Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
7B_271/2023, 7B_445/2023
Arrêt du 1er février 2024
IIe Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Abrecht, Président,
Koch, Hurni, Kölz et Hofmann,
Greffier : M. Tinguely.
Participants à la procédure
7B_271/2023
A.________ Ltd,
représentée par Maîtres Patrick Hunziker, Romain Canonica, Dominique Lecocq et Vincent Jeanneret, avocats,
recourante,
contre
1. Ministère public de la République et canton de Genève,
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy,
2. B.________,
3. F.________ Ltd Corp.,
4. Fondation C.________,
toutes les trois représentées par Maîtres Grégoire Mangeat et Yaël Hayat, avocats,
5. D.________,
6. E.________ Ltd,
toutes les deux représentées par Me Guy Stanislas, avocat,
intimés,
et
7B_445/2023
Ministère public de la République et canton de Genève,
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy,
recourant,
contre
1. B.________,
2. F.________ Ltd Corp.,
3. Fondation C.________,
toutes les trois représentées par Maîtres Grégoire Mangeat et Yaël Hayat, avocats,
4. D.________,
5. E.________ Ltd,
toutes les deux représentées par Me Guy Stanislas, avocat,
6. A.________ Ltd, représentée par Maîtres Patrick Hunziker, Romain Canonica, Dominique Lecocq et Vincent Jeanneret, avocats,
intimées.
Objet
7B_271/2023
Blanchiment d'argent aggravé; faux dans les titres; maintien de séquestres et de la confiscation des avoirs; conclusions civiles; arbitraire,
7B_445/2023
Blanchiment d'argent aggravé; faux dans les titres; maintien de séquestres et de la confiscation des avoirs; arbitraire; droit d'être entendu,
recours contre l'arrêt de la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 28 novembre 2022
(P/17122/2016 - AARP/13/2023).
Faits :
A.
Par jugement du 9 décembre 2019, le Tribunal correctionnel de la République et canton de Genève a condamné B.________ pour blanchiment d'argent aggravé (art. 305bis ch. 2 let. c et ch. 3 CP) et faux dans les titres (art. 251 CP) à une peine privative de liberté de 30 mois, dont 15 mois avec sursis pendant 3 ans, ainsi qu'à une peine pécuniaire de 250 jours-amende, à 300 fr., avec sursis pendant 3 ans. B.________ a en outre été astreinte à payer à A.________ Ltd la somme de 34'995'320 EUR, avec intérêts à 5% l'an dès le 9 décembre 2019, à titre de réparation du dommage matériel, et de 498'711 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 9 décembre 2019, à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure. Le Tribunal correctionnel a en outre ordonné la restitution à A.________ Ltd des 327'600 actions de G.________ SA figurant sur le compte n° 1111 ouvert au nom de F.________ Ltd Corp. auprès de la banque H.________, à Genève, la confiscation du solde des avoirs déposés sur ce compte et le maintien des séquestres ainsi que la confiscation des avoirs figurant sur divers comptes ouverts auprès de différents établissements bancaires au nom de I.________, J.________ SA PCP, B.________, E.________ Ltd, D.________, la Fondation C.________ et F.________ Ltd. Le Tribunal correctionnel a également alloué à A.________ Ltd, à concurrence des dommages-intérêts fixés dans le jugement, les montants séquestrés sur les comptes bancaires évoqués ci-avant et l'a renvoyé à agir par la voie civile pour le surplus. Il a prononcé contre B.________, en faveur de l'État de Genève, une créance compensatrice d'un montant de 5'179'638 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 9 décembre 2019. Il a enfin statué sur les frais de la procédure.
B.
