Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
1C_63/2024
Arrêt du 2 décembre 2024
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président,
Chaix et Merz.
Greffière : Mme Rouiller.
Participants à la procédure
A.________ et B.A.________, représentés par
Me Aurore Estoppey, avocate,
recourants,
contre
C.________ SA,
intimée,
Municipalité de Lucens, place de la Couronne 1, 1522 Lucens, représentée par Me Samuel Guignard, avocat.
Objet
Permis de construire,
recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif
et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 9 janvier 2024 (AC.2023.0020).
Faits :
A.
La Commune de Lucens (ci-après: commune) est propriétaire de la parcelle n
o 1194, sise sur son territoire. Cette parcelle, qui présente une surface de 1'396 m
2, est classée en zone de villas. Elle est répertoriée partiellement en zone de danger de glissements de terrain spontanés et coulées de terre (niveau de danger résiduel) et en zone de danger de glissements de terrain permanent (niveau de danger faible).
A.________ et B.A.________ sont propriétaires de la parcelle n
o 1195, qui jouxte la parcelle n
o 1194 au nord.
B.
Le 5 mai 2022, C.________ SA, promettante-acquéreuse (ci-après: constructrice) et la commune ont déposé auprès de la Municipalité de Lucens (ci-après: municipalité) une demande de permis de construire deux villas contiguës de deux logements chacune sur la parcelle n
o 1194: la villa 6A, au nord, et la villa 6B, au sud. La parcelle serait au surplus morcellée en deux nouvelles parcelles. Le projet a été mis à l'enquête publique du 14 mai au 12 juin 2022.
B.a. Les différents services de l'État consultés ont délivré les autorisations spéciales nécessaires, moyennant le respect de certaines conditions impératives (cf. synthèse CAMAC du 17 juin 2022). En particulier, l'Établissement cantonal d'assurance contre l'incendie et les éléments naturels (ci-après: ECA) a soumis l'octroi de l'autorisation spéciale requise à la condition impérative que des mesures visant à sécuriser la construction et les personnes soient définies au moyen d'une évaluation locale du risque réalisée par une personne spécialisée mandatée par le maître d'ouvrage. Ces mesures devaient être définies avant le début des travaux et cette condition n'était donc pas un préalable à la délivrance du permis de construire, mais à la délivrance du permis d'habiter/utiliser.
B.b. L'Association Intercommunale Service Technique Broye vaudoise (ci-après: AISTBV), dont Lucens est membre, a rendu un premier rapport le 27 juin 2022 relatif au projet de construction; ce rapport ne figure pas au dossier. La municipalité a ensuite mandaté le bureau E.________ SA (ci-après: E.________) pour traiter les oppositions au projet. Selon ce rapport, daté du 9 août 2022, les plans déposés à l'enquête publique étaient lacunaires, les niveaux du terrain naturel devaient être attestés par un ingénieur géomètre breveté et des études géotechniques par des professionnels qualifiés étaient recommandées avant le début des travaux. Suite au rapport de E.________, la municipalité a mandaté le bureau F.________ SA (ci-après: F.________), lequel lui a transmis, le 22 septembre 2022, des plans et profils avec les niveaux du terrain naturel tels que nouvellement mesurés. Le 19 octobre 2022, la municipalité a transmis ces différents rapports et relevés à la constructrice, qui a en retour produit des plans d'architecte complémentaires. Dans un second rapport du 1
er décembre 2022, l'AISTBV a considéré que lesdits plans complémentaires permettaient de répondre clairement aux inquiétudes des opposants. Elle recommandait partant la levée des oppositions et l'octroi du permis de construire.
B.c. La municipalité a, par décision du 5 décembre 2022, délivré le permis de construire demandé et, par décision du 8 décembre 2022, levé les oppositions formées notamment par A.________ et B.A.________.
C.
