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Ecriture agrandie
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_906/2023  
 
 
Arrêt du 15 mai 2024  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président, Hartmannn et De Rossa. 
Greffière : Mme de Poret Bortolaso. 
 
Participants à la procédure 
A.A.________, 
représenté par Me Romain Canonica, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
B.A.________, 
représentée par Me Alexander Troller, avocat, 
intimée. 
 
Objet 
exécution forcée d'un jugement, obligation de renseigner entre époux ( art. 170 CC), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre civile, du 20 octobre 2023 (C/24542/2022, ACJC/1426/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Les parties, mariées en 1999, ont deux enfants actuellement majeurs; elles s'opposent dans le contexte d'une procédure de divorce, initiée le 23 novembre 2018 par A.A.________. 
 
B.  
Se fondant sur l'art. 170 CC, B.A.________ a requis la production de certaines pièces de la part de son époux et a notamment conclu à ce que celui-ci soit astreint à lui verser 501'513 fr. 70 à titre de liquidation du régime matrimonial, sous réserve d'amplification. 
Par jugement du 23 février 2022, le Tribunal de première instance du canton de Genève (ci-après: le tribunal) a ordonné à l'époux de produire différents relevés et documents dans un délai échéant au 23 mars 2022, dont ses déclaration fiscale et avis de taxation 2018 (ch. 1.l du dispositif) - seul point litigieux dans le contexte de la présente procédure. 
Statuant le 23 août 2022 sur appel de l'épouse, la Cour de justice a complété le premier jugement en ordonnant à l'époux de produire encore d'autres documents - qui ne sont pas concernés par le présent litige. 
Le 14 octobre 2022, notamment en lien avec le ch. 1.l du dispositif du premier jugement, A.A.________ a produit un bordereau de taxation 2018, dont certains éléments sont caviardés, soit ceux en lien avec le montant des impôts dus et restant à payer, la fortune mobilière de l'époux et les déductions sociales sur ladite fortune ainsi que le montant du rachat de la prévoyance professionnelle. 
 
C.  
Le 17 novembre 2022, B.A.________ a déposé devant le tribunal une requête en exécution de l'arrêt du 23 août 2022, respectivement du jugement du 23 février 2022 que cet arrêt confirmait, s'agissant entre autres des déclarations fiscales et avis de taxation 2018. 
Par jugement du 6 juillet 2023, le tribunal a ordonné dite exécution, dans un délai au 31 août 2023. Statuant le 20 octobre 2023 sur le recours déposé par A.A.________, la cour cantonale a confirmé l'ordre d'exécution dans un délai d'un mois dès la notification de son arrêt. 
 
D.  
Agissant le 30 novembre 2023 par la voie du recours en matière civile au Tribunal fédéral, A.A.________ (ci-après: le recourant) conclut principalement à ce qu'il soit constaté qu'il a valablement exécuté le ch. 1.l du dispositif du jugement du tribunal du 23 février 2022, confirmé par l'arrêt de la cour cantonale du 23 août 2022 et, cela fait, à ce que l'arrêt attaqué soit annulé en ce qui concerne sa condamnation à son exécution. Subsidiairement, le recourant sollicite le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants et précise qu'en tout état de cause, les frais et dépens doivent être mis à la charge de B.A.________ (ci-après: l'intimée), celle-ci étant déboutée de toute autre ou contraire conclusion. 
Des déterminations n'ont pas été demandées. 
 
E.  
L'effet suspensif a été accordé au recours par ordonnance présidentielle du 22 décembre 2023. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue sur recours (art. 309 al. 1 let. a et 319 ss CPC) par le tribunal supérieur du canton de Genève (art. 75 al. 1 et 2 LTF) au sujet de l'exécution d'une décision de nature civile, rendue en Suisse au sens des art. 335 ss CPC (art. 72 al. 2 let. b ch. 1 LTF; arrêt 4A_542/2022 du 19 septembre 2023 consid. 1 et la référence). La demande de renseignements dont l'exécution est requise a été formulée dans le contexte du divorce des parties, singulièrement de la liquidation de leur régime matrimonial; il s'agit ainsi d'une cause de nature pécuniaire, dont la valeur litigieuse atteint ici 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF). Le recourant, qui a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 let. a et b LTF), a agi à temps (art. 100 al. 1 LTF). 
 
2.  
 
2.1. La décision sur le fond à exécuter n'est pas une mesure provisionnelle, en sorte que les motifs de recours contre la décision sur l'exécution ne sont pas limités (arrêt 5A_455/2022 du 9 novembre 2022 consid. 3.1 et la référence citée). Le recours en matière civile peut donc être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4 et la référence). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée par le recourant ("principe d'allégation", art. 106 al. 2 LTF; ATF 148 I 127 consid. 4.3; 146 III 303 consid. 2; 146 IV 114 consid. 2.1).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ceux-ci ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 144 II 246 consid. 6.7; 143 I 310 consid. 2.2 et la référence), doit satisfaire au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.1).  
 