Par arrêt du 28 novembre 2022, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise a statué sur les appels formés par B.________, D.________, A.________ Ltd, F.________ Ltd Corp., E.________ Ltd et la Fondation C.________ contre le jugement du 9 décembre 2019 ainsi que sur l'appel joint du Ministère public genevois. Elle a rejeté l'appel de A.________ Ltd et l'appel joint du Ministère public, a partiellement admis l'appel de B.________ et a admis les appels de D.________, de F.________ Limited Corp., de E.________ Ltd et de la Fondation C.________. Outre en ce qui concerne les frais et indemnités de la procédure, le jugement du 9 décembre 2019 a été réformé en ce sens que B.________ était acquittée des chefs d'accusation de blanchiment d'argent aggravé et de faux dans les titres pour une partie des faits ("convention à 10%" et formulaire A transmis à Banque K.________), qu'elle était condamnée pour faux dans les titres (formulaires A transmis à la banque L.________ et à l'intermédiaire financier M.________ AG) à une peine pécuniaire de 250 jours-amende, à 300 fr., avec sursis pendant 3 ans, que les séquestres sur les avoirs figurant sur divers comptes bancaires étaient levés (comptes n° 2222 ouvert auprès de la banque N.________, à Genève, au nom de I.________, n° 3333 ouvert auprès de la banque N.________, à Genève, au nom de J.________ SA PCP, n° 4444 ouvert auprès de la Banque K.________, à Genève, et n° 5555 ouvert auprès de M.________ AG, à Genève, tous deux au nom de E.________ Ltd, n° 6666 ouvert auprès de la banque O.________ Limited, à Dubaï, au nom de la Fondation C.________, n° 7777 ouvert auprès de la banque P.________, à Singapour, au nom de F.________ Ltd Corp., n° 8888 ouvert auprès de la banque N.________, à Genève, au nom de B.________ et n° 9999 ouvert auprès de la Banque K.________, à U.________, au nom de D.________), qu'était ordonné le séquestre en couverture des frais de procédure d'un montant de 63'183 fr. 70 sur le compte n° 1111 ouvert auprès de la banque H.________, à Genève, au nom de F.________ Ltd Corp., le séquestre sur le solde étant levé, et que A.________ Ltd était renvoyée à agir par la voie civile.
C.
C.a.
C.a.a. A.________ Ltd forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 28 novembre 2022 (cause 6B_231/2023).
Elle conclut, avec suite de frais et dépens, principalement à la condamnation de B.________ pour blanchiment d'argent aggravé et pour faux dans les titres à raison de l'entier des faits reprochés, au maintien des séquestres et à la confiscation des avoirs figurant sur les comptes n° 2222 ouvert auprès de la banque N.________, à Genève, au nom de I.________, n° 3333 ouvert auprès de la banque N.________, à Genève, au nom de J.________ SA PCP, n° 4444 ouvert auprès de la Banque K.________, à Genève, et
n° 5555 ouvert auprès de M.________ AG, à Genève, tous deux au nom de E.________ Ltd, n° 6666 ouvert auprès de la banque O.________ Limited, à Dubaï, au nom de la Fondation C.________, n° 7777 ouvert auprès de la banque P.________, à Singapour et n° 1111 ouvert auprès de la banque H.________, à Genève, tous deux au nom de F.________ Ltd Corp., n° 8888 ouvert auprès de la banque N.________, à Genève, au nom de B.________ et n° 9999 ouvert auprès de la Banque K.________, à Genève, au nom de D.________, et que soit ordonnée la restitution à A.________ Ltd des 327'600 d'actions de G.________ SA figurant sur le compte n° 1111 ouvert auprès de la banque H.________, à Genève, au nom de F.________ Ltd Corporation.