Par arrêt du 9 janvier 2024, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois (ci-après: CDAP) a rejeté le recours formé par A.________ et B.A.________ contre la décision de la municipalité du 8 décembre 2022. Elle a notamment considéré qu'aucun motif de récusation ne justifiait d'annuler la décision attaquée et que l'accès au garage souterrain était suffisant. Au surplus, la solution retenue par la municipalité s'agissant de la distance aux limites des escaliers, du mur et de la terrasse situés au nord du bâtiment était soutenable.
D.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ et B.A.________ demandent au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt de la CDAP du 9 janvier 2024 en ce sens que le permis de construire litigieux n'est pas délivré. Subsidiairement, ils concluent à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour un nouvel arrêt dans le sens des considérants.
La CDAP renonce à se déterminer sur le recours et se réfère aux considérants de l'arrêt attaqué. La municipalité de Lucens conclut au rejet du recours. La constructrice s'en remet à justice. Un second échange d'écritures a eu lieu, au terme duquel les recourants et la municipalité maintiennent leurs conclusions respectives.
Par ordonnance du 19 février 2024, le Président de la Ire Cour de droit public du Tribunal fédéral a accordé l'effet suspensif au recours.
Considérant en droit :
1.
Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans le domaine du droit public des constructions (art. 82 let. a LTF), le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée.
Les recourants ont pris part à la procédure de recours devant la cour cantonale. En tant que voisins directs, ils sont particulièrement touchés par l'arrêt attaqué qui confirme le projet litigieux et peuvent ainsi se prévaloir d'un intérêt personnel et digne de protection à l'annulation de l'arrêt entrepris et de l'autorisation de construire. Partant, ils bénéficient de la qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF.
Les autres conditions de recevabilité sont au surplus réunies, si bien qu'il convient d'entrer en matière.
2.
Dans un premier grief, les recourants reprochent à la cour cantonale d'avoir violé les règles applicables en matière de récusation. Dans ce cadre, ils font également valoir un établissement inexact des faits.
2.1. Le droit à un traitement équitable en procédure, garanti à l'art. 29 al. 1 Cst. permet notamment d'exiger la récusation des membres d'une autorité administrative dont la situation ou le comportement sont de nature à faire naître un doute sur leur indépendance ou leur impartialité; il tend à éviter que des circonstances extérieures à l'affaire ne puissent influencer une décision en faveur ou au détriment de la personne concernée. La récusation peut s'imposer même si une prévention effective du membre de l'autorité visée n'est pas établie, car une disposition interne de sa part ne peut guère être prouvée; il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale. Cependant, seules des circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération; les impressions purement individuelles d'une personne impliquée ne sont pas décisives (cf. ATF 142 III 732 consid. 4.2.2; 138 I 425 consid. 4.2.1).
De manière générale, les dispositions sur la récusation sont moins sévères pour les membres des autorités administratives que pour les autorités judiciaires. Contrairement à l'art. 30 al. 1 Cst., l'art. 29 al. 1 Cst. n'impose pas l'indépendance et l'impartialité comme maxime d'organisation. En règle générale, les prises de position qui s'inscrivent dans l'exercice normal des fonctions gouvernementales, administratives ou de gestion, ou dans les attributions normales d'une autorité partie à la procédure, ne permettent pas de conclure à l'apparence de partialité et ne sauraient justifier une récusation, au risque sinon de vider de son sens la procédure administrative (arrêt 1C_657/2018 du 18 mars 2021 consid. 4.1 non publié in ATF 147 II 319; ATF 140 I 326 consid. 5.2).
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), hormis dans les cas visés à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 148 I 160 consid. 3; 145 V 188 consid. 2). La partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 148 I 160 consid. 3; 146 I 62 consid. 3); un simple renvoi à des actes de la procédure cantonale n'est à cet égard pas suffisant (ATF 140 III 115 consid. 2; 133 II 396 consid. 3.2). Les faits et les critiques invoqués de manière appellatoire sont irrecevables (ATF 148 I 104 consid. 1.5; 145 I 26 consid. 1.3).
2.3. En l'espèce, les recourants considèrent que G.________, directeur de l'AISTBV, est intervenu dans le traitement de la demande de permis alors qu'il aurait dû se récuser, dès lors qu'il est également actif au sein de l'entreprise constructrice.
Malgré le fait que le rapport de l'AISTBV du 1
er décembre 2022 mentionne expressément la récusation de G.________, ce dernier était présent en tant qu'accompagnant de la municipalité lors de l'inspection locale du 22 août 2023 effectuée par la CDAP. Il a alors répondu à plusieurs questions des juges cantonaux. Cela, selon les recourants, démontrerait qu'il disposait d'une connaissance du dossier et, partant, qu'il l'aurait examiné en vue de sa validation.
Les recourants considèrent également que G.________ aurait participé à l'élaboration du rapport de l'AISTBV et au traitement de la demande de permis de construire. Ils se réfèrent à cet égard à un courriel de G.________ à la municipalité du 5 août 2021. Les recourants rappellent encore que l'AISTBV avait proposé à la municipalité d'exiger de la constructrice une attestation d'un géomètre officiel en lien avec les plans complémentaires devant être déposés. Or, la municipalité, dans son courrier du 19 octobre 2022, avait abandonné cette exigence. Les recourants soutiennent que cet abandon ne pouvait être expliqué que par une intervention de G.________. De même, les recourants estiment que l'absence du rapport de l'AISTBV du 27 juin 2022 au dossier laisse penser que son auteur est G.________.
2.4. La CDAP a considéré que G.________ s'était valablement récusé. S'agissant de sa participation à l'inspection locale du 22 août 2023, elle était certes "maladroite et regrettable" et avait effectivement pu donner l'impression qu'il intervenait pour la municipalité et non à titre de partie. Ses déclarations devaient par conséquent être appréciées comme des déclarations de partie, et non comme émanant de l'AISTBV.
Cela étant, il n'existait pas d'élément au dossier permettant de retenir que G.________ aurait participé à l'élaboration du rapport technique du 1
er décembre 2022 et à la prise de décision de la municipalité. Rien n'indiquait non plus qu'il serait intervenu auprès des collaborateurs de l'AISTBV en charge du dossier. En tout état, la municipalité ne s'était pas fondée sur le seul avis de l'AISTBV, mais également sur d'autres rapports établis par des bureaux externes.
2.5. Il est vrai que la participation de G.________ à l'inspection locale en qualité de directeur de l'AISTBV est malheureuse, tout comme le fait qu'il ait à ce titre répondu à des questions, notamment en lien avec la pratique de la commune pour l'interprétation de son règlement (cf. consid. 5 ci-dessous). Une telle configuration, au demeurant peu transparente, n'est en effet pas idéale et devrait être évitée. Toutefois, la solution retenue par la CDAP, consistant à traiter les propos tenus par G.________ comme ceux d'une partie, et non comme ceux d'une autorité, permet de s'assurer que les informations données à cette occasion soient appréciées avec la retenue qui s'impose.
Au surplus, dans son courriel du 5 août 2021, auquel se réfèrent les recourants, G.________ précise contacter la municipalité à titre personnel; s'il mentionne effectivement la possibilité de discuter du projet lors de la séance de la municipalité de la semaine suivante, rien ne permet d'établir qu'il souhaitait le faire en qualité de directeur de l'AISTBV ou que cette séance ait un quelconque lien avec le projet litigieux. Ainsi, et contrairement à ce qu'affirment les recourants, la CDAP n'était pas tenue de se référer à ce courriel.
Finalement, les différentes affirmations des recourants concernant le contenu du courrier de la municipalité du 19 octobre 2022 et de l'auteur du rapport de l'AISTBV du 27 juin 2022 relèvent de simples hypothèses. Elles ne reposent sur aucun élément précis ou concret et ne sauraient dès lors constituer une quelconque preuve de la participation de G.________ à la procédure de traitement de la demande de permis.
Partant, et avec l'autorité précédente, il convient de retenir que les éléments avancés par les recourants ne suffisent pas à établir que G.________ aurait participé à l'élaboration du rapport de l'AISTBV, serait intervenu dans le traitement de la demande du permis litigieux ou aurait eu une quelconque influence sur la décision de la municipalité. Dès lors, il ne saurait non plus être retenu que la CDAP a établi les faits de manière arbitraire.
