Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
5A_890/2023
Arrêt du 2 avril 2024
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président,
Bovey et De Rossa.
Greffière : Mme de Poret Bortolaso.
Participants à la procédure
A.________,
c/o C.________,
représentée par Me Samir Djaziri, avocat,
recourante,
contre
Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant du canton de Genève,
rue des Glacis-de-Rive 6, 1207 Genève,
intimé,
1. B.________,
2. C.________,
Objet
retrait de garde et du droit de déterminer le lieu de résidence des enfants (mesures provisionnelles),
recours contre la décision de la Chambre de surveillance de la Cour de justice du canton de Genève du 16 octobre 2023 (C/12006/2019-CS, DAS/251/2023).
Faits :
A.
A.a. Les mineurs D.________ et E.________, nés en 2019 et 2020, sont les enfants de A.________ et C.________. Les parents, mariés, n'ont jamais fait ménage commun.
A.b. A.________ a également une fille désormais majeure ainsi que deux autres fils mineurs, nés d'une précédente union en 2012 et 2014. Le droit de déterminer le lieu de résidence et la garde de ceux-ci lui ont été retirés par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant du canton de Genève (ci-après: tribunal de protection) par décision du 10 juillet 2019. Les mineurs sont actuellement placés chez leur père, après avoir vécu en foyer.
Un rapport d'expertise familiale réalisé le 4 juillet 2019 dans le cadre de la procédure concernant ses deux fils aînés a mis en évidence que A.________ souffrait d'un trouble de la personnalité mixte, avec des traits narcissiques et paranoïaques, lequel avait des effets sur sa capacité parentale qui était réduite. Anosognosique de ses troubles, elle n'était pas capable de tenir compte des souffrances et des difficultés que traversaient ses fils aînés. Elle devait bénéficier d'une psychothérapie intensive, ainsi qu'être soutenue par une guidance parentale.
A.c. Différents rapports établis par le Service de protection des mineurs (ci-après: SPMi) démontrent que la situation de D.________ et E.________ fait l'objet de nombreuses préoccupations (en substance: appartements des parents insalubres, encombrés, voire dangereux; retard de développement des deux enfants, sévère chez le cadet; déni des parents quant à la situation et incapacité à comprendre les besoins des enfants; collaboration difficile, voire impossible avec les différents intervenants).
B.
Me B.________, avocate, a été nommée curatrice d'office des enfants. Le tribunal de protection a pris différentes mesures superprovisionnelles et provisionnelles les concernant: avant la naissance de E.________, il a ainsi retiré le droit de déterminer le lieu de résidence de D.________ aux deux parents et la garde de fait à la mère pour placer l'enfant d'abord à l'hôpital puis chez son père; il a ensuite restitué les prérogatives parentales aux deux parents, pour finalement les leur retirer à nouveau et placer les deux mineurs chez leur père. Différentes curatelles ont par ailleurs été ordonnées (ainsi: curatelle d'assistance éducative; curatelle de gestion des biens administrative et financière; curatelle de représentation des mineurs dans le domaine médical et limitation de l'autorité parentale des parents en conséquence).
Par ordonnance du 28 février 2023, le tribunal de protection a également ordonné la mise en place d'une expertise familiale.
C.
C.a.
C.a.a. Antérieurement, à savoir par décision rendue sur mesures superprovisionnelles le 17 février 2023, le tribunal de protection a fait sien le préavis des curateurs du même jour, lesquels concluaient au placement des mineurs en famille d'accueil ou en foyer dès qu'une place serait disponible.
Les curateurs avaient constaté des comportements inadéquats de la mère lors de rendez-vous et observé que les mineurs résidaient toujours au domicile de la mère, malgré le placement ordonné chez le père; l'appartement de celui-ci présentait quoi qu'il en soit les mêmes problématiques que celui de la mère (encombrement, insalubrité). Les retards importants des deux mineurs étaient encore soulignés.
C.a.b. Un placement en hospitalisation sociale a finalement été effectué le 23 mai 2023, avec l'intervention de la brigade des mineurs - intervention, qui, vu l'opposition des parents, avait été autorisée préalablement par le tribunal de protection.
