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[AZA 0] 
1P.503/2000 
 
Ie COUR DE DROIT PUBLIC 
********************************************** 
 
4 septembre 2000 
 
Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Aemisegger, 
Président, Favre et Pont Veuthey, suppléante. 
Greffier: M. Parmelin. 
 
___________ 
 
Statuant sur le recours de droit public 
formé par 
X.________ , actuellement détenu à la prison de la Croisée, à Orbe, représenté par Me Olivier Subilia, avocat à Lausanne, 
 
contre 
l'arrêt rendu le 28 juillet 2000 par le Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud; 
 
(détention préventive) 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent 
les faits suivants: 
 
A.- X.________, ressortissant du Kosovo né le 1er septembre 1965, se trouve en détention préventive depuis le 10 février 2000 sous la prévention d'infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants. Il est soupçonné d'avoir participé à un trafic de drogue portant sur une grosse quantité, en raison notamment de ses liens avec Y.________, arrêté le même jour en possession de 7 kilos d'héroïne. 
 
B.- Par ordonnance du 10 mars 2000, le Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne (ci-après, le Juge d'instruction) a refusé la mise en liberté de X.________ au motif qu'en l'état de l'enquête, la libération du prévenu présenterait des inconvénients sérieux pour l'instruction. 
 
Le 16 mars 2000, le Juge d'instruction a également refusé au conseil du prévenu, en raison des besoins de l'instruction, la consultation du dossier de l'enquête jusqu'au 15 avril 2000, à l'exception des déclarations de son client. 
 
Le 22 mars 2000, le Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après, le Tribunal d'accusation) a confirmé l'une et l'autre de ces décisions. Statuant le 5 mai 2000 sur recours du prévenu, le Tribunal fédéral a annulé cette décision et renvoyé la cause à la cour cantonale pour qu'elle statue à nouveau à bref délai, après avoir donné à X.________ un accès suffisant au dossier. 
 
Par arrêt du 23 mai 2000, le Tribunal d'accusation a confirmé le maintien du prévenu en détention après lui avoir remis en consultation l'entier du dossier de la cause. Il a considéré qu'il existait des présomptions suffisantes de culpabilité à l'encontre de X.________ et que sa libération ne se justifiait pas en raison du risque de collusion. Il a en outre retenu que le principe de la proportionnalité était respecté, compte tenu de la détention déjà subie et de la gravité des infractions imputées au prévenu. 
 
Statuant le 7 juillet 2000 sur recours de X.________, le Tribunal fédéral a annulé cet arrêt parce que le risque de collusion, tel qu'il était motivé, n'était pas justifié de manière concrète. Il a toutefois rejeté la demande de mise en liberté immédiate et invité le Juge d'instruction à réexaminer l'existence éventuelle d'un motif de détention, sur le vu du résultat des diverses mesures d'instruction entreprises jusqu'alors. 
 
Par arrêt du 28 juillet 2000, le Tribunal d'accusation a confirmé le maintien en détention de X.________, après avoir recueilli les déterminations du Juge d'instruction et du prévenu. Il a considéré qu'il existait des présomptions suffisantes de culpabilité à l'encontre de ce dernier et vu des motifs de détention dans les besoins de l'enquête et le risque de fuite. Il a enfin retenu que la détention déjà subie n'excédait pas la durée de la peine qui pourrait être prononcée à l'encontre du prévenu. 
 
C.- Agissant par la voie du recours de droit public, X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt et d'ordonner sa mise en liberté immédiate. Il reproche au Tribunal d'accusation d'avoir admis à tort l'existence d'un risque de collusion et de fuite. Il prétend enfin que sa détention serait disproportionnée au regard de la peine à laquelle il s'expose et des sanctions qu'il encourt de la part de son employeur sur le plan professionnel. Il requiert l'assistance judiciaire. 
Le Tribunal d'accusation se réfère aux considérants de son arrêt. Le Juge d'instruction a renoncé à déposer des observations. 
 
Considérant en droit : 
 
1.- Le recourant est personnellement touché par l'arrêt attaqué, qui confirme une décision refusant sa mise en liberté provisoire; il a un intérêt personnel, actuel et juridiquement protégé à ce que cet arrêt soit annulé, et a, partant, qualité pour recourir selon l'art. 88 OJ. Formé en temps utile contre une décision prise en dernière instance cantonale, le recours répond aux exigences des art. 86 al. 1 et 89 al. 1 OJ, de sorte qu'il convient d'entrer en matière. 
Les conclusions du recourant tendant à sa libération immédiate sont par ailleurs recevables (ATF 124 I 327 consid. 4b/aa p. 333). 
 
