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Ecriture agrandie
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
8C_559/2023  
 
 
Arrêt du 19 février 2024  
 
IVe Cour de droit public  
 
Composition 
M. et Mmes les Juges fédéraux Wirthlin, Président, 
Heine et Viscione. 
Greffier : M. Ourny. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par M e Philippe Nordmann, avocat, recourante, 
 
contre  
 
SWICA Assurances SA, 
Service juridique, Römerstrasse 37, 8401 Winterthur, 
intimée. 
 
Objet 
Assurance-accidents (traumatisme crânio-cérébral), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 11 août 2023 (AA 78/22 - 90/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, née en 1970, a travaillé comme vendeuse pour le compte de B.________ dès novembre 2006. Le 22 décembre 2020, elle a été victime d'un accident de la circulation. Selon le rapport de police y afférent, elle s'est assoupie un court instant alors qu'elle circulait sur l'autoroute, perdant ainsi le contrôle de son véhicule. Celui-ci a effectué un tête-à-queue, a heurté violemment le dispositif central de sécurité puis a réalisé d'autres tête-à-queue, avant de s'immobiliser. Le lendemain de l'accident, les diagnostics de contusions et de contractures paravertébrales post-traumatiques, sans complication autre au bilan clinique et radiologique, ont été posés. SWICA Assurances SA (ci-après: SWICA), alors assureur-accidents de l'assurée, a pris en charge le cas. En février 2021, le docteur C.________, médecin praticien, a fait état de douleurs cervico-dorso-lombaires, de céphalées, de vertiges, d'insomnie et de douleurs à l'épaule gauche avec fourmillement, dans le cadre d'un syndrome post-commotionnel. En mars 2021, la doctoresse D.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, a diagnostiqué un état de stress post-traumatique lié à l'accident. Par la suite, l'assurée a subi plusieurs IRM (Imagerie par Résonance Magnétique) et d'autres examens médicaux, pratiqués notamment par la doctoresse E.________. Dans un rapport non daté reçu par SWICA le 21 décembre 2021, cette spécialiste en neurologie a estimé que les lésions somatiques structurelles consécutives à l'accident étaient guéries. 
Par décision du 1 er février 2022, confirmée sur opposition le 7 juin 2022, SWICA a mis un terme à ses prestations au 20 décembre 2021, au motif que les troubles somatiques étaient guéris et qu'il n'y avait pas de lien de causalité adéquate entre les affections psychiques et l'accident du 22 décembre 2020.  
 
B.  
Saisie d'un recours contre la décision sur opposition, la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud l'a rejeté par arrêt du 11 août 2023. 
 
C.  
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt, en concluant à son annulation et au renvoi de la cause à la cour cantonale, subsidiairement à l'intimée, pour complément d'instruction et nouvelle décision au sens des considérants. 
L'intimée conclut au rejet du recours. La juridiction cantonale et l'Office fédéral de la santé publique ont renoncé à se déterminer. La recourante a répliqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le litige porte sur le point de savoir si la juridiction cantonale a violé le droit fédéral en confirmant la décision sur opposition du 7 juin 2022, par laquelle l'intimée a mis fin à ses prestations en faveur de la recourante au 20 décembre 2021.  
 
2.2. Selon l'art. 6 al. 1 LAA, les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Du catalogue des prestations découlent notamment le droit au traitement médical (art. 10 LAA), le droit à une indemnité journalière (art. 16 et 17 LAA), le droit à une rente d'invalidité (art. 18 ss LAA) ainsi que le droit à une indemnité pour atteinte à l'intégrité (art. 24 et 25 LAA).  
 
2.3. Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 3 LTF); le recours peut alors porter sur toute constatation incomplète ou erronée des faits (art. 97 al. 2 LTF). Lorsque le jugement entrepris porte à la fois sur des prestations en espèces et en nature de l'assurance-accidents, le Tribunal fédéral constate avec un plein pouvoir d'examen les faits communs aux deux objets litigieux et se fonde sur ces constatations pour statuer, en droit, sur ces deux objets; en revanche, les faits qui ne seraient pertinents que pour statuer sur le droit aux prestations en nature ne sont revus que dans les limites définies aux art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF (arrêt 8C_211/2023 du 13 septembre 2023 consid. 2.2 et l'arrêt cité).  
En l'espèce, l'intimée a nié le droit à toute prestation, en nature et en espèces, dès le 21 décembre 2021, de sorte que le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par la juridiction précédente s'agissant des faits pertinents pour les prestations en espèces et de ceux communs aux deux types de prestations (en nature et en espèces). 
 
3.  
 