C.a.c. Par décision sur mesures superprovisionnelles du 25 mai 2023, le tribunal de protection a fait siennes les mesures préavisées par les curateurs, à savoir le maintien du retrait de la garde des mineurs à leurs parents et leur placement en hospitalisation sociale avec instauration d'une curatelle d'organisation et de surveillance des relations personnelles, un droit de visite médiatisé des parents ainsi qu'une curatelle de financement du lieu de placement et aux fins de faire valoir la créance alimentaire, les autres curatelles existantes (
supra let. B) devant être maintenues.
C.b. Statuant le 10 juillet 2023 sur mesures provisionnelles, le tribunal de protection a en substance maintenu les mesures prononcées à titre superprovisionnel, y compris les différentes curatelles.
Le 16 décembre 2023, la Chambre de surveillance de la Cour de justice du canton de Genève a rejeté le recours formé par A.________ et confirmé la décision de première instance.
D.
D.a. Le 22 novembre 2023, A.________ (ci-après: la recourante), exerce contre cette dernière décision un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Sollicitant son annulation, elle demande principalement l'annulation de la presque intégralité des mesures prononcées par le tribunal de protection (à l'exception, apparemment, de la curatelle d'assistance éducative) et, cela fait, la restitution du droit de déterminer le lieu de résidence et la garde de ses deux enfants ainsi que la levée de leur placement. Subsidiairement, la recourante requiert le renvoi de la procédure à l'autorité cantonale.
Elle sollicite par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire.
D.b. Précédemment, à savoir le 21 novembre 2023, la recourante a pris l'initiative d'adresser un courrier à l'attention du Tribunal fédéral, sans l'intervention de son conseil.
D.c. Des déterminations n'ont pas été demandées.
Considérant en droit :
1.
Les conditions de recevabilité du recours sont ici réunies (art. 72 al. 2 let. b ch. 6; art. 75 al. 1 et 2; art. 76 al. 1 let. a et b; art. 100 al. 1 LTF), étant précisé que la décision, de nature incidente au sens de l'art. 93 LTF, est susceptible de causer un préjudice irréparable à la recourante (art. 93 al. 1 let. a LTF), une décision finale ultérieure favorable ne pouvant pas compenser rétroactivement l'exercice des prérogatives parentales dont elle a été privée (arrêts 5A_911/2023 du 27 février 2024 consid. 1; 5A_666/2022 du 13 avril 2023 consid. 1 et les références; cf. ATF 137 III 475 consid. 1).
Le courrier que la recourante a adressé personnellement à la Cour de céans sera écarté, étant précisé qu'il est difficilement compréhensible (cf. art. 98 LTF;
infra consid. 2.1).
2.
2.1. La décision attaquée porte sur des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF, en sorte que le recourant ne peut dénoncer que la violation de ses droits constitutionnels, moyen qu'il est tenu de motiver conformément aux exigences accrues de l'art. 106 al. 2 LTF (" principe d'allégation "; ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1).
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Dans l'hypothèse d'un recours soumis à l'art. 98 LTF, le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 148 IV 39 consid. 2.3.5; 147 I 73 consid. 2.2; 144 III 93 consid. 5.2.2), doit, sous peine d'irrecevabilité, satisfaire au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf.
supra consid. 2.1).
3.
La recourante se prévaut de l'établissement arbitraire des faits et de la violation du "principe de la proportionnalité (art. 5 al. 2 Cst.) ".
3.1. La cour cantonale a relevé que la recourante était dans l'impossibilité de comprendre les besoins spécifiques de ses fils et d'y répondre de manière adéquate, ce malgré les nombreuses mesures d'accompagnement mises en place au fil des années avant le placement des mineurs en hospitalisation sociale; les inquiétudes convergentes des différents professionnels entourant les enfants n'étaient pas entendues (ainsi: interruption régulière des suivis médicaux des enfants; comportement hostile à l'égard des professionnels entourant les mineurs; refus de délier du secret médical les médecins les prenant en charge), en dépit des retards de développement importants qui étaient observés (ainsi, par exemple: l'aîné n'avait pas acquis la propreté diurne à quatre ans et ne parvenait pas à formuler de petites phrases; à trois ans, le cadet n'avait pas encore acquis la marche autonome et n'était nourri que de lait et de compotes). Bien que sentimentalement très investie auprès de ses enfants, la recourante présentait des carences parentales majeures, qui ne permettaient pas de lui restituer le droit de déterminer le lieu de résidence et la garde de ses fils. Dans la mesure où elle n'avait entrepris aucune démarche afin de se soigner, l'état psychique et physique de ses enfants était menacé sous sa garde, en sorte que la mesure prononcée apparaissait non seulement adéquate, mais parfaitement proportionnée et conforme à l'intérêt des enfants, lesquels avaient déjà fait d'énormes progrès tant au niveau physique, psychique que social depuis leur placement.
3.2.
3.2.1. La recourante estime que cette motivation violerait le principe de proportionnalité. Il ne s'agit pas d'un droit fondamental (ATF 140 II 194 consid. 5.8.2; 135 V 172 consid. 7.3.2); l'on peut néanmoins ici admettre qu'il est invoqué en lien avec la violation de l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.), circonstance qui permet de l'examiner sous cet angle (140 II 194 consid. 5.8.2; 134 I 153 consid. 4.1; arrêts 5A_163/2022 du 14 octobre 2022 consid. 3.4; 5D_204/2023 du 8 mars 2024 consid. 4.2.1).
3.2.2. A propos de la violation de l'interdiction de l'arbitraire, la recourante se limite toutefois à opposer sa propre appréciation du contexte entourant le prononcé des mesures qu'elle conteste, sans s'en prendre concrètement à la motivation développée par l'autorité cantonale pour confirmer leur maintien.
Elle affirme d'abord que ce serait sa situation économique qui aurait conduit au placement, alors que cette circonstance ne ressort pourtant nullement de la motivation cantonale; quant à l'insalubrité de son appartement, qu'elle discute vainement, elle ne constitue pas l'élément déterminant sur lequel se fondent les mesures ordonnées par les instances cantonales successives. La recourante souligne encore la mise sur pied de différentes thérapies en faveur de ses enfants et soutient sa volonté de poursuivre leur suivi, volonté dont elle déduit son investissement dans le soin qu'elle porte à ses fils et sa prise de conscience de la situation; elle ne conteste toutefois aucunement les difficultés, voire l'impossibilité de mettre en oeuvre jusqu'à présent les suivis aménagés pour ses enfants, de même que leur interruption régulière, circonstances qui démontrent précisément le défaut de conscientisation de la situation particulièrement préoccupante des deux mineurs. Son affirmation - non motivée - selon laquelle les curatelles instituées - à l'exception apparemment de la curatelle d'assistance éducative - n'auraient aucune pertinence et devaient être levées, l'illustre d'ailleurs parfaitement. Pour autant que recevable, l'on ne saisit pas enfin la critique selon laquelle l'intervention de la brigade des mineurs aurait été "contraire à la bonne foi" dans la mesure où la recourante indique elle-même qu'elle n'était pas opposée à l'hospitalisation de ses fils.
Largement défaillante au regard des exigences de motivation ici applicables (consid. 2.1 et 2.2
supra), l'intégralité de l'argumentation développée par la recourante ne peut qu'entraîner l'irrecevabilité de son recours.
4.
Les conclusions de la recourante étaient d'emblée vouée à l'échec, en sorte que sa requête d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF) et les frais judiciaires mis à sa charge (art. 66 al. 1 LTF). Aucune indemnité de dépens n'est attribuée à l'autorité intimée (art. 68 al. 3 LTF), qui n'a au demeurant pas été invitée à se déterminer.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est irrecevable.
2.
La requête d'assistance judiciaire de la recourante est rejetée.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à Me B.________, à C.________, à la Chambre de surveillance de la Cour de justice du canton de Genève et au Service de protection des mineurs.
Lausanne, le 2 avril 2024
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Herrmann
La Greffière : de Poret Bortolaso