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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4A_502/2010 
 
Arrêt du 1er décembre 2010 
Ire Cour de droit civil 
 
Composition 
Mmes et M. les Juges Klett, Présidente, 
Corboz et Rottenberg Liatowitsch. 
Greffière: Mme Crittin. 
 
Participants à la procédure 
X.________, 
représentée par Me Philippe Vogel, 
avocat, 
recourante, 
 
contre 
 
Y.________ AG, 
représentée par Me Eric Cerottini, avocat, 
intimée. 
 
Objet 
contrat de travail; conflit de travail, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 31 mai 2010. 
 
Faits: 
 
A. 
Y.________ AG, de siège à Z.________, est active dans la fabrication et la commercialisation de produits pharmaceutiques et cosmétiques. 
 
Par contrat du 22 mai 2006, prenant effet le 1er septembre 2006, la société a engagé X.________ en qualité de représentante au sein du service externe de vente pour la Suisse Romande. Le délai de congé contractuellement prévu était de trois mois pour la fin d'un mois après l'échéance du temps d'essai. Le salaire mensuel brut de l'employée, versé treize fois l'an, a été fixé à 9'500 fr. A son art. 4, le contrat prévoyait une "Mitarbeiter Gewinnbeteiligung", définie dans la notice intitulée "xxx", remise à l'employée avant son engagement. 
 
Il existe, au sein de la société, une règle implicite selon laquelle le bonus de l'année écoulée n'est versé que si les rapports de travail du collaborateur ne sont pas résiliés avant le 1er mai de l'année suivante. L'employée connaissait cette pratique, qui lui a été rappelée avant son engagement. 
 
Le 23 janvier 2009, X.________ a donné son congé pour le 30 avril suivant et a, peu après, été informée qu'elle ne percevrait aucun bonus pour l'année 2008. Elle s'est opposée à cette manière de faire, estimant que la prime annuelle était un élément du salaire, ce qui a été réfuté par l'employeuse. 
 
B. 
Le 1er septembre 2009, X.________ a ouvert action contre son employeuse en paiement de 29'999 fr. nets, avec intérêts, cette somme correspondant au montant évalué de sa prime 2008. La défenderesse a conclu à libération. 
 
Par jugement du 2 mars 2010, le Tribunal de prud'hommes de l'arrondissement de La Côte a rejeté les conclusions de la demanderesse. 
 
Statuant par arrêt du 31 mai 2010, sur appel de cette dernière, la Chambre des recours du Tribunal cantonal vaudois a confirmé le jugement entrepris. 
A l'instar des juges précédents, les magistrats cantonaux ont considéré que le montant réclamé par l'employée ne constituait pas un élément du salaire, mais correspondait plutôt à une gratification au sens de l'art. 322d CO. Comme l'employée a quitté l'entreprise avant le 1er mai 2008, elle n'avait droit à aucune prestation à ce titre. 
 
C. 
L'employée exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Invoquant une violation du droit fédéral, elle estime que le bonus litigieux fait partie du salaire au sens de l'art. 322a CO et lui est donc dû, indépendamment de la résiliation intervenue avant le 1er mai 2009. Elle conclut, sous suite de frais et dépens, à l'admission du recours, à la réforme du jugement de la Chambre des recours, en ce sens que l'employeuse est reconnue débitrice de l'employée du montant de 29'333 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 1er septembre 2009, sous déduction des retenues sociales usuelles. Subsidiairement, la recourante demande l'annulation de l'arrêt entrepris et le renvoi de la cause à l'autorité précédente. 
 
L'employeuse conclut au rejet du recours, sous suite de frais et dépens. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
1.1 Le jugement attaqué a été rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par l'autorité judiciaire cantonale de dernière instance (art. 75 al. 1 LTF) dans une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse, qui correspond aux montants encore litigieux devant l'autorité précédente (art. 51 al. 1 let. a LTF), atteint le seuil de 15'000 fr. fixé en matière de droit du travail (art. 74 al. 1 let. a LTF). Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions condamnatoires (art. 76 al. 1 LTF), le recours est en principe recevable puisqu'il a été déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF en liaison avec l'art. 46 al. 1 let. b LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. 
 
1.2 Le recours en matière civile peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments soulevés dans le recours, ni par la motivation retenue par l'autorité précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation différente de celle de l'autorité précédente (ATF 135 III 397 consid. 1.4 p. 400). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 135 III 397 consid. 1.4 p. 400). 
 
