Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_963/2021  
 
 
Arrêt du 1er septembre 2022  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux 
Herrmann, Président, von Werdt et Bovey. 
Greffière : Mme de Poret Bortolaso. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Isabelle Bühler Galladé, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
B.________, 
représentée par Me Virginie Jaquiery, avocate, 
intimée, 
 
Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant du canton de Genève, 
rue des Glacis-de-Rive 6, 1207 Genève. 
 
Objet 
garde alternée (parents non mariés), modification des circonstances, 
 
recours contre la décision de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre de surveillance, du 21 octobre 2021 (C/20475/2014-CS DAS/197/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
B.________ et A.________ sont les parents non mariés de C.________, née en 2014. 
L'autorité parentale est conjointe selon convention des parties du 30 septembre 2014. 
 
B.  
Par jugement du Tribunal de première instance du canton de Genève du 26 juillet 2018, confirmé sur ce point par arrêt de la Cour de justice du 16 avril 2019, la garde de l'enfant a été attribuée à la mère; le droit de visite du père a été arrêté largement (un week-end sur deux, chaque mardi à la sortie de l'école jusqu'au jeudi matin et la moitié des vacances scolaires). 
 
C.  
 
C.a. Le 18 juin 2020, le père a requis du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant du canton de Genève (ci-après: le Tribunal de protection) la modification de la prise en charge de sa fille, concluant à l'instauration d'une garde alternée.  
La mère s'y est opposée. 
Le Service d'évaluation et d'accompagnement à la séparation parentale (SEASP) a rendu un rapport d'évaluation sociale concluant au maintien du dispositif des relations personnelles tel que défini jusqu'à présent. 
Par ordonnance du 25 février 2021, le Tribunal de protection a instauré une garde alternée, à mettre en place d'entente entre les parents, mais au plus tard le 15 août 2021, en en précisant les modalités (ch. 2 et 3: enfant chez son père du lundi au mercredi midi et chez sa mère du mercredi midi au vendredi, les week-ends et vacances étant partagés), exhorté les parties à entreprendre un travail de coparentalité et de médiation en vue de l'instauration de la garde alternée (ch. 5) et attribué à chacun des parents, à parts égales, la bonification pour tâches éducatives de l'AVS (ch. 7). 
 
C.b. Statuant le 21 octobre 2021 sur appel de la mère, la Chambre de surveillance de la Cour de justice a annulé les chiffres précités du dispositif de l'ordonnance du Tribunal de protection.  
 
D.  
Le 24 novembre 2021, A.________ (ci-après: le recourant) exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Il conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal et principalement à la confirmation des chiffres 2, 3 et 5 du dispositif de l'ordonnance rendue le 25 février 2021 par le Tribunal de protection, déclarant s'en remettre à justice sur le chiffre 7; subsidiairement, il demande le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants. 
Invitées à se déterminer, la cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt tandis que B.________ (ci-après: l'intimée) conclut au déboutement du recourant et à la confirmation de la décision entreprise. Les parties ont répliqué, respectivement dupliqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les conditions du recours en matière civile sont ici réalisées (art. 72 al. 1 [cf. notamment: arrêts 5A_401/2021 du 3 mars 2022 consid. 1 et les références; 5A_22/2016 du 2 septembre 2016 consid. 1], art. 75 al. 1 et 2, art. 76 al. 1 let. a et b, art. 90 et art. 100 al. 1 LTF), étant précisé que l'affaire n'est pas de nature pécuniaire. 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés; il n'est pas tenu de traiter, à l'instar d'une autorité de première instance, toutes les questions juridiques pouvant se poser, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références, 402 consid. 2.6). Le recourant doit discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (art. 42 al. 2 LTF; ATF 146 IV 297 consid. 1.2; 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4 et la référence). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ceux-ci ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 144 II 246 consid. 6.7; 143 I 310 consid. 2.2 et la référence), doit satisfaire au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.1).  
 
