Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
5A_647/2023
Arrêt du 5 mars 2024
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux
Herrmann, Président, Bovey et De Rossa.
Greffière : Mme Achtari.
Participants à la procédure
A.________ SA,
représentée par Me Valérie Nys, avocate,,
recourante,
contre
B.________,
représenté par Me Sven Engel, avocat,
intimé.
Objet
interprétation d'un contrat de servitude, retour anticipé du droit de superficie (art. 779f CC),
recours contre l'arrêt de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel, du 26 juin 2023 (CACIV.2023.16/lbb).
Faits :
A.
A.a.
A.a.a. La société A.________ SA a son siège social à U.________ et a pour but de détenir des domaines agricoles et de les exploiter, soit directement, soit en les affermant.
Depuis fin 2013, elle est propriétaire du bien-fonds no xxx du cadastre de U.________, issu notamment du bien-fonds no yyy du même cadastre.
A.a.b Le précédent propriétaire du bien-fonds no yyy, C.________, a constitué à fin 2012, en faveur de B.________, un droit de superficie ayant le caractère de droit distinct et permanent sur une partie du bien-fonds en question. Ce droit de superficie est immatriculé sous DDP no zzz du cadastre de U.________ et confère à B.________ le droit de maintenir, sur le bien-fonds no yyy grevé, les constructions qui y sont cadastrées, à savoir une habitation, un rural, une dépendance, trois silos, ainsi que leurs accès et dégagement. Il a été concédé pour une durée de 50 ans.
Le chapitre " conditions du droit de superficie " qui figure dans l'acte authentique du 19 décembre 2012 relatif à sa constitution prévoit notamment que:
" 9. Le propriétaire du sol peut dénoncer le droit de superficie avec effet immédiat, après mise en demeure du superficiaire, dans les cas prévus à l'article 779f du Code civil suisse, et notamment: a) en cas de violations graves ou réitérées par le superficiaire des obligations assumées par lui en vertu de la loi ou des dispositions de la présente convention; [...].
14. Le superficiaire s'engage vis-à-vis du propriétaire du sol à maintenir l'objet de son droit en bon état d'entretien; il décharge le propriétaire du sol de toute obligation résultant de l'entretien des constructions et de leurs abords; il répond à l'égard des tiers de tous les excès en matière de droit de voisinage. "
A.a.c Par acte authentique du 7 novembre 2013, C.________ a déclaré vendre et transférer à A.________ SA la propriété de plusieurs biens-fonds du cadastre de U.________, dont le bien-fonds no yyy précité. Par acte non daté et intitulé " cession de créance ", C.________ a cédé à A.________ SA ses créances en lien avec le droit de superficie concédé à B.________, dont notamment la créance en lien avec l'art. 14 précité, impliquant le droit d'exiger le maintien de l'objet du droit de superficie en bon état d'entretien.
A.b.
A.b.a. Par courrier du 29 novembre 2016, A.________ SA s'est plainte auprès de B.________ de divers manquements d'entretien, constatés par une experte indépendante qu'elle avait mandatée. Elle lui fixait un délai pour effectuer les travaux les plus urgents selon l'experte. Le 23 décembre 2016, B.________ a contesté les manquements qui lui étaient reprochés.
Le 23 mars 2017, A.________ SA a globalement confirmé sa position et précisé que l'exigence du maintien en bon état d'entretien prévue à l'art. 14 de l'acte constitutif du droit de superficie s'appréciait objectivement et ne dépendait pas de l'état dans lequel les constructions avaient été reçues. Ce courrier évoquait aussi une procédure initiée par un avis de résiliation du 2 décembre 2016 et une requête de conciliation du 13 mai 2016.
A.b.b. Par courrier du 21 mars 2019, A.________ SA a exposé que les valeur et substance des ouvrages étaient en péril et a sommé B.________ de commander les travaux mentionnés dans ses précédentes correspondances. Le 11 avril 2019, B.________ a une nouvelle fois contesté la position soutenue par A.________ SA et son obligation d'exécuter les travaux requis.
Le 18 avril 2019, A.________ SA a fixé un ultime délai à B.________ pour qu'il effectue les travaux requis.
B.
B.a.
B.a.a. Le 13 novembre 2019, A.________ SA a déposé devant le Tribunal civil du Littoral et du Val-de-Travers (ci-après: Tribunal civil) une demande dans le cadre de laquelle elle a notamment conclu, principalement, à ce que le transfert du " DDP zzz du cadastre de U.________ " soit ordonné en sa faveur, à ce que l'indemnité équitable pour les constructions qui lui faisaient retour soit fixée à un montant total maximal de 286'000 fr. et, subsidiairement, à ce que B.________ soit condamné à entreprendre les travaux listés dans la demande dans un délai de 60 jours dès l'entrée en force de la décision et, faute d'exécution dans ce délai, à ce qu'elle soit autorisée à procéder à ces travaux par substitution et aux frais de B.________, ce dernier devant être condamné au paiement d'une avance de 770'000 fr. plus intérêts, à valoir sur le coût des travaux.
Par réponse du 3 avril 2020, B.________ a conclu au rejet de la demande. En substance, il a allégué qu'il s'était engagé à maintenir l'objet de son droit de superficie en bon état d'entretien et que l'acte constitutif ne faisait aucune mention d'une " remise en état " ou d'une " réfection ".