C'est donc à bon droit que la CDAP a refusé d'annuler la décision attaquée pour un motif de récusation.
3.
Les recourants se plaignent ensuite d'une application arbitraire des art. 8 et 87 du règlement de la commune de Lucens sur le plan général d'affectation et la police des constructions (ci-après: RPGA), qui fixent les règles relatives à la distance aux limites. Ils affirment que les terrasses, murs et escaliers prévus au nord de la villa 6A ne respectent pas ces dispositions.
3.1. Le Tribunal fédéral revoit librement l'interprétation et l'application du droit fédéral et du droit constitutionnel cantonal (art. 95 LTF). Il ne revoit en revanche l'interprétation et l'application faites du droit cantonal ou communal que sous l'angle de l'arbitraire (ATF 147 I 433 consid. 4.2; 146 II 367 consid. 3.1.5).
Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de justice et d'équité. Le Tribunal fédéral n'a pas à déterminer quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement examiner si l'interprétation qui a été faite est défendable. Il ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci apparaît insoutenable ou en contradiction manifeste avec la situation effective, ou encore si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que celle-ci soit arbitraire dans son résultat. Si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne se révèle pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution - éventuellement plus judicieuse - paraît possible (ATF 145 II 32 consid. 5.1; 145 I 108 consid. 4.4.1).
Si le Tribunal fédéral applique le droit fédéral d'office (art. 106 al. 1 LTF), il appartient au recourant de démontrer par une argumentation qui réponde aux exigences des art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF en quoi une norme cantonale ou communale a été appliquée arbitrairement. Le recourant doit ainsi indiquer précisément quelle disposition constitutionnelle ou légale a été violée et démontrer par une argumentation précise en quoi consiste la violation.
De manière générale, lorsque, statuant sur une demande d'autorisation de construire, l'autorité communale interprète son règlement en matière de police des constructions et apprécie les circonstances locales, elle bénéficie d'une liberté d'appréciation particulière, que l'instance cantonale de recours contrôle avec retenue (cf. ATF 146 II 367 consid. 3.1.4).
3.2. Aux termes de l'art. 8 al. 1 RPGA, la distance entre un bâtiment et la limite de la propriété voisine est mesurée au mur de la façade sans tenir compte des terrasses non couvertes, des seuils, des perrons, des balcons en porte à faux et autres installations semblables, perpendiculairement à la limite. Lorsque la façade se présente obliquement par rapport à la limite de propriété, la distance réglementaire est mesurée au milieu de la façade, perpendiculairement à la limite. À l'angle le plus rapproché de la limite, la distance réglementaire ne pourra pas être diminuée de plus de 1 mètre (art. 8 al. 2 RPGA). En zone de villas, la distance entre la façade et la limite de propriété est de 4 mètres au moins (art. 87 al. 2 RPGA).
Selon la jurisprudence canto nale, la réglementation sur la distance aux limites tend principalement à préserver un minimum de lumière, d'air et de soleil entre les constructions afin de garantir un aménagement sain et rationnel et éviter que les habitants de bien-fonds contigus n'aient l'impression que la construction voisine les écrase (cf. arrêt 1C_391/2023 du 8 août 2024 consid. 8.2). Le critère pour déterminer si un élément de construction doit être qualifié d'avant-corps et, par conséquent, être pris en compte dans le calcul de la distance aux limites, tient à son aspect extérieur et sa volumétrie. Un élément de construction peut ainsi être exclu du calcul de la distance aux limites s'il est de dimension réduite et s'il conserve un caractère accessoire par rapport au bâtiment principal s'agissant de ses fonctions et de sa destination, ainsi que de ses effets sur l'aspect et la volumétrie du bâtiment. En général, un élément en saillie dont la profondeur ne dépasse pas 1.5 mètres n'est pas pris en considération dans le calcul de la distance à respecter entre bâtiments et limites de propriété.