A.________ Ltd conclut également à ce que B.________ soit condamnée à lui payer principalement un montant de 218'792'477.82 EUR (ou subsidiairement de 245'769'590 fr., au cours de 1,1233), avec intérêts à 5% dès la date de l'arrêt du Tribunal fédéral, sous déduction de la valeur des actions devant être restituées directement à A.________ Ltd, que ce soit à la date valeur retenue par le Tribunal correctionnel ou à la date valeur que le Tribunal fédéral devra fixer; subsidiairement, l'addition des montants de 23'325'120 EUR (ou subsidiairement de 26'201'107 fr., au cours de 1,1233), de 5'661'562 EUR correspondant aux dividendes calculés sur les 327'600 actions moins les coûts de participation à l'augmentation de capital sur 327'600 actions (ou subsidiairement le montant de 6'359'632 fr. 50, au cours de 1,1233), et de 91'605'750 EUR (ou subsidiairement le montant de 102'900'739 fr., au cours de 1,1233), avec un intérêts à 5 % calculé sur le montant mentionné dès la date du 17 mars 2005, ou toute autre date fixée par le Tribunal fédéral, sous déduction de la valeur des actions devant être restituées directement à A.________ Ltd, que ce soit à la date valeur retenue par le Tribunal correctionnel ou à la date valeur que le Tribunal fédéral devra fixer; plus subsidiairement, le montant de 108'358'056 EUR (ou subsidiairement le montant de 121'718'604 fr., au cours de 1,1233) dont à déduire les frais liés à l'augmentation de capital de 5'060'780 EUR, avec intérêts à 5 % dès la date du 17 mars 2005 ou de toute autre date fixée par le Tribunal fédéral, sous déduction de la valeur des actions devant être restituées directement à A.________ Ltd, que ce soit à la date valeur retenue par le Tribunal correctionnel ou à la date valeur que le Tribunal fédéral devra fixer. Elle conclut, par ailleurs, au prononcé d'une créance compensatrice de 18'400'000 EUR (équivalant à 20'260'720 fr.) contre B.________ ou D.________ et les sociétés F.________ Ltd Corp., E.________ Ltd, J.________ SA PCP et I.________, conjointement et solidairement, avec intérêts à 5 % à compter de la date de l'arrêt. Elle conclut encore à l'allocation à A.________ Ltd des confiscations, produits éventuels de la réalisation des actifs confisqués, créances compensatrices et amendes, à concurrence des dommages et intérêts auxquels B.________ aura été condamnée, sous déduction de la valeur des actions devant être restituées directement à A.________ Ltd et à ce qu'il soit donné acte à A.________ Ltd que, moyennant le prononcé de l'allocation requise, elle cède à l'État une part correspondante de sa créance.
A titre subsidiaire, A.________ Ltd conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
Elle requiert par ailleurs l'octroi de l'effet suspensif.
C.a.b. Le Ministère public de la République et canton de Genève forme également un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 28 novembre 2022 (cause 6B_234/2023).
Il conclut principalement à la réforme de l'arrêt attaqué en ce sens que B.________ soit reconnue coupable, outre de l'infraction retenue en instance cantonale, de blanchiment d'argent aggravé (art. 305bis ch. 2 let. c et ch. 3 CP) et de faux dans les titres (art. 251 CP) en lien avec la "convention à 10%", qu'elle soit condamnée à une peine privative de liberté de 4 ans et à une peine pécuniaire de 250 jours-amende, qu'elle soit condamnée à payer à A.________ Ltd une somme de 34'995'320 EUR, à titre de réparation du dommage matériel, que soit ordonnée la restitution à A.________ Ltd des 327'600 actions de G.________ SA figurant sur le compte n° 1111 ouvert au nom de F.________ Ltd Corp. auprès de la banque H.________, à Genève, le solde des avoirs déposés sur ce compte étant confisqué, que soient ordonnés le maintien des séquestres et la confiscation des avoirs figurant sur les comptes n° 2222, 3333 et 8888 ouverts respectivement au nom de I.________, de J.________ SA PCP et de B.________ auprès de la banque N.________, à Genève, sur les comptes n° 4444 et 9999 ouverts respectivement au nom de E.________ Ltd et de D.________ auprès de la Banque K.________, à Genève, ainsi que sur le compte n° 5555 ouvert au nom de E.________ Ltd auprès de l'intermédiaire financier M.________ AG, à Genève, que les montants séquestrés sur ces comptes soient alloués à A.________ Ltd, à concurrence des dommages-intérêts fixés, que A.________ Ltd soit renvoyée, pour le surplus, à agir par la voie civile, que soient ordonnés le séquestre et la confiscation des avoirs figurant sur le compte n° 6666 ouvert au nom de la Fondation C.________ auprès de la banque O.________ Ltd, à Dubaï, ainsi que sur le compte n° 7777 ouvert au nom de F.________ Ltd auprès de la banque P.________, à Singapour et, enfin, qu'une créance compensatrice d'un montant de 5'179'638 fr. soit prononcée contre B.________ en faveur de l'Etat de Genève.
C.b. Par ordonnance du 20 mars 2023, le Juge présidant la Cour de droit pénal a admis la requête d'effet suspensif assortie au recours formé par A.________ Limited.