B.a.b. Une vision locale a eu lieu le 14 septembre 2020.
B.a.c. Par courrier du 15 septembre 2020, le Tribunal civil a invité les parties à se déterminer sur les preuves et sur l'éventualité de limiter le procès à la portée de l'art. 14 de l'acte notarié du 19 décembre 2012, ce qu'elles ont fait l'une et l'autre le 30 octobre 2020.
Le 22 décembre 2021, le Tribunal civil a statué sur les preuves et a rejeté l'expertise sollicitée par A.________ SA. Il a notamment retenu que cette expertise était propre à démontrer l'état d'entretien des bâtiments concernés. Elle ne saurait cependant porter que sur l'entretien effectué dès 2012 (entrée du défendeur en jouissance des bâtiments) et " [f]ondé sur l'appréciation anticipée de l'acte du 19 décembre 2012, de son article 14 en particulier, on ne saurait en effet déduire une obligation du défendeur allant au-delà du maintien des bâtiments dans l'état dans lesquels ils se trouvaient lorsqu'il les a acquis. Or il ne ressort pas des allégués de la demanderesse que le défendeur a violé son obligation d'entretien, ainsi comprise ".
B.b. Par jugement du 22 décembre 2022, le Tribunal civil a rejeté la demande.
B.c. Par arrêt du 26 juin 2023, expédié le 3 juillet suivant, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel a rejeté l'appel interjeté le 15 février 2023 par A.________ SA contre ce jugement.
C.
Par acte du 4 septembre 2023, A.________ SA exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral, en concluant à l'annulation de l'arrêt cantonal et, principalement, à ce que le transfert du DDP zzz du cadastre de U.________ soit ordonné en sa faveur, à ce que l'indemnité équitable pour les constructions qui lui font retour soit fixée à un montant maximal de 308'211 fr., sous déduction d'un montant de 47'600 fr. pour le comportement fautif de B.________, soit un montant total de 260'611 fr., et à ce qu'il soit ordonné au Conservateur du registre foncier de procéder à l'inscription du transfert du DDP zzz du cadastre de U.________ en sa faveur. A titre subsidiaire, elle requiert la condamnation de B.________ à entreprendre les travaux listés au chiffre 35 de la demande dans les soixante jours dès l'entrée en force de la décision ou, faute d'exécution dans ce délai, qu'elle soit autorisée à procéder à ces travaux par substitution et aux frais de B.________, celui-ci étant condamné à une avance de 680'000 fr. avec intérêts 5% l'an dès le prononcé du jugement, à valoir sur les coûts des travaux, montant qui pourra être réévalué après l'établissement d'une expertise. Plus subsidiairement, elle demande le renvoi de la cause à l'autorité précédente, subsidiairement à l'autorité de première instance, pour complément d'instruction et nouvelle décision au sens des considérants. En substance, elle se plaint d'un déni de justice formel (art. 29 al. 1 Cst.), d'arbitraire (art. 9 Cst.) dans l'établissement des faits, de la violation de plusieurs dispositions du CPC, notamment des art. 150, 310 et 311 CPC , ainsi que de celle des art. 779f CC et 97 ss CO.
Invités à déposer des réponses, l'intimé a conclu au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité et la cour cantonale s'est référée à son arrêt. La recourante a répliqué.
Considérant en droit :
1.
Le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par le tribunal supérieur du canton, lequel a statué sur recours (art. 75 LTF). La cause atteint manifestement la valeur litigieuse de 30'000 fr. ouvrant le recours en matière civile (art. 74 al. 1 let. b LTF). La recourante, qui a succombé dans ses conclusions, a la qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF). Déposé dans le délai (art. 100 al. 1 et 46 al. 1 let. b LTF) et la forme (art. 42 al. 1 LTF) prévus par la loi, le recours est en principe recevable au regard des dispositions qui précèdent.
2.
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF; ATF 143 V 19 consid. 2.3; 140 III 86 consid. 2). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l' art. 42 al. 1 et 2 LTF , il n'examine en principe que les griefs soulevés (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4 et la référence). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF; ATF 147 I 73 consid. 2.1; 146 III 303 consid. 2; 142 III 364 consid. 2.4).
Lorsque la décision attaquée se fonde sur plusieurs motivations indépendantes, alternatives ou subsidiaires, toutes suffisantes pour sceller le sort de la cause, la partie recourante doit, sous peine d'irrecevabilité, démontrer que chacune d'entre elles est contraire au droit en se conformant aux exigences de motivation requises (ATF 142 III 364 consid. 2.4; 138 III 728 consid. 3.4; 138 I 97 consid. 4.1.4 et les références).
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1). Le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 147 I 73 consid. 2.2; 144 III 93 consid. 5.2.2; 140 III 264 consid. 2.3), doit, sous peine d'irrecevabilité, satisfaire au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf.
supra consid. 2.1; ATF 147 I 73 consid. 2.2; 146 IV 88 consid. 1.3.1). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 147 V 35 consid. 4.2; 143 IV 500 consid. 1.1; 140 III 264 consid. 2.3).
3.
L'autorité cantonale a rejeté l'appel de la recourante en s'appuyant sur une double motivation, l'une relative à la mise en oeuvre d'une expertise sur l'état des bâtiments, l'autre relative à la condition de la gravité de la violation des obligations du superficiaire au retour anticipé du droit de superficie.