Les murs de soutènement sont assimilés, toujours selon la jurisprudence cantonale, à des dépendances au sens de l'art. 39 du règlement d'application de la loi cantonale du 4 décembre 1985 sur l'aménagement du territoire et les constructions (RLTAC; BLV 700.11.1). Les municipalités peuvent autoriser la construction de dépendances de peu d'importance, dont l'utilisation est liée à l'occupation du bâtiment principal, dans les espaces réglementaires entre bâtiments ou entre bâtiments et limites de propriété (art. 39 al. 1 RLATC). Les terrasses constituent également des aménagements assimilés à des dépendances (art. 39 al. 3 RLATC). Ces constructions ne peuvent être autorisées que pour autant qu'elles n'entraînent aucun préjudice pour les voisins (art. 39 al. 4 RLATC).
3.3. En l'espèce, et se fondant sur sa propre jurisprudence, la CDAP a retenu que les escaliers étaient formés de trois volées de marches d'une largeur inférieure à 1.5 mètres. Ils ne constituaient pas les accès principaux aux logements, dès lors que ces derniers étaient accessibles par un ascenseur depuis le garage souterrain. La cour cantonale a partant validé l'appréciation de la municipalité selon laquelle les escaliers n'entraînaient pas de nuisances insupportables pour les recourants et pouvaient être considérés comme un aménagement extérieur assimilé aux autres installations semblables au sens de l'art. 8 al. 1 RPGA.
Les murs de soutènement, prévus le long des escaliers susmentionnés, prenaient place à 1 mètre de la limite entre la parcelle n
o 1194 et celle des recourants, et leur hauteur oscillait entre 20 cm et 1.58 mètres depuis le terrain naturel. Dès lors que le sentiment d'écrasement décrit par les recourants était principalement dû à la position de leur parcelle située plusieurs mètres en contrebas de la parcelle n
o 1194, la CDAP a retenu que l'impact des murs de soutènement en termes de perte d'ensoleillement et de visibilité pour les recourants était limité. Ils pouvaient partant être considérés comme des dépendances de peu d'importance au sens de l'art. 39 RLATC.
La cour cantonale a au surplus retenu que la terrasse attenante au logement du rez-de-chaussée de la villa 6A était pour l'essentiel prévue en façade est, où elle n'empiétait pas sur la distance aux limites. Sur la façade nord, elle était d'une largeur inférieure à 1.5 mètres et prolongeait en quelque sorte le seuil ou la coursive par laquelle on accédait aux escaliers; elle y était partiellement couverte et entourée de garde-corps vitrés de 1.5 mètres de haut. La CDAP a encore relevé qu'au vu de cette conception, la terrasse sera principalement utilisée dans sa partie centrale, en façade est. La partie située en façade nord pouvait par conséquent également être assimilée à une installation admissible dans les distances aux limites, conformément à l'art. 8 al. 1 RPGA.
Au vu de ce qui précède, et contrairement à ce qu'affirment les recourants, la cour cantonale a tenu compte de la dimension des escaliers, murs et terrasse dans son raisonnement (cf. consid. 4f et 4g de l'arrêt attaqué). Il ne saurait dès lors être retenu que l'autorité précédente se serait fondée uniquement sur l'utilisation prévue de ces espaces, et non sur leur aspect et/ou leur volumétrie, pour les qualifier d'aménagements extérieurs, respectivement de dépendances de peu d'importance dont il n'est pas nécessaire de tenir compte dans le calcul de la distance aux limites.
Les recourants se contentent en réalité d'opposer leur propre analyse de la situation à celle de la cour cantonale. Or, une telle manière de procéder ne suffit pas à démontrer l'arbitraire de l'interprétation du droit communal faite par l'instance précédente. Si la distinction entre les aménagements extérieurs dont il doit être tenu compte lors du calcul de la distance aux limites et ceux qui peuvent prendre place dans les espaces réglementaires peut raisonnablement prêter à discussion, la solution adoptée par l'autorité précédente n'en est pas pour autant choquante. En effet, la CDAP a examiné à la fois les dimensions et la fonction des escaliers, murs et terrasse litigieux, en les comparant à de nombreux autres exemples jurisprudentiels; elle a également tenu compte du terrain et du fait que la parcelle des recourants est déjà actuellement située en contrebas de la parcelle n
o 1194. Dans ces conditions, l'interprétation opérée par la cour cantonale apparaît défendable et il ne semble pas déraisonnable de retenir que la dérogation aux règles sur la distance aux limites octroyée par la municipalité est conforme aux dispositions applicables.
3.4. À défaut de démonstration d'arbitraire dans l'application du droit communal, le grief des recourants doit être écarté.
4.
Les recourants se plaignent ensuite d'un accès inadéquat aux logements via le garage souterrain. Ils invoquent dans ce cadre les art. 94 et 95 de la loi cantonale du 4 décembre 1985 sur l'aménagement du territoire et les constructions (LATC; BLV 700.11), ainsi que l'art. 36 RLATC.
Il ressort de l'arrêt que, sur le plan cantonal, le grief soulevé par les recourants en lien avec les accès ne portait que sur les voies d'accès au garage souterrain, en lien avec l'art. 19 al. 1 LAT. Il n'était en revanche pas question de la conformité aux dispositions cantonales portant sur l'accès aux bâtiments d'habitation pour les personnes handicapées ou âgées. Par conséquent, s'agissant d'un grief portant exclusivement sur l'application du droit cantonal, soulevé pour la première fois devant le Tribunal fédéral, celui-ci est d'emblée irrecevable (cf. arrêt 1C_481/2023 du 26 mars 2024 consid. 4 et références).
5.
Dans un dernier grief, les recourants invoquent une application arbitraire de l'art. 12 al. 2 RPGA, selon lequel toute demande de permis de construire sur une parcelle située dans un secteur exposé à un danger naturel devra être complétée par une étude technique indiquant les mesures constructrices nécessaires afin de protéger les personnes et les biens matériels.
Les recourants reprochent, à raison, à la CDAP d'avoir retenu les propos de G.________ tenus lors de l'inspection locale, selon lesquels la municipalité interprétait l'art. 12 RPGA dans ce sens que la production du rapport géotechnique est exigée avant le début des travaux et non lors de la demande de permis de construire (cf. consid. 2.4 et 2.5 ci-dessus). Or, même à écarter lesdits propos, il n'apparaît pas que l'autorité précédente ait fait preuve d'arbitraire dans l'interprétation de l'art. 12 RPGA.
En effet, la cour cantonale rappelle sa jurisprudence constante selon laquelle un rapport géologique et géotechnique n'est en principe pas exigé avant que le droit de construire sur le terrain ne soit sanctionné par le permis de construire. Dès lors qu'un tel rapport demande un investissement important, il est contraire au principe de la proportionnalité d'en exiger la production déjà au stade du permis de construire.
En l'espèce, le permis de construire est conditionné au respect des exigences posées par l'ECA. Ce dernier n'a toutefois pas jugé utile de requérir, au stade de la procédure de demande de permis de construire, l'établissement d'un rapport géologique et géotechnique complet. Au surplus, les documents requis devront en tout état être validés par la municipalité et par l'ECA avant le début des travaux. Partant, l'interprétation opérée par la cour cantonale ne paraît pas s'écarter de la pratique cantonale et repose sur l'avis spécialisé de l'ECA; on ne saurait dès lors la qualifier d'insoutenable.
Le grief doit ainsi être écarté.
6.
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours. Les frais judiciaires sont mis à la charge des recourants, qui succombent ( art. 65 et 66 al. 1 LTF ). Il n'est alloué de dépens ni à la commune (art. 68 al. 3 LTF), ni à l'intimée qui n'a pas procédé.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge des recourants.
3.
Il n'est pas alloué de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des recourants et de la Municipalité de Lucens, à l'intimée et à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Lausanne, le 2 décembre 2024
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Kneubühler
La Greffière : Rouiller