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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_598/2023  
 
 
Arrêt du 29 août 2023  
 
Ire Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Denys et Muschietti. 
Greffier : M. Vallat. 
 
Participants à la procédure 
A.A.________, 
représenté par Me Mathias Eusebio, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton du Jura, Le Château, 2900 Porrentruy, 
intimé. 
 
Objet 
Rixe; arbitraire, 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal 
de la République et canton du Jura, Cour pénale, 
du 17 mars 2023 (CP 31 / 2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le mercredi 5 mars 2014, dès 1h20, plusieurs personnes participant aux festivités du Carnaval de U.________ se sont affrontées dans les rues de la vieille ville. Une première échauffourée, qui a essentiellement opposé B.________ aux frères A.A.________ et C.A.________, a éclaté aux abords du pub D.________. Peu après, E.E.________ et F.E.________ se sont regroupés avec B.________. Ils ont tous trois retrouvé les frères A.________ à proximité du pub G.________ et une nouvelle altercation a eu lieu. Tous les protagonistes, à l'exception de F.E.________, ont été blessés, sans que les déclarations contradictoires et fluctuantes des protagonistes et les témoignages recueillis aient permis de déterminer qui leur avait causé leurs blessures respectives.  
 
Par jugement du 17 septembre 2020, la juge pénale du Tribunal de première instance du canton du Jura a notamment déclaré A.A.________ coupable de rixe (à côté de E.E.________, C.A.________ et B.________, cependant que F.E.________, a été libéré de ce chef d'accusation parce qu'il subsistait un doute quant à la nature de sa participation à cette infraction). La juge pénale a notamment condamné A.A.________ à une peine pécuniaire de 50 jours-amende à 90 fr. le jour, avec sursis pendant 2 ans, peine complémentaire à celle prononcée le 19 octobre 2018 par la Cour suprême du canton de Berne, avec suite de frais. Les prétentions civiles ont été renvoyées au juge civil. 
 
B.  
Saisie principalement par A.A.________ et par jonction par E.E.________, par jugement du 17 mars 2023, la Cour pénale du Tribunal cantonal jurassien a rejeté intégralement l'appel et l'appel joint, confirmant notamment la condamnation de A.A.________, pour rixe, à 50 jours-amende à 90 fr. l'un avec sursis pendant 2 ans, sous suite de frais des deux instances.  
 
Ce jugement sur appel, auquel on renvoie dans son intégralité quant aux faits pertinents, retient en particulier, en soulignant que les déclarations de A.A.________ avaient fortement varié durant la procédure et manquaient ponctuellement de crédibilité, qu'il ressortait invariablement de toutes les dépositions des témoins que deux groupes, à tout le moins composés du précité et de son frère, d'une part, et de B.________ et E.E.________, de l'autre, s'étaient affrontés à deux reprises, aucun des deux camps n'ayant voulu "baisser la tête" selon les termes d'un témoin. Elle en a conclu que A.A.________ et E.E.________ avaient tous deux participé activement à une bagarre générale. La cour cantonale s'est, par ailleurs, ralliée à l'appréciation de l'autorité de première instance, selon laquelle en donnant des coups dans le cadre d'une altercation physique réciproque et violente entre trois personnes au moins, A.A.________ et E.E.________ avaient pris une part active à la bagarre qui avait éclaté aux abords du pub D.________ et qui s'était ensuite poursuivie à proximité du pub G.________. Les intéressés ne s'étaient nullement bornés à défendre autrui ou à séparer les protagonistes. 
 
C.  
Par acte du 8 mai 2023, A.A.________ recourt en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement rendu sur appel le 17 mars 2023. Il conclut, avec suite de frais et dépens de la procédure fédérale, à sa réforme dans le sens de son acquittement de l'infraction de rixe, la cause étant renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur le sort des frais et dépens de la procédure cantonale.  
 
Par ordonnance du 25 juillet 2023, le Juge présidant de la Ire Cour de droit pénal a rejeté la requête d'effet suspensif présentée par courrier du 21 juillet 2023. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Invoquant l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.) et la présomption d'innocence (art. 10 CPP, art. 32 al. 1 Cst., art. 14 par. 2 Pacte ONU II et art. 6 par. 2 CEDH), le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir retenu qu'il ne s'était pas limité à repousser une attaque pour défendre son frère devant le premier établissement public. Il n'aurait pas pris part aux faits devant le second. 
 