3.1. S'agissant de la mise en oeuvre d'une expertise, l'autorité cantonale a tout d'abord écarté, dans tous ses aspects, le grief de violation du droit d'être entendu soulevé par la recourante en lien avec l'ordonnance de preuves rendue le 22 décembre 2021 (impossibilité de plaider la question de l'étendue des obligations de l'intimé, rejet de l'offre de preuve tendant à la mise en oeuvre d'une expertise), de même qu'en lien avec un défaut de motivation de la décision finale rendue par le premier juge. En particulier, elle a rejeté la critique de la recourante selon laquelle le Tribunal civil avait injustement refusé sa demande d'expertise, en affirmant qu'une " appréciation anticipée de l'article 14 de l'acte constitutif du droit de superficie et des preuves " telle qu'effectuée en l'occurrence supposait nécessairement de procéder à une première analyse juridique de la cause pour déterminer les faits pertinents, de sorte que la recourante soutenait à tort qu'une question de fond avait été tranchée dans l'ordonnance de preuves. Elle a aussi retenu qu'en se contentant d'affirmer que, si le premier juge avait retenu que l'intimé avait une obligation de maintenir les bâtiments en bon état, l'expertise aurait été pertinente, la recourante n'exposait pas en quoi le rejet de l'expertise requise devait être qualifiée d'" arbitraire ". Elle a ajouté que, si on ne devait pas déjà retenir que l'expertise était dans tous les cas injustifiée, on pourrait dans tous les cas considérer que la recourante n'avait pas formellement renouvelé sa réquisition de preuve tendant à la mise en oeuvre d'une expertise au stade de l'appel.
Ensuite, dans une motivation relative à l'influence de l'expertise requise sur la décision à rendre, l'autorité cantonale s'est saisie de la critique de la recourante portant sur l'interprétation de l'art. 14 de l'acte constitutif du droit de superficie, qui soutenait qu'il fallait accorder de l'importance à la notion de " bon état " plutôt qu'au verbe " maintenir ", de sorte que l'état dans lequel les bâtiments avaient été reçus n'était pas déterminant et que l'expertise requise en première instance était pertinente. Elle a constaté en premier lieu que la recourante ne s'en prenait pas aux motifs retenus par le premier juge - ou alors, très implicitement - mais présentait bien plutôt ses propres appréciation et interprétation de l'article litigieux, de sorte que la recevabilité de son grief était " discutable ". En second lieu, elle a relevé que la position soutenue par la recourante en appel n'était pas celle qu'elle défendait en première instance. Selon elle, il ressortait en effet du dossier que la recourante avait allégué dans sa demande que l'intimé avait une obligation de remettre les constructions " en meilleur état afin de remédier aux dégradations " et qu'il " devait donc assurer la réfection du bâtiment et prendre les mesures nécessaires en vue de rétablir un bon état des bâtiments ". Or, en procédure d'appel, la recourante soutenait désormais que l'obligation de l'intimé consistait à maintenir les constructions dans un état tel qu'elles puissent être utilisées conformément à leur destination, en nuançant quelque peu sa position dans sa réplique. Selon l'autorité cantonale, d'une part, cette interprétation n'était
a priori pas incompatible avec celle retenue par le premier juge, sauf à considérer qu'au moment de la constitution du droit de superficie, les constructions étaient dans un état tel qu'elles ne pouvaient pas être utilisées conformément à leur destination. Cela ne ressortait toutefois pas du dossier et les parties ne le prétendaient pas. D'autre part, la recourante n'avait jamais allégué, en première instance, que les constructions étaient dans un état de dégradation tel qu'elles ne pouvaient plus être utilisées conformément à leur destination. Elle avait allégué, en se fondant sur une expertise privée, que les bâtiments présentaient divers manquements d'entretien (par exemple, léger affaissement des pans du toit de la maison d'habitation, les façades présentent des fissures, les volets sont en mauvais état, etc.) de façon toute générale, que l'intimé avait laissé les bâtiments " se dégrader à l'extrême " et encore que cette dégradation était pleinement imputable à l'intimé. Elle n'avait fourni aucune allégation concernant la destination des différentes constructions concernées - la cour cantonale précisant que l'on pouvait éventuellement admettre que ces faits aient été implicitement allégués (la destination d'une maison d'habitation ou d'une ferme étant plutôt évidente) -, mais, surtout, n'avait pas allégué que telle dégradation spécifique empêcherait l'une ou l'autre des constructions d'être utilisée conformément à sa destination. En d'autres termes, il ne ressortait ni des allégués de la recourante, ni du dossier que les dégradations qui affectaient la maison d'habitation étaient telles que l'on ne pouvait plus y habiter, par exemple. Force était donc de constater que l'allégation de la recourante était lacunaire, toujours dans l'hypothèse d'interprétation qu'elle-même proposait. L'autorité cantonale a encore précisé que l'expertise que la recourante avait requise en première instance lui aurait certes permis d'établir l'état actuel d'entretien des constructions, mais n'aurait pas pu pallier l'allégation lacunaire qui venait d'être évoquée.
En définitive, le rejet de la demande s'imposait, selon l'interprétation de l'article litigieux effectuée par le Tribunal civil et le raisonnement qui en avait découlé, mais également selon l'interprétation de cet article proposée par la recourante en procédure d'appel. Les nuances que la recourante tentait d'apporter dans sa réplique n'y changeaient rien, étant rappelé que la motivation de l'appel devait figurer dans le mémoire d'appel lui-même et qu'elle ne pouvait être complétée ou corrigée ultérieurement.