1.3 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire (ATF 135 III 127 consid. 1.5 p. 130, 397 consid. 1.5 p. 401; 135 II 145 consid. 8.1 p. 153) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Il incombe à la partie recourante, qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente, d'expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée (ATF 136 I 184 consid. 1.2 p. 187; 133 IV 286 consid. 1.4 p. 287 s. et consid. 6.2 p. 288). 
 
Aucun fait nouveau, ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF). 
 
1.4 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Toute conclusion nouvelle est irrecevable (art. 99 al. 2 LTF). 
 
2. 
L'employée soutient que la prestation litigieuse est un élément du salaire au sens de l'art. 322a CO et non pas une gratification, comme prévue à l'art. 322d CO. Dans son argumentation, elle cite l'art. 18 CO et dénonce une violation du principe de l'égalité de traitement des travailleurs. 
2.1 
2.1.1 En cas de litige sur l'interprétation d'un accord de volonté, le juge doit tout d'abord s'efforcer de déterminer la commune et réelle intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO); s'il y parvient, il s'agit d'une constatation de fait qui lie en principe le Tribunal fédéral conformément à l'art. 105 al. 1 LTF; si la volonté réelle des parties ne peut pas être établie ou si leur volonté intime diverge, le juge doit interpréter les déclarations faites et les comportements selon la théorie de la confiance; il doit donc rechercher comment une déclaration ou une attitude pouvait être comprise de bonne foi en fonction de l'ensemble des circonstances (ATF 136 III 186 consid. 3.2.1 p. 188); le principe de la confiance permet ainsi d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement, même s'il ne correspond pas à sa volonté intime; l'application du principe de la confiance est une question de droit que le Tribunal fédéral peut examiner librement (art. 106 al. 1 LTF); cependant, pour trancher cette question, il doit se fonder sur le contenu de la manifestation de volonté et sur les circonstances, dont la constatation relève du fait (ATF 135 III 410 consid. 3.2 p. 413; 132 III 268 consid. 2.3.2 p. 275, 626 consid. 3.1 p. 632). 
2.1.2 Le droit suisse ne contient aucune disposition qui définisse et traite de façon spécifique le bonus. Selon ses caractéristiques, le bonus sera considéré soit comme une gratification au sens de l'art. 322d CO, soit comme un élément du salaire (art. 322 CO), pouvant revêtir, selon les cas, la forme d'une participation au résultat de l'exploitation (art. 322a CO). On en jugera de cas en cas sur le vu des circonstances pertinentes (ATF 136 III 313 consid. 2 p. 317). Cette qualification est déterminante, car le régime des gratifications est beaucoup plus flexible que les règles applicables aux éléments du salaire. Ainsi, contrairement au salaire, la gratification dépend, au moins partiellement, du bon vouloir de l'employeur. Si elle n'a pas été convenue expressément ou par acte concluant, la gratification est entièrement facultative et, si un versement a été convenu, l'employeur est tenu d'y procéder, mais il jouit d'une certaine liberté dans la fixation du montant à allouer (ATF 136 III 313 consid. 2 p. 317; 131 III 615 consid. 5.2 p. 620; 129 III 276 consid. 2 p. 278). 
 
En l'absence d'un accord explicite, la gratification est considérée comme convenue lorsque l'employeur l'a versée durant plus de trois années consécutives sans en réserver, par une déclaration adressée au travailleur, le caractère facultatif (ATF 131 III 615 consid. 5.2 p. 620; 129 III 276 consid. 2 p. 278 in fine). Selon les circonstances, la gratification peut être due alors même que, d'année en année, l'employeur a exprimé et répété une réserve à ce sujet (ATF 131 III 615 consid. 5.2 p. 621; 129 III 276 consid. 2.3 p. 280 s.). Au demeurant, la gratification est accessoire par rapport au salaire et elle ne peut avoir qu'une importance secondaire dans la rétribution du travailleur. Par conséquent, un montant très élevé en comparaison du salaire annuel, égal ou même supérieur à ce dernier, et versé régulièrement, doit être considéré comme un salaire variable même si l'employeur en réservait le caractère facultatif. Dans le cas de salaires modestes, un montant proportionnellement moins élevé peut déjà présenter le caractère d'un salaire variable (ATF 131 III 615 consid. 5.2 et 5.3 p. 621; 129 III 276 consid. 2.1 p. 279 s.). 
 