3.1. Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose notamment, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette exigence est remplie lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout ou ne serait pas survenu de la même manière (ATF 148 V 356 consid. 3; 148 V 138 consid. 5.1.1; 142 V 435 consid. 1). Le droit à des prestations de l'assurance-accidents suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate entre l'accident et l'atteinte à la santé. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de manière générale favorisée par une telle circonstance (ATF 148 V 356 consid. 3; 143 II 661 consid. 5.1.2; 139 V 156 consid. 8.4.2; 129 V 177 consid. 3.2).  
 
3.2. Lorsque des symptômes consécutifs à un accident ne sont pas objectivables du point de vue organique, il y a lieu d'examiner le caractère adéquat du lien de causalité en se fondant sur le déroulement de l'événement accidentel, compte tenu, selon les circonstances, de certains critères en relation avec cet événement (ATF 134 V 109 consid. 2.1; 117 V 359 consid. 6, 369 consid. 4; 115 V 133 consid. 6, 403 consid. 5; arrêts 8C_867/2015 du 20 avril 2016 consid. 4.2; 8C_445/2013 du 27 mars 2014 consid. 4.3.1). En présence de troubles psychiques apparus après un accident, on examine les critères de la causalité adéquate en excluant les aspects psychiques (ATF 140 V 356 consid. 3.2; 134 V 109 consid. 2.1; 115 V 133 consid. 6c/aa, 403 consid. 5c/aa). En cas de traumatisme de type "coup du lapin" à la colonne cervicale, de traumatisme analogue ou de traumatisme crânio-cérébral sans preuve d'un déficit fonctionnel organique, l'examen se fait en revanche sur la base de critères particuliers n'opérant pas de distinction entre les éléments physiques et psychiques des atteintes, lorsque les symptômes attribuables de manière crédible au tableau clinique typique (maux de têtes diffus, vertiges, troubles de la concentration et de la mémoire, nausées, fatigabilité, troubles de la vue, irritabilité, dépression, modification du caractère, etc.) se trouvent au premier plan (ATF 134 V 109 consid. 10.3; 117 V 359 consid. 6a); toutefois, lorsque les troubles psychiques constituent une atteinte à la santé distincte et indépendante du tableau clinique caractéristique habituellement associé aux traumatismes en cause, il y a lieu de se fonder sur les critères applicables en cas de troubles psychiques consécutifs à un accident, c'est-à-dire en excluant les aspects psychiques (ATF 134 V 109 précité consid. 9.5; 127 V 102 consid. 5b/bb).  
 
4.  
Les juges cantonaux ont retenu qu'en sus des douleurs cervico-dorso-lombaires consécutives à l'accident, la recourante avait rapidement présenté le tableau clinique typique d'un syndrome post-commotionnel, avec notamment des céphalées, des vertiges, une sensation de tangage, des insomnies, une irritabilité, des troubles de la concentration et de la mémoire et, parfois, des nausées. Sur ces troubles était venu s'ajouter un syndrome de stress post-traumatique, avec principalement des flash-back réguliers, des cauchemars, des troubles du sommeil, une tendance à l'évitement, une hypersensibilité psychique, une hypervigilance et un sentiment de détresse. Des angoisses importantes, une réaction agoraphobique et une sensibilité au bruit étaient également associées à ce trouble. En l'absence d'autres explications objectives à l'origine de la symptomatologie, il n'y avait pas lieu de réfuter l'existence d'un rapport de causalité naturelle entre, d'une part, le syndrome post-commotionnel, les troubles neuropsychologiques qui lui étaient associés et l'état de stress post-traumatique et, d'autre part, l'accident du 22 décembre 2020. A cet égard, la doctoresse E.________ avait nié, après avoir multiplié les examens spécifiques, que la symptomatologie ait pu avoir une cause neurologique. En outre, aucune fracture vertébrale ni lacération splénique n'avait été constatée ensuite de l'accident, et les troubles cervicaux mis en évidence par une IRM de la colonne vertébrale étaient d'origine dégénérative. Aussi, la recourante avait développé de manière précoce, en sus des symptômes caractéristiques d'un tableau clinique typique d'un syndrome post-commotionnel, des problèmes psychiques qui constituaient une atteinte à la santé distincte et indépendante du traumatisme initial. Cela justifiait l'application des critères en cas de troubles psychiques consécutifs à un accident (cf. consid. 3.2 in fine supra). Par conséquent, il n'y avait pas lieu de donner suite à la requête de la recourante tendant à la mise en oeuvre d'une expertise neurologique et neuropsychologique, qui s'avérait superflue. Considérant que l'accident était de gravité moyenne stricto sensu, les premiers juges ont retenu qu'aucun des critères jurisprudentiels n'était réalisé, de sorte que les troubles psychiques de la recourante n'étaient pas en relation de causalité adéquate avec l'accident. L'intimée était ainsi fondée à mettre un terme à ses prestations au 20 décembre 2021. 
 
