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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_358/2023  
 
 
Arrêt du 5 avril 2024  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz, Hänni, Ryter et Kradolfer. 
Greffier : M. de Chambrier. 
 
Participants à la procédure 
1. Association A.________, 
2. B.________ Sàrl, 
3. C.________ SA, 
4. D.________ Sàrl, 
5. E.________, 
6. F.________ Sàrl, 
7. G.________, 
8. H.________ SA, 
tous représentés par Me Gilles Robert-Nicoud, avocat, recourants, 
 
contre  
 
Département de l'économie, de l'innovation, de l'emploi et du patrimoine du canton de Vaud (DEIEP), Secrétariat général, rue Caroline 11, 1014 Lausanne Adm cant VD. 
 
Objet 
Allocation d'aide extraordinaire destinée aux entreprises touchées par les mesures contre l'épidémie du Covid-19, contrôle abstrait, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour constitutionnelle, du 26 mai 2023 (CCST.2022.0004, CCST.2022.0005, CCST.2022.0008). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 2 décembre 2020, le Conseil d'État du canton de Vaud (ci-après: le Conseil d'État) a adopté l'arrêté sur les mesures économiques destinées à lutter contre les effets du coronavirus (COVID-19) par un soutien aux entreprises, dans des cas de rigueur (RS/VD 900.05.021220.5).  
Dans sa version originelle, l'art. 17 de cet arrêté, sous le titre "Suivi et contrôle", avait la teneur suivante: 
 
1 Le Département est chargé du suivi et du contrôle des aides.  
2 Les bénéficiaires d'aide sont tenus de lui présenter toutes informations et toutes pièces nécessaires au contrôle du respect des conditions d'octroi, notamment leurs pièces comptables et tout autre document jugé pertinent.  
3 Au surplus, les dispositions de la loi du 22 février 2005 sur les subventions relatives à leur suivi, leur contrôle et leur révocation, ainsi qu'à la prescription et aux dispositions pénales, sont applicables par analogie aux aides octroyées en application du présent arrêté.  
 
A.b. Le Grand Conseil du canton de Vaud (ci-après: le Grand Conseil) a ratifié, dans leur principe, les différentes mesures prises par le Conseil d'État en adoptant le 15 décembre 2020 le décret sur les mesures économiques destinées à lutter contre les effets du coronavirus (COVID-19) par un soutien aux entreprises, dans des cas de rigueur (RS/VD 900.05.151220.5; en vigueur jusqu'au 31 décembre 2021; ci-après: le décret). L'art. 17 du décret a la même teneur que celle de l'art. 17 de l'arrêté précité du 2 décembre 2020 (cf. infra consid. 4.4)  
A.c L'art. 17 de l'arrêté précité du 2 décembre 2020 a fait l'objet de plusieurs amendements successifs. Par arrêté du 6 juillet 2022, avec entrée en vigueur le même jour, le Conseil d'État a modifié cette disposition, en y intégrant notamment un al. 2bis. A la suite de cette modification, l'art. 17 de l'arrêté avait la teneur suivante: 
 
" 1Le Département est chargé du suivi, du contrôle et de la révocation des aides, avec possibilité de délégation au Service.  
2Les bénéficiaires d'aide sont tenus de lui présenter toutes informations et toutes pièces nécessaires au suivi et au contrôle des aides, notamment leurs pièces comptables et tout autre document jugé pertinent. À cet égard, il est expressément renvoyé à l'article 9 du règlement d'application de la loi du 22 février sur les subventions (tenue de la comptabilité et révision des comptes du bénéficiaire), qui est applicable par analogie.  
2bisLe Conseil d'Etat édicte par voie de règlement les dispositions particulières relatives aux mesures et au déroulement des contrôles des aides octroyées.  
3Au surplus, les dispositions de la loi du 22 février 2005 sur les subventions relatives à leur suivi, leur contrôle et leur révocation, ainsi qu'à la prescription et aux dispositions pénales, sont applicables par analogie aux aides octroyées en application du présent arrêté. "  
 
A.c. Le 30 juin 2022, le Conseil d'État a, dans l'attente de l'établissement du règlement prévu à l'art. 17 al. 2bis de l'arrêté, adopté à titre de réglementation provisoire une directive relative au contrôle des aides pour cas de rigueur octroyées.  
Il résultait notamment de cette directive que l'ensemble des entreprises bénéficiaires serait contrôlé. Différentes modalités de contrôle étaient prévues, dont, selon les circonstances, l'obligation de remettre un rapport sous forme d'"auto-déclaration de reporting" ou un "rapport NAS 950" établi par un réviseur agréé par l'Autorité fédérale de surveillance en matière de révision (ASR). L'absence de remise des documents requis au Service de la promotion de l'économie et de l'innovation du canton de Vaud (ci-après: le Service cantonal) pouvait conduire à l'obligation de rembourser la totalité de l'aide reçue. 
 