3.2. Dans sa seconde motivation sur la gravité que devait revêtir la violation des obligations du superficiaire pour justifier un retour anticipé du droit de superficie, l'autorité cantonale a considéré que la recourante n'avait aucunement allégué les circonstances dont il aurait découlé que les conditions strictes du retour anticipé étaient réalisées. Elle s'était bornée à prétendre que les conditions pour le retour anticipé étaient réunies et, de manière toute générale, que si l'intimé ne remédiait pas aux manques d'entretien constatés, les bâtiments perdraient définitivement de leur valeur et qu'il était à craindre que cela altérât la qualité structurelle, protectrice et isolante initiale des matériaux. Or, il ressortait des conditions du droit de superficie que seul l'intimé assumait l'entretien des constructions et répondait à l'égard des tiers de tous les excès en matière de voisinage. En outre, à l'échéance du droit de superficie, les constructions feraient leur retour au propriétaire du sol contre une indemnité équitable fixée en fonction de leur état, leur vétusté et leur état d'entretien. Un mauvais état d'entretien des constructions, pendant la durée du droit de superficie, n'affectait dès lors
a priori pas la recourante puisqu'elle n'avait pas à répondre de cet état et qu'il avait pour effet de réduire le montant de l'indemnité équitable due par elle pour le retour des constructions. Il ne l'affectait à tout le moins pas au point de rendre la continuation du droit de superficie déraisonnable, sauf circonstances particulières qui n'avaient pas été alléguées en l'espèce. Même si l'état de toutes les constructions avait été globalement mauvais - ce que la recourante ne prétendait même pas - et même si l'on considérait que l'intimé n'avait pas respecté son obligation de maintenir les constructions en " bon " état d'entretien, cela n'aurait pas encore nécessairement signifié qu'un retour anticipé du droit de superficie - qui était une mesure d'
ultima ratio - aurait été justifié.
Toujours selon l'autorité cantonale, la question de savoir si des violations réitérées des obligations contractuelles suffisaient pour considérer qu'un retour anticipé du droit de superficie était justifié au sens de l'art. 779f CC pouvait rester ouverte. Le seul fait que les obligations contractuelles du superficiaire eussent été violées à réitérées reprises, cas échéant, n'impliquait pas automatiquement que la continuation du droit de superficie ne pouvait pas raisonnablement être exigée du propriétaire du sol ou que le retour anticipé apparaissait comme la seule mesure appropriée. En outre, le premier juge avait retenu que l'allégation des faits pertinents par la recourante était insuffisante pour retenir une violation ou des violations de l'art. 14 litigieux (graves ou non) et la recourante n'avait même pas contesté cet aspect en appel, en reprenant ses allégués et en prétendant qu'ils étaient suffisamment complets et précis. À défaut, il ne pouvait pas être retenu que l'intimé avait violé ses obligations contractuelles découlant du contrat de superficie.
Au vu de ce qui précédait, l'autorité cantonale a laissé indécis les autres griefs de la recourante.
4.
4.1. La recourante se plaint de la violation de son droit à la preuve (art. 29 al. 2 Cst.) et de celle de l'art. 310 CPC en tant que son offre d'expertise tendant à démontrer les manquements de l'intimé à maintenir les bâtiments en bon état d'entretien a été refusée.
Elle se plaint aussi de la violation de son droit de plaider (art. 232 CPC). Ce grief doit toutefois d'emblée être déclaré irrecevable en tant qu'il est dirigé contre la décision de première instance et qu'il est sans portée par rapport à ses autres griefs: la recourante soutient que l'autorité cantonale n'a pas réparé ce défaut précisément parce qu'elle s'est dispensée, pour des motifs fallacieux de procédure, d'examiner ses arguments au fond relatifs à l'interprétation de l'art. 14 du contrat.
4.1.1. La recourante soutient en substance que l'autorité cantonale a restreint à tort sa cognition à l'arbitraire sur cette question et qu'elle s'est référée à tort à la jurisprudence relative à l'appréciation anticipée de la force probante du moyen offert, alors que seule était déterminante la pertinence de celui-ci, soit la question de droit relative à l'interprétation objective à donner à l'art. 14 du contrat de superficie. Elle expose qu'une interprétation littérale, systématique et téléologique, ainsi que les circonstances du cas d'espèce, auraient amené l'autorité cantonale, si elle avait procédé à l'interprétation du contrat, à considérer que celui-ci imposait à l'intimé d'entretenir la ferme dans un état objectivement " bon ", indépendamment de l'état des constructions au moment de la constitution du droit. Cette interprétation erronée avait conduit les autorités cantonales à violer son droit à la preuve en niant la pertinence de l'expertise destinée à prouver les violations répétées de l'art. 14 du contrat de superficie et, par là même, ses droits au retour anticipé (art. 779f CC) et à l'exécution du contrat (art. 97 CO).
