé par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire que l'acte de recours doit, sous peine d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés et préciser de façon circonstanciée en quoi consiste la violation (ATF 145 I 121 consid. 2.1; 142 V 577 consid. 3.2). A cela s'ajoute que, sauf dans les cas cités expressément à l'art. 95 LTF, le recours devant le Tribunal fédéral ne peut pas être formé pour violation du droit cantonal en tant que tel; en revanche, il est possible de faire valoir que la mauvaise application du droit cantonal constitue une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à d'autres droits constitutionnels (ATF 143 I 321 consid. 6.1); dans ce cadre également s'appliquent les exigences strictes en matière de motivation définies par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 142 V 577 consid. 3.2). 
 
3.  
Les recourantes invoquent la liberté d'information garantie à l'art. 16 al. 3 Cst. et à l'art. 17 de la Constitution du canton de Vaud du 14 avril 2003 (Cst-VD; BLV 101.1) et se plaignent d'arbitraire dans l'application de l'art. 16 al. 1 et 2 let. c et de l'art. 17 al. 2 LInfo. Elles contestent que leur demande de renseignements porterait sur des millions de documents ainsi que les autres motifs retenus pour justifier le caractère disproportionné du travail d'anonymisation incombant aux tribunaux et aux offices des poursuites. 
 
3.1. Selon la jurisprudence, une décision est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou le sentiment de la justice et de l'équité; il ne suffit pas qu'une autre solution paraisse concevable, voire préférable; pour que cette décision soit annulée, encore faut-il qu'elle se révèle arbitraire non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 148 III 95 consid. 4.1).  
La LInfo a pour but de garantir la transparence des activités des autorités afin de favoriser la libre formation de l'opinion publique (art. 1 al. 1 LInfo). S'agissant des informations transmises sur demande, elle précise que, par principe, les renseignements, informations et documents officiels détenus par les organismes soumis à la présente loi sont accessibles au public (art. 8 al. 1 LInfo). Par document officiel, on entend tout document achevé, quel que soit son support, qui est élaboré ou détenu par les autorités, qui concerne l'accomplissement d'une tâche publique et qui n'est pas destiné à un usage personnel (art. 9 al. 1 Linfo). 
Le droit à l'information institué par la LInfo n'est pas absolu. Aux termes de l'art. 16 LInfo, les autorités peuvent à titre exceptionnel décider de ne pas publier ou transmettre des informations, de le faire partiellement ou de différer cette publication ou transmission si des intérêts publics ou privés prépondérants s'y opposent (al. 1). Des intérêts publics prépondérants sont en cause lorsque le travail occasionné serait manifestement disproportionné (al. 2 let. c). L'art. 24 du règlement d'application du 25 septembre 2003 de la LInfo (RLInfo; BLV 170.21.1) précise que le travail occasionné peut être considéré comme manifestement disproportionné lorsque l'autorité n'est pas en mesure, avec le personnel et l'infrastructure dont elle dispose ordinairement, de satisfaire à la demande de consultation sans perturber considérablement l'accomplissement de ses tâches. 
 
3.2. Nul ne conteste que les extraits d'actes de poursuite et les décisions judiciaires dont les recourantes réclament la transmission constituent des documents officiels tel que défini à l'art. 9 LInfo, ni que les tribunaux et les offices de poursuite font partie des organes judiciaires de l'Etat soumis au principe de transparence (art. 2 al. 1 let. c LInfo).  
On peut toutefois se demander si la demande des recourantes, en tant qu'elle concerne les offices des poursuites et porte sur des actes de poursuite, est soumise à la LInfo et si l'accès aux documents requis n'est pas réglé exclusivement par l'art. 8a de la loi fédérale du 11 avril 1989 sur la poursuite pour dettes et faillites (LP; RS 281.1; cf. VALÉRIE DÉFAGO GAUDIN, L'article 8a LP et la transparence de l'administration in: Transparence et secret dans l'ordre juridique suisse, 2010, p. 84 ss; LUC VOLLERY, La loi fribourgeoise sur l'information et l'accès aux documents, RFJ 2009 393 n. 54; voir aussi arrêt 1C_278/2023 du 14 novembre 2023 consid. 2 excluant l'application de la LInfo pour les registres fonciers vu la règle spéciale à l'art. 970a CC; au sujet du rapport entre l'art. 8a LP et la loi fédérale sur la protection des données [LPD; RS 235.1]: pour l'ancien droit, ATF 147 III 486 consid. 3.1; pour le droit actuel, MÉTILLE/DI TRIA, Commentaire romand de la loi fédérale sur la protection des données, 2023, n. 58 ss et 70 ss ad art. 2: POWELL/SCHÖNBACHER, OFK zum Schweizerischen Datenschutzgesetz, 2023, n. 29 s. ad art. 2 DSG). Cette question peut demeurer indécise vu le sort de la cause. Il n'y a pas non plus lieu que le Tribunal fédéral procède comme première instance à un examen sous l'angle de l'art. 8a LP; les recourantes n'ont rien fait valoir à ce sujet et insistent sur l'application de la LInfo. Elles pourraient, le cas échéant, toujours encore déposer une requête en se fondant sur l'art. 8a LP
Le principe de la publicité de la justice, ancré dans l'art. 30 al. 3 Cst., garantit un droit fondamental à la consultation de tous les jugements après leur prononcé, même s'ils ont été rendus il y a quelque temps. Il importe peu que la demande porte sur un seul ou quelques jugements ou sur un grand nombre de décisions. Dans la mesure toutefois où le droit de consultation nécessite l'anonymisation d'un grand nombre de jugements, il est soumis à la réserve que ce travail ne représente pas une charge excessive pour l'autorité judiciaire (ATF 147 I 407 consid. 6.4.2). La jurisprudence fédérale admet qu'un refus puisse être opposé à une demande de renseignements lorsque le traitement de celle-ci requiert un effort si considérable qu'il paralyserait le fonctionnement de l'autorité (ATF 144 I 170 consid. 8.2; 142 II 324 consid. 3.5; arrêt 1C_467/2017 du 27 juin 2018 consid. 8.2 in ZBl 120/2019 p. 260; arrêt 1C_155/2017 du 17 juillet 2017 consid. 2.6 in ZBl 119/2018 p. 404). Dans un arrêt 1C_584/2022 du 20 juin 2023, la Cour de céans a considéré que la demande d'accès à 243 décisions de classement rendues par la Commission genevoise de surveillance des professions de la santé, laquelle n'était pas tenue à une obligation de résultat, présentait un travail excessif pour l'autorité compte tenu du temps de recherche par document et du temps destiné au caviardage estimés au total à 148 heures (consid. 5.2). 
 