1.1. Dans le recours en matière pénale, le Tribunal fédéral est lié par les faits retenus par la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), sous les réserves découlant des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de l'arbitraire (art. 9 Cst.; sur cette notion, cf. ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2 p. 81; 143 IV 241 consid. 2.3.1 p. 244) dans la constatation des faits. Il en va ainsi notamment du contenu de la pensée (ATF 135 IV 152 consid. 2.3.2). Le Tribunal fédéral n'examine la violation de droits fondamentaux que si ce moyen est invoqué et motivé par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée (ATF 146 IV 114 consid. 2.1 p. 118). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2 p. 81; 146 IV 114 consid. 2.1 p. 118; 145 IV 154 consid. 1.1 p. 156).  
 
1.2. Dans la mesure où la décision entreprise rappelle la définition de la rixe (art. 133 al. 1 CP) et les principes jurisprudentiels qui s'y appliquent, il suffit d'y renvoyer en soulignant que toute personne qui prend une part active à la bagarre en se livrant elle-même à un acte de violence doit en être considérée comme un participant (ATF 131 IV 150 consid. 2.1 p. 151 et références citées; arrêt 6B_1307/2021 du 9 janvier 2023 consid. 2.1.2), cependant que ne peut se prévaloir du fait justificatif visé par l'art. 133 al. 2 CP (qui suppose la participation mais exclut la punissabilité) que l'adversaire qui n'accepte pas le combat et se borne ainsi à repousser une attaque, à défendre autrui ou à séparer les combattants, soit celui qui participe effectivement à la rixe par son engagement physique, mais qui a pour but exclusif de se protéger, protéger un tiers ou séparer les protagonistes. Il agit alors seulement pour défendre sa personne ou d'autres individus ou pour séparer les adversaires. Par son comportement, il ne provoque ni n'alimente le combat d'une quelconque manière. Il n'augmente pas les risques propres à la rixe voire cherche à les éliminer (ATF 131 IV 150 consid. 2.1 et 2.1.2).  
 
1.2.1. Le recourant conteste que ses déclarations aient fortement varié durant la procédure et manqué ponctuellement de crédibilité. Ses explications n'auraient pas changé quant à son implication dans la première altercation et, compte tenu du temps écoulé entre sa première audition et les suivantes (6 ans), ses premières déclarations devraient être retenues. Il souligne avoir déposé plainte en premier, ce qui constituerait un indice qu'il n'avait rien à se reprocher. Il relève aussi avoir été lourdement frappé à la tête lors de l'épisode près du premier pub (traumatisme crânien, avec fracture de l'os maxillaire droit, fracture non déplacée de l'os ptérygoïdien, emphysème sous cutané de la joue droite, plaie à la lèvre supérieure à droite et une plaie profonde de 7 cm au cuir chevelu). En bref, reprenant le contenu de sa première audition, il objecte que les pièces médicales déposées confirmeraient que, lors de cette première altercation, B.________ avait frappé violemment le frère du recourant à la tête. Ce dernier avait essayé de les séparer sans frapper B.________. Il avait ensuite, alors qu'il était à terre, été frappé violemment au visage par E.E.________. Totalement sonné par la violence de ce choc, il n'avait pu réagir et c'est un ami de la famille qui était venu le chercher pour l'éloigner. Durant cette phase, le recourant, victime, n'avait frappé ni E.E.________ ni B.________ ni son frère, mais n'avait fait que défendre ce dernier en séparant les protagonistes.  
 
Près du second pub, le recourant affirme n'avoir frappé personne ni pris part à la bagarre, ce qu'auraient confirmé plusieurs témoins. À ce moment là, il venait, selon lui, de se faire sauvagement agresser devant le premier établissement public; il avait le visage en sang et souffrait d'un traumatisme crânien. Son état physique ne lui aurait donc pas permis de se battre. 
 
1.2.2. Ces développements procèdent d'une large rediscussion des déclarations du recourant et d'autres preuves (pièces médicales et témoignages) dont le recourant oppose sa propre lecture à celle de la cour cantonale. Ils sont essentiellement appellatoires et, partant, irrecevables dans cette mesure. On peut se restreindre à relever ce qui suit.  
 