B.  
 
B.a. Le 20 juillet 2022, l'association A.________, B.________ Sàrl, C.________ SA, D.________ Sàrl, E.________, I.________ SA et F.________ Sàrl, G.________ et H.________ SA, ont saisi conjointement la Cour constitutionnelle du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: la Cour constitutionnelle) d'une requête contre, d'une part, l'art. 17 al. 2 de l'arrêté susmentionné du 6 juillet 2022 modifiant celui du 2 décembre 2020 (cause CCST.2022.0004) et contre, d'autre part, la directive du Conseil d'État du 30 juin 2022 relative au contrôle des aides "cas de rigueur" octroyées (cause CCST.2022.0005). Ils ont conclu à l'annulation de l'article et de la directive contestés.  
 
B.b. Le 5 octobre 2022, le Conseil d'État a adopté le règlement concernant le contrôle et la restitution des aides octroyées au sens de l'arrêté du 2 décembre 2020 sur les mesures économiques destinées à lutter contre les effets du coronavirus (COVID-19) par un soutien aux entreprises, dans des cas de rigueur (RS/VD 900.05.051022.1; ci-après: le règlement) et abrogé la directive du Conseil d'État du 6 juillet 2022 (art. 14 al. 1 du règlement).  
Le règlement comporte en particulier les dispositions suivantes: 
Art. 6 Entreprises dont le chiffre d'affaires de référence est inférieur ou égal à CHF 5'000'000 et l'aide totale reçue inférieure ou égale à CHF 250'000 
1 Le contrôle est effectué sur la base d'une auto-déclaration, réalisée par une ou plusieurs personnes autorisées à engager l'entreprise par leur signature.  
2 L'entreprise doit transmettre au Service, par courrier électronique, les documents suivants dûment remplis et signés :  
a. Auto-déclaration; 
b. Tableau de calcul de la limite de bénéfice autorisé. 
-..] 
Art. 7 Entreprises dont le chiffre d'affaires de référence est inférieur ou égal à CHF 5'000'000 et l'aide totale reçue supérieure à CHF 250'000 
1 Le contrôle est effectué sur la base d'un rapport conformément à la Norme d'audit suisse 950 (ci-après : rapport NAS 950) visant à obtenir une assurance limitée et établi par un réviseur agréé par l'Autorité fédérale de surveillance en matière de révision (ci-après : le réviseur).  
2 Le réviseur est mandaté par l'entreprise. Ses honoraires sont à la charge de l'entreprise.  
-..] 
 
4 L'entreprise doit transmettre au Service, par courrier électronique, les documents suivants dûment remplis et signés :  
a. Rapport NAS 950; 
b. Tableau de calcul de la participation conditionnelle au bénéfice. 
-..] 
Art. 8 Entreprises dont le chiffre d'affaires de référence est supérieur à CHF 5'000'000 et l'aide totale reçue inférieure ou égale à CHF 250'000 
1 Le contrôle est effectué sur la base d'une auto-déclaration, réalisée par une ou plusieurs personnes autorisées à engager l'entreprise par leur signature.  
2 L'entreprise doit transmettre au Service, par courrier électronique, les documents suivants dûment remplis et signés :  
a. Auto-déclaration; 
b. Tableau de calcul de la participation conditionnelle au bénéfice. 
-..] 
Art. 9 Entreprises dont le chiffre d'affaires de référence est supérieur à CHF 5'000'000 et l'aide totale reçue supérieure à CHF 250'000 
1 Le contrôle est effectué sur la base d'un rapport conformément à la Norme d'audit suisse 950 (ci-après : rapport NAS 950) visant à obtenir une assurance limitée et établi par un réviseur agréé par l'Autorité fédérale de surveillance en matière de révision (ci-après : le réviseur).  
2 Le réviseur est mandaté par l'entreprise. Ses honoraires sont à la charge de l'entreprise.  
-..] 
4 L'entreprise doit transmettre au Service, par courrier électronique, les documents suivants