C.c. Par avis du 14 août 2023, les parties ont été informées qu'en raison d'une réorganisation interne du Tribunal fédéral, les causes étaient désormais traitées par la IIe Cour de droit pénal, sous les références 7B_271/2023 (recours de A.________ Ltd) et 7B_445/2023 (recours du Ministère public).
Considérant en droit :
1.
Les recours dans les causes 7B_271/2023 et 7B_445/2023 sont formés contre la même décision et les griefs qui y sont développés s'inscrivent dans le même complexe de faits. Partant, il se justifie de joindre ces deux causes et, par économie de procédure, de statuer dans un seul arrêt (art. 24 PCF [RS 273], applicable par analogie vu le renvoi de l'art. 71 LTF).
2.
2.1. En application de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 3 LTF, l'accusateur public a qualité pour former un recours en matière pénale. Formé et signé par l'un des procureurs du Ministère public genevois (art. 76 ss LOJ/GE [RS/GE E 2 05] et art. 38 al. 1 LaCP/GE [RS/GE E 4 10]; cf. ATF 142 IV 196 consid. 1.5.) dans le délai de 30 jours (art. 100 al. 1 LTF), le recours du Ministère public (ci-après: recourant 1), dirigé contre une décision rendue par une autorité cantonale de dernière instance (art. 80 al. 1 LTF), est recevable.
2.2. Il en va de même du recours formé par la partie plaignante A.________ Ltd (ci-après: recourante 2), qui dispose de la qualité pour recourir au regard de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF, étant précisé qu'en instance cantonale, elle a fait valoir contre l'intimée B.________, prévenue, des prétentions civiles à hauteur de 218'792'477.82 EUR - ou subsidiairement de 245'769'500 fr. -, pour lesquelles elle a été renvoyée à agir par la voie civile.
3.
La recourante 2 se plaint que les appels interjetés contre le jugement du 9 décembre 2019 ont été traités en procédure écrite, alors que les conditions de l'art. 406 CPP n'étaient en l'occurrence pas réunies.
3.1.
3.1.1. Selon l'intention du législateur, la procédure d'appel est en principe orale. L'appel ne peut être traité en procédure écrite qu'à titre exceptionnel et aux conditions restrictives de l'art. 406 CPP, dont la réalisation doit être examinée d'office par la juridiction d'appel (ATF 147 IV 127 consid. 2.2.1; 143 IV 483 consid. 2.1.1; 139 IV 290 consid. 1.1).
3.1.2. Selon l'art. 406 al. 1 CPP, la cour d'appel peut traiter l'appel en procédure écrite, indépendamment de l'accord des parties, notamment lorsqu'il s'agit de trancher exclusivement des questions de droit (let. a). La procédure ne peut ainsi pas être écrite lorsqu'une question de fait est contestée (à l'exception des cas prévus à l'art. 406 al. 2 CPP).
La remise en cause du jugement dans son ensemble implique la contestation tant des questions de fait que des questions de droit. L'appelant n'étant pas tenu de motiver son appel (art. 399 al. 3 CPP), il suffit qu'il demande l'acquittement pour que l'on doive considérer qu'il remet potentiellement en cause les constatations de fait (ATF 139 IV 290 consid. 1.3; arrêts 6B_242/2023 du 22 mai 2023 consid. 1.2.2; 6B_253/2023 du 16 mars 2023 consid. 2.2), de sorte que la procédure écrite est irrecevable lorsque l'instance d'appel entend s'écarter des constatations de fait de première instance au détriment du prévenu (ATF 147 IV 127 consid. 3.1). Le dépôt d'une déclaration d'appel motivée n'empêche par ailleurs pas la partie de soulever d'autres griefs en fait ou en droit à l'occasion des débats judiciaires, pour autant que ceux-ci restent dans le cadre des points contestés par les conclusions (cf. ATF 139 IV 290 consid. 1.3). Aussi, si elle doit procéder à une nouvelle appréciation des preuves, la juridiction d'appel traite des questions de fait et ne peut pas examiner le recours en procédure écrite selon l'art. 406 al. 1 let. a CPP (ATF 139 IV 290 consid. 1.3; arrêt 6B_22/2023 du 16 octobre 2023 consid. 3.2.2).