3.  
Le recourant se prévaut de la violation de l'art. 341 al. 3 CPC; il invoque dans cette perspective l'appréciation manifestement inexacte et incomplète des faits. 
 
3.1. Conformément à la jurisprudence relative à l'art. 336 CPC, la décision dont l'exécution est requise doit décrire l'obligation à exécuter avec une précision suffisante sous l'angle matériel, local et temporel, de façon à ce que le juge chargé de l'exécution n'ait pas à élucider lui-même ces questions (arrêts 4A_542/2022 du 19 septembre 2023 consid. 3.1; 5A_70/2021 du 18 octobre 2021 consid. 4.1 et les références). À supposer que le dispositif de la décision en cause ne soit pas suffisamment détaillé à cet égard, il pourra toutefois être concrétisé à la lumière des considérants (arrêts 5A_70/2021 précité loc. cit.; 4A_287/2020 du 24 mars 2021 consid. 2.2.2; cf. ATF 143 III 420 consid. 2.2).  
Le juge de l'exécution est lié par le contenu de la décision à exécuter (arrêt 4A_287/2020 précité loc. cit. et les références citées); il doit déterminer si le débiteur a respecté les obligations qui lui ont été imposées dans le jugement à exécuter et ne peut pas en fixer l'étendue, dans la mesure où celle-ci ne ressort pas du jugement à exécuter (arrêt 4A_287/2020 précité loc. cit. et les références).  
 
3.2. La cour cantonale a retenu que, dans le jugement du 23 février 2022 dont l'exécution était requise par l'intimée, le tribunal prescrivait la production de la déclaration fiscale et de l'avis de taxation 2018 du recourant. Cette injonction, que le juge de l'exécution n'était pas autorisé à revoir, était formulée sans restriction, en sorte qu'en produisant un bordereau de taxation 2018 dont certains éléments étaient caviardés, le recourant n'y avait pas satisfait.  
 
3.3. Le recourant estime en revanche s'être exécuté. Il soutient que le tribunal n'avait ordonné la production des documents fiscaux précités qu'à la seule fin de déterminer les déductions qu'il avait effectuées pour charges d'enfants en 2018, ce que corroboraient les écritures de sa partie adverse ainsi qu'un procès-verbal d'audience du 8 novembre 2021, mais qu'omettait pourtant de constater la cour cantonale. En tant que la pièce qu'il avait produite permettait de pleinement déterminer les déductions précitées et que les éléments caviardés ne portaient que sur des actifs étrangers à la liquidation du régime matrimonial, l'intimée ne disposait d'aucun intérêt digne de protection à réclamer la déclaration fiscale 2018 dépourvue de caviardages. La cour cantonale avait ainsi violé l'art. 341 al. 3 CPC en ordonnant l'exécution du ch. 1.l du dispositif du jugement du 23 février 2022.  
 
3.4. L'on comprend certes à la lecture de cette dernière décision que l'intimée paraît réclamer la production des documents fiscaux aux fins de connaître les déductions opérées en 2018 par le recourant en lien avec leurs enfants (let. B., ch. 9, p. 10). Le jugement - que ce soit au terme du passage qui vient d'être cité que dans son dispositif - ne limite cependant aucunement la production de ces documents à cette seule perspective, ordonnant au recourant de produire "ses déclarations fiscales et avis de taxation 2018" sans restriction. De même, le procès-verbal d'audience du 8 novembre 2021, auquel se réfère le recourant pour justifier son caviardage, fait état de son acceptation à produire sa déclaration fiscale 2018, sans émettre de réserves particulières quant à certaines informations qui pourraient y figurer. Dans cette mesure, le recourant ne peut prétendre avoir satisfait à l'injonction qui lui a été faite en produisant un document incomplet. S'il tenait à garder confidentielles certaines informations en ressortant, il lui incombait alors de s'opposer au libellé du dispositif du jugement rendu le 23 février 2022, ce qu'il n'a pas fait. Incontestablement exécutoire, celui-ci ne peut en effet plus être remis en cause sur ce point.  
 
4.  
En définitive, le recours est rejeté aux frais de son auteur (art. 66 al. 1 LTF). L'intimée, qui a conclu sans succès au rejet de la requête d'effet suspensif, n'a droit à aucun dépens (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre civile. 
 
 
Lausanne, le 15 mai 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : de Poret Bortolaso