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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_131/2021  
 
 
Arrêt du 4 janvier 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix, Haag, Müller et Merz. 
Greffier : M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
Helvetia Nostra, représentée par Me Céline Vara, avocate, 
recourante, 
 
contre  
 
Département de la jeunesse, de l'environnement et de la sécurité du canton de Vaud (DJES), place du Château 4, 1014 Lausanne, représenté par la Direction générale de l'environnement du canton de Vaud (DGE), Unité droit et études d'impact, avenue de Valmont 30b, 1014 Lausanne, 
Municipalité de Provence, route de Changebois 12, 1428 Provence. 
 
Objet 
Décision de classement du Haut Plateau du Creux du Van, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton 
de Vaud, Cour de droit administratif et public, du 9 février 2021 (AC.2020.0048). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le Creux du Van est un cirque de falaises d'environ 400 mètres de haut formant un demi-cercle d'environ un kilomètre de diamètre, situé principalement (soit le cirque lui-même et la falaise, ainsi que les parties nord et sud du plateau sommital) en territoire neuchâtelois. La partie centrale du plateau sommital et le bord de la falaise, à une altitude d'environ 1440 m, se trouvent partiellement sur territoire vaudois (commune de Provence). Le site est inscrit comme objet 1004 (Creux du Van et Gorges de l'Areuse) à l'inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale (inventaire IFP), qui couvre une surface totale de 2121 ha dont, au sud, une surface de 74 ha située sur le territoire de la commune de Provence. 
Les autorités des cantons de Vaud et de Neuchâtel se sont coordonnées en vue de mettre en oeuvre des mesures de protection de ce site, soumis à une pression croissante à la fois touristique et agricole. Les autorités neuchâteloises ont décidé d'établir un plan d'affectation cantonal (PAC; cf. arrêt de ce jour dans la cause 1C_237/2021). Pour la partie vaudoise, le Département cantonal du territoire et de l'environnement (DTE, désormais: Département de la jeunesse, l'environnement et de la sécurité - DJES) a choisi d'adopter une décision de classement (DC) au sens des art. 20 ss de la loi vaudoise du 10 décembre 1969 sur la protection de la nature, des monuments et des sites (LPNMS; RS/VD 450.11). 
Le 21 janvier 2020, après mise à l'enquête et complément, la cheffe du DTE a adopté la décision de classement qui concerne trois parcelles: n° 2059 (partie de l'alpage du Soliat, qui s'étend jusqu'au bord de la falaise); n° 2058 (partie de l'alpage de La Baronne); n° 2445 (partie de l'alpage du Sétif). Le plan d'ensemble distingue des secteurs sylvo-pastoraux I, II et III et des secteurs de forêt parcourue. Un plan de détail "aire de protection floristique" concerne le bord de la falaise avec un périmètre interdit, un périmètre accessible et aménageable et deux périmètres "points de vue". Les deux plans mentionnent le réseau pédestre, le réseau vélos tout terrain (VTT) ainsi qu'un tracé "manifestations sportives d'envergure". Un troisième plan mentionne les tracés hivernaux (ski de fond, raquettes et ski de randonnée). Selon le règlement de la décision de classement (ci-après: le règlement, art. 3), les objectifs du classement sont la conservation de la qualité du paysage naturel, la restauration des éléments caractéristiques dégradés, le maintien des espèces prioritaires ou caractéristiques, le maintien d'une exploitation agricole et forestière mettant en valeur la biodiversité ainsi que l'accueil, la canalisation et l'information du public. L'opposition formée par Helvetia Nostra a été écartée. 
 
B.  
Par arrêt du 9 février 2021, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois (CDAP) a rejeté le recours d'Helvetia Nostra et a confirmé la décision de classement. La question de la qualité pour agir de la recourante, fondée sur l'art. 12 de la loi fédérale sur la protection de la nature et du paysage (LPN; RS 451) et l'existence d'une tâche de la Confédération, a été laissée indécise. Le principe de coordination n'imposait pas que le plan de gestion intégrée (PGI) de l'alpage du Soliat soit adopté simultanément au classement. Le périmètre du plan de classement comprenait au sud-est 8,5 hectares de prairies et pâturages secs (PPS) inscrits à l'inventaire fédéral (objet n° 6026); cette surface était comprise dans le secteur sylvo-pastoral protégé I, ce qui lui assurait une protection suffisante. La piste de VTT empruntait la route forestière existante et ne générait pas d'atteinte. La décision de classement était également compatible avec les objectifs de protection de l'objet IFP n° 1004; la mesure de classement ne créait pas de nouvelles atteintes liées à la fréquentation touristique justifiant une pesée d'intérêts. Les atteintes existantes étaient minimes et les parcours autorisés étaient clairement définis de manière à canaliser le public. S'agissant des deux voies d'escalade autorisées, seule une d'entre elles (couloir du Pharmacien) aboutissait - sur territoire vaudois - à l'emplacement d'un point de vue accessible. Des constructions et aménagements étaient possibles, mais devaient faire l'objet d'une procédure ultérieure dans laquelle la conformité au droit fédéral serait examinée. Les cheminements hivernaux permettaient aussi d'éviter la dispersion des randonneurs. La proximité d'un district franc fédéral n'imposait pas une interdiction de la chasse dans le périmètre. La possibilité d'accorder des dérogations aux mesures de protection ne violait pas la loi. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, Helvetia Nostra demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal et de renvoyer la cause à l'instance précédente dans le sens des considérants. 
La CDAP renonce à se déterminer et se réfère à son arrêt. La Direction générale de l'environnement du canton de Vaud (DGE) conclut à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet du recours. Invité à présenter des observations, l'Office fédéral de l'environnement (OFEV) considère que l'arrêt attaqué est conforme au droit fédéral, sous réserve d'un suivi des mesures et d'un contrôle d'impact s'agissant de la piste VTT empiétant sur des PPS et des deux voies d'escalade. Dans ses dernières observations, la recourante persiste dans ses conclusions. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 147 II 300 consid. 1). 
 
1.1. Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans le domaine du droit public (art. 82 let. a LTF), le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée.  
 
1.2. En vertu de l'art. 89 al. 2 let. d LTF, ont qualité pour former un recours en matière de droit public les personnes, organisations et autorités auxquelles une autre loi fédérale accorde un droit de recours.  
 