3.  
Le recourant remet en cause le refus de l'autorité cantonale de modifier la prise en charge de sa fille dans le sens d'une garde alternée. Il souligne notamment que, dans sa décision du 26 juillet 2018 - à l'origine de l'attribution exclusive de la garde à la mère (let. B supra) - le Tribunal de première instance n'avait pas refusé l'instauration d'une garde alternée dans son principe, mais du fait de son caractère prématuré, en tant que la fillette allait alors être confrontée aux deux bouleversements importants que constituaient la naissance de sa demi-soeur et son entrée à l'école, évènements désormais révolus. L'arrêt déféré occultait pourtant cet élément factuel déterminant.  
L'intimée soutient pour l'essentiel que cette conclusion relève de l'interprétation du recourant. L'instauration d'une garde alternée devait s'examiner au regard de l'art. 298d CC, dont les conditions d'application n'étaient nullement données: comme l'avait jugé la cour cantonale, aucune modification importante et durable n'était à relever. 
 
3.1.  
 
3.1.1. Dans son ordonnance du 25 février 2021, le Tribunal de protection a jugé que l'instauration d'une garde alternée était ici envisageable, s'écartant en cela du préavis du SEASP. Les premiers juges ont en substance considéré pouvoir envisager que la communication future des parents serait suffisante, que ceux-ci présentaient des capacités parentales identiques et que la distance entre leurs domiciles ne constituait pas un motif rédhibitoire, si bien que l'instauration de la garde alternée ne compromettrait pas l'équilibre de l'enfant. L'autorité de première instance a fait application de l'art. 298 al. 2ter CC ( sic ! [disposition s'appliquant aux parents mariés]).  
 
3.1.2. Saisie d'un appel de la mère, la cour cantonale a relevé que cette décision ne procédait cependant à aucun examen des conditions posées par l'art. 298d CC, applicable en matière de modification des modalités de garde lorsque les parents ne sont pas mariés. Elle a ainsi jugé qu'il ne ressortait pas du dossier que la situation qui prévalait actuellement serait préjudiciable au développement de l'enfant, au contraire: le rapport du SEASP aboutissait précisément à la conclusion inverse, considérant que la stabilité dont l'enfant avait besoin était sauvegardée par le maintien de la situation et des modalités des relations personnelles telles qu'elles existaient. L'autorité cantonale a par ailleurs relevé que les faits nouveaux qui justifieraient d'envisager une modification des modalités des relations personnelles ne ressortaient pas du dossier. Seul pouvait entrer en considération le déménagement de la mère et de l'enfant dans un lieu plus éloigné du domicile du père, mais il confortait plutôt l'opinion selon laquelle un changement n'était pas favorable à l'intérêt de la fille des parties. Dans ces conditions, la modification sollicitée par le recourant devait être refusée.  
 
3.2.  
 
3.2.1. Selon l'art. 298d CC, à la requête de l'un des parents ou de l'enfant ou encore d'office, l'autorité de protection de l'enfant modifie l'attribution de l'autorité parentale lorsque des faits nouveaux importants le commandent pour le bien de l'enfant (al. 1). Elle peut aussi se limiter à statuer sur la garde de l'enfant, les relations personnelles ou la participation de chaque parent à sa prise en charge (al. 2).  
Toute modification dans l'attribution de l'autorité parentale ou de la garde de fait suppose ainsi que la nouvelle réglementation soit requise dans l'intérêt de l'enfant en raison de la survenance de faits nouveaux essentiels. En d'autres termes, une nouvelle réglementation de l'autorité parentale, respectivement de l'attribution de la garde de fait, ne dépend pas seulement de l'existence de circonstances nouvelles importantes; elle doit aussi être commandée par le bien de l'enfant (arrêts 5A_951/2020 du 17 février 2021 consid. 4; 5A_756/2019 du 13 février 2020 consid. 3.1.1; 5A_406/2018 du 26 juillet 2018 consid. 3.1 et les références; 5A_46/2017 du 19 juin 2017 consid. 4.2.1. 
 
