Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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6B_1054/2016
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Arrêt du 1er juin 2017
Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Rüedi.
Greffier : M. Thélin.
Participants à la procédure
A.________,
B.________,
C.________,
D.________,
tous représentés par Me Thomas Barth, avocat,
recourants,
contre
Ministère public central du canton de Vaud,
intimé.
Objet
procédure pénale; classement
recours contre l'arrêt rendu le 11 mai 2016par la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal
du canton de Vaud.
Considérant en fait et en droit :
1.
Le 10 octobre 2013 au soir, E.________ a organisé une fête dans une résidence d'étudiants qu'elle habitait à Ecublens. Avec quelques-uns de ses invités, elle s'est rendue à Lausanne pour y poursuivre la soirée dans divers établissements publics. Le 11 octobre vers 4h30 ou 5h00, l'un des invités l'a accompagnée en taxi jusque dans le quartier de Malley où il demeurait. On ignore ce qu'il est ensuite advenu de E.________, sinon qu'à 6h05, elle se trouvait sur les voies du chemin de fer à 600 m au-delà de la gare de Renens, en direction de Genève, où elle a été heurtée et tuée par un train des Chemins de fer fédéraux.
Ses père et mère A.________ et B.________, sa soeur C.________ et son frère D.________ ont tous quatre déposé plainte pénale; ils se sont constitués parties plaignantes dans l'enquête ouverte par le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne.
Par ordonnance du 24 mars 2016, le Ministère public a refusé d'ordonner les mesures d'instruction supplémentaires requises par ces parties et il a ordonné le classement de la procédure pénale.
La Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal a statué le 11 mai 2016 sur le recours desdites parties; elle a rejeté ce recours et confirmé l'ordonnance.
2.
Agissant par la voie du recours en matière pénale, les parties plaignantes requièrent le Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de la Chambre des recours, d'ordonner la mise en prévention du conducteur du train et d'ordonner les mesures d'instruction déjà réclamées devant les autorités précédentes. Elles requièrent notamment un nouvel examen toxicologique de la victime, une analyse de prélèvements d'ADN à accomplir sur ses vêtements, une analyse dactyloscopique d'un billet de transport public trouvé sur elle, acheté à 5h25 à la gare de Lausanne, la production des données enregistrées par le tachygraphe du train, l'interrogation contradictoire du conducteur et l'inspection contradictoire du lieu où le choc s'est produit.
3.
La qualité pour exercer le recours en matière pénale est reconnue à la partie plaignante pour autant que la décision attaquée puisse avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles (art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF).
3.1. Selon la jurisprudence, cette condition suppose notamment que le droit applicable à la responsabilité civile du prévenu autorise le lésé à lui intenter directement une action civile (ATF 131 I 455 consid. 1.2.4 p. 461).
La loi fédérale sur la responsabilité de la Confédération, des membres de ses autorités et de ses fonctionnaires (LRCF; RS 170.32) exclut cette action directe en cas de dommage causé par un fonctionnaire ou par un autre agent de la Confédération dans l'exercice de ses fonctions (art. 1 al. 1 let. e; art. 3 al. 3 LRCF). La même loi exclut également cette action directe en cas de dommage causé par l'employé d'une institution indépendante de l'administration fédérale ordinaire, lorsque cette institution est chargée par la Confédération d'exécuter des tâches de droit public et que le dommage est causé dans l'accomplissement de ces tâches (art. 19 al. 1 let. a LRCF). La Confédération ou l'institution indépendante sont alors seules responsables envers le tiers lésé; s'il y a lieu, elles peuvent exercer une action récursoire contre l'agent ou l'employé ( art. 7 et 19 al. 1 let. b LRCF ).
Le conducteur du train est un employé des Chemins de fer fédéraux, société anonyme de droit public selon l'art. 2 al. 1 de la loi fédérale sur les Chemins de fer fédéraux (LCFF; RS 742.31). Selon le Message du Conseil fédéral sur la deuxième réforme des chemins de fer, du 23 février 2005 (FF 2005 2269), l'art. 19 al. 1 LRCF est notamment applicable aux Chemins de fer fédéraux et aux entreprises de transport au bénéfice d'une concession de la Confédération, à titre d'organisations indépendantes chargées de l'accomplissement d'une tâche de droit public (ch. 2.7.1 p. 2380/2381). Il s'ensuit qu'en l'espèce, les membres de la famille de E.________ ne peuvent pas élever directement, devant un tribunal, des prétentions civiles contre le conducteur du train. Dans la cause pénale, en tant qu'ils réclament la poursuite de cet employé, les membres de la famille n'ont donc pas non plus qualité pour recourir au regard de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF.