1.2.1. L'art. 12 al. 1 let. b LPN confère la qualité pour recourir contre les décisions des autorités fédérales ou cantonales aux organisations actives au niveau national qui se vouent à la protection de la nature, à la protection du paysage, à la conservation des monuments historiques ou à des tâches semblables, dans les domaines du droit visés depuis dix ans au moins par leurs statuts. L'habilitation prévue par l'art. 12 al. 1 LPN concerne toutefois exclusivement le recours contre des décisions prises dans l'accomplissement de tâches de la Confédération selon les art. 78 al. 2 Cst. et 2 LPN; l'art. 12 LPN est en effet in--clus dans le chapitre premier de cette loi, intitulé "Protection de la nature et du paysage lors de l'accomplissement de tâches de la Confédération" (ATF 138 II 281 consid. 4.4; 121 II 190 consid. 2c; 120 Ib 27 consid. 2c; arrêt 1C_636/2015 du 26 mai 2016 consid. 2.1, publié in DEP 2016 p. 597). Selon la jurisprudence, il incombe à la partie recourante d'alléguer, sous peine d'irrecevabilité, les faits qu'elle considère comme propres à fonder sa qualité pour agir, lorsqu'ils ne ressortent pas de façon évidente de la décision attaquée ou du dossier (ATF 139 II 499 consid. 2.2; arrêt 1C_554/2019 du 5 mai 2020).  
 
1.2.2. Helvetia Nostra est reconnue comme association d'importance nationale vouée à la protection de l'environnement, de la nature et du paysage (cf. ch. 9 de l'annexe à l'ordonnance relative à la désignation des organisations habilitées à recourir dans les domaines de la protection de l'environnement ainsi que de la protection de la nature et du paysage du 27 juin 1990 [ODO; RS 814.076]). S'agissant de l'existence d'une tâche de la Confédération, la recourante relève que le site du Creux du Van est un espace vital pour des espèces animales et végétales menacées et constituerait un biotope digne de protection au sens des art. 18 al. 1 LPN et 14 de l'ordonnance sur la protection de la nature (OPN; RS 451.1). Il est en outre inventorié comme objet PPS et constituerait aussi à ce titre un biotope (art. 18a LPN). La protection de tels biotopes serait une compétence de la Confédération. La recourante se prévaut aussi du fait que l'ensemble du périmètre fait partie de l'objet IFP n° 1004 dont la protection constituerait une tâche fédérale déléguée au canton. Enfin, une partie du périmètre serait constituée de forêts au sujet desquelles les plans de gestion intégrée (PGI) prévoient des mesures d'exploitation.  
 
1.2.3. Selon la jurisprudence, les organisations de protection de la nature et du paysage sont légitimées à recourir contre les mesures d'aménagement du territoire (qu'il s'agisse d'un plan d'affectation ou, comme en l'espèce, d'une décision de classement) lorsque sont concernés des objets que les cantons sont tenus de protéger en vertu du droit fédéral. Tel est le cas des biotopes dignes de protection au sens de l'art. 18a LPN (ATF 142 II 509 consid. 2.5 et les références). Comme cela ressort de l'arrêt attaqué, le plateau sommital du Creux du Van abrite des biotopes, notamment 8,5 ha de prairies et pâturages secs d'importance nationale inscrits à l'inventaire fédéral des PPS sous le n° 6026. Il s'agit d'un biotope au sens de l'art. 18a LPN, ce qui suffit pour admettre la légitimation de la recourante.  
La DGE estime que la recourante n'aurait pas allégué la présence de biotopes en instance cantonale pour fonder sa qualité pour agir. Il ne s'agit toutefois pas d'un fait nouveau dès lors que la présence de tels biotopes est constatée dans l'arrêt attaqué. En outre, dès lors que la question de la protection des biotopes relève du droit fédéral, que le Tribunal fédéral est tenu de l'examiner d'office (art. 106 al. 1 LTF) et que la recourante pouvait dès lors la soulever pour la première fois à ce stade, l'absence d'allégation devant l'instance précédente ne porte pas à conséquence du point de vue de la recevabilité du recours. 
Il s'ensuit que la qualité pour agir doit être reconnue à la recourante. 
 
1.3. Conformément à l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté devant le Tribunal fédéral, à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente. Cette exception vise les faits qui sont rendus pertinents pour la première fois par la décision attaquée. En dehors de ces cas, les nova ne sont pas admissibles, qu'il s'agisse de faits ou moyens de preuve survenus postérieurement à la décision attaquée ou d'éléments que les parties ont négligé de présenter aux autorités cantonales (ATF 143 V 19 consid. 1.2). Conformément à cette règle, le test de restauration de végétation produit par la DGE avec sa réponse au recours, daté du 23 mars 2021 et donc postérieur à l'arrêt attaqué, est irrecevable et il ne peut en être tenu compte.  
 
2.  
Se plaignant d'une constatation manifestement inexacte des faits, la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir considéré que le site n'avait pas jusque-là subi d'atteinte grave, suivant en cela l'appréciation du DJES, alors qu'il ressortait du rapport explicatif de la DGE du 31 octobre 2017 concernant la décision de classement que la très forte affluence de visiteurs entraînait un piétinement intense de la végétation entre le mur et la falaise (laissant apparaître la dalle), avec un processus de dégradation rapide et la régression ou la disparition de plusieurs espèces floristiques; les pâturages seraient touchés à grande échelle avec la raréfaction de certaines espèces emblématiques; en outre, un broyage de la couche supérieure du sol (girobroyage) aurait eu lieu en 2003-2004 sur une surface de pâturage rocheux près du sommet. Dans son avis du 20 mars 2017, l'OFEV faisait état d'une importante dégradation de la végétation dans le périmètre, y compris dans les PPS d'importance nationale, ce qui l'avait conduit à préconiser un suivi des mesures. L'OFEV avait aussi retenu que la situation continuait de se dégrader, de sorte que la cour cantonale ne pouvait affirmer que les objectifs de protection ne sont pas gravement compromis dans la situation actuelle. La recourante reproche également à la cour cantonale d'affirmer que les éléments marquants du site seraient conservés, que la mesure de protection ne créerait pas d'atteintes nouvelles et que l'impact de la chasse serait insignifiant. 
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 142 I 155 consid. 4.4.3). La recourante ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 145 V 188 consid. 2). La recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (art. 106 al. 2 LTF). Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur des critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou sur l'appréciation des preuves (ATF 145 V 188 consid. 2). S'agissant de l'appréciation des preuves et des constatations de fait, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1).  
 
2.2. Les différentes atteintes au site du Creux du Van sont mentionnées à plusieurs reprises dans l'arrêt attaqué. Dans sa partie en fait, la CDAP reprend les objectifs de la décision de classement en rappelant que la très forte affluence de visiteurs se marque dans le secteur du Solliat et plus spécialement sur le sentier du bord du cirque, où le piétinement intense entraîne la destruction de la végétation naturelle et l'érosion du sol. L'exploitation des pâturages s'est intensifiée et l'augmentation significative de la charge en bétail entraîne une banalisation de la flore (let. B). Dans ses considérants en droit, l'arrêt attaqué rappelle les atteintes existantes telles qu'évoquées par la recourante (consid. 4c). Reprenant ensuite l'énumération de ces atteintes dans la réponse du département cantonal (lequel se réfère au rapport explicatif de la DGE précité), il indique que celles-ci "proviennent de l'intensification agricole, des dérangements de la faune, de la dégradation de la végétation sur le sentier de la falaise, de l'abroutissement excessif de la flore des vires rocheuses et des sous-bois par les ongulés, ainsi que des dommages causés par les sangliers... Malgré des dégradations localement importantes, aucun des éléments justifiant l'importance nationale du site dans son ensemble n'est gravement atteint et aucun de ses objectifs de protection n'est gravement compromis dans la situation actuelle". L'arrêt attaqué explique ainsi que, s'agissant des atteintes localisées (soit celles qui sont liées à la fréquentation du sentier bordant la falaise), elles apparaissaient limitées à l'échelle du site. Le secteur visé est en effet essentiellement celui qui fait l'objet dans la décision de classement, du périmètre de protection floristique, soit l'étroite bande de terrain longeant la falaise, de part et d'autre du mur de pierres sèches. A l'échelle du périmètre du plan, force est de reconnaître qu'il s'agit d'une surface limitée justifiant l'appréciation de fait de la cour cantonale. Le girobroyage mentionné par la recourante constitue une atteinte unique et ponctuelle sur laquelle la décision de classement n'a pas d'effet. Les autres atteintes ont été qualifiées de diffuses puisqu'elles concernaient d'une part le dérangement de la faune et d'autre part l'intensification agricole. Ainsi, même si elles ne sont pas décrites dans le plus grand détail, l'ensemble des atteintes au site est relevé correctement du point de vue des faits.  
L'arrêt attaqué retient également que les éléments marquants du site ont été conservés, mais ne précise nullement quels sont ces éléments, alors que la recourante relève que de nombreuses espèces végétales ont régressé ou ont disparu et que le bord de la falaise serait fortement dégradé. La recourante conteste également l'affirmation de la cour cantonale selon laquelle la décision de classement ne causerait aucune nouvelle atteinte; elle relève que cette décision prévoit de nouveaux aménagements (cheminements pour piétons et VTT et points de vue), et prévoit d'autoriser les constructions nécessaires à l'exploitation forestière et agricole. Comme on le verra, les aménagements en question ont pour objectif une réduction importante des nuisances existantes. Les nouvelles atteintes, très limitées, sont ainsi à tout le moins compensées de sorte que la constatation de l'instance cantonale n'apparaît pas arbitraire. 
L'arrêt attaqué retient enfin que l'impact des chasseurs sur la végétation est négligeable et que les coups de feu et les chiens ne sont pas de nature à causer de graves dérangements. La recourante estime que cette assertion ne reposerait sur aucun élément du dossier, mais elle ne tente pas pour autant de démontrer qu'elle serait manifestement erronée ou contraire à l'une ou l'autre des pièces du dossier. 
En définitive, aucun des éléments de fait dont se prévaut la recourante n'a été formellement écarté par la cour cantonale, de sorte que la recourante est libre de les reprendre dans son argumentation juridique pour autant qu'ils ressortent du dossier. Les griefs relatifs à l'établissement des faits doivent ainsi être écartés dans la mesure où ils ne sont pas appellatoires. 
 
3.  
Sur le fond, la recourante se plaint d'une violation des art. 1 et 2 LAT (RS 700) et 2 et 3 OAT (RS 700.1). La cour cantonale aurait considéré qu'il n'y avait pas lieu de procéder à une pesée d'intérêts dès lors que la décision de classement ne prévoyait pas de nouvelles infrastructures ou installations et qu'elle ne créait pas de nouvelle atteinte au site. La recourante relève qu'à l'instar d'un plan d'affectation (art. 17 al. 1 LAT) le classement nécessitait une mise à l'enquête et impliquait une pesée de l'ensemble des intérêts en présence au sens de l'art. 3 OAT. Pour la recourante, le contrôle de l'adéquation des mesures de protection ne remplacerait pas une telle pesée d'intérêts, en présence des nouvelles atteintes que constituent l'aménagement de chemins pour piétons, de points de vue et de balisage, ainsi que l'autorisation des constructions nécessaires aux exploitations agricoles et forestières. La recourante invoque aussi à ce sujet le principe de coordination matérielle (art. 25a LAT), applicable selon elle à une décision de classement. 
 
3.1. Selon l'art. 6 al. 1 LPN, l'inscription d'un objet d'importance nationale dans un inventaire fédéral indique que l'objet mérite spécialement d'être conservé intact ou en tout cas d'être ménagé le plus possible, y compris au moyen de mesures de reconstitution ou de remplacement adéquates. Lorsqu'il s'agit de l'accomplissement d'une tâche de la Confédération la règle suivant laquelle un objet doit être conservé intact dans les conditions fixées par l'inventaire ne souffre d'exception que si des intérêts équivalents ou supérieurs, d'importance nationale également, s'opposent à cette conservation (art. 6 al. 2 LPN). Cette disposition accorde un poids prioritaire à la conservation des objets d'importance nationale inventoriés; cela ne signifie cependant pas qu'aucune pesée des intérêts ne soit nécessaire, mais seuls des intérêts d'importance nationale peuvent entrer en considération pour justifier une dérogation à l'art. 6 al. 1 LPN (arrêts 1C_116/2020 du 21 avril 2021 consid. 4.4.1; 1C_347/2016 du 5 septembre 2017 consid. 3.1; 1C_360/2009 du 3 août 2010 consid. 3.1; 1A.185/2006 du 5 mars 2007 consid. 7.1). A contrario et en dépit de l'accomplissement d'une tâche fédérale, lorsque l'objet protégé n'est pas touché de manière sensible (ou grave), il suffit de procéder à une pesée libre des intérêts au sens de l'art. 3 OAT, tout en veillant cependant à ménager le plus possible l'objet inventorié (cf. art. 6 al. 1 LPN; arrêts 1C_116/2020 du 21 avril 2021 consid. 4.4.1; 1C_360/2009 du 3 août 2010 consid. 3.2).  
L'art. 5 de l'ordonnance fédérale concernant l'IFP (OIFP; RS 451.11) précise qu'il faut veiller à conserver intacts les caractéristiques paysagères naturelles et culturelles des objets ainsi que leurs éléments marquants. S'agissant des biotopes d'importance nationale, l'art. 18a al. 2 LPN prévoit que leur protection est réglée par les cantons, lesquels prennent à temps les mesures appropriées et veillent à leur exécution. L'art. 14 OPN prévoit en particulier que cette protection doit assurer, notamment de concert avec la compensation écologique (art. 15 OPN) et les dispositions relatives à la protection des espèces (art. 20 OPN), la survie de la flore et de la faune sauvage indigènes (al. 1). Elle est notamment assurée par: a) des mesures visant à sauvegarder et, si nécessaire, à reconstituer leurs particularités et leur diversité biologique; b) un entretien, des soins et une surveillance assurant à long terme l'objectif de la protection; c) des mesures d'aménagement permettant d'atteindre l'objectif visé par la protection, de réparer les dégâts existants et d'éviter des dégâts futurs; d) la délimitation de zones tampon suffisantes du point de vue écologique; e) l'élaboration de données scientifiques de base (al. 2). Les biotopes sont désignés comme étant dignes de protection sur la base: a) de la liste des milieux naturels dignes de protection figurant à l'annexe 1, caractérisés notamment par des espèces indicatrices; b) des espèces de la flore et de la faune protégées en vertu de l'art. 20 OPN; d) des espèces végétales et animales rares et menacées, énumérées dans les Listes rouges publiées ou reconnues par l'OFEV; e) d'autres critères, tels que les exigences des espèces migratrices ou la connexion des sites fréquentés par les espèces (al. 3). Selon l'alinéa 6 de cette même disposition, une atteinte d'ordre technique qui peut entraîner la détérioration de biotopes dignes de protection ne peut être autorisée que si elle s'impose à l'endroit prévu et qu'elle correspond à un intérêt prépondérant. 
Pour l'évaluation du biotope lors de la pesée des intérêts, outre le fait qu'il soit digne de protection selon l'al. 3, les caractéristiques suivantes sont notamment déterminantes: a) son importance pour les espèces végétales et animales protégées, menacées et rares; b) son rôle dans l'équilibre naturel; c) son importance pour la connexion des biotopes entre eux; d) sa particularité ou son caractère typique. Enfin, selon l'art. 14 al. 7 OPN, l'auteur ou le responsable d'une atteinte doit être tenu de prendre des mesures optimales pour assurer la protection, la reconstitution ou, à défaut, le remplacement adéquat du biotope. 
 
3.2. La protection des sites protégés ou des biotopes peut se faire soit par la délimitation de zones à protéger par le biais d'un plan d'affectation (art. 17 al. 1 LAT), soit au moyen d'autres mesures adéquates au sens de l'art. 17 al. 2 LAT. Tel est le cas de la mesure de classement adoptée par le canton de Vaud en application des art. 20 ss de la loi vaudoise sur la protection de la nature, des monuments et des sites (LPNMS; RS/VD 450.11). Cette mesure a été préférée à celle d'un plan d'affectation (tel qu'adopté dans le même contexte par les autorités neuchâteloises) en raison du fait que le périmètre était restreint et qu'il ne comportait qu'une seule affectation de base (zone agropastorale). La recourante ne conteste d'ailleurs pas ce choix, qui apparaît conforme au droit fédéral. Selon l'art. 20 LPNMS, pour assurer la protection d'un objet digne d'intérêt au sens de l'article 4 de la loi, il peut être procédé à son classement, par voie de décision, assorti au besoin d'un plan de classement. Selon l'art. 21 LPNMS, la décision de classement définit: l'objet classé et l'intérêt qu'il présente (a); les mesures de protection déjà prises (b); les mesures de protection prévues pour sa sauvegarde, sa restauration, son développement et son entretien (c). La procédure est la même que pour l'adoption d'un plan d'affectation (art. 24 LPNMS). Comme le relève la recourante, une telle mesure impose, conformément à l'art. 3 OAT, une pesée d'intérêts tenant compte de l'importance des atteintes prévisibles, de l'intérêt public lié à la réalisation du projet et de l'efficacité des mesures de compensation (arrêt 1C_628/2019 du 22 décembre 2021 consid. 7.1).  
 
3.3. La recourante invoque l'art. 6 al. 2 LPN; elle considère que la protection d'un objet figurant à l'IFP relèverait de l'accomplissement d'une tâche fédérale, ce qui impliquerait que l'objet en question devrait demeurer intact. En réplique, elle estime que les atteintes autorisées (création d'une voie VTT sur le chemin existant, autorisation de l'escalade sur deux voies, utilisation de la fumure sur les surfaces dégradées) porteraient atteinte aux objectifs de protection posés par l'IFP. Elle estime en outre que cette atteinte serait grave. Comme cela est relevé ci-dessus, l'art. 6 al. 2 LPN n'a de portée que dans l'accomplissement des tâches fédérales telles que mentionnées aux art. 2 et 3 LPN, et en cas d'atteinte grave (art. 6 al. 2 OIFP). Tel n'est pas le cas d'une décision de classement destinée à assurer la protection de la nature et du patrimoine, de la compétence cantonale (art. 78 al. 1 Cst.; ATF 135 II 209 consid. 2.1). Si la mesure en question ne va pas aussi loin que le voudrait la recourante, elle ne cause aucune atteinte nouvelle par rapport à l'état existant. En autorisant la fréquentation des lieux par les visiteurs, elle laisse certes subsister quelques atteintes, lesquelles peuvent toutefois être qualifiées, comme on le verra, de résiduelles. Pour l'essentiel, elle tend à limiter dans le temps et l'espace l'impact des différentes activités humaines (tourisme pédestre, VTT, sports d'hiver, escalade, agriculture). La pesée d'intérêt n'est dès lors pas une pesée qualifiée au sens de cette disposition (nécessitant l'existence d'un intérêt national), mais une pesée libre. Elle doit toutefois être effectuée en tenant compte de l'objet de la mesure en question, qui n'est pas la construction de nouvelles installations ou d'infrastructures touristiques, mais essentiellement la protection du site. Dans un tel contexte, il n'y a pas à mettre en balance l'intérêt à la réalisation d'un projet concret et l'intérêt - opposé - à la conservation du site, mais il s'agit de déterminer si les mesures prises satisfont aux objectifs de protection tels qu'ils résultent notamment des inventaires fédéraux. En affirmant qu'il s'agissait avant tout d'un examen d'adéquation, la cour cantonale n'a donc nullement violé le droit fédéral. Au demeurant, l'arrêt attaqué procède à une pesée classique des intérêts lorsqu'il examine si et dans quelle mesure le maintien des activités touristiques (randonnée, VTT, ski, etc.) est compatible avec l'objectif de protection. Le grief doit par conséquent être écarté.  
 
4.  
L'art. 25a LAT énonce des principes en matière de coordination lorsque l'implantation ou la transformation d'une construction ou d'une installation nécessite des décisions émanant de plusieurs autorités. Une autorité chargée de la coordination doit en particulier veiller à ce que toutes les pièces du dossier de demande d'autorisation soient mises simultanément à l'enquête publique (art. 25a al. 2 let. b LAT) et à ce qu'il y ait une concordance matérielle des décisions ainsi que, en règle générale, une notification commune ou simultanée (art. 25a al. 2 let. d LAT); ces décisions ne doivent pas être contradictoires (art. 25a al. 3 LAT). Le contenu ou l'ampleur de la coordination exigée ressort des principes généraux (notamment de la nécessité d'effectuer une pesée globale des intérêts, dans la mesure où elle est exigée dans le droit de la construction et de l'aménagement) ou de prescriptions spéciales (arrêts 1C_449/2020 du 26 août 2021 consid. 6.1; 1C_242/2019 du 7 avril 2020 consid. 2.1). 
La recourante ne soutient pas que la décision de classement souffrirait d'un défaut de coordination sur un point particulier, notamment avec les mesures de protection décidées parallèlement par les autorités neuchâteloises. Son grief consiste à affirmer qu'il n'y aurait pas eu de pesée des intérêts. En cela, il se recoupe entièrement avec le grief précédent et doit être rejeté dans la même mesure. 
 
5.  
Relevant l'importance du site, inscrit à l'IFP ainsi que dans l'inventaire PPS et contenant en outre plusieurs biotopes, la recourante insiste sur la nécessité de le maintenir intact (art. 6 LPN, 5 OIFP et 18a LPN). La décision de classement elle-même aurait pour but la conservation, la gestion voire la restauration des éléments caractéristiques. Le maintien - et l'augmentation ces dernières années - de la fréquentation par des visiteurs, avec les atteintes actuelles qui en découlent, ne permettrait pas de diminuer la pression sur les tracés, tant sur le plateau sommital que sur le bord de la falaise, et compromettrait tout objectif de restauration. La canalisation et la sensibilisation des visiteurs seraient des mesures insuffisantes puisqu'elles dépendraient de la bonne coopération du public et que l'interdiction actuelle de circuler en VTT n'est pas respectée. L'absence de sanctions rendrait ces mesures inefficaces. Seule une réduction du tourisme permettrait d'atteindre les objectifs de protection et de restauration. S'agissant des chemins VTT, la création d'une nouvelle liaison empruntant partiellement le chemin pour piétons pourrait générer des conflits augmentant la pression sur les milieux naturels; les aménagements et le balisage porteraient de nouvelles atteintes aux PPS. La recourante estime encore que la chasse devrait être interdite dans le périmètre de la décision de classement, tout comme l'escalade. 
 
5.1. La protection des objets portés à l'IFP est régie à l'art. 6 al. 1 LPN précité ainsi qu'à l'art. 5 OIFP, dont la teneur est la suivante:  
 
1 Les caractéristiques paysagères naturelles et culturelles des objets ainsi que leurs éléments marquants doivent être conservés intacts. 
2 Lorsque les objectifs de protection spécifiques aux objets sont fixés, il convient de tenir compte en particulier: 
a. des formes géomorphologiques et tectoniques ainsi que des formations géologiques remarquables (géotopes); 
b. de la dynamique naturelle du paysage, en particulier celle des eaux; 
c. des milieux naturels dignes de protection avec la diversité de leurs espèces caractéristiques et leurs fonctions importantes, notamment pour leur mise en réseau; 
d. du caractère intact et de la tranquillité des objets, dans la mesure où ils représentent une caractéristique spécifique; 
e. des paysages avec leurs éléments typiques quant aux structures d'habitat et aux formes d'exploitation agricole et sylvicole, aux bâtiments, aux installations, aux éléments caractéristiques du paysage et au patrimoine historico-culturel; leur gestion et leur évolution doivent rester possibles à long terme en fonction des caractéristiques des objets. 
 
5.2. L'objet IFP 1004 "Creux du Van et Gorges de l'Areuse", d'une surface de 2121 ha et s'étendant sur sept communes neuchâteloises et la commune vaudoise de Provence, constitue une vaste entité paysagère dominée par la verticalité du Creux du Van et la naturalité des Gorges de l'Areuse, le tout relié par une forêt abrupte sauvage et très diversifiée. Le périmètre de la décision de classement occupe l'extrémité ouest du site. Occupant un pli jurassien, le Creux du Van forme un demi-cercle de falaises de près de 400 m de haut. Le demi-cercle presque parfait de son flanc érodé est souligné par la régularité des strates de roches, bien visibles dans sa moitié supérieure au-dessus des dépôts d'éboulis, et jusqu'au sommet. Le plateau sommital, très vaste et irrégulièrement boisé, se caractérise par de vastes pâturages secs et offre une vue dégagée sur les Alpes ainsi que sur le lac de Neuchâtel. Une mosaïque de milieux très différents et contrastés confère à ce paysage un aspect naturel et sauvage (IFP 1004, Description, 2.1 Caractère du paysage). Du point de vue géologique, le Creux du Van est constitué par une spectaculaire falaise de calcaire entaillant sur près de 200 m l'anticlinal du Soliat et dominant une large combe d'érosion (2.2 Géologie et géomorphologie). S'agissant des milieux naturels (2.3), le cirque abrite, avec des hautes falaises calcaires et ses vastes surfaces d'éboulis, une flore rupestre diversifiée comprenant des espèces rares et en danger, comme l'Arabette auriculée. L'avifaune est présente avec de nombreuses espèces, les falaises constituant le seul lieu de nidification du Martinet à ventre blanc dans l'arc jurassien. Le plateau sommital abrite de nombreux milieux herbacés caractérisés par des pâturages boisés (habitat privilégié pour les tétraonidés tels que la Gélinotte des bois, une espèce en danger) et des pâturages secs d'importance nationale. Les pelouses mi-sèches médio-européennes, les pelouses calcaires sèches à seslérie et les pâturages maigres acides sont présents en proportion exceptionnelle et abritent de nombreuses espèces de rhopalocères (papillons de jour). S'agissant enfin du paysage historico-culturel (2.4), le Creux du Van ne porte que peu l'empreinte des activités humaines: les pâturages de la zone sommitale sont parsemés de chalets et séparés par plusieurs murs de pierres sèches, dont le long mur qui borde la falaise.  
La justification de l'importance nationale réside dans la "vaste entité paysagère dominée par la verticalité du Creux du Van et la naturalité des Gorges de l'Areuse, le tout relié par une forêt sauvage et très diversifiée" (IFP 1004, ch. 1.1). Pour la partie concernée par la décision de classement, il s'agit des éléments suivants: haute falaise calcaire en forme de demi-cercle, formation géologique unique (1.2); vaste zone forestière d'un seul tenant (1.6); mosaïque paysagère de forêts, prairies, pâturages secs et terrains rocheux (1.7); vaste complexe de prairies et pâturages secs et flore subalpine en station de basse altitude (1.8); grande richesse floristique et faunistique (1.9). Les objectifs de protection sont, pour le secteur concerné: conserver la qualité du paysage naturel (3.1); conserver les formes géologiques et géomorphologiques, en particulier le cirque et sa silhouette (3.2); conserver la qualité, la variété et l'étendue de la zone forestière et assurer la tranquillité de ces espaces (3.4); conserver la qualité biologique et paysagère des prairies sèches et des pâturages boisés dans leur étendue (3.5); conserver la mosaïque de milieux naturels (3.6); conserver la diversité floristique et faunistique et en particulier les espèces caractéristiques (3.8); conserver la zone en tant qu'habitat privilégié pour la faune sauvage (3.9); conserver une utilisation agro-pastorale adaptée au contexte local et permettre son évolution (3.10); conserver les structures et éléments paysagers caractéristiques tels que, notamment, les clairières et les murs de pierres sèches (3.11). 
Le rapport explicatif de la DGE du 31 octobre 2017 distingue deux sortes d'atteintes au site: la pression du public fréquentant les lieux et l'intensification agricole (p. 11 ss). Selon une estimation réalisée en 2014, la fréquentation des lieux entre mai et juin était en moyenne de plus de 15'000 visiteurs par mois (ce qui représente une moyenne de 500 visiteurs par jour), avec un pic de 3'458 visiteurs le dimanche de Pentecôte. En hiver, les visiteurs sont estimés entre 10 et 40 (marche, ski, raquettes), les 2/3 des traces ne suivant ni les routes ni les sentiers. Cette forte affluence est majoritairement marquée dans le secteur du Soliat et plus spécialement sur le sentier du bord du cirque. Elle entraîne un piétinement intense de la végétation entre le mur et la falaise, puis l'érosion du sol et finalement la mise à nu de la dalle. Dans les secteurs les plus fréquentés, la dégradation est rapide. La fréquentation disséminée sur l'ensemble du site occasionne par ailleurs des dérangements pour la faune sauvage, notamment pour diverses espèces d'oiseaux rupestres (faucon pèlerin) et pour le bétail. Elle est également à l'origine de dépôts de déchets dans le pâturage ou de places à feux (rapport p. 12). S'agissant de l'intensification agricole sur les alpages du Soliat et du Sétif, le rapport met en évidence une détérioration de la composition floristique avec une raréfaction des espèces emblématiques et une extension des espèces banales (50% des PPS en 2010). La pression de pâture est moyenne à forte, des surfaces ont été fertilisées sans autorisation en 2014. Les genévriers ont été éliminés et les dolines, abritant des espèces sensibles, subissent également cette pression; la régénération du boisé est compromise. Plusieurs espèces emblématiques des pâturages maigres ont fortement régressé (anémone à fleurs de narcisses, pulsatille des Alpes, gentiane de Koch, gentiane champêtre, orchis vanillé). Certaines ont disparu, comme le lycopode des Alpes. L'engraissement de la végétation est également défavorable aux espèces animales liées aux milieux maigres, comme l'Alouette lulu. La tendance à l'intensification des exploitations agricoles pourrait compromettre la conservation des PPS (rapport, pp. 12-13). Le rapport indique encore qu'un gyrobroyage effectué en 2003-2004 d'une surface de pâturage proche du sommet vaudois a entraîné la disparition du relief rocheux abritant certaines espèces emblématiques du site. 
Les principes et objectifs de la décision de classement sont de tenir compte des enjeux écologiques et paysagers en prévoyant l'accueil, la canalisation et l'information du public d'une part, et en intégrant les intérêts agronomiques et sylvicoles d'autre part. Les deux principes généraux sont que les éléments caractéristiques doivent être conservés, gérés, voire restaurés, et que les activités doivent être conformes aux objectifs de protection, qu'il s'agisse notamment d'exploitation forestière ou de loisirs. Toute activité non conforme est interdite, comme le camping, les feux hors des endroits aménagés, la pratique de certains sports, les chiens non tenus en laisse, le dépôt de déchets ou la cueillette. 
 
5.3. Les objectifs de protection fixés dans l'IFP - qui tendent essentiellement à la conservation de l'état actuel - n'excluent nullement, contrairement à ce que soutient la recourante, la fréquentation du site au titre notamment des activités de loisirs. Ils n'imposent en particulier ni la suppression, ni la réduction de la fréquentation par les promeneurs ou autres usagers. A défaut de toute restriction à ce sujet, le site du Creux du Van doit être considéré comme un site naturel servant au délassement au sens de l'art. 3 al. 2 let. d LAT, dont l'affectation doit être conservée.  
La décision de classement présente par ailleurs une claire amélioration par rapport à l'état actuel et aux nuisances existantes. La canalisation des randonneurs sur un seul itinéraire, évitant la partie la plus exposée du bord de la falaise et longeant le mur de pierres sèches, permettra de réduire fortement le phénomène de piétinement décrit ci-dessus. Sur l'ensemble du périmètre, la mesure en question devrait avoir pour effet d'éviter l'éparpillement des visiteurs et de diminuer la pression sur la flore et la faune. D'une surface réduite, les deux points de vue aménagés sur le bord de la falaise sont situés sur des zones actuellement déjà accessibles. En 2018-2020, les cantons de Vaud et de Neuchâtel ont procédé à un test de restauration de végétation dans le site, avec pose de divers types de barrières. Ce test a permis de démontrer que la reconstitution de la flore est sensible dans les zones soustraites au passage des piétons. Il a en outre permis de vérifier l'efficacité des différentes mesures (barrières fixes, poteaux de délimitation, panneaux d'information). 
Contrairement à ce que soutient la recourante, l'efficacité des mesures ne repose pas exclusivement sur le bon vouloir des visiteurs. L'art. 14 du règlement prévoit en effet que l'interdiction d'accès peut être assurée par la fermeture des passages à travers le mur, ainsi que par la pose de barrières (al. 2 let. a), ce qui pourrait assurer le respect de la mesure la plus importante, soit l'interdiction d'accès au bord de la falaise. En outre, selon l'art. 19 du règlement, la surveillance du respect des dispositions réglementaires est assurée par les agents désignés par le département. 
Cela étant, l'efficacité des mesures d'information et de canalisation devra encore être vérifiée régulièrement: comme le relève l'OFEV à propos de la piste de VTT, un suivi sera nécessaire pour s'assurer que le dispositif mis en place aura un effet suffisamment contraignant pour parvenir aux buts recherchés. L'art. 6 du règlement prévoit à ce titre la création d'une commission de coordination intercantonale chargée de donner des avis consultatifs sur les mesures de mise en oeuvre, la sensibilisation du public et la diffusion de l'information ainsi que sur les aménagements, constructions et activités prévus ou observés dans le périmètre (al. 1). Composée d'un représentant du service cantonal en charge de la protection de la nature, de l'inspecteur des forêts d'arrondissement, d'un représentant du service de l'agriculture, d'un représentant des autorités communales, des représentants des associations de promotion du tourisme, des associations de protection de la nature et du paysage et des exploitants agricoles (art. 6 al. 3), cette commission peut en particulier formuler des propositions sur les mesures de monitoring et de contrôle nécessaires (art. 6 al. 2 du règlement). Elle n'a certes pas de rôle décisionnel, mais elle peut saisir le service compétent. Du point de vue du respect du droit fédéral, il est déterminant qu'un suivi et un monitoring soient expressément prévus par la décision de classement, même si leurs modalités ne sont pas précisées. Le grief doit par conséquent être rejeté. 
 
5.4. Le même raisonnement vaut pour la piste de VTT. La création d'un itinéraire balisé obligatoire aura pour effet de limiter les impacts de cette activité, actuellement exercée sans limitation sur l'ensemble du secteur, en la canalisant. Le tracé prévu doit éviter les zones sensibles et emprunter des cheminements existants. Il traverse toutefois une PPS et, comme le relève l'OFEV, la pratique du VTT dans un tel biotope n'est admissible qu'à la condition que le tracé emprunte des routes ou chemins existants, faute de quoi la création d'un nouvel itinéraire peut entraîner une érosion importante. Il ressort en l'occurrence du plan de la décision de classement que le réseau VTT emprunte des chemins existants et se recoupe sur certains tronçons avec le réseau pédestre, notamment dans le périmètre PPS (route forestière de la Baronne). Il n'y a dès lors pas d'atteinte supplémentaire à la PPS, les éventuelles mesures de balisage pouvant être réalisées sans impact sur le milieu protégé. L'annexe 5 du rapport explicatif fixe en effet les principes pour les aménagements des sentiers pédestres, pistes VTT et points de vue. S'agissant de la piste VTT, il n'est pas prévu d'aménagement, la piste étant tracée par l'usage. Comme la piste n'est pas encore bien marquée, des bornes pourraient être nécessaires pour guider les usagers. Celles-ci présentent toutefois une surface au sol très réduite et pourront être implantées le cas échéant sur le chemin existant, sans empiétement supplémentaire sur la PPS.  
Pour le surplus, les mesures de monitoring et de contrôle précitées, que le Département s'est déjà engagé à prendre dans le cadre de la procédure cantonale (réponse au recours du 18 mai 2020, p. 10) permettront de vérifier, comme le recommande l'OFEV, notamment l'absence de conflit entre les cyclistes et les piétons, ou d'y remédier le cas échéant. 
 
5.5. S'agissant de la chasse, la recourante se contente de relever que des espèces protégées (Gelinotte des bois, Bécasse des bois) sont susceptibles d'être dérangées et stressées par cette activité, les coups de feu et les chiens étant en outre susceptibles de faire fuir les animaux sauvages protégés (lynx, lièvre brun, bouquetin); il s'ensuivrait une réduction du milieu naturel, aucune zone tampon n'ayant été prévue.  
La chasse ne fait pas partie des activités interdites en vertu de l'art. 7 du règlement. Le rapport explicatif d'octobre 2017 expose que le périmètre de la décision de classement est fortement concerné par l'impact des sangliers sur les pâturages. Les effectifs de cette espèce sont en effet très importants depuis quelques années, notamment du fait d'hivers doux qui conduisent l'espèce à fréquenter de plus en plus les alpages d'altitude. Sa présence génère des dommages parfois conséquents aux herbages et pâturages de la région. La remise en état de ces surfaces, parfois accompagnées de moyens mécaniques, d'épierrages et de semis de mélange du commerce, a contribué à modifier et à banaliser le cortège floristique naturel. La recourante ne conteste nullement la nécessité de réguler l'espèce, ce qui constitue un motif suffisant pour ne pas interdire la chasse, d'autant que la régulation par les seuls gardes-faune causerait les mêmes dérangements. En outre, le site se trouve à proximité d'un district franc fédéral (objet n° 27, Creux du Van) et imposant la conservation de la zone en tant qu'habitat pour des mammifères et oiseaux sauvages, la conservation des zones abritant des populations de tétraonidés ainsi que la protection des animaux contre les dérangements. L'ensemble du district franc est soumis à une protection intégrale. Le périmètre de la décision de classement jouxte au sud-ouest ce district franc; il en est donc expressément exclu et n'impose nullement la création d'une zone tampon. Dans la mesure où il est suffisamment motivé, le grief doit lui aussi être écarté. 
 
5.6. Il en va de même s'agissant de la pratique de l'escalade. Celle-ci n'est, selon l'art. 8 al. 2 du règlement, autorisée que du 1er août au 31 décembre sur deux voies spécifiques: celle dite du "Couloir du Pharmacien" qui débouche sur un point de vue (et dont seuls les dix derniers mètres se trouvent en territoire vaudois), et celle du "Paratonnere", qui n'aboutit pas au sommet mais doit être redescendue en rappel. Alors qu'il avait dans un premier temps préconisé un abandon total de l'escalade dans la falaise, l'OFEV admet qu'une limitation à certaines zones (en l'occurrence deux voies seulement concernant le canton de Vaud) et durant une période limitée (excluant les périodes de reproduction) suffirait au respect du droit fédéral. Dans sa décision d'approbation, le DTE rappelle que l'escalade était depuis de nombreuses années limitée à certaines voies et hors des périodes de nidification, et qu'aucun problème n'avait été identifié. Dans sa réponse au recours cantonal, la DGE rappelle également qu'une expertise effectuée en 2010 n'a mis en évidence aucun conflit actuel ou potentiel entre l'escalade et l'avifaune. Rien dans l'argumentation de la recourante ne permet de retenir le contraire et, sur ce point également, les restrictions apportées par la décision de classement améliorent encore la situation par rapport à une pratique incontrôlée de l'activité.  
 
6.  
La recourante relève enfin que l'exploitation agricole actuelle porte gravement atteinte aux PPS en raison de la banalisation de la végétation et de l'augmentation de la charge en bétail. Mis à part l'interdiction de la fumure (mesure insuffisante à elle seule), la décision de classement ne fixerait aucune valeur maximale; la protection des PPS dépendrait ainsi des plans de gestion intégrée (PGI) qui doivent être élaborés avec les propriétaires concernés. Toutefois, compte tenu de la force contraignante de la décision de classement, celle-ci devrait poser des règles d'exploitation suffisamment précises, notamment concernant la charge en bétail. En l'occurrence, aucune mesure concrète ne permettrait d'assurer la protection des PPS et des autres biotopes, ainsi que leur restauration. 
 
6.1. Les PPS, qui résultent d'une exploitation séculaire, sont presque toujours des surfaces encore utilisées à des fins agricoles. Leur maintien est subordonné à des pratiques agricoles et sylvicoles adaptées au milieu et respectueuses des principes du développement durable. La fumure et l'irrigation modifient les conditions de station de manière telle que les espèces PPS typiques s'en trouvent menacées; en règle générale, elles ne sont donc pas compatibles avec l'objectif de protection. Pour les prairies, les prescriptions à observer concernent la date et la fréquence de la fauche ainsi que le maintien de zones refuges pour la petite faune; pour les pâturages, elles concernent le type de bétail, la gestion de la pâture, la proportion de structures ainsi que les mesures mécaniques d'entretien. Les structures boisées telles que lisières, bosquets, haies, pierres et sols nus, ruisseaux et stations humides leur confèrent une plus-value exceptionnelle et doivent être entretenus et revalorisés (OFEV, Prairies et pâturages secs d'importance nationale, Aide à l'exécution de l'ordonnance sur les prairies sèches, Berne 2010 - ci-après: OFEV, PPS -, p. 8 s.).  
 
6.2. Selon l'art. 6 al. 1 de l'ordonnance sur la protection des prairies et pâturages secs d'importance nationale (OPPPS; RS 451.37), les objets doivent être conservés intacts. Les buts de la protection consistent notamment en la conservation et le développement de la flore et de la faune spécifiques ainsi que des éléments écologiques indispensables à leur existence (a), en la conservation des particularités, de la structure et de la dynamique propres aux prairies sèches (b), et en une agriculture et une sylviculture respectant les principes du développement durable (c). Les mesures de protection et d'entretien sont précisées à l'art. 8 OPPPS en ces termes:  
¹ Les cantons, après avoir pris l'avis des propriétaires fonciers concernés et des usagers, prennent les mesures de protection et d'entretien adéquates pour atteindre les buts de la protection. Ce faisant, ils veillent en particulier à conserver et à développer une exploitation agricole et sylvicole durable et adaptée. 
2 Les mesures de protection et d'entretien font l'objet d'accords entre l'autorité cantonale et les intéressés. Si la conclusion d'un accord n'est pas possible, elles sont ordonnées. 
3 Les cantons veillent en particulier: 
a. à ce que les plans et les prescriptions régissant l'utilisation du sol admise par la législation sur l'aménagement du territoire tiennent compte de manière appropriée des dispositions de la présente ordonnance; 
b. à ce qu'il ne soit entrepris aucune construction ni installation ni aucune modification de terrain, qui contreviendraient aux buts de la protection; 
c. à ce que les utilisations existantes ou nouvelles, notamment par l'agriculture, la sylviculture et le tourisme ainsi que l'utilisation à des fins de détente, soient en concordance avec les buts de la protection; 
d. à ce que les éléments structurels des objets soient conservés, voire améliorés ou recréés si cela sert à atteindre les buts de la protection; 
e. à ce que le développement des espèces animales et végétales rares ou menacées ainsi que leurs biocénoses soit favorisé. 
Selon l'art. 18c al. 1 LPN, la protection des biotopes et leur entretien seront, si possible, assurés sur la base d'accords conclus avec les propriétaires fonciers et les exploitants et par l'adaptation des modes d'exploitation agricole et sylvicole. Si aucun contrat ne peut être conclu et que l'objet est menacé, les cantons sont tenus d'assurer subsidiairement sa protection par d'autres moyens (art. 18c al. 3 LPN). 
 
6.3. Sur le vu de ce qui précède, la voie conventionnelle exigée par le droit fédéral apparaît comme la plus adéquate pour maintenir l'équilibre entre sous-exploitation et surexploitation. Chaque PPS constitue un cas unique et l'exploitation doit être adaptée à chaque objet. En particulier, il y a lieu de tenir compte des conditions-cadre globales propres à chaque entreprise agricole (utilisation de la fumure, charge et périodes de travail, qualité du fourrage, proportion du biotope; OFEV, PPS, pp 29 et 59). Comme le relève l'arrêt attaqué, la surface de PPS comprise dans le plan de classement est entièrement colloquée dans le secteur "sylvopastoral protégé I". Selon le règlement (art. 15), ce secteur a pour but la conservation des milieux naturels dignes de protection, de leurs zones-tampon ainsi que des surfaces abritant des espèces prioritaires ou caractéristiques (al. 1). L'exploitation agricole est extensive, sans apport d'engrais autre que celui provenant de la pâture du bétail sur place (al. 2). Pour le surplus, le règlement pose certains principes plus généraux applicables également aux PPS, tels que le maintien d'une exploitation agricole et forestière mettant en valeur la biodiversité et les éléments caractéristiques du paysage (art. 3 al. 2 let. e), l'interdiction de l'usage des produits phytosanitaires (art. 7 let. j), l'adaptation de la charge et de la gestion du bétail aux objectifs de protection (art. 12 al. 1) et la limitation de l'ensemencement et du sursemis (art. 12 al. 2). Enfin, le service compétent est chargé d'établir ou de faire établir les plans de gestion intégrée entre l'Etat et les exploitants (art. 5 al. 2). Si aucun accord ne peut être conclu, les mesures nécessaires font l'objet d'une décision du département (art. 5 al. 3).  
Sur le vu de ce qui précède, le plan de classement et son règlement permettent la conclusion de conventions, voire la prise de décisions unilatérales, sur la base de principes généraux suffisamment clairs mais ménageant une certaine marge de négociation. Contrairement à ce que soutient la recourante, le droit fédéral n'exige pas que la mesure de protection contienne elle-même une réglementation plus précise, notamment sur la charge en bétail. Cet ultime grief doit donc, lui aussi, être rejeté. 
 
7.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté, dans la mesure où il est recevable. Conformément à l'art. 66 al. 1 LTF, les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante qui succombe. Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. Il n'est pas alloué de dépens. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire de la recourante, au Département de la jeunesse, de l'environnement et de la sécurité du canton de Vaud (DJES), à la Municipalité de Provence, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, et à l'Office fédéral de l'environnement. 
 
 
Lausanne, le 4 janvier 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
Le Greffier : Kurz