 
2.- La détention préventive est une restriction de la liberté personnelle garantie par les art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH. A ce titre, elle n'est admissible que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art. 59 du Code de procédure pénale vaudois (CPP vaud.). Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst. ; ATF 123 I 268 consid. 2c p. 270). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par les besoins de l'instruction, un risque de fuite ou un danger de collusion ou de réitération (cf. art. 59 al. 1, 2 et 3 CPP vaud.). La gravité de l'infraction ne peut à elle seule fonder la prolongation de la détention préventive (ATF 106 Ia 404 consid. 4c p. 407) même si, compte tenu de l'ensemble des circonstances, elle permet souvent de présumer l'existence d'un risque de fuite eu égard à l'importance de la peine privative de liberté dont l'intéressé est menacé (ATF 117 Ia 69 consid. 4a p. 70 et les arrêts cités). Préalablement à ces conditions, il doit exister à l'égard de celui-ci des charges suffisantes (ATF 116 Ia 143 consid. 3p. 144). Cette dernière exigence coïncide avec la règle de l'art. 5 § 1 let. c CEDH, qui autorise l'arrestation d'une personne s'il y a des raisons plausibles de soupçonner celle-ci d'avoir commis une infraction. 
 
 
 
S'agissant d'une restriction grave à la liberté personnelle, le Tribunal fédéral examine librement ces questions, sous réserve toutefois de l'appréciation des preuves, revue sous l'angle restreint de l'arbitraire (ATF 123 I 268 consid. 2d p. 271). L'autorité cantonale dispose ainsi d'une grande liberté dans l'appréciation des faits (ATF 114 Ia 281 consid. 3 p. 283). 
 
 
3.- Le recourant ne conteste pas l'existence de charges suffisantes à son encontre. Il prétend en revanche que l'autorité intimée aurait retenu à tort qu'il présentait un risque de collusion et de fuite propre à justifier son maintien en détention préventive. Il dénonce à cet égard une violation des art. 10 al. 2 et 31 al. 1 Cst. 
 
a) Selon la jurisprudence, le risque de fuite ne doit pas s'apprécier sur la seule base de la gravité de l'infraction même si la perspective d'une longue peine privative de liberté permet souvent d'en présumer l'existence (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62 et les arrêts cités); il doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères, tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'Etat qui le poursuit et ses contacts avec l'étranger (ATF 117 Ia 69 consid. 4 p. 70 et les arrêts cités). Il est sans importance, pour apprécier le risque de fuite, que son extradition puisse être obtenue (ATF 123 I 31 consid. 3dp. 36/37). 
b) En l'occurrence, le recourant, âgé de trente-cinq ans, est originaire du Kosovo où il a passé toute son enfance et effectué un apprentissage de soudeur; il est venu pour la première fois en Suisse en 1987 pour s'y établir définitivement en 1993; il a épousé en premières noces une compatriote dont il a divorcé en 1993; il s'est remarié en 1994 avec une Suissesse dont il est aujourd'hui séparé; il vit actuellement avec son ex-épouse, qui ne parle pas le français, et leurs deux enfants; il travaille à plein temps comme maçon auprès de l'entreprise Z.________, à Saint-Sulpice; il est endetté à concurrence de 10'000 fr. environ et fait l'objet d'une saisie de salaire de 700 fr. par mois. Compte tenu de ces circonstances et de la peine d'emprisonnement à laquelle il s'expose si sa culpabilité était retenue (cf. 
consid. 4 ci-dessous), l'éventualité que le recourant se rende dans son pays d'origine pour se soustraire à la justice apparaît suffisamment vraisemblable, en dépit des inconvénients qui en résulteraient aussi pour lui. 
 
La mesure litigieuse se justifiant pour ce motif, le grief tiré de la violation de la liberté personnelle doit être rejeté sans qu'il soit nécessaire d'examiner si les besoins de l'instruction nécessitaient également le maintien du recourant en détention. 
 
4.- Ce dernier reproche en outre à l'autorité intimée d'avoir considéré à tort sa détention comme compatible avec le principe de la proportionnalité. 
 
a) L'art. 5 § 3 CEDH reconnaît à toute personne arrêtée ou détenue le droit d'être jugée dans un délai raisonnable ou d'être libérée pendant la phase d'instruction préparatoire. 
Selon la jurisprudence, ce droit est notamment violé lorsque la durée de la détention préventive dépasse celle de la peine privative de liberté qui pourrait, le cas échéant, être prononcée (ATF 125 I 60 consid. 3d p. 64; 124 I 208 consid. 6 p. 215; 123 I 268 consid. 3a p. 273; 107 Ia 256 consid. 2 et 3 p. 257/258). Celle-ci doit être évaluée avec la plus grande prudence, car il faut éviter que le juge de l'action pénale ne soit incité à prononcer une peine excessive pour la faire coïncider avec la détention préventive à imputer (ATF 116 Ia 143 consid. 5a p. 147). Cette question doit être examinée au regard de l'ensemble des circonstances concrètes du cas d'espèce (ATF 124 I 208 consid. 6 p. 215; 123 I 268 consid. 3a p. 273; 116 Ia 143 consid. 5a p. 147; 107 Ia 256 consid. 1b p. 257; cf. arrêts de la CourEDH dans les causes Muller c. France, du 17 mars 1997, Recueil des arrêts et décisions 1997 p. 374, § 35 et W. c. Suisse, du 26 janvier 1993, Série A vol. 254, § 30). Enfin, l'incarcération peut aussi être disproportionnée en cas de retard injustifié dans le cours de la procédure pénale (ATF 123 I 268 consid. 3a p. 273; 116 Ia 143 consid. 5a p. 147; 107 Ia 256 consid. 2 et 3 p. 257/258). 
 
b) En l'espèce, X.________ se trouve en détention préventive depuis le 10 février 2000 sous la prévention d'infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants. Il est soupçonné d'avoir participé à un trafic de drogue portant sur plusieurs kilos de produits stupéfiants, en raison notamment de ses liens avec Y.________, arrêté le même jour en possession de 7 kilos d'héroïne, soit une quantité susceptible, selon la jurisprudence, de mettre en danger la vie de nombreuses personnes au sens de l'art. 19 ch. 2 let. a LStup (ATF 109 IV 143 consid. 3b; cf. ATF 122 IV 360 consid. 2ap. 363; 120 IV 334 consid. 2a p. 338). A ce titre, il est passible d'une peine d'emprisonnement d'une année au moins, même s'il devait n'avoir joué qu'un rôle subalterne dans le trafic de drogue mis en place par Y.________ (art. 19 ch. 1 et 26 LStup; ATF 115 IV 59 consid. 4; 113 IV 90 consid. 2). 
Dans ces conditions, la durée de la détention préventive subie à ce jour n'est pas excessive. Examiné sous cet angle, le principe de la proportionnalité est respecté. 
c) Pour le surplus, le recourant ne prétend pas que la procédure aurait connu des retards propres à justifier sa libération immédiate, de sorte que le Tribunal fédéral ne saurait examiner d'office cette question (ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495). Il voit en revanche une circonstance de nature à mettre un terme à sa détention dans les menaces de licenciement que son employeur aurait à maintes reprises proférées à son égard. On peut se demander si ce grief est recevable au regard de l'exigence de l'épuisement préalable des instances cantonales posée à l'art. 86 al. 1 OJ dès lors que le recourant ne l'a pas invoqué dans ses déterminations au Tribunal d'accusation. Quoi qu'il en soit, cette question peut demeurer indécise car la perte éventuelle d'un emploi, en dépit des conséquences négatives qu'elle est de nature à entraîner pour la personne qui en souffre, ne saurait faire obstacle à la prolongation d'une détention préventive ordonnée conformément aux exigences déduites du droit constitutionnel et conventionnel. 
 
 
5.- Le recours doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est recevable. Les conditions de l'art. 152 al. 1 OJ étant réunies, il convient de faire droit à la demande d'assistance judiciaire et de statuer sans frais. Me Olivier Subilia est désigné comme avocat d'office du recourant pour la présente procédure et une indemnité lui sera versée (art. 152 al. 2 OJ). Il n'y a pas lieu à l'octroi de dépens (art. 159 al. 2 OJ). 
 
 
 
Par ces motifs, 
 
le Tribunal fédéral : 
 
1. Rejette le recours dans la mesure où il est recevable. 
 
2. Admet la demande d'assistance judiciaire et désigne Me Olivier Subilia en qualité d'avocat d'office du recourant. 
 
3. Dit que la Caisse du Tribunal fédéral versera une indemnité de 1'000 fr. à titre d'honoraires au mandataire du recourant. 
 
4. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judiciaire, ni alloué de dépens. 
 
5. Communique le présent arrêt en copie au mandataire du recourant, au Juge d'instruction de l'arrondissement de Lausanne et au Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
__________ 
Lausanne, le 4 septembre 2000 PMN/mnv 
 
Au nom de la Ie Cour de droit public 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE: 
Le Président, 
 
Le Greffier,