3.2. Il est par ailleurs possible que d'autres personnes aient participé de manière répréhensible à des événements qui ne sont en l'état pas élucidés et qui ont abouti à la mort de E.________. Le recours formé devant le Tribunal fédéral tend également à l'élucidation complète des événements, à l'identification des éventuels coupables, dont la responsabilité civile est par hypothèse soumise au régime ordinaire des art. 41 et ss CO, et à leur poursuite pénale; le classement ordonné par le Ministère public compromet les prétentions civiles à élever contre ces coupables. Sous cet aspect, les parties plaignantes ont indiscutablement qualité pour recourir.
4.
A teneur de l'art. 319 al. 1 let. a à c CPP, le Ministère public ordonne le classement de la procédure lorsque, parmi d'autres cas, aucun soupçon justifiant une mise en accusation n'est établi (let. a), les éléments constitutifs d'une infraction ne sont pas réunis (let. b), ou des faits justificatifs empêchent d'imputer une infraction au prévenu (let. c).
Selon la jurisprudence, ces dispositions doivent être appliquées conformément à l'adage
in dubio pro duriore, celui-ci exigeant que la poursuite pénale suive son cours tant que son issue est incertaine. Lorsque l'instruction est terminée, le Ministère public doit saisir le tribunal compétent s'il ne peut pas prononcer une ordonnance pénale et qu'une condamnation semble plus vraisemblable qu'un acquittement. En règle générale, notamment en cas d'infraction grave, le Ministère public ne peut pas non plus classer la procédure lorsque la condamnation et l'acquittement paraissent également vraisemblables. Le Ministère public doit évaluer les intérêts en présence d'après les circonstances concrètes de la cause; cet organe et l'autorité cantonale de recours jouissent d'un certain pouvoir d'appréciation, dont le Tribunal fédéral ne contrôle l'exercice qu'avec retenue (ATF 138 IV 186 consid. 4.1 et 4.2 p. 190; 138 IV 186 consid. 4.1 p. 190).
En l'espèce, les recourants tiennent l'ordonnance de classement pour prématurée; ils soutiennent que l'instruction n'est pas terminée, qu'elle doit se poursuivre conformément à leurs propres réquisitions de preuves et qu'en l'état, le Ministère public n'est pas en mesure d'appliquer sainement les critères déterminants selon l'art. 319 al. 1 let. a à c CPP.
5.
A teneur de l' art. 318 al. 1 et 2 CPP , le Ministère public ne peut pas ordonner le classement de la procédure sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs réquisitions de preuves (al. 1), et il ne peut rejeter une réquisition ainsi présentée que dans l'éventualité où cette réquisition porte sur des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité pénale ou déjà suffisamment prouvés (al. 2). Cette seconde disposition coïncide avec l'art. 139 al. 2 CPP régissant la preuve dans l'ensemble du procès pénal. Selon la jurisprudence relative à l'art. 29 al. 2 Cst., ici transposable (arrêt 6B_1129/2014 du 9 septembre 2015, consid. 4.1), l'autorité est notamment habilitée à effectuer une appréciation anticipée des preuves déjà disponibles; lorsqu'elle peut admettre de façon exempte d'arbitraire qu'une preuve supplémentaire offerte par une partie serait impropre à ébranler sa conviction, elle peut refuser l'administration de cette preuve (ATF 136 I 229 consid. 5.3 p. 236/237; 131 I 153 consid. 3 p. 157).
6.
Dans la mesure où les réquisitions de preuves rejetées par le Ministère public puis par la Chambre des recours sont destinées à la poursuite pénale du conducteur du train, on a vu que les parties plaignantes n'ont pas qualité pour contester leur rejet.
Pour le surplus, ces réquisitions sont destinées à révéler d'hypothétiques actes répréhensibles d'autres personnes, ayant pu entraîner le décès de E.________. La Chambre des recours les a discutées point par point et de manière détaillée; elle est parvenue à la conclusion qu'elles ne permettraient ni d'élucider la nature exacte ni d'identifier les auteurs d'interventions en l'état inconnues et ayant, le cas échéant, conduit au décès de la victime. A l'appui du recours en matière pénale, les recourants développent longuement leur propre discussion. Ils dénoncent un jugement prétendument arbitraire mais le Tribunal fédéral ne discerne guère sur quels points ils reprochent réellement aux précédents juges, sinon par de simples protestations ou dénégations, d'avoir commis une erreur certaine ou de s'être livrés à une appréciation absolument insoutenable. L'argumentation présentée tend seulement à substituer une appréciation différente de celle de l'autorité précédente; elle est par conséquent irrecevable au regard de la jurisprudence concernant la motivation des griefs dirigés contre la constatation des faits et l'appréciation des preuves (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3 p. 254; voir aussi ATF 141 IV 249 consid. 1.3.1 p. 253; 140 III 264 consid. 2.3 p. 266). Ainsi, le recours en matière pénale se révèle en tous points irrecevable.
7.
A titre de parties qui succombent, les recourants doivent acquitter l'émolument à percevoir par le Tribunal fédéral.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est irrecevable.
2.
Les recourants acquitteront un émolument judiciaire de 2'000 francs.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Lausanne, le 1er juin 2017
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le président : Denys
Le greffier : Thélin