2.2 Il ressort des constatations de fait cantonales, qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), que le conseil d'administration de la société employeuse attribue au début de chaque année un montant global à distribuer au titre de bonus de l'année écoulée et que l'octroi du bonus à tel ou tel collaborateur et le montant de celui-ci font l'objet d'une discussion entre le supérieur hiérarchique et le chef des ressources humaines, le chef marketing pouvant encore ensuite décider seul d'une adaptation éventuelle du montant prévu; les facteurs permettant d'établir le principe et le montant des bonus tiennent à la qualité des prestations personnelles des collaborateurs, à leur fonction, à la durée du travail dans l'entreprise, à leur fidélité à son égard et au nombre de leurs absences. Il a été souverainement retenu que l'employée a été informée, lors des entretiens ayant précédé son engagement, du système de bonus pratiqué par l'employeuse; il a de même été constaté que l'employée connaissait la règle implicite, selon laquelle le bonus annuel n'était versé que si les rapports de travail n'étaient pas résiliés avant le 1er mai de l'année suivante. 
 
Il a donc bien été établi que l'employée savait que l'octroi du bonus dépendait de l'appréciation de l'employeuse et non pas du résultat réalisé par la société. Le sens attribué par l'employeuse à la clause litigieuse, intitulée "Mitarbeiter Gewinnbeteiligung", étant connu de l'employée, une interprétation selon le principe de la confiance n'entre pas en considération. 
 
Le pouvoir d'appréciation que l'employeuse s'est réservé, quant à la détermination du montant du bonus, est une circonstance caractérisant la gratification. En outre, celui-ci n'a été versé qu'en 2006 et 2007, soit durant moins de trois années consécutives, et revêt une importance secondaire dans la rétribution de la travailleuse. Alors que le salaire annuel brut de l'employée s'élevait à 123'500 fr., le bonus 2008, à répartir au sein de l'office de l'employée, ascendait à 37'000 fr. Rien n'indique que celle-ci aurait eu droit aux 30'000 fr. réclamés sur les 37'000 fr. octroyés, en lieu et place de la moitié de ce montant - compte tenu du nombre de collaborateurs de l'office. Ainsi, le montant probablement obtenu se serait chiffré à 18'500 fr. (37'000 : 2), ce qui représente moins de 15% du salaire annuel. En 2006, l'employée a perçu, en sus de la rémunération convenue, 3'300 fr. pour quatre mois de travail et en 2007, 24'640 fr., ce qui, en moyenne, représente également un pourcentage inférieur à 15% du salaire annuel. Il se justifie, par conséquent, de qualifier la prestation litigieuse de gratification au sens de l'art. 322d CO
 
On ne discerne par ailleurs aucune inégalité de traitement entre les travailleurs, telle que dénoncée par la recourante. Il ne ressort pas de l'état de fait que l'employeuse ait accordé, pour l'année 2008, un bonus à d'autres collaborateurs qui auraient eux aussi quitté la société avant le 1er mai de l'année suivante. En outre, la jurisprudence admet que l'employeur subordonne, comme dans le cas d'espèce, le droit à la gratification à la condition que les rapports de travail ne soient pas résiliés (arrêts 4A_509/2008 du 3 février 2009 consid. 4.1 et 4C.426/2005 du 28 février 2006 consid. 5.1 et les références). Le grief soulevé en lien avec la question doit être rejeté. 
 
Pour le surplus, la recourante ne peut valablement prétendre à un versement partiel, au pro rata temporis, dès lors qu'un éventuel accord sur ce point au sens de l'art. 322d al. 2 CO fait défaut. 
 
En conclusion, l'autorité cantonale n'a pas enfreint le droit fédéral en ayant jugé que la rémunération en cause ne constituait pas un élément du salaire, mais bien une gratification, et en ayant confirmé le refus de son paiement, compte tenu de la rupture de la relation contractuelle intervenue avant le 1er mai 2009. 
 
Le recours doit ainsi être rejeté. 
 
3. 
Les frais judiciaires et les dépens sont mis à la charge de la partie qui succombe (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté. 
 
2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3. 
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 2'500 fr. à titre de dépens. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
Lausanne, le 1er décembre 2010 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
La Présidente: La Greffière: 
 
Klett Crittin