3.1.3. Avec l'accord des parties, la direction de la procédure peut en outre ordonner la procédure écrite, selon l'art. 406 al. 2 CPP, lorsque la présence du prévenu aux débats d'appel n'est pas indispensable (let. a) et que l'appel est dirigé contre un jugement rendu par un juge unique (let. b).
L'introduction de la limitation décrite à l'art. 406 al. 2 let. b CPP trouve son origine dans le fait que le législateur entendait ne réserver la possibilité de renoncer à des débats oraux qu'aux seules causes de relativement faible importance (ATF 147 IV 127 consid. 2.2.1; cf. Message du Conseil fédéral du 21 décembre 2005 relatif à l'unification du droit de la procédure pénale, FF 2006 1057, ch. 2.9.3.2 p. 1301). Aussi, selon la jurisprudence, l'accord des parties pour la procédure écrite ne peut pas remplacer les conditions légales prévues par l'art. 406 al. 2 CPP, mais les complète; les conditions de l' art. 406 al. 2 let. a et b CPP doivent en outre être réalisées cumulativement (ATF 147 IV 127 consid. 2.2.2; arrêt 6B_1021/2021 du 16 février 2022 consid. 1.2). Une telle interprétation du texte légal s'impose en premier lieu dès lors qu'eu égard à la formulation de l'art. 406 al. 2 let. a CPP, il n'apparaît pas envisageable de renoncer à une procédure orale si la présence du prévenu aux débats est tenue pour indispensable; en outre, l'application cumulative des critères contenus à l'art. 406 al. 2 CPP et, par voie de corollaire, la définition restrictive du champ d'application de cette disposition correspondent à la conception du législateur selon laquelle la procédure écrite doit, en appel, s'inscrire comme une exception (ATF 147 IV 127 consid. 2.2.2).
3.1.4. En tout état de cause, avant de renoncer aux débats, le juge doit examiner si l'application de l'art. 406 CPP est compatible avec l'art. 6 par. 1 CEDH (ATF 147 IV 127 consid. 2.3.1; 143 IV 483 consid. 2.1.2). Il découle de la jurisprudence que l'absence de débats en appel n'est pas nécessairement contraire à la garantie d'un procès équitable lorsqu'il s'agit de questions de fait qui peuvent être aisément tranchées sur la base du dossier et qui n'obligent pas à une appréciation directe de la personnalité de l'accusé (ATF 139 IV 290 consid. 1.1; 119 Ia 316 consid. 2b; arrêt 6B_1171/2022 du 19 octobre 2023 consid. 1.1.3). En ce qui concerne le prévenu, celui-ci doit être entendu si la cour cantonale entend le condamner pour la première fois ou le condamner plus sévèrement (ATF 147 IV 127 consid. 2.3.2 et les références citées).
3.2. En l'espèce, alors que, saisie de plusieurs appels contre le jugement du 9 décembre 2019 - dont ceux de l'intimée B.________ et de la recourante 2 -, la juridiction d'appel, par son président, avait jusqu'alors vainement tenté de fixer des débats au 22 mars 2021, l'intimée a produit, par courrier de son défenseur du 23 février 2021, un certificat médical, émanant d'un médecin établi en Belgique, selon lequel elle n'était alors "pas en capacité d'effectuer des tâches administratives et judiciaires" au moins jusqu'au 31 mai 2021, dès lors que "le traitement et la thérapie se poursuiv[ai]ent et pendant encore longtemps". Relevant que, du fait de son état de santé, de son éloignement géographique et de la situation sanitaire liée à la pandémie de Covid-19, il pourrait être difficile de prévoir une "nouvelle audience à moyen, voire à long terme", l'intimée a sollicité la mise en oeuvre de la procédure écrite (cf. dossier de la Chambre pénale d'appel et de révision [CPAR], P. 155).