1.2.3. Le recourant a lui-même admis lors de sa première audition, le 7 mars 2014 avoir "sauté sur une personne", lui avoir pris la tête sous le bras avant qu'ils ne tombent et, un peu plus tard, avoir donné un coup de poing à un gamin qui l'aurait frappé par derrière. Il n'est pas contestable qu'il a participé activement au combat dans cette mesure. Par ailleurs, hormis sa propre appréciation, l'intéressé ne cite aucun élément du dossier (singulièrement médical) qui soutiendrait que son état physique ensuite de ce premier épisode fût tel qu'il ne lui aurait pas permis de participer au second round. S'il est établi que le recourant a subi diverses lésions des os du crâne (mâchoire et os ptérygoïdien, fracture toutefois non déplacée) ainsi que des dents, soit un traumatisme crânien, ainsi qu'une plaie profonde au cuir chevelu, rien n'indique que sa conscience aurait été altérée, par exemple par un traumatisme crânio-cérébral. Le rapport médical fait, au contraire, état d'un patient conscient et orienté et d'un score de Glasgow de 15/15. Le recourant n'a du reste sollicité ni aide médicale ni intervention d'une ambulance (ou de la police) à l'issue de l'escarmouche initiale. Ses seules affirmations sur son état physique ne suffisent en tout cas pas à démontrer que la décision entreprise serait arbitraire. De surcroît, même si les déclarations de certains témoins doivent être appréciées avec circonspection, en raison du temps écoulé, des circonstances et des liens existant (jugement sur appel consid. 3.1.4), on ne saurait reprocher à la cour cantonale d'avoir conclu, de son appréciation d'ensemble de ces preuves, qu'elles attestaient de la participation active du recourant aux deux échauffourées. En particulier, entendu trois semaines après les faits, le témoin H.________, qui travaillait à proximité et a vu le second épisode, a déclaré avoir observé le recourant et son frère se battre avec E.E.________ et leur avoir dit qu'il allait appeler leur père. Il a confirmé que tous avaient des bouts de bois dans les mains (procès-verbal d'audition H.________ du 24 mars 2014, dossier cantonal, p. A.1.47). Dans le même sens, le témoin I.________ a confirmé avoir vu le recourant "se battre" (procès-verbal d'audition I.________ du 31 mars 2014, dossier cantonal, p. A.1.51). Que le témoin J.________ n'ait pas vu le recourant frapper B.________ devant le second pub et que le recourant se soit empressé de déposer plainte n'y change rien. Il s'ensuit que le Tribunal fédéral n'a pas de raison de s'écarter de l'état de fait de la décision entreprise en tant qu'elle constate que le recourant a eu un comportement actif et combatif et qu'il ne s'est pas borné à défendre autrui ou à séparer les protagonistes, constatation de fait qui lie elle aussi la cour de céans et exclut l'application de l'art. 133 al. 2 CP.  
 
1.2.4. De surcroît, la décision entreprise retient que la bagarre a éclaté aux abords du premier pub et s'est poursuivie à proximité du second (jugement sur appel consid. 4.5). On comprend ainsi que la cour cantonale a considéré l'ensemble des faits comme une seule et même infraction. Le recourant ne développe aucune critique en fait ou en droit sur ce point et, compte tenu de la proximité temporelle et de la connexité des faits, cette approche n'apparaît pas critiquable. Il s'ensuit également que le recourant ne peut rien déduire en sa faveur de ses développements relatifs à l'application de l'art. 133 al. 2 CP en relation avec son seul comportement devant le premier pub.  
 
2.  
Pour le surplus, le recourant ne formule aucune critique, même implicite, quant à la fixation de la peine dans son principe, ses modalités ou sa quotité. Il suffit de renvoyer à la décision cantonale qui n'apparaît entachée d'aucun vice patent relatif à l'application du droit fédéral (cf. ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 140 III 86 consid. 2; 141 II 307 consid. 6.8; en matière pénale: v. p. ex.: arrêt 6B_307/2023 du 13 juillet 2023 consid. 2.1). 
 
3.  
Le recourant succombe. Il supporte les frais de la procédure (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour pénale, et à Me K.________, V.________. 
 
 
Lausanne, le 29 août 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
Le Greffier : Vallat