3.3. La Cour de droit administratif et public a constaté, dans l'arrêt querellé (consid. 4b), qu'il n'existait pas de liste de toutes les affaires judiciaires et les poursuites qui ont été traitées, entre 2010 et 2020 dans le canton de Vaud en lien avec l'art. 14 LI. Elle s'est ralliée à l'avis de la Chargée de communication de l'Ordre judiciaire vaudois selon lequel une recherche automatique des documents demandés dans les systèmes informatiques des autorités et des offices judiciaires concernés par la demande n'était pas réalisable. Il n'était, en effet, pas acquis que la solidarité fiscale des époux fondée sur l'art. 14 LI soit mentionnée expressément dans toutes les décisions et tous les prononcés des tribunaux de première instance ainsi que dans tous les actes de poursuite requis, respectivement qu'elle y soit mentionnée de manière identique. Or, toujours selon la cour cantonale, la plus petite différence d'orthographe ou de ponctuation dans les documents visés pouvait conduire à un résultat infructueux ou, à tout le moins, approximatif et très peu fiable. En outre, le site internet consacré à la jurisprudence vaudoise réunissait les arrêts du Tribunal cantonal, mais pas les décisions judiciaires de première instance sous réserve des jugements du Tribunal de prud'hommes de l'Administration cantonale. Le recours au logiciel de stockage des arrêts du Tribunal cantonal mis à disposition du public sur Internet ne permettrait donc de se procurer qu'une infime partie des documents auxquels les recourantes demandent à avoir accès (consid. 4c).  
La cour cantonale a relevé que les recourantes demandaient en outre une copie caviardée des décisions et arrêts des tribunaux et des actes de poursuite et de saisie sur salaire liés à la solidarité fiscale des époux prévue par l'art. 14 LI, qui ont été rendus sur une période de onze ans pour les prononcés des tribunaux de première instance (2010 à 2020), respectivement de cinq ans pour les actes de poursuites (2017 à 2021). Cette demande portait sur un nombre extrêmement important de pièces, dont la seule estimation représenterait déjà en soi un travail considérable. La recherche et le recensement sous la forme d'une liste des documents visés, ainsi que leur compilation dans un fichier papier ou informatique en vue de leur transmission, nécessiteraient un travail long et fastidieux, pour lequel les autorités et les offices judiciaires devraient occuper plusieurs collaborateurs pendant une période prolongée. Il serait également nécessaire d'anonymiser l'ensemble de ces actes. Il existait certes des outils informatiques d'assistance à l'anonymisation, qui facilitent grandement ce travail. Mais même en utilisant de tels outils, il conviendrait d'effectuer une relecture minutieuse et attentive de chaque décision judiciaire et de chaque acte de poursuite pour s'assurer qu'aucune donnée personnelle n'a échappé au caviardage et garantir ainsi la protection de la personnalité des parties concernées. Or, l'Ordre judiciaire vaudois ne disposait pas des ressources nécessaires. Au vu du nombre important d'affaires traitées chaque année, la fourniture des documents requis générerait une charge de travail considérable et risquerait de perturber le bon fonctionnement des tribunaux et des offices des poursuites. Pour ces motifs, la cour cantonale a jugé qu'il ne pouvait pas être reproché à la Chargée de communication de l'Ordre judiciaire vaudois d'avoir considéré que le travail occasionné pour répondre aux demandes des recourantes serait disproportionné (consid. 4d). 
 
3.4. Les recourantes tiennent cette appréciation pour arbitraire. Elles font observer que les formulaires de réquisition d'actes de poursuite comportent des rubriques consacrées à la cause de l'obligation et que la solidarité fondée sur l'art. 14 LI y est expressément mentionnée. Le manque de rigueur dans la saisie de ces informations ne saurait leur être opposé tout comme une organisation déficiente des autorités. La cour cantonale n'aurait pas démontré qu'il n'existerait pas de logiciel de stockage des décisions judiciaires de première instance. Elle aurait perdu de vue qu'elles ne demandaient pas une copie caviardée de tous les actes de poursuite rendus par les autorités de poursuite sur une période de 5 ans mais uniquement ceux ayant pour cause de l'obligation la solidarité fiscale fondée sur l'art. 14 LI. Or, elle ne pouvait sans autre investigation retenir que leur nombre dépasserait une dizaine de cas par an, ce qui représenterait une cinquantaine de documents pour la période considérée. Enfin, elle aurait retenu sans le moindre élément de preuve que le travail occasionné par leurs demandes serait manifestement disproportionné.  
 