3.2.2. Déterminer si une modification essentielle est survenue par rapport à la situation existant au moment où la décision initiale a été prise doit s'apprécier en fonction de toutes les circonstances du cas d'espèce et relève du pouvoir d'appréciation du juge (art. 4 CC; arrêts 5A_800/2021 du 25 janvier 2022 consid. 5.1; 5A_762/2020 du 9 février 2021 consid. 4.1). Le Tribunal fédéral n'intervient que si l'autorité cantonale a pris en considération des éléments qui ne jouent aucun rôle au sens de la loi ou a omis de tenir compte de facteurs essentiels (ATF 144 III 442 consid. 2.6; 142 III 336 consid. 5.3.2).  
 
3.3. Le litige présente ici certaines particularités qui nécessitent d'être soulignées (art. 105 al. 2 LTF) :  
 
3.3.1. Dans son jugement du 26 juillet 2018, le Tribunal de première instance a essentiellement privilégié le critère de la stabilité de l'enfant en en attribuant la garde à sa mère: cette situation, qui prévalait depuis la séparation des parties, avait permis à l'enfant de trouver un équilibre et deux bouleversements importants pour celle-ci s'annonçaient prochainement, à savoir son entrée à l'école et la naissance de sa demi-soeur. Dans ces conditions, il n'était pas conforme à ses intérêts de lui faire vivre un changement supplémentaire.  
Dans son arrêt du 16 avril 2019, se référant au conflit marqué et persistant entre les parents, à l'équilibre trouvé par l'enfant et au fait que celle-ci, encore jeune, venait de vivre trois changements significatifs (entrée à l'école, naissance de sa demi-soeur et déménagement), la cour cantonale a jugé qu'un nouveau bouleversement dans sa vie était contraire à son intérêt et que la garde partagée était pour l'heure prématurée. 
 
3.3.2. Il faut ainsi déduire de cette dernière décision que l'instauration d'un tel mode de garde a été expressément réservée par les juges cantonaux dans la procédure initiale et qu'une nouvelle évaluation de la situation pouvait être envisagée ultérieurement, une fois passés les évènements précités. Dans les circonstances particulières de la présente espèce, l'écoulement du temps constitue le fait nouveau à examiner dans la perspective du bien de l'enfant.  
Dans ce contexte particulier, la cour cantonale ne pouvait ainsi s'abstenir de déterminer si la situation désormais stabilisée de l'enfant recommandait d'envisager, dans son intérêt, la mise en place d'une garde alternée; s'y refuser revient en effet à priver le recourant de toute perspective d'élargissement de ses prérogatives parentales, pourtant réservée dans la procédure antérieure. Tout en relevant que les compétences parentales sont ici identiques - ce qui ressort des différentes décisions rendues dans la première procédure (décision du Tribunal de première instance du 26 juillet 2018, let. B.d; arrêt de la Cour de justice du 16 avril 2019, consid. 4.4), des rapports établis par les différents services appelés à évaluer la situation et des décisions cantonales rendues dans l'actuelle procédure (ordonnance du tribunal de protection du 25 février 2021, let. B.c; absence de remise en cause des compétences parentales dans l'arrêt déféré) - et que le droit de visite qu'exerce le recourant est déjà particulièrement large (let. B. supra), la Cour de céans ne peut suppléer à cet examen essentiellement factuel; la cause doit ainsi être renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants.  
Vu l'issue du recours, il n'y a pas lieu d'examiner les autres critiques du recourant. 
 
4.  
En conclusion, le recours apparaît bien fondé et doit par conséquent être admis. L'arrêt entrepris sera dès lors annulé et la cause renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Bien que l'issue du litige soit incertaine, les frais et dépens de l'instance fédérale incombent à l'intimée (art. 66 al. 1, 68 al. 1 et 2 LTF; arrêt 5A_93/2019 du 13 septembre 2021 consid. 7 et les références), laquelle a conclu au rejet du recours (ATF 119 Ia 1 consid. 6b). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis, l'arrêt cantonal annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de l'intimée. 
 
3.  
Une indemnité de 2'500 fr., à verser au recourant à titre de dépens, est mise à la charge de l'intimée. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant du canton de Genève, à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre de surveillance, et au Service de protection des mineurs. 
 
 
Lausanne, le 1er septembre 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : de Poret Bortolaso