4.1.2. L'intimé soutient en substance que la preuve n'était " pertinente ou probante " que si l'interprétation du contrat se faisait dans le sens d'une remise en état. Or, le premier juge était en droit de procéder à une première analyse juridique de la clause litigieuse pour parvenir au rejet de cette preuve. Dès lors que l'expertise ne portait que sur l'hypothèse d'une obligation de remise en état, l'administration de cette preuve n'était, à l'évidence, pas apte à modifier l'interprétation qu'il avait faite de la clause. Si le premier juge avait par la suite été amené à revoir l'interprétation qu'il avait faite de la clause à la lumière d'autres éléments, il aurait pu et dû modifier son ordonnance de preuve, pour autant que l'expertise requise fût alors pertinente. En outre, selon lui, la recourante n'a pas réellement précisé en quoi consistait ce moyen de preuve, de sorte qu'on pouvait se demander s'il avait été régulièrement offert.
4.2.
4.2.1. Aux termes de l'art. 150 al. 1 CPC, la preuve a pour objet les faits pertinents et contestés. Les faits pertinents sont ceux propres à influencer la solution juridique de la contestation (arrêt 4A_229/2012 du 19 juillet 2012 consid. 4). Il s'agit des faits qui correspondent aux faits constitutifs (ou faits générateurs) de la règle légale applicable. C'est donc le droit matériel qui détermine les éléments pertinents sur lesquels la procédure d'administration des preuves doit porter (Hohl, Procédure civile, tome I, 2e éd., 2016, n° 1587 s.). Si le juge du fond refuse d'administrer les moyens de preuve offerts parce qu'il comprend mal la norme applicable ou la considère à tort comme non déterminante, il viole par conséquent le droit matériel lui-même (arrêt 4P.129/2003 du 3 novembre 2003 consid. 2.1; Hohl,
op. cit., n° 2071). La preuve suppose des allégués de fait correspondants et motivés, contestés par la partie adverse de manière suffisamment motivée. A défaut, sous réserve de l'art. 153 CPC, il n'y a pas de place pour l'administration de la preuve (ATF 144 III 67 consid. 2.1).
Le droit à la preuve est une composante du droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst.; il se déduit également de l'art. 8 CC et trouve une consécration expresse à l'art. 152 CPC (ATF 143 III 297 consid. 9.3.2; 138 III 374 consid. 4.3.1). Il implique que toute partie a le droit, pour établir un fait pertinent contesté, de faire administrer les moyens de preuves adéquats, pour autant qu'ils aient été proposés régulièrement et en temps utile selon la loi de procédure applicable (ATF 144 II 427 consid. 3.1; 143 III 297 consid. 9.3.2). L'autorité a ainsi l'obligation de donner suite aux offres de preuves présentées en temps utile et dans les formes requises, à moins qu'elles ne soient manifestement inaptes à apporter la preuve ou qu'il s'agisse de prouver un fait sans pertinence (ATF 131 I 153 consid. 3; arrêt 5A_403/2007 du 25 octobre 2007 consid. 3.1 et les autres références). Les art. 8 CC et 152 CPC ne régissent pas l'appréciation des preuves et ne disent pas quelles mesures probatoires doivent être ordonnées, ni ne dictent au juge civil comment forger sa conviction (arrêts 4A_309/2021 du 18 janvier 2022 consid. 4.1 et les références; 5A_793/2020 du 24 février 2021 consid. 4.1). En outre, le droit à la preuve n'interdit pas au juge de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis d'acquérir une conviction et qu'à l'issue d'une appréciation anticipée des moyens de preuves qui lui sont encore proposés, il a la certitude que ceux-ci ne pourraient pas l'amener à modifier son opinion (ATF 146 III 73 consid. 5.2.2; 143 III 297 consid. 9.3.2; 141 I 60 consid. 3.3; arrêt 4A_42/2017 du 29 janvier 2018 consid. 3.2, non publié aux ATF 144 III 136).
Lorsque le juge refuse une offre de preuve parce que celle-ci est manifestement inapte à apporter la preuve ou parce qu'il nie la pertinence du fait allégué, il procède à une appréciation anticipée des preuves "improprement dite". En revanche, lorsqu'il se fonde sur un état de fait hypothétique qu'il estime connaître sur la base des circonstances déjà établies et des preuves déjà administrées, il procède à une appréciation anticipée des preuves "proprement dite" (ATF 146 III 203 consid. 3.3.2; arrêts 5A_131/2021 du 10 septembre 2021 consid. 3.2.1; 2C_733/2012 du 24 janvier 2013 consid. 3.2.3).
4.2.2. Le pouvoir de cognition de la cour d'appel dans l'appréciation des preuves n'est pas limité à l'arbitraire. Celle-ci dispose d'un plein pouvoir d'examen en droit et en fait (cf. art. 310 CPC), ce qui lui permet notamment de contrôler librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (cf. entre autres ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).
Conformément à l'art. 316 al. 3 CPC, l'instance d'appel peut librement décider d'administrer des preuves: elle peut ainsi ordonner que des preuves administrées en première instance le soient à nouveau devant elle, faire administrer des preuves écartées par le tribunal de première instance ou encore décider l'administration de toutes autres preuves. Cette disposition ne confère toutefois pas à l'appelant un droit à la réouverture de la procédure probatoire et à l'administration de preuves. L'instance d'appel peut rejeter la requête de réouverture de la procédure probatoire et d'administration d'un moyen de preuve déterminé présentée par l'appelant si celui-ci n'a pas suffisamment motivé sa critique de la constatation de fait retenue par la décision attaquée; elle peut également refuser une mesure probatoire en procédant à une appréciation anticipée des preuves, lorsqu'elle estime que le moyen de preuve requis ne pourrait pas fournir la preuve attendue ou ne pourrait en aucun cas prévaloir sur les autres moyens de preuve déjà administrés par le tribunal de première instance, à savoir lorsqu'il ne serait pas de nature à modifier le résultat des preuves qu'elle tient pour acquis (ATF 145 I 167 consid. 4.1; 140 I 285 consid. 6.3.1; 138 III 374 consid. 4.3.2; arrêt 5A_79/2023 du 24 août 2023 consid. 3.3.2).