Par avis du 25 février 2021, le Président de la Chambre pénale d'appel et de révision a observé qu'à teneur de l'arrêt 6B_973/2019 du 28 octobre 2020 (consid. 2.2.2; publié par la suite aux ATF 147 IV 127), les conditions de l'art. 406 al. 2 CPP étaient cumulatives, de sorte qu'il n'apparaissait pas possible d'instruire les appels par écrit, étant rappelé qu'ils étaient en l'occurrence dirigés contre un jugement du Tribunal correctionnel. Cela étant, le Président a relevé qu'au vu des "circonstances particulières du cas d'espèce", de la crise sanitaire et du fait que la demande émanait de la partie prévenue, il pourrait être exceptionnellement dérogé à cette jurisprudence, pour autant que toutes les parties y consentent (cf. dossier de la CPAR, P. 157).
Interpellées à ce sujet, les parties ont toutes consenti à la mise en oeuvre de la procédure écrite (cf. arrêt attaqué, Faits, let. C.a p. 48), en particulier la recourante 2 par courrier du 2 mars 2021 (cf. dossier de la CPAR, P. 159). Par la suite, les parties ont présenté des mémoires d'appel, respectivement des mémoires de réponse, se déterminant par ailleurs sur les conclusions prises par les autres parties (cf. arrêt attaqué, let. C.c-C.h p. 49).
Par avis du 5 juillet 2022, le Président de la Chambre pénale d'appel et de révision a informé les parties que la cause était définitivement gardée à juger (cf. dossier de la CPAR, P. 275).
3.3.
3.3.1. En l'espèce, le jugement du 9 décembre 2019, attaqué en appel, n'a pas été rendu par un juge unique, mais par une autorité collégiale, soit par le Tribunal correctionnel de la République et canton de Genève, qui siège dans une composition à trois juges (cf. art. 97 LOJ/GE). Il faut ainsi donner acte à la recourante 2 qu'une procédure d'appel écrite était exclue au regard de l'art. 406 al. 2 CPP, la condition nécessaire d'un jugement rendu par un juge unique, prévue par la let. b de cette disposition, n'étant pas réalisée.
Il sera au demeurant relevé que, selon le droit cantonal, la peine privative de liberté de 30 mois, infligée en première instance à l'intimée B.________, n'était pas susceptible d'être prononcée par un juge unique. Le Tribunal de police, qui siège dans une composition à un seul juge (art. 95 LOJ/GE), connaît en effet dans le canton de Genève des infractions à propos desquelles le Ministère public entend requérir l'amende, une peine pécuniaire, un travail d'intérêt général ou une peine privative de liberté ne dépassant pas 2 ans, le Tribunal de police étant lié par ce maximum de peine (art. 96 al. 1 et 2 LOJ/GE; cf. art. 19 al. 2 let. b CPP).
3.3.2. Il apparaît de surcroît que la condition décrite à l'art. 406 al. 2 let. a CPP n'était pas non plus réalisée.
On rappellera que la cour cantonale a prononcé l'acquittement de l'intimée du chef d'accusation de blanchiment d'argent aggravé ainsi que partiellement de celui de faux dans les titres, alors que l'autorité de première instance l'avait reconnue coupable et l'avait condamnée à ces titres. Or il apparaît que cet acquittement partiel est intervenu après que la cour cantonale a procédé à une appréciation particulièrement détaillée des différentes déclarations recueillies en cours de procédure (cf. arrêt attaqué, not. consid. 4 p. 58 ss), soit notamment de celles de l'intimée qu'elle a tour à tour, selon les circonstances factuelles examinées, tenues pour "plausibles" (cf. arrêt attaqué, consid. 4.4 p. 59) et "douteuses" (cf. arrêt attaqué, consid. 4.5 p. 60). La cour cantonale a d'ailleurs reconnu, à au moins une reprise, que, parmi les différentes versions présentées, il "para[issait] difficile d'établir quelles déclarations [étaient] les plus crédibles" (cf. arrêt attaqué, ibidem).
Il apparaît dès lors fortement compromis, dans un tel contexte, de considérer que la présence de la prévenue aux débats d'appel n'était pas indispensable au regard de l'art. 406 al. 2 let. a CPP.
3.3.3. Les conditions décrites à l'art. 406 CPP n'étant ainsi pas réunies, c'est à tort que la cour cantonale a traité en procédure écrite les appels formés contre le jugement du 9 décembre 2019.
3.4.
