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Ecriture agrandie
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
7B_250/2024  
 
 
Arrêt du 30 avril 2024  
 
IIe Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Abrecht, Président, 
Koch et Kölz, 
Greffier: M. Tinguely. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Robert Assaël, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, 
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy. 
 
Objet 
Complément d'expertise (recours irrecevable), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours, du 26 janvier 2024 
(ACPR/66/2024 - P/1715/2018). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 25 janvier 2018, A.________ a déposé une plainte pénale pour lésions corporelles par négligence auprès de Ministère public de la République et canton de Genève. 
En substance, il reprochait au personnel soignant de l'Hôpital B.________, à U.________, de ne pas lui avoir prodigué de traitement convenable et adapté lors de ses différentes prises en charge entre le 25 octobre 2017 et le 4 novembre 2017 ainsi que d'avoir mal effectué un geste médical sur sa personne, soit la pose d'une sonde urinaire, l'ensemble de ces négligences ayant selon lui conduit à la dégradation sérieuse de son état de santé tant physique que psychologique. 
 
B.  
 
B.a. Le 26 septembre 2023, le Ministère public a ordonné un complément d'expertise à celle qui avait été initialement réalisée le 27 octobre 2021. Il a désigné à cette fin les Prof. C.________ et D.________ ainsi que la Dre E.________.  
 
B.b. Par arrêt du 26 janvier 2024, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice genevoise a partiellement admis le recours formé par A.________ contre l'ordonnance du 26 septembre 2023, l'a annulée et a renvoyé la cause au Ministère public pour qu'il ordonne aux experts désignés de s'adjoindre des médecins spécialistes, à savoir un urologue et un néphrologue, idéalement basés hors du canton de Genève, et dont les noms devront être soumis préalablement à A.________, afin qu'il puisse faire valoir ses observations.  
 
C.  
A.________ interjette un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 26 janvier 2024 en concluant à sa réforme en ce sens qu'il soit enjoint au Ministère public d'ordonner une contre-expertise et de la confier à un médecin spécialiste FMH en urologie et à un médecin spécialiste FMH en néphrologie, basés hors du canton de Genève. Il sollicite l'octroi de l'effet suspensif. 
Invité à se déterminer, le Ministère public conclut au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité. La Chambre pénale de recours renonce à formuler des observations et se réfère aux considérants de son arrêt. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 149 IV 9 consid. 2). Toutefois, lorsque les conditions de recevabilité ne ressortent pas à l'évidence de la décision attaquée ou du dossier, le recourant est tenu d'exposer en quoi elles sont réunies, sous peine d'irrecevabilité (art. 42 al. 2 LTF; ATF 147 IV 453 consid. 1.4.8; 141 IV 1 consid. 1.1).  
 
1.2. Par l'arrêt attaqué, la cour cantonale a ordonné au Ministère public de mettre en oeuvre un complément d'expertise, les experts désignés devant dans ce cadre s'adjoindre les services de médecins spécialisés. Elle a pour le surplus confirmé le rejet de la requête du recourant tendant à la mise en oeuvre d'une contre-expertise.  
L'arrêt attaqué ne met ainsi pas pas un terme à la procédure pénale et le recours en matière pénale n'est dès lors recevable qu'aux conditions de l'art. 93 al. 1 LTF, soit si la décision attaquée peut causer un préjudice irréparable (art. 93 al. 1 let. a LTF) ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (art. 93 al. 1 let. b LTF). Cette dernière hypothèse n'entre cependant généralement pas en considération en matière pénale (ATF 144 IV 127 consid. 1.3; 141 IV 284 consid. 2; 133 IV 288 consid. 3.2). 
 
1.3. Un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF se rapporte à un dommage de nature juridique qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision favorable au recourant (ATF 144 IV 321 consid. 2.3; 141 IV 284 consid. 2.2). Cette réglementation est fondée sur des motifs d'économie de procédure; en tant que cour suprême, le Tribunal fédéral ne doit en principe s'occuper qu'une seule fois d'un procès et cela seulement lorsqu'il est certain que le recourant subit effectivement un dommage définitif (ATF 139 IV 113 consid. 1; arrêt 7B_49/2022 du 23 octobre 2023 consid. 1.3).  
De jurisprudence constante, les décisions relatives à l'administration des preuves ne sont en principe pas de nature à causer un dommage irréparable puisqu'il est normalement possible, à l'occasion d'un recours contre la décision finale, d'obtenir que la preuve administrée à tort soit écartée du dossier ou d'obtenir l'administration de la preuve refusée à tort, en particulier si elle devait avoir été écartée pour des raisons non pertinentes ou en violation des droits fondamentaux du recourant (ATF 141 III 80 consid. 1.2; 136 IV 92 consid. 4.1; arrêts 1B_53/2022 du 14 juillet 2022 consid. 2.3; 1B_278/2021 du 28 mai 2021 consid. 2). Cette règle comporte toutefois des exceptions. Il en va notamment ainsi lorsque le refus d'instruire porte sur des moyens de preuve qui risquent de disparaître et qui visent des faits décisifs non encore élucidés, ou encore quand la sauvegarde de secrets est en jeu (arrêts 1B_53/2022 du 14 juillet 2022 consid. 2.3; 1B_234/2019 du 6 février 2020 consid. 2.3 et les arrêts cités). 
De même, en général, une décision ordonnant le renvoi de la cause à l'instance inférieure n'est pas susceptible de causer un préjudice irréparable aux parties, le seul allongement de la durée de la procédure ou le seul accroissement des frais de celle-ci n'étant pas considérés comme des éléments constitutifs d'un tel dommage (ATF 147 III 159 consid. 4.1; 144 III 475 consid. 1.2). Il en va différemment lorsque le justiciable fait valoir un retard injustifié à statuer sur le fond constitutif d'un déni de justice formel, notamment lors d'un renvoi au ministère public pour des mesures d'instruction que le tribunal de première instance paraîtrait à même de mettre en oeuvre (ATF 141 IV 39 consid. 1.6.2). Il faut toutefois que le grief fasse apparaître un risque sérieux de violation du principe de la célérité (ATF 138 III 190 consid. 6; arrêt 7B_573/2023 du 26 février 2024 consid. 2.2.2). 
 
1.4. En l'espèce, en tant que le recourant persiste à solliciter la mise en oeuvre d'une contre-expertise, il n'apparaît pas qu'il soit empêché de requérir à nouveau l'administration d'un tel moyen de preuve à un stade ultérieur de la procédure pénale, ni qu'il lui serait, le cas échéant, impossible de contester l'éventuel refus qui lui serait signifié en faisant usage des voies de droit ouvertes contre la décision finale.  
Au surplus, en tant que, pour justifier l'existence d'un risque de préjudice irréparable, le recourant se plaint d'un déni de justice (art. 29 al. 1 Cst.) ainsi que d'une violation du principe de la célérité (art. 5 al. 1 CPP), arguant sans plus de détails que, depuis janvier 2018, le Ministère public n'aurait procédé qu'à "très peu d'actes d'instruction", il n'y a, en l'état, rien d'évident à considérer que la contre-expertise requise serait de nature à accélérer le cours de la procédure, bien au contraire. 
 
1.5. Dès lors, à défaut pour le recourant d'avoir démontré que l'arrêt attaqué constituait une décision attaquable au regard de l'art. 93 al. 1 LTF, le recours doit être déclaré irrecevable.  
 
2.  
L'irrecevabilité du recours rend sans objet la requête d'effet suspensif que le recourant avait assortie à son recours. 
 
3.  
Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
La requête d'effet suspensif est sans objet. 
 
3.  
Les frais judiciaires, fixés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.  
La présente ordonnance est communiquée au recourant, au Ministère public de la République et canton de Genève et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours. 
 
 
Lausanne, le 30 avril 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Abrecht 
 
Le Greffier : Tinguely