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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1P.757/2005 /col 
 
Arrêt du 3 avril 2006 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Féraud, Président, 
Aemisegger et Fonjallaz. 
Greffier: M. Rittener. 
 
Parties 
A.________, 
recourant, représenté par Me Christophe Zellweger, avocat, 
 
contre 
 
B.________, 
intimé, représenté par Me Laurent Panchaud, avocat, 
Département des constructions et des technologies de l'information du canton de Genève, 
case postale 22, 1211 Genève 8, 
Tribunal administratif du canton de Genève, 
case postale 1956, 1211 Genève 1. 
 
Objet 
autorisation de construire, 
 
recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Genève du 11 octobre 2005. 
 
Faits: 
A. 
B.________ est propriétaire de la parcelle n° 8730 du registre foncier de Collonge-Bellerive (GE), sise en "5e zone" de construction au sens de l'art. 19 al. 3 de la loi cantonale d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT; RS/GE L 1 30). Cette parcelle a fait l'objet d'une servitude de non-bâtir au profit de l'Etat, laquelle n'était toutefois pas mentionnée au registre foncier au moment où B.________ est devenu propriétaire. Un projet de mutation parcellaire prévoit de diviser ce bien-fonds de 1150 m2 en deux parcelles n° 9162/8730A (ci-après: 8730A) et n° 9163/8730B (ci-après: 8730B), la première d'une surface de 430 m2 et la seconde de 720 m2. Sur la parcelle n° 8730A est édifiée une villa de style "chalet" de 87 m2 datant des années 1930. 
Le 24 mars 2004, B.________ a déposé une demande d'autorisation de construire sur la parcelle n° 8730B une "villa jumelée" de 172,50 m2 ainsi qu'un couvert à voitures de 52,50 m2, ce dernier empiétant partiellement sur la parcelle n° 8730A pour venir s'appuyer sur l'habitation existante. Il a en outre sollicité l'autorisation d'abattre un épicéa. Le Département de l'équipement et du logement du canton de Genève (appelé aujourd'hui Département des constructions et des technologies de l'information, ci-après: le département) a recueilli les préavis favorables de la commission d'architecture, du service d'habitabilité, de la direction de l'aménagement du territoire et du service des forêts et de la protection de la nature et du paysage. Quant à la commune de Collonge-Bellerive, elle a émis un préavis défavorable, considérant que la parcelle avait été vidée de ses droits à bâtir lors d'un précédent morcellement. Enfin, le département a considéré que B.________ ne devait pas supporter l'absence d'indication au registre foncier concernant la servitude de non-bâtir et qu'il devait être protégé dans sa bonne foi. Le 2 juillet 2004, A.________, propriétaire de la parcelle voisine n° 6613, a fait part de son opposition à ce projet, alléguant notamment que la densité maximale avait déjà été atteinte sur l'ancienne parcelle n° 831, dont est issue la parcelle n° 8730. 
Par décision du 15 septembre 2004, le département a délivré l'autorisation de construire demandée. Par décision du même jour, le Service des forêts, de la protection de la nature et du paysage du Département cantonal de l'intérieur, de l'agriculture et de l'environnement a autorisé l'abattage d'arbres nécessaire à la réalisation du projet. 
B. 
Le 19 octobre 2004, A.________ a recouru contre ces décisions auprès de la Commission cantonale de recours en matière de constructions, qui a rejeté le recours par décision du 22 juin 2005. En substance, la commission a considéré que B.________ devait être protégé dans sa bonne foi s'agissant de l'absence d'indication au registre foncier quant à la servitude de non-bâtir. De plus, son projet pouvait bénéficier de la dérogation de l'art. 59 al. 4 let. a de la loi cantonale sur les constructions et les installations diverses (LCI; RS/GE L 5 05), autorisant une surface habitable allant jusqu'à 25% de la surface de la parcelle. Le projet pouvait en effet être qualifié de construction en ordre contigu et respectait le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier. Enfin, les circonstances, en particulier l'état actuel du marché du logement, justifiaient cette mesure. A.________ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif du canton de Genève, qui a rejeté le recours par arrêt du 11 octobre 2005. Le Tribunal a notamment considéré que c'était à juste titre que B.________ avait été protégé dans sa bonne foi s'agissant de la servitude de non-bâtir, que l'exigence de contiguïté était respectée, que le couvert projeté était une construction de peu d'importance au sens de l'art. 3 al. 3 du règlement d'application de la LCI (RALCI; RS/GE L 5 05.01) et que l'autorité inférieure n'avait pas abusé de son pouvoir d'appréciation quant à l'intégration du projet litigieux dans le quartier. 
C. 
Agissant par la voie du recours de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt. Il se plaint d'une application arbitraire des art. 973 CC, 58 et 59 LCI et 3 RALCI. B.________ et le Département des constructions et des technologies de l'information se sont déterminés et ont conclu au rejet du recours. Le Tribunal administratif a renoncé à présenter des observations. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 131 II 571 consid. 1 p. 573; 130 I 312 consid. 1 p. 317 et les arrêts cités). 
1.1 La qualité pour agir par la voie du recours de droit public est définie à l'art. 88 OJ. Ce recours est ouvert uniquement à celui qui est atteint par l'acte attaqué dans ses intérêts personnels et juridiquement protégés. Le recours formé pour sauvegarder l'intérêt général ou ne visant qu'à préserver des intérêts de fait est en revanche irrecevable (ATF 129 I 113 consid. 1.2 p. 117; 129 II 297 consid. 2.1 p. 300; 126 I 43 consid. 1a p. 44 et les arrêts cités). D'après la jurisprudence relative à cette disposition, celui qui conteste l'octroi d'une autorisation de construire à un autre propriétaire, en dénonçant une application arbitraire (art. 9 Cst.) de la réglementation en matière d'aménagement du territoire ou de police des constructions, doit alors invoquer la violation d'une norme tendant, au moins accessoirement, à la protection de ses intérêts de propriétaire voisin. Dans cette situation, l'intérêt juridiquement protégé ne peut pas résulter du seul art. 9 Cst. (cf. ATF 129 I 113 consid. 1.5 p. 118; 126 I 81 consid. 2a et 3b p. 84 s.; à propos plus spécialement du recours du voisin: ATF 127 I 44 consid. 2c p. 46; 125 II 440 consid. 1c p. 442 s.; 118 Ia 232 consid. 1a p. 234 et les arrêts cités). La jurisprudence admet à ce propos que les règles ayant pour effet de limiter la densité et le volume des constructions dans un quartier, comme par exemple un coefficient maximum d'utilisation ou d'occupation du sol, peuvent être considérées comme des règles mixtes, tendant à protéger tant l'intérêt public que l'intérêt des voisins (cf. ATF 127 I 44 consid. 2d p. 47; 117 Ia 18 consid. 3b p. 20). Le recourant doit en outre se trouver dans le champ de protection des dispositions dont il allègue la violation, et être touché par les effets prétendument illicites de la construction ou de l'installation litigieuse (ATF 121 I 267 consid. 2 p. 268 et les arrêts cités). 
1.2 En l'espèce, le recourant se plaint d'une application arbitraire des art. 58 et 59 LCI et de l'art. 3 al. 3 RALCI. Ces dispositions régissent les rapports de surface dans la "5e zone" de constructions, en déterminant quelle surface de plancher peut être construite en fonction de la surface de la parcelle concernée (coefficient maximum d'occupation du sol). Elles visent à garantir un équilibre entre les surfaces construites et les zones libres de construction sur les parcelles sises en zone à bâtir et protègent donc indirectement les intérêts des propriétaires voisins, qui bénéficient ainsi d'un environnement plus harmonieux et bâti dans des proportions équilibrées. Par conséquent, elles peuvent être considérées comme des règles mixtes au sens de la jurisprudence précitée, de sorte que le recourant, propriétaire du fond directement voisin de la parcelle n° 8730, dispose à cet égard d'un intérêt personnel et juridiquement protégé au sens de l'art. 88 OJ
1.3 Le recourant invoque en outre une application arbitraire de l'art. 973 CC. Dès lors que l'arrêt attaqué fonde la protection de la bonne foi de l'intimé sur l'art. 5 al. 3 Cst. et non sur la disposition précitée, ce moyen est dénué de pertinence. Au demeurant, dans la mesure où le recourant semble en réalité reprocher au Tribunal administratif d'avoir omis d'examiner l'art. 973 CC - qu'il considérait comme décisif et qu'il avait expressément invoqué - il aurait dû se prévaloir de l'art. 29 al. 2 Cst. pour se plaindre de la violation par l'autorité de son obligation de motivation; or il n'appartient pas au Tribunal fédéral d'examiner cette question d'office (art. 90 al. 1 let. b OJ). Le grief est donc irrecevable. 
1.4 Les exigences formelles des art. 86 ss OJ étant par ailleurs satisfaites, il y a lieu d'entrer en matière sur le recours dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Le recourant reproche à l'autorité attaquée d'avoir appliqué les dispositions cantonales de façon arbitraire; elle aurait autorisé un projet dépassant la limite de 25% posée par l'art. 59 al. 4 let. a LCI, en retenant à tort que le couvert à voitures était une construction de peu d'importance au sens de l'art. 3 al. 3 RALCI. 
2.1 Selon la jurisprudence, l'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait préférable; le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue en dernière instance cantonale que si elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté ou si elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice ou de l'équité. Il ne suffit pas que la motivation de la décision soit insoutenable; encore faut-il qu'elle soit arbitraire dans son résultat (ATF 131 I 217 consid. 2.1 p. 219, 57 consid. 2 p. 61; 129 I 173 consid. 3.1 p. 178; 128 I 273 consid. 2.1 p. 275). 
2.2 Aux termes de l'art. 59 al. 1 LCI, la surface de la construction, exprimée en m2 de plancher, ne doit pas excéder 20% de la surface de la parcelle. L'art. 59 al. 7 LCI précise que les constructions de peu d'importance (art. 3 al. 3 RALCI) ne sont pas prises en considération dans ce calcul. Lorsque les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, le département peut autoriser, après consultation de la commune et de la commission d'architecture, un projet de construction en ordre contigu (cf. art. 58 LCI) dont la surface de plancher habitable n'excède pas 25% de la surface du terrain (art. 59 al. 4 let. a LCI). De plus, un rapport de surfaces de 40% peut être autorisé exceptionnellement, moyennant l'accord de la commune exprimé sous la forme d'une délibération municipale (art. 59 al. 4 let. b LCI). Enfin, ces rapports de surfaces peuvent être augmentés respectivement à 22%, 27,5% et 44% pour les constructions "de haut standard énergétique" (modification du 27 août 2004, entrée en vigueur le 26 octobre 2004; ROLG 2004 638). 
2.3 Le projet autorisé consiste en une villa de trois niveaux (un étage sur rez et sous-sol), reliée par un couvert à une habitation existante située sur la parcelle 8730A. Que l'on considère la parcelle n° 8730 dans son ensemble (1150 m2) ou que l'on prenne en compte seulement la parcelle n° 8730B (720 m2) sur laquelle sera construite la villa, le seuil de 20% prévu par l'art. 59 al. 1 LCI est largement dépassé, de même que le seuil de 25% prévu par l'art. 59 al. 4 let. a LCI ([87 + 172,50 + 52,50] : 1150 x 100 = 27,13%; [172,50 + 52,50] : 720 x 100 = 31,25%). Le projet ne peut donc être autorisé en vertu de l'art. 59 al. 4 let. a LCI que si l'on considère le couvert à voitures comme une construction de peu d'importance, laquelle n'est pas prise en considération pour le calcul des surfaces, conformément à l'art. 59 al. 7 LCI ([87 + 172,50] : 1150 x 100 = 22,56%; 172,50 : 720 x 100 = 23.95%). 
2.4 
2.4.1 Aux termes de l'art. 3 al. 3 par. 1 RALCI, sont réputées constructions de peu d'importance, à la condition qu'elles ne servent ni à l'habitation, ni à l'exercice d'une activité commerciale, industrielle ou artisanale, celles dont la surface n'excède pas 50 m2 et qui s'inscrivent dans un gabarit limité par une ligne verticale dont la hauteur n'excède pas 2,50 m (let. a), une ligne oblique faisant avec l'horizontale partant du sommet de la ligne verticale un angle de 30 (let. b), une ligne horizontale de faîtage située à 4,50 m du sol au maximum (let. c). Dans le cadre d'un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d'habitat groupé, et afin d'améliorer l'insertion dans le site et pour autant qu'il n'en résulte pas de gêne pour le voisinage, le département peut autoriser, après consultation de la commission d'architecture, des constructions de peu d'importance groupées d'une surface de plus de 50 m2 au total (art. 3 al. 3 par. 2 RALCI, entré en vigueur le 11 novembre 2004). Dans tous les cas, la surface totale des constructions de peu d'importance ne doit pas excéder 8% de la surface de la parcelle et au maximum 100 m2 (art. 3 al. 3 par. 3 RALCI). 
2.4.2 En l'occurrence, la surface du couvert à voitures litigieux est de 52,50 m2 (7,50 m x 7 m). Le couvert est toutefois situé à cheval sur les deux futures parcelles n° 8730A et 8730B, de sorte que seuls 17,50 m2 (2,50 m x 7 m) seront situés sur la première et 35 m2 (5 m x 7 m) sur la seconde. Selon le département, une pratique cantonale constante veut que chaque parcelle soit prise en considération individuellement pour vérifier que la limite de 50 m2 est respectée. Bien que l'argumentation du Tribunal administratif soit à cet égard succincte, on comprend qu'elle se fonde sur cette pratique, puisque les deux parts du couvert sont prises en compte séparément. Peu importe que l'autorité attaquée se réfère à l'art. 3 al. 3 par. 3 RALCI en considérant que les parts du couvert, prises individuellement, restent en deçà de la limite de 100 m2, dès lors que celles-ci sont également inférieures à la limite de 50 m2 posée par l'art. 3 al. 3 par. 1 RALCI. Pour le surplus, la pratique susmentionnée n'est pas en contradiction flagrante avec le texte de l'art. 3 al. 3 RALCI et le recourant ne démontre pas en quoi elle serait manifestement insoutenable. Il y a donc lieu de constater que le Tribunal administratif n'a pas fait preuve d'arbitraire en considérant que le couvert à voitures litigieux était une construction de peu d'importance. Une telle construction n'étant pas comptée dans le calcul du rapport des surfaces, conformément à l'art. 59 al. 7 LCI, il y a lieu de constater que le projet litigieux ne dépasse pas la limite de 25% (172,50 : 720 x 100 = 23,95%). 
3. 
Il reste à examiner si le Tribunal administratif a retenu de manière arbitraire que le projet de l'intimé était une construction en ordre contigu, pouvant être autorisée sur la base de l'art. 59 al. 4 let. a LCI. 
Aux termes de l'art. 58 al. 2 LCI, est réputée en ordre contigu l'édification de deux maisons au moins, réunies par un mur mitoyen ou par une construction de peu d'importance et disposant chacune de son propre accès de plain-pied. Le projet autorisé répond pleinement à cette définition. Quoi qu'en dise le recourant, il n'est pas exigé que les deux maisons soient construites simultanément, ni qu'elles soient alignées et semblables sur le plan architectural. Faute de précisions supplémentaires du législateur cantonal, il n'est en tout cas pas arbitraire de considérer que le projet litigieux est bien une construction en ordre contigu au sens de la disposition précitée. Mal fondé, ce grief doit donc également être rejeté. 
4. 
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté, dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, doit supporter les frais de la présente procédure (art. 153, 153a et 156 al. 1 OJ). L'intimé, qui s'est déterminé, a droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 3000 fr. est mis à la charge du recourant. 
3. 
Le recourant versera à l'intimé une indemnité de 2000 fr. à titre de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, au Département des constructions et des technologies de l'information et au Tribunal administratif du canton de Genève. 
Lausanne, le 3 avril 2006 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: