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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_617/2023  
 
 
Arrêt du 5 avril 2024  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Haag, 
Greffière : Mme Tornay Schaller. 
 
Participants à la procédure 
1. A.A.________, 
2. A.B.________, 
3. B.________, 
4. C.________, 
5. D.________, 
6. E.A.________, 
7. E.B.________, 
8. F.A.________, 
9. F.B.________, 
10. G.________, 
11. H.________, 
12. I.________, 
13. J.________, 
14. K.________, 
15. L.A.________, 
16. L.B.________, 
17. L.C.________, 
18. M.A.________, 
19. M.B.________, 
20. N.A.________, 
21. N.B.________, 
22. O.________, 
23. P.________, 
24. Q.A.________, 
25. Q.B.________, 
tous représentés par Me Adelina Shala, avocate, 
recourants, 
 
contre  
 
Commune municipale de Sonvilier, 
2615 Sonvilier, 
agissant par le Conseil municipal de Sonvilier, rue du Collège 1, 2615 Sonvilier, 
lui-même représenté par Me Magali Giglio, avocate, 
Préfecture du Jura bernois, 
case postale 106, 2608 Courtelary, 
 
Comité d'initiative "Parc éolien des Quatre Bornes ", 
2615 Montagne-de-Sonvilier. 
 
Objet 
Droits politiques; irrecevabilité d'un recours en matière d'initiative populaire communale, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Berne, Cour des affaires de langue française, du 9 octobre 2023 (100.2023.61). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 27 septembre 2020, le corps électoral de la Commune municipale de Sonvilier (ci-après: la commune) a refusé l'adoption d'un plan de quartier valant permis de construire pour le projet de Parc éolien des Quatre Bornes. 
Par arrêté adopté en séance du 5 avril 2022 et publié dans la Feuille officielle d'avis du district de Courtelary du 14 avril 2022, le Conseil municipal de Sonvilier a validé le dépôt de l'initiative communale "Parc éolien des Quatre Bornes" déposée le 21 février 2022. Cette initiative demande que le projet de plan de quartier valant permis de construire du projet Parc éolien des Quatre Bornes soit soumis au vote populaire une nouvelle fois. Le Conseil municipal a notamment indiqué dans son arrêté que "le projet sera mis en dépôt public et soumis au vote populaire par la voie des urnes". 
Par courrier du 17 juin 2022, l'association "Sauvez l'Echelette" ayant pour but la sauvegarde du patrimoine naturel régional a demandé à la commune si celle-ci considérait l'initiative déposée comme une simple proposition ou comme un projet rédigé de toutes pièces. Elle a requis de la commune qu'elle se détermine dans un délai de dix jours en rendant une décision. Le 22 juin 2022, la commune a répondu que l'initiative en cause avait été considérée comme un projet rédigé de toutes pièces et que cette réponse ne constituait pas une décision. A.A.________, A.B.________, B.________, C.________, D.________, E.A.________, E.B.________, F.A.________, F.B.________, G.________, H.________, I.________, J.________, K.________, L.A.________, L.B.________, L.C.________, M.A.________, M.B.________, N.A.________, N.B.________, O.________, P.________, Q.A.________ et Q.B.________ (ci-après: A.A.________ et consorts) notamment ont déposé un recours contre ce courrier auprès de la Préfète du Jura bernois (ci-après: la Préfète). Par décision du 12 janvier 2023, celle-ci a déclaré le recours irrecevable. 
 
B.  
Par jugement du 9 octobre 2023, le Juge unique de la Cour des affaires de langue française du Tribunal administratif du canton de Berne (ci-après: le Tribunal administratif) a admis partiellement le recours déposé notamment par A.A.________ et consorts contre la décision du 12 janvier 2023. Il a annulé la décision du 12 janvier 2023 en tant qu'elle mettait des frais de procédure de 400 francs à la charge des recourants et a rejeté le recours pour le surplus. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.A.________ et consorts demandent au Tribunal fédéral d'annuler le jugement du 9 octobre 2023 et de renvoyer la cause au Tribunal administratif, éventuellement à la Préfecture du Jura bernois pour nouveau jugement. 
Le Tribunal administratif renonce à se déterminer et se réfère à son jugement. La Préfète se réfère à sa décision. La commune conclut au rejet du recours. Les recourants répliquent. 
Par ordonnance du 7 décembre 2023, le Président de la Ire Cour de droit public a admis la requête d'effet suspensif, traitée comme une demande de mesure provisionnelle, déposée par les recourants. Il a fait interdiction à la commune de soumettre l'initiative communale "Parc éolien des Quatre Bornes" à la votation populaire jusqu'à droit connu sur le recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dirigé contre une décision confirmant une irrecevabilité prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans le domaine des droits politiques, le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public qui concerne le droit de vote des citoyens ainsi que les élections et votations populaires (art. 82 let. c LTF). Titulaires des droits politiques dans la commune de Sonvilier, les recourants ont qualité pour agir (art. 89 al. 3 LTF). 
Le Tribunal administratif ayant confirmé la non-entrée en matière sur le recours, seule la question de la recevabilité du recours peut donc être portée devant le Tribunal fédéral qui n'a, à ce stade, pas à examiner le fond de la contestation. 
 
2.  
Le Tribunal fédéral ne connaît pas l'institution du recours joint, de sorte que la partie qui entend contester une décision doit le faire elle-même dans le délai de recours de l'art. 100 LTF. A défaut, elle ne peut, dans sa détermination sur le recours formé par l'autre partie, que proposer de rejeter celui-ci; elle n'est pas admise à reprendre les conclusions formulées devant l'autorité précédente (ATF 145 V 57 consid. 10.2; 138 V 106 consid. 2.1). Il s'ensuit que les conclusions de la commune sont irrecevables dans la mesure où elles tendent à autre chose qu'au rejet du recours. 
 
3.  
Il y a lieu de déterminer si c'est à bon droit que le Tribunal administratif a confirmé l'irrecevabilité du recours contre le courrier du 22 juin 2022. Les recourants se plaignent à cet égard d'une violation de leurs droits politiques (art. 34 al. 1 Cst.) et de l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.). 
 
3.1. Appelé à revoir l'interprétation d'une norme cantonale sous l'angle de l'arbitraire, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En revanche, si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne s'avère pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution - même préférable - paraît possible (ATF 148 I 145 consid. 6.1; 147 I 241 consid. 6.2.1).  
 
3.2. L'art. 34 al. 1 Cst. garantit de manière générale et abstraite les droits politiques, que ce soit sur le plan fédéral, cantonal ou communal. Il ne définit en revanche pas en détail leur contenu et renvoie à cet égard aux constitutions et lois cantonales. La violation des dispositions en question implique aussi celle de l'art. 34 al. 1 Cst. (ATF 147 I 206 consid. 2.2).  
Dans le canton de Berne, aux termes de l'art. 60 al. 1 let. b ch. 2 de la loi bernoise sur la procédure et la juridiction administratives du 23 mai 1989 (LPJA; RS/BE 155.21), le recours est recevable contre les élections et votations ainsi que les arrêtés et décisions rendus en matière d'élections et de votations. 
Dans la commune de Sonvilier, l'art. 23 al. 2 du règlement d'organisation du 4 juin 2015 de la Commune municipale de Sonvilier (ci-après: règlement communal) prévoit qu'une initiative aboutit si au moins un dixième du corps électoral l'a signée, si elle a été déposée dans le délai de six mois prévu à l'art. 24 du règlement, si elle est conçue en termes généraux ou revêt la forme d'un projet rédigé de toutes pièces, si elle contient une clause de retrait exempte de réserve et le nom des personnes habilitées à la retirer, si elle n'est ni contraire à la loi, ni irréalisable et si elle ne se rapporte qu'à un seul objet. 
A teneur de l'art. 26 du règlement communal, le Conseil municipal soumet l'initiative à l'assemblée dans un délai de huit mois à compter de son dépôt. 
 
3.3. En l'espèce, le Tribunal administratif a d'abord considéré que la décision du Conseil municipal relative à la validité du dépôt de l'initiative en question constituait une décision susceptible de recours au sens de l'art. 60 al. 1 let. b ch. 2 LPJA; publiée le 14 avril 2022, elle pouvait être contestée par les administrés jouissant du droit de vote dans la commune dans le délai de 30 jours prévu par l'art. 67 LPJA, soit jusqu'au 16 mai 2022. Par conséquent, en interjetant un recours le 4 juillet 2022, les recourants n'avaient pas respecté le délai de 30 jours prévu par l'art. 67 LPJA, ce qu'ils ne contestaient au demeurant pas.  
 
3.3.1. Les recourants sont toutefois d'avis que la publication du 14 avril 2022 ne permettait pas de savoir si l'initiative avait été conçue en termes généraux ou si elle revêtait la forme d'un projet rédigé de toutes pièces et nécessitait des explications complémentaires, raison pour laquelle ils s'étaient adressés à la commune, qui leur avait répondu par courrier du 22 juin 2022. Ils considèrent ce courrier comme une décision, qu'ils ont attaquée dans le délai de 10 jours.  
 
3.3.2. La cour cantonale a considéré à cet égard que si les recourants étaient d'avis que l'arrêté publié le 14 avril 2022 n'était pas suffisamment précis et qu'il ne permettait en particulier pas de savoir si l'initiative considérée comme étant valable avait été conçue en termes généraux ou revêtait la forme d'un projet rédigé de toutes pièces, il leur appartenait malgré tout de recourir dans le délai légal de 30 jours; cette prétendue absence de clarté de la publication ne pouvait conduire à leur restituer le délai de recours, en application de l'art. 43 al. 2 LPJA; en outre, compte tenu du principe de l'autorité matérielle de la chose jugée ( res judicata, voir ATF 144 I 11 consid. 4.2 et les références), dans la mesure où la décision du Conseil municipal est entrée en force à l'échéance du délai de recours de 30 jours faisant suite à la publication du 14 avril 2022 (soit le 16 mai 2022), il n'était plus possible pour les recourants d'entamer une nouvelle procédure ordinaire sur la même question de la validité de l'initiative; le courrier du 22 juin 2022 ne pouvait donc être considéré comme une décision susceptible de recours.  
 
3.4. Face à ce raisonnement, les recourants se contentent d'affirmer à nouveau qu'ils n'ont pas critiqué l'aboutissement de l'initiative populaire mais "la constatation erronée de la forme de l'initiative populaire". Ils font valoir que le Conseil municipal n'avait pas à soumettre l'initiative directement au vote populaire à l'urne, mais qu'il aurait dû, conformément à l'art. 26 du règlement communal, la soumettre préalablement à l'assemblée municipale dans un délai de huit mois à compter de son dépôt. Ils soutiennent que l'arrêté du 14 avril 2022 ne portait que sur la validité de l'initiative et non sur sa forme. Ils avancent ne pas savoir (et ne pas pouvoir savoir) à la seule lecture de la publication du 14 avril 2022 comment le Conseil municipal avait évalué la forme de l'initiative.  
S'il est vrai que la forme de l'initiative populaire n'est pas mentionnée, il ressort cependant expressément de la publication du 14 avril 2022 que "le projet sera mis en dépôt public et soumis au vote populaire par la voie des urnes". Une telle formulation impliquait nécessairement que l'initiative se trouvait en état d'être soumise au vote, en d'autres termes qu'elle était entièrement rédigée. Les recourants sont par conséquent malvenus de se plaindre de ce qu'ils ne pouvaient pas comprendre que l'initiative ne sera pas soumise préalablement à l'assemblée municipale. 
Le Tribunal administratif n'a ainsi pas violé l'art. 34 al. 1 Cst. et n'a pas fait preuve d'arbitraire en jugeant que les recourants devaient recourir contre l'arrêté du 14 avril 2022, s'ils entendaient s'opposer au fait que l'initiative communale allait être directement soumise au vote populaire à l'urne. 
 
4.  
Les recourants font aussi valoir une violation du principe de la bonne foi (art. 9 Cst.). 
 
4.1. Découlant directement de l'art. 9 Cst. et valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu'il met dans les assurances reçues des autorités, lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de celles-ci. Un renseignement ou une décision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées, qu'elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et que l'administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement de l'inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore qu'il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice, que la réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée et que l'intérêt à l'application correcte du droit n'apparaisse pas prépondérant (ATF 143 V 95 consid. 3.6.2).  
 
4.2. En l'espèce, les recourants soutiennent qu'ils n'avaient aucune raison de douter que le Conseil municipal inscrirait l'initiative populaire déclarée valable à l'ordre du jour et la soumettrait à l'assemblée municipale dans un délai de huit mois à compter de son dépôt, conformément au règlement communal. Ils estiment qu'il "fallait dans un premier temps voter sur l'initiative elle-même - comprenant la question de savoir si le Conseil municipal devait soumettre un projet de parc éolien au vote ou non; ce n'est qu'en cas de oui à cette question qu'un vote sur un projet concret de parc éolien aurait dû être organisé dans un deuxième temps".  
On ne voit cependant pas en quoi le principe de la confiance placée dans les autorités aurait été violé. En effet, le Conseil municipal n'a pas donné de renseignement ou de décision erronés. Au contraire, il ressortait clairement du texte de l'arrêté du 14 avril 2022 que l'initiative communale allait être soumise au vote populaire aux urnes. Cela correspond au demeurant à l'art. 3a let. b du règlement communal, qui prévoit expressément que "les ayants-droits décident aux urnes les plans de quartier ayant pour objet des installations destinées à produire de l'énergie renouvelable". 
Par conséquent, le grief de violation du principe de la confiance doit être écarté. 
 
5.  
Les recourants font encore valoir qu'ils n'ont pas critiqué la décision de validation de l'initiative, mais un acte préparatoire de la votation. Ils prétendent que la lettre du 22 juin 2022 constituerait un acte préparatoire au sens de l'art. 60 al. 1 let. b ch. 2 LPJA car elle indiquerait pour la première fois la procédure de vote qui allait suivre, soit que l'initiative allait être soumise au vote populaire à l'urne. 
Cette information ressort cependant déjà de l'arrêté du 14 avril 2022. En effet, l'arrêté de validation de l'initiative mentionne clairement que l'initiative communale va être soumise au vote populaire à l'urne. En n'agissant pas contre l'arrêté du 14 avril 2022 dans un délai de 30 jours, les recourants ont perdu la possibilité de remettre ultérieurement en question le fait que l'initiative ne sera pas soumise au vote préalable de l'assemblée communale. 
 
6.  
Il s'ensuit que le recours est rejeté. 
Les frais judiciaires sont mis à la charge des recourants qui succombent (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 francs, sont mis à la charge des recourants. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des recourants et de la Commune municipale de Sonvilier, à la Préfecture du Jura bernois, au Comité d'initiative "Parc éolien des Quatre Bornes" et à la Cour des affaires de langue française du Tribunal administratif du canton de Berne. 
 
 
Lausanne, le 5 avril 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
La Greffière : Tornay Schaller