5.  
La recourante soutient avoir souffert d'un traumatisme cérébral, avec perte de connaissance et vraisemblablement des lésions cérébrales sous forme de lésions axonales diffuses. Le tribunal cantonal aurait pourtant écarté à tort tout traumatisme cérébral, centrant le débat sur les suites psychiques de l'accident, alors qu'elle se serait essentiellement plainte des troubles neuropsychologiques causés par ce traumatisme, lequel aurait été diagnostiqué du reste par la doctoresse E.________. La recourante reproche par ailleurs aux juges précédents d'avoir rejeté de manière arbitraire et non motivée sa requête d'expertise, sollicitée en vue notamment de détecter d'éventuelles lésions cérébrales, plus singulièrement des lésions axonales diffuses, pas forcément visibles sur des IRM ordinaires. 
 
6.  
Quoi qu'en dise la recourante, les juges cantonaux ont clairement retenu que celle-ci avait souffert d'un syndrome post-commotionnel causé par l'accident du 22 décembre 2020. Ce traumatisme a été diagnostiqué, de manière concordante, par la doctoresse E.________ et le docteur C.________. Il ne souffre d'aucune discussion. Les premiers juges ont en outre détaillé les troubles neuropsychologiques, associés à ce syndrome, qui ont touché la recourante. Selon les avis médicaux au dossier, en particulier celui de la doctoresse E.________, dont se prévaut la recourante, les lésions somatiques consécutives à l'accident étaient toutefois guéries au plus tard le 21 décembre 2021. Cette spécialiste en neurologie a précisé qu'aucune lésion n'avait été détectée sur les imageries réalisées et qu'il était impossible de mettre en évidence, par le biais d'examens, la douleur chronique de la recourante. Précédemment, elle avait indiqué en juin 2021 que l'incapacité de travail ne trouvait pas son origine dans une cause neurologique, mais psychiatrique. La recourante ne se prévaut d'aucun autre avis médical donnant à penser que des troubles somatiques - causés par un traumatisme crânien - auraient perduré au-delà du 20 décembre 2021. En ce qui concerne plus précisément les possibles lésions axonales diffuses dont fait mention la recourante, force est de constater qu'aucun médecin n'a évoqué, même à titre de simple hypothèse, l'existence de telles lésions, ni proposé ou mis en place des examens permettant de les déceler. L'arrêt 8C_120/2023 du 11 octobre 2023, cité par la recourante, ne lui est d'aucun secours. Dans cette affaire, à l'inverse de celle qui nous occupe, un médecin avait fait état d'une lésion axonale diffuse, de sorte que les juges fédéraux ont - en présence d'avis médicaux divergents sur l'évolution des symptômes - ordonné une expertise médicale, portant notamment sur le lien de causalité naturelle entre cette lésion et l'accident (cf. consid. 6.1 et 6.2). 
Vu les avis concordants des médecins, notamment d'une neurologue, et en l'absence de tout indice allant dans le sens de la persistance de troubles somatiques au-delà du 20 décembre 2021, l'instance précédente n'a pas versé dans l'arbitraire en ne donnant pas suite à la requête de la recourante tendant à la mise en oeuvre d'une expertise neurologique et neuropsychologique (cf. ATF 145 I 167 consid. 4.1; 144 II 427 consid. 1.3; 141 I 60 consid. 3.3). En outre, le tribunal cantonal a motivé de façon suffisante le rejet de cette réquisition de preuve, sans violation de son obligation de motiver (cf. arrêt 8C_376/2023 du 29 novembre 2023 consid. 8.2.1 et les arrêts cités). 
Pour le reste, la juridiction cantonale a, au vu des éléments médicaux, retenu à juste titre que les affections psychiques développées par la recourante étaient distinctes et indépendantes des troubles propres au syndrome post-commotionnel, appliquant ainsi à bon droit les critères jurisprudentiels en cas de troubles psychiques (cf. consid. 3.2 in fine supra). A cet égard, la recourante ne conteste pas qu'aucun de ces critères n'est rempli et que le lien de causalité adéquate entre ses atteintes psychiques et l'accident doit être nié. 
 
7.  
Il s'ensuit que le recours, mal fondé, doit être rejeté. La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud et à l'Office fédéral de la santé publique. 
 
 
Lucerne, le 19 février 2024 
 
Au nom de la IVe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Wirthlin 
 
Le Greffier : Ourny