3.5. Les recourantes requéraient en l'espèce une copie anonymisée des décisions, prononcés et arrêts rendus entre 2010 et 2020 par les tribunaux de première instance, sans autre précision, à l'encontre de personnes séparées ou divorcées appelées en solidarité des dettes fiscales de leur (ex-) conjoint (e) en application de l'art. 14 LI, avec la référence attribuée à chacune des affaires, l'année, les montants (avec intérêts) réclamés, et en précisant le code postal et le sexe des personnes concernées. Elles sollicitaient par ailleurs des dix offices de poursuites du canton de Vaud la liste de tous les actes de poursuite (commandements de payer, ordonnances de séquestre de compte bancaire, de biens immobiliers, mobiliers ou autres biens, hypothèques légales, certificats d'insuffisance de gage, saisies sur salaire, etc) rendus sur une période de dix ans et ayant pour cause de l'obligation la solidarité fiscale fondée sur l'art. 14 LI. La cour cantonale pouvait de manière soutenable admettre que le traitement de ces requêtes, portant sur un très grand nombre de documents, nécessitait de longues recherches et un investissement temporel qui excédait les ressources dont disposaient les tribunaux de première instance et les offices de poursuite concernés lesquels, s'agissant d'autorités administratives (ATF 140 III 175 consid. 4.3; 130 III 285 consid. 5.1; arrêt 5A_106/2012 du 20 septembre 2012 consid. 7.2.2 in RSDIE 2014 p. 127), ne sont pas soumis à une obligation de résultat (cf. arrêt 1C_584/2022 du 20 juin 2023 consid. 5.2). Les recourantes ne font qu'alléguer, sans l'étayer, qu'il existerait un logiciel permettant d'isoler facilement les documents visés par leur demande. Il n'est pas davantage établi que les cas d'application de l'art. 14 LI puissent être isolés sans une recherche dans le texte de l'arrêt. Cela étant, la cour cantonale pouvait sans arbitraire et sans procéder à des investigations approfondies retenir que le traitement des requêtes des recourantes, telles que formulées, occasionnerait un travail trop conséquent tant pour les offices de poursuite que pour les tribunaux de première instance. A tout le moins, la solution retenue se tient dans la ligne de l'arrêt 1C_584/2022 du 20 juin 2023. Dans cette mesure, la question de l'éventuel recours à des moyens supplémentaires de l'administration est sans pertinence.  
Il sera encore relevé que les litiges avec l'administration fiscale au sujet de la responsabilité solidaire des époux selon l'art. 14 al. 1 LI portés devant les tribunaux au niveau cantonal font uniquement l'objet d'arrêts du Tribunal cantonal (cf. art. 199 LI) qui sont, comme déjà exposés ci-dessus (consid. 1), librement accessibles sur Internet. 
 
3.6. En tant qu'il confirme le refus de faire droit aux demandes d'accès des recourantes pour un motif lié à la charge disproportionnée de travail qu'occasionnerait leur traitement pour les autorités concernées, l'arrêt attaqué ne consacre aucune application arbitraire de l'art. 16 LInfo ou violation de la liberté d'information consacrée aux art. 16 al. 3 Cst. et 17 Cst.-VD, évoquée de manière générale et sans autre développement, contrairement aux exigences de motivation requises en vertu de l'art. 106 al. 2 LTF.  
 
4.  
Les recourantes reprochent à la Chargée de communication de l'Ordre judiciaire vaudois de ne pas leur avoir proposé, comme le droit l'y oblige, de reformuler une demande similaire qui engendrerait moins de travail, respectivement de ne pas s'être efforcée de répondre au moins partiellement à leur demande en produisant par exemple une liste de tous les actes de poursuite qui ont comme cause de l'obligation la solidarité fondée sur l'art. 14 LI uniquement pour l'année 2018 avec une copie caviardée de ces actes. Elles dénoncent à ce propos une violation de l'art. 17 al. 2 LInfo qui prescrit que l'organisme sollicité s'efforce de répondre au moins partiellement à la demande. 
Il ne ressort toutefois pas du dossier cantonal que les recourantes auraient soulevé un tel grief devant la Cour de droit administratif et public. Dans la mesure où il ressort du droit cantonal, dont le Tribunal fédéral ne revoit l'application que sous l'angle de l'arbitraire, elles ne sauraient l'invoquer pour la première fois devant la Cour de céans. 
Sur ce point, le recours est irrecevable. 
 
5.  
Les recourantes dénoncent une violation de l'art. 10 par. 1 CEDH en faisant valoir que leurs requêtes satisfaisaient aux quatre conditions posées par la Cour européenne des droits de l'homme pour légitimer l'accès aux informations requises. 
 