Sous le régime de la maxime des débats, les parties doivent alléguer les faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions et produire, dans les délai et forme requis, les moyens de preuve qui s'y rapportent (art. 55 al. 1 CPC). L'administration d'office de preuves n'a lieu que lorsqu'il existe des motifs sérieux de douter d'un fait non contesté (art. 153 al. 2 en lien avec l'art. 55 al. 2 CPC). En principe, les parties sont tenues de renouveler en seconde instance leurs réquisitions de preuves de première instance qui n'ont pas été admises. Cette obligation s'explique pour des raisons pratiques et vise à éviter que la juridiction d'appel ne doive chercher dans le dossier de première instance - souvent volumineux - les réquisitions de preuves formulées en première instance, mais non renouvelées en instance d'appel par les parties, en particulier par l'intimé (ATF 144 III 394 consid. 4.2).
4.3. En l'espèce, non seulement l'autorité cantonale s'est méprise sur sa cognition en fait qu'elle a limitée à tort à l'arbitraire, de sorte qu'elle aurait de toute façon dû contrôler librement l'appréciation du premier juge, mais elle a confondu l'appréciation anticipée des preuves proprement et improprement dite. En l'occurrence, le grief soulevé relevait du droit, en ce sens que la recourante se plaignait de ce que l'administration d'une preuve lui avait été refusée à tort, faute pour le premier juge d'avoir déterminé correctement les éléments constitutifs de l'obligation de l'intimé au terme d'une interprétation objective du contrat de superficie. Partant, l'autorité cantonale ne pouvait rejeter, par une argumentation portant sur l'appréciation des preuves, même anticipée, le grief de la recourante qui se plaignait de la violation de son droit à la preuve. Par ailleurs, en reprochant à la recourante de n'avoir pas formulé devant elle la réquisition de preuve que le premier juge avait refusée, l'autorité cantonale méconnaît l'art. 316 CPC: il était évident que la recourante entendait que le moyen de preuve dont elle se plaignait du refus soit administré, soit par l'autorité cantonale, soit par le premier juge après un renvoi.
Cela étant, malgré cette motivation d'ordre formel, l'autorité cantonale s'est néanmoins saisie dans la suite de son argumentation de la question de droit matériel en lien avec le droit à la preuve. Il reste donc à examiner si celle-ci était en droit de refuser l'administration de l'expertise requise, soit parce que le fait allégué n'était pas pertinent pour l'issue du litige, soit parce que la recourante n'avait pas allégué ce fait conformément aux réquisits du CPC.
5. La recourante reproche en substance à la cour cantonale d'avoir refusé de traiter au fond sa critique relative à l'interprétation à donner à l'art. 14 du contrat de superficie en lien avec l'obligation d'entretien incombant à l'intimé, pour des motifs procéduraux erronés et sur la base d'une constatation arbitraire des faits, que ce soit en lien avec le contenu du contrat ou la gravité de la violation des obligations du superficiaire. À cet égard, elle invoque en particulier un déni de justice formel (art. 29 al. 1 Cst.), l'arbitraire dans la constatation des faits (art. 9 Cst.) et la violation de plusieurs dispositions du CPC, notamment des art. 150, 310 et 311 CPC . Elle invoque aussi la violation des art. 779f CC et 97 ss CO.
5.1.
5.1.1. S'agissant de l'interprétation du contrat, la recourante soutient d'abord que la considération de la cour cantonale portant sur le défaut de motivation de l'appel relèverait du formalisme excessif et serait contraire à l'art. 311 al. 1 CPC. Elle souligne que, aux pages 17-21 de son mémoire d'appel, elle s'est attelée à démontrer le caractère erroné de la motivation du premier juge quant à l'interprétation de l'art. 14 du contrat, notamment que la notion de " bon état " était décisive, et non le verbe " maintenir ".
La recourante expose ensuite que l'appréciation de l'autorité cantonale selon laquelle elle avait changé de position était une élucubration construite par l'intimé, qui avait détourné ses propos dans sa réponse en sortant des phrases de leur contexte. Elle n'avait jamais changé sa position, à savoir le maintien de l'objet en bon état d'entretien. Rien ne pouvait laisser comprendre à l'autorité cantonale que ses développements en appel étaient destinés à " annuler et remplacer " ses allégués en lien avec l'obligation de l'intimé de maintenir " l'objet de son droit en bon état d'entretien "; ceux-ci précisaient uniquement l'interprétation objective du contrat à l'appui de sa position. On pouvait d'ailleurs admettre de bonne foi que la notion " conformément à la destination du bâtiment " ne constituait qu'une précision venant étoffer son propos, soit que le bon état d'entretien est évidemment relatif à la destination du bâtiment. Il était donc arbitraire de prétendre qu'elle avait changé de position.