3.4.1. Certes, il est constant qu'en mars 2021, la recourante 2, assistée d'un mandataire professionnel, avait expressément donné son consentement à la procédure écrite, sans y revenir dans la suite de la procédure d'appel, qui s'est poursuivie jusqu'au 5 juillet 2022, date à laquelle la cause avait été gardée à juger.
3.4.2. Dès lors, à première vue, la remise en cause, en procédure fédérale, de la validité de l'accord signifié à la juridiction d'appel pourrait être appréhendée comme une attitude contraire au principe de la bonne foi en procédure (cf. art. 3 al. 2 let. a CPP), qui proscrit notamment l'adoption par les parties de comportements contradictoires (cf. not. ATF 143 IV 397 consid. 3.4.2).
Pour autant, on rappellera que la mise en oeuvre d'une procédure écrite n'avait pas été sollicitée par la recourante 2, mais bien par l'intimée. Aussi, le consentement à la procédure écrite, au moment où il avait été donné par la recourante 2, s'inscrivait pour cette dernière dans la perspective légitime de préserver, dans son propre intérêt, le principe de la célérité, alors que le contexte pandémique, couplé à l'état de santé de l'intimée et au fait qu'elle résidait à l'étranger, pouvait susciter chez elle des craintes justifiées quant à la possibilité de tenir des débats à une échéance raisonnable.
3.4.3. Il est par ailleurs déterminant de relever qu'à l'inverse de ce qui est par exemple ordinairement le cas d'un procès civil, le procès pénal n'est pas à la libre disposition des parties. C'est bien en effet à l'autorité pénale, en particulier à la direction de la procédure, d'assurer en toute indépendance la conduite du procès et, à cet égard, d'assumer les conséquences de choix procéduraux qui s'avèrent contraires à la loi. On relèvera ainsi qu'en l'occurrence, le choix de proposer aux parties la voie de la procédure écrite a été opéré en toute connaissance de cause par le président de la Chambre pénale d'appel et de révision, lequel ne pouvait avoir que pleine conscience du caractère illégal de sa démarche, dès lors qu'il avait fait expressément référence, dans son avis du 25 février 2021, à la jurisprudence entre-temps publiée aux ATF 147 IV 127.
4.
4.1. Au vu de ce qui précède, le recours de A.________ Ltd (recourante 2; cause 7B_271/2023) doit être admis, sans qu'il y ait matière à examiner les autres griefs développés. L'arrêt attaqué sera annulé et la cause renvoyée à la cour cantonale pour qu'elle mette en oeuvre une procédure d'appel orale, puis rende une nouvelle décision.
Au regard de la nature procédurale du vice constaté et dans la mesure où le Tribunal fédéral n'a pas traité la cause sur le fond, ne préjugeant ainsi pas de l'issue de celle-ci, il peut être procédé au renvoi sans ordonner préalablement un échange d'écritures (cf. ATF 133 IV 293 consid. 3.4.2; arrêt 6B_1330/2022 du 3 juillet 2023 consid. 4).
4.2. L'annulation de l'arrêt attaqué rend par ailleurs sans objet le recours déposé par le Ministère public (recourant 1; cause 7B_445/2023).
4.3. Vu l'issue du litige, il ne sera pas perçu de frais judiciaires. La recourante 2, qui obtient gain de cause, peut prétendre à une indemnité de dépens, à la charge du canton de Genève ( art. 68 al. 1 et 2 LTF ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Les causes 7B_271/2023 et 7B_445/2023 sont jointes.
2.
Le recours de A.________ Ltd (cause 7B_271/2023) est admis, l'arrêt de la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise du 28 novembre 2022 est annulé et la cause renvoyée à cette autorité pour qu'elle mette en oeuvre une procédure d'appel orale, puis rende une nouvelle décision.
3.
Le recours du Ministère public de la République et canton de Genève (cause 7B_445/2023) est sans objet.
4.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
5.
Le canton de Genève versera aux mandataires de A.________ Ltd, solidairement entre eux, la somme de 3'000 fr., à titre de dépens.
6.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice de la République et canton de Genève.
Lausanne, le 1er février 2024
Au nom de la IIe Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Abrecht
Le Greffier : Tinguely