5.1. L'art. 10 par. 1 CEDH garantit à toute personne le droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière. L'exercice de cette liberté peut être soumis à des restrictions ou à des sanctions prévues par la loi qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, en particulier pour le maintien de l'ordre public et la protection de la réputation ou des droits d'autrui (art. 10 par. 2 CEDH). La question de savoir si et dans quelle mesure le refus de donner accès à des informations constitue une ingérence dans l'exercice du requérant du droit à la liberté d'expression s'apprécie au cas par cas, à la lumière des circonstances particulières de la cause, et plus spécialement au regard du but de la demande d'information, de la nature des informations recherchées, du rôle du requérant et de la disponibilité des informations demandées (arrêt de la CourEDH dans la cause Magyar Helsinki Bizottság contre Hongrie du 8 novembre 2016, §§ 157 ss; arrêt 1C_59/2020 du 20 novembre 2020 consid. 5.1; voir aussi, FLÜCKIGER/JUNOD, La reconnaissance d'un droit d'accès aux informations détenues par l'Etat fondée sur l'art. 10 CEDH, in: Jusletter 27 février 2017).  
 
5.2. Point n'est besoin d'examiner le bien-fondé des arguments que les recourantes développent aux fins de démontrer que leurs demandes d'accès satisferaient aux critères dégagés par la Cour européenne des droits de l'homme. La cour cantonale ne les a pas rejetées parce qu'elles poursuivaient des buts qui ne mériteraient pas d'être protégés, que les informations requises ne répondaient pas à un critère d'intérêt public ou encore que les documents et informations requises n'étaient pas accessibles. Elle a motivé son refus uniquement par le fait que leur traitement entraînait une charge de travail considérable et disproportionnée pour les autorités judiciaires et les offices de poursuite concernés. Or, la Cour européenne des droits de l'homme n'exclut pas qu'une demande d'informations puisse être refusée pour un tel motif (cf. pour un cas, arrêt de la CourEDH dans la cause Weber contre Allemagne du 6 janvier 2015, requête n° 70287/11, § 26, cité par FLÜCKIGER/JUNOD en note 88). L'art. 10 CEDH n'impose pas une obligation de rassembler l'information requise, en particulier lorsqu'une quantité de travail considérable est en jeu (arrêt de la CourEDH dans la cause Bubon contre Russie du 7 mai 2017, requête n° 63898/09, § 45, qui concernait une demande déposée par un avocat dans le cadre de ses travaux de recherches visant à connaître le nombre d'affaires ouvertes en lien avec certains articles du Code criminel russe entre 2000 et 2009) et la communication des documents peut être refusée si elle fait peser sur les autorités une charge particulièrement lourde (arrêt de la CourEDH dans la cause Cangi contre Turquie, du 29 janvier 2019, requête n° 24973/15, § 36).  
Pour les raisons évoquées plus haut, la cour cantonale pouvait retenir de manière soutenable que cela était le cas. 
Ainsi, les recourantes se prévalent en vain de l'art. 10 par. 1 CEDH pour conclure à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'intimée pour qu'elle fasse droit à leurs demandes. 
 
6.  
Le recours doit par conséquent être rejeté dans la mesure où il est recevable. 
Les associations recourantes ont demandé à être dispensées des frais judiciaires. Elles ont agi au moins partiellement dans l'intérêt de leurs membres et non uniquement par pur idéal, ce qui justifie la perception d'un émolument judiciaire. Au demeurant, le fait de recourir dans un but d'intérêt idéal ne constitue pas un motif suffisant pour renoncer à prélever des frais, mais il peut justifier d'en réduire le montant (arrêts 1C_136/2019 du 4 décembre 2019 consid. 5 et 1C_51/2007 du 22 mai 2008 consid. 6.2). Cela étant, il y a lieu de mettre les frais à hauteur de 1'000 fr. à leur charge solidaire. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge solidaire des recourantes. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux recourantes, à la Chargée de communication de l'Ordre judiciaire vaudois et à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 2 février 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
Le Greffier : Parmelin