La recourante soutient en outre que cette première constatation arbitraire avait conduit l'autorité cantonale à retenir qu'elle n'avait jamais allégué, en première instance, la destination des différentes constructions ni que les constructions étaient dans un état de dégradation tel qu'elles ne pouvaient plus être utilisées conformément à celle-ci. Or, pareil raisonnement était faux et arbitraire. D'une part, elle avait distingué dans sa demande chaque bâtiment selon sa destination (Demande p. 8-12); d'autre part, elle y avait allégué, comme le constatait du reste l'arrêt entrepris, que si l'intimé ne remédiait pas aux défauts d'entretien constatés, les bâtiments perdraient définitivement de leur valeur et qu'il était à craindre que cela n'altère la qualité structurelle, protectrice et isolante initiale des matériaux. Elle avait au surplus formulé tous les allégués consacrés au défaut d'entretien et à leurs conséquences actuelles et prévisibles (Demande p. 5-12).
S'agissant de la gravité des violations commises par l'intimé, la recourante soutient qu'elle n'avait pas à alléguer des dégradations spécifiques qui empêchaient l'utilisation des bâtiments conformément à leur destination. Il suffisait d'alléguer les violations de l'art. 14 commises par l'intimé, ce qu'elle avait largement fait, en mentionnant en particulier les défauts d'entretien reprochés à l'intimé et leurs risques pour les bâtiments. Aussi, si l'autorité cantonale estimait que les circonstances alléguées ne remplissaient pas les conditions de l'art. 779f CC, elle se devait de trancher cette question comme une question de droit, et non se réfugier derrière un prétendu vice de procédure qui n'en était pas un.
5.1.2. L'intimé rejoint l'autorité cantonale sur le défaut de motivation de l'appel et sur la modification de position de la recourante qui, se fondant sur les avis de droit qu'elle avait requis, s'était prévalue du maintien des constructions conformément à leur destination.
Il ajoute que la recourante a présenté des allégués uniquement en lien avec son interprétation de l'art. 14, à savoir la remise en état des bâtiments. Il reproche aussi à la recourante d'avoir omis bon nombre d'allégués soutenant sa position juridique, quant à l'état du bâtiment.
5.2. Selon l'art. 311 al. 1 CPC, l'appel doit être motivé. Pour satisfaire à cette obligation, l'appelant doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée par une argumentation suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre aisément, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 141 III 569 consid. 2.3.3; 138 III 374 consid. 4.3.1). Même si l'instance d'appel applique le droit d'office (art. 57 CPC), le procès se présente différemment en seconde instance, vu la décision déjà rendue. L'appelant doit donc tenter de démontrer que sa thèse l'emporte sur celle de la décision attaquée. Il ne saurait se borner à simplement reprendre des allégués de fait ou des arguments de droit présentés en première instance, mais il doit s'efforcer d'établir que, sur les faits constatés ou sur les conclusions juridiques qui en ont été tirées, la décision attaquée est entachée d'erreurs. Il ne peut le faire qu'en reprenant la démarche du premier juge et en mettant le doigt sur les failles de son raisonnement. A défaut, l'appel est irrecevable (ATF 147 III 176 consid. 4.2.1; parmi plusieurs: arrêt 5A_524/2023 du 14 décembre 2023 consid. 3.3.1 et les autres références).
5.3.
5.3.1. En l'espèce, l'autorité cantonale a retenu qu'il était " discutable " que le grief sur l'interprétation à donner à l'art. 14 du contrat de superficie était suffisamment motivé et donc recevable. Il n'apparaît donc pas qu'elle ait accordé à cette motivation un caractère décisif.
Quoi qu'il en soit, il résulte de l'appel que la recourante s'est expressément plainte d'une constatation inexacte de faits, le premier juge ayant selon elle retenu à tort que l'état des bâtiments était moyen à bon (p. 15 ss de l'appel du 15 février 2023), d'une interprétation erronée de l'art. 14 du contrat de superficie (p. 17 ss de l'appel précité) et de la violation de l'art. 779f CC sur le droit de retour anticipé (p. 21 ss de l'appel précité). Dans ses écritures, elle s'était référée à des passages du jugement de première instance. Elle reprochait notamment au premier juge d'avoir déterminé le sens objectif de l'art. 14 en se concentrant à tort sur le terme " maintenir " pour aboutir à la conclusion que la notion de " bon état d'entretien " devait être comprise " dans le sens de la conservation de l'état existant au moment de la rédaction dudit texte " (cf. p. 17 de l'appel précité). Elle contestait cette interprétation en exposant, sur plusieurs pages et en se référant aux avis de droit produits, que c'était à la notion de " bon état " que l'autorité intimée aurait dû accorder une importance décisive et que l'interprétation ainsi donnée ignorait que le terme " bon " introduisait un standard qualitatif. Il n'apparaît donc pas, contrairement à ce qu'a retenu l'autorité cantonale, que la recourante s'est limitée à renvoyer aux moyens soulevés en première instance ou s'est livrée à une critique toute générale. Sa motivation était en tout cas suffisamment explicite pour que cette autorité puisse la comprendre. En particulier, tout au long de ses écritures, la recourante n'a eu de cesse de soutenir que la notion de " bon état " était, contrairement à celle de " maintien " lors de l'acquisition, décisive et introduisait un critère qualitatif que le premier juge avait ignoré (cf. n° 60 ss, 67 p. 19 et 21 de l'appel précité). Contrairement à l'opinion de l'autorité cantonale, qui y voit une motivation contradictoire au fil de la procédure, il faut comprendre que la référence à la destination du bâtiment ne servait qu'à déterminer ce standard. Partant, on ne saurait faire grief à la recourante de n'avoir pas satisfait aux exigences précitées de motivation de l'art. 311 al. 1 CPC.
En outre, contrairement à ce qu'estime l'autorité cantonale, on ne saurait davantage reprocher à la recourante un défaut d'allégation en lien avec la destination des constructions et les dégradations spécifiques qui affectent la destination de chaque construction. En effet, il ressort notamment de la demande (all. 28 à 35 de la demande du 13 novembre 2019), à laquelle l'appel fait référence également (cf. n° 15 p. 4 et n° 47 p. 16 de l'appel précité), que la recourante a rendu compte de la destination des différentes constructions; l'état de fait de l'arrêt entrepris mentionne par ailleurs la nature des différentes constructions. La recourante a également allégué (cf. notamment all. 20 à 58 de la demande précitée et all. 142 à 153 de la réplique du 23 juin 2020), les violations d'entretien qu'elle reprochait à l'intimé, en précisant en particulier, sur la base d'une expertise privée réalisée le 18 octobre 2019 (pièce 9) et en requérant en sus la mise en oeuvre d'une expertise judiciaire, quels défauts d'entretien présentait chacune des constructions (all. 27 à 32 de la demande précitée). Ces allégués apparaissent suffisants pour apprécier si l'intimé avait contrevenu à son obligation d'entretien contenue à l'art. 14 du contrat de superficie. C'est donc à tort que l'autorité cantonale a refusé de se saisir de cette question. La cause doit ainsi lui être renvoyée pour qu'elle procède à l'interprétation objective dudit contrat.
5.3.2. Le même reproche peut être fait à l'autorité cantonale concernant le prétendu défaut d'allégation en lien avec la gravité de la violation des obligations, nécessaire à l'exercice du droit de retour anticipé (cf. art. 779f CC), invoquée à titre de motivation alternative.
En l'espèce, la recourante a allégué les violations d'entretien qu'elle reprochait à l'intimé (all. 27 à 32 de la demande précitée) et les conséquences possibles de ces violations (all. 24 et 34 de la demande: perte de valeur, atteinte à la qualité structurelle, protectrice et isolante; n° 77 p. 23 de l'appel précité). L'autorité cantonale ne pouvait donc pas se contenter, comme elle l'a fait, d'écarter la prétention en retour anticipé pour le motif que la recourante n'avait pas fourni d'allégués en lien avec la réalisation des conditions strictes de ce droit. Elle se devait au contraire d'examiner si, au vu des violations contractuelles et des conséquences invoquées par la recourante et, cas échéant, après avoir administré les moyens de preuve offerts à l'appui de celles-ci, ces conditions étaient en l'occurrence réalisées. La cause doit donc également lui être renvoyée pour qu'elle procède à l'examen de la question de savoir si l'éventuelle violation des obligations par le superficiaire revêt une gravité suffisante pour justifier un retour anticipé. Dès lors qu'elles revêtent un caractère général et qu'elles sont déconnectées des circonstances (d'espèce) alléguées par la recourante, les considérations de l'autorité cantonale portant sur le fait qu'un mauvais état des constructions, qu'un manquement dans l'obligation de maintenir les constructions en " bon état " ou qu'une violation répétée des obligations contractuelles ne justifierait pas encore nécessairement un retour anticipé, n'apparaissent pas de nature à pallier cette absence d'examen, ce d'autant que l'arrêt querellé laisse ouverte la question de l'application de l'art. 779f CC
in casu.
Il sera au surplus relevé qu'en tant que l'autorité cantonale indique que la recourante n'aurait pas contesté en appel la motivation du premier juge selon laquelle son allégation était insuffisante pour retenir une ou des violations de l'art. 14 du contrat de superficie, elle omet de dire que le premier juge avait retenu que cette insuffisance d'allégation concernait l'état des constructions " qui était le leur au moment de la constitution " du droit de superficie. Vu que la recourante contestait que l'art. 14 devait objectivement être interprété dans ce sens, en soutenant dans son appel qu'il incombait à l'intimé de maintenir les constructions en " bon état d'entretien ", indépendamment de l'état des constructions au moment de la constitution dudit droit, l'argument ne porte pas. Par ailleurs, la recourante s'est plainte dans son appel, d'une constatation incomplète des faits quant aux violations de l'obligation d'entretien de l'intimé, qui prises dans leur ensemble rendaient la poursuite de la relation contractuelle intolérable (cf. n° 70 de l'appel précité). Un refus de traiter d'emblée les conclusions subsidiaires de la recourante en exécution des travaux n'apparaît dès lors pas justifié.
Il résulte de ce qui précède que l'arrêt entrepris doit être annulé et que la cause doit être retournée à l'autorité cantonale pour qu'elle procède à un examen complet du bien-fondé des critiques de fond formulées par la recourante dans son appel dans le sens des considérants du présent arrêt.
6.
En définitive, le recours est admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants. L'intimé, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF) et versera à la recourante une indemnité à titre de dépens ( art. 68 al. 1 et 2 LTF ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 10'000 fr., sont mis à la charge de l'intimé.
3.
L'intimé versera à la recourante la somme de 12'000 fr. à titre de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.
Lausanne, le 5 mars 2024
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Herrmann
La Greffière : Achtari