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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
7B_43/2024  
 
 
Arrêt du 4 mars 2024  
 
IIe Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Abrecht, Président, 
Koch et Hofmann. 
Greffière : Mme Rubin. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Fabien Mingard, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de l'arrondissement de Lausanne, p.a. Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD. 
 
Objet 
Détention provisoire, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 28 décembre 2023 (1067 - PE23.018244-LAS). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 25 septembre 2023, le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne (ci-après: le Ministère public) a ouvert une instruction pénale contre A.________, ressortissant de U.________ né en 1982, pour tentative de meurtre, menaces et infraction à la loi fédérale du 20 juin 1997 sur les armes, les accessoires d'armes et les munitions (LArm; RS 514.54).  
ll est en substance reproché à A.________, membre de la communauté de gitans installée à V.________, d'avoir, dans un camp de gitans situé dans cette localité, le 24 septembre 2023, tiré avec un fusil en l'air, puis d'avoir agrippé au cou B.________, membre d'une autre communauté de gitans installée à W.________, de l'avoir fait tomber tout en essayant de lui couper la gorge avec un couteau et de lui avoir dit: "Maintenant tu es mort!", la lame du couteau le blessant au nez, à la lèvre inférieure et à la joue. 
Le 24 septembre 2023, un "tribunal gitan" était réuni dans le camp de V.________ au sujet d'une affaire de couple. B.________ s'y était rendu, malgré qu'un autre "tribunal gitan" avait prononcé à son égard, plusieurs années auparavant, une interdiction d'entrer en contact avec A.________. À un moment donné le jour en question, B.________ aurait été pris à partie par des proches de A.________. Deux fils de B.________ auraient été informés de cette situation et se seraient rendus sur les lieux pour en découdre. A leur arrivée, ces derniers s'en seraient pris à C.________, fils de A.________, l'un tenant la victime pendant que l'autre lui tranchait le ventre au moyen d'un couteau. C.________, qui présentait une importante lésion s'étendant sur tout l'abdomen, a été hospitalisé au CHUV. 
A.________ a été appréhendé le 25 septembre 2023. Le 28 septembre 2023, le Tribunal des mesures de contrainte du canton de Vaud (ci-après: le TMC) a ordonné sa détention provisoire jusqu'au 24 décembre 2023. 
 
A.b. A.________ a sollicité à deux reprises sa libération. Ses demandes ont été rejetées par ordonnances du TMC des 25 octobre et 28 novembre 2023.  
 
 
B.  
Par arrêt du 28 décembre 2023, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: l'autorité précédente ou la cour cantonale) a rejeté le recours formé par A.________ contre l'ordonnance du TMC du 28 novembre 2023. 
 
C.  
Par acte du 15 janvier 2024, A.________ interjette un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt cantonal du 28 décembre 2023. Il conclut à sa réforme en ce sens que sa libération immédiate soit ordonnée et qu'une indemnité lui soit allouée pour ses frais de défense, s'élevant respectivement à 753 fr. 90 pour la procédure devant le TMC et à 565 fr. 40 pour la procédure devant la cour cantonale. Il requiert par ailleurs l'octroi de l'assistance judiciaire et la désignation de Me Fabien Mingard en tant qu'avocat d'office pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
Invités à se déterminer sur le recours, le Ministère public et la cour cantonale y ont renoncé, se référant à la décision entreprise. Pour le surplus, la cour cantonale a informé la Cour de céans que le recourant avait formé recours contre une nouvelle ordonnance du TMC du 22 décembre 2023, laquelle ordonne la prolongation de sa détention provisoire pour une durée de trois mois. La cour cantonale a encore relevé qu'un recours était pendant devant le Tribunal fédéral concernant le droit du recourant d'être assisté par un avocat de choix, en plus du défenseur d'office qui lui a déjà été désigné. Ces écritures ont été transmises pour information à A.________ le 30 janvier 2024, qui n'a pas formulé d'observations. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 146 IV 185 consid. 2).  
 
1.2. Le recours en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) est ouvert contre une décision relative à la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté au sens des art. 212 ss CPP. La détention du recourant repose actuellement sur l'ordonnance du TMC du 22 décembre 2023 qui la prolonge jusqu'au 23 mars 2024, notamment en raison du risque de fuite qu'il présente. Le recourant conserve dès lors un intérêt actuel et pratique à l'examen de ses griefs (art. 81 al. 1 let. b LTF; ATF 149 I 14 consid. 1.2; 139 I 206 consid. 1.2.3; arrêt 7B_1009/2023 du 6 février 2024 consid. 1.1). En outre, l'arrêt entrepris, en tant que décision incidente, peut causer au recourant un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF. Pour le surplus, le recours a été formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision prise en dernière instance cantonale (art. 80 LTF), de sorte qu'il est recevable.  
 
2.  
Dans le cadre d'un recours en matière pénale, le Tribunal fédéral contrôle uniquement l'application correcte par l'autorité cantonale du droit fédéral en vigueur au moment où celle-ci a statué (cf. art. 453 al. 1 CPP; ATF 145 IV 137 consid. 2.6 ss; 129 IV 49 consid. 5.3). L'arrêt attaqué ayant été rendu le 28 décembre 2023, il n'y a donc pas lieu en l'espèce de prendre en compte les modifications du Code de procédure pénale entrées en vigueur au 1 er janvier 2024 (RO 2023 468; arrêt 7B_1009/2024 du 4 février 2024 consid. 1.2).  
 
3.  
 
3.1. Invoquant les art. 5 al. 2 CPP, 5 et 6 CEDH, le recourant fait grief à la cour cantonale d'avoir écarté la violation du principe de la célérité par le Ministère public.  
 
3.2. Concrétisant le principe de la célérité consacré à l'art. 29 al. 1 Cst., l'art. 5 CPP impose aux autorités pénales d'engager les procédures pénales sans délai et de les mener à terme sans retard injustifié (al. 1), la procédure devant être conduite en priorité lorsqu'un prévenu est placé en détention (al. 2).  
Selon la jurisprudence, la détention peut être considérée comme disproportionnée en cas de retard injustifié dans le cours de la procédure pénale. Il doit s'agir d'un manquement particulièrement grave, faisant au surplus apparaître que l'autorité de poursuite n'est plus en mesure de conduire la procédure à chef dans un délai raisonnable (ATF 140 IV 74 consid. 3.2; 137 IV 118 consid. 2.1; cf. arrêts 7B_984/2023 du 8 janvier 2024 consid. 3.1.2; 7B_944/2023 du 15 décembre 2023 consid. 3.3). Le caractère raisonnable de la durée d'une procédure pénale s'apprécie selon les circonstances particulières de la cause, soit en particulier par rapport à la complexité de l'affaire, au comportement du requérant et à celui des autorités compétentes, ainsi qu'à l'enjeu du litige pour l'intéressé (ATF 133 I 270 consid. 3.4.2; arrêts 7B_1001/2023 du 8 janvier 2024 consid. 3.4; 7B_933/2023 du 14 décembre 2023 consid. 2.3 et les références citées). 
 
3.3. En l'occurrence, la cour cantonale a écarté le grief du recourant, relevant que pour qu'une violation du principe de la célérité mène à une libération de la détention provisoire, la jurisprudence imposait des conditions très restrictives qui n'étaient pas remplies dans le cas d'espèce et sur lesquelles le recourant ne fournissait même pas d'explication (cf. arrêt attaqué, ch. 3.3, p. 9).  
 
3.4.  
 
3.4.1. Le recourant prétend que le Ministère public serait resté inactif entre le 26 septembre 2023, lendemain de son arrestation, et le 28 novembre 2023, date de l'ordonnance du TMC confirmée par l'arrêt attaqué. Il s'appuie à cet égard sur l'état du dossier du TMC à cette dernière date, duquel il ne ressortirait aucune pièce ni audition nouvelle depuis le 26 septembre 2023. Il ajoute que dans sa prise de position du 17 novembre 2023, le Ministère public n'avait évoqué aucun élément nouveau par rapport à la précédente ordonnance du TMC - celle du 28 septembre 2023 - ni aucune mesure d'instruction qui serait en cours et qui justifierait le maintien en détention. Il conclut à un grave manquement de la part du Ministère public, qui ne serait plus à même de mener la procédure pénale à chef dans un délai raisonnable. Partant, il y aurait lieu de prononcer sa libération immédiate.  
 
3.4.2. En l'espèce, le recourant a été appréhendé le 25 septembre 2023. Les premiers actes d'enquête ont été accomplis rapidement puisque dès le lendemain, la police cantonale vaudoise a procédé à son audition, ainsi qu'à celle de la victime et de nombreuses autres personnes. Certes, il ne ressort pas du dossier du TMC - tel qu'il se présentait au 28 novembre 2023 - que d'autres mesures d'investigation auraient été entreprises depuis celles du 26 septembre 2023.  
Il convient toutefois de relever que, comme il le reconnaît lui-même, le recourant n'avait alors pas eu accès à toutes les pièces du dossier. Or il ressort de celui-ci que des mesures d'instruction ont été entreprises durant la période critiquée. En effet, au vu de la demande de prolongation de la détention provisoire déposée le 14 décembre 2023 par le Ministère public, il apparaît qu'en date des 3 et 27 octobre 2023, cette autorité a ordonné au Centre universitaire romand de médecine légale (ci-après: le CURML) d'établir un rapport d'examen clinique ainsi qu'un rapport toxicologique, afin d'établir notamment la nature des lésions subies par la victime. Dans ce document, le Ministère public a également indiqué vouloir mettre en oeuvre les mesures nécessaires à l'arrestation des agresseurs de C.________ puis, à réception des documents requis, clôturer l'instruction (cf. demande de prolongation de la détention provisoire du 14 décembre 2023, p. 3 et ses annexes). Partant, il résulte de ces éléments que l'instruction pénale progresse et qu'elle semble se dérouler sans retard ni temps mort inadmissibles. 
En outre, le recourant perd de vue que l'instruction n'en est qu'à ses débuts - trois mois au moment de l'arrêt attaqué - et que les infractions qui lui sont reprochées sont très graves. Les faits interviennent qui plus est dans un contexte particulier, puisqu'ils ont eu lieu au sein de la communauté des gens du voyage, qui n'a pas pour habitude de se confier à la police au sujet des affaires du camp (cf. ordonnance du TMC du 28 septembre 2023, p. 6). A cela s'ajoute que la procédure en cours présente une certaine complexité. Elle ne concerne pas uniquement le recourant, mais également son fils qui a été victime, le jour des faits, d'une agression par des auteurs n'ayant pas pu être interpellés (cf. ordonnance du TMC du 28 septembre 2023, pp. 6-7). 
Au vu de l'ensemble des circonstances précitées, rien ne permet d'affirmer - à ce stade précoce de l'enquête - que le Ministère public aurait commis un manquement particulièrement grave dans la conduite de la procédure ni qu'il n'aurait pas la volonté ou la capacité de la mener à chef dans un délai raisonnable. Il est à ce titre rappelé qu'on ne peut pas exiger des autorités pénales qu'elles s'occupent constamment d'une seule et unique affaire et que le fait que la procédure soit temporairement suspendue entre certaines étapes ou que certains actes de procédure auraient pu être accomplis plus tôt ne constitue pas en soi une violation du principe de la célérité (cf. ATF 130 IV 54 consid. 3.3.3; arrêts 7B_887/2023 du 24 novembre 2023 consid. 2.2.2; 6B_230/2022 du 25 octobre 2023 consid. 3.3.4 et les références citées). 
C'est le lieu de noter que le recourant avait pris connaissance dès le 15 décembre 2023 de la demande de prolongation de la détention provisoire du Ministère public mentionnant les mesures d'instruction entreprises, soit bien avant de déposer le présent recours devant la Cour de céans (cf. lettre de Me Baudraz au TMC du 15 décembre 2023). Dans ces circonstances, le recourant est malvenu de reprocher au Ministère public une quelconque inaction et a fortiori de se plaindre d'une violation du principe de la célérité, dans le but de soutenir que la détention subie serait disproportionnée.  
 
3.5. Il s'ensuit que la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en retenant que la durée de la procédure ne violait pas le principe de la célérité, notamment d'une manière qui permettrait de considérer que la détention provisoire subie par le recourant serait disproportionnée.  
 
4.  
Le recourant requiert encore l'octroi d'une indemnité pour ses frais de défense, qu'il chiffre à 753 fr. 90 pour la procédure devant le TMC, respectivement à 565 fr. 40 s'agissant de la procédure devant la cour cantonale. Ces conclusions sont sans objet dans la mesure où elles reposent sur la prémisse d'une libération immédiate du recourant de la détention provisoire, qu'il n'obtient pas. 
 
5.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté. 
Le recourant a demandé l'octroi de l'assistance judiciaire (cf. art. 64 al. 1 LTF). Les conditions y relatives étant réunies, il y a lieu d'admettre cette requête, de désigner Me Fabien Mingard en tant que défenseur d'office du recourant pour la procédure fédérale et de lui allouer une indemnité à titre d'honoraires, qui seront supportés par la caisse du Tribunal fédéral. Le recourant est toutefois rendu attentif au fait qu'il devra rembourser la caisse du Tribunal fédéral s'il retrouve ultérieurement une situation financière lui permettant de le faire (cf. art. 64 al. 4 LTF). Il ne sera pas perçu de frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens (cf. art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
La requête d'assistance judiciaire est admise. 
 
2.1. Me Fabien Mingard est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral.  
 
2.2. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.  
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au recourant, au Ministère public de l'arrondissement de Lausanne, à la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud, au Tribunal des mesures de contrainte du canton de Vaud et à Me Philippe Baudraz, Lausanne. 
 
 
Lausanne, le 4 mars 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Abrecht 
 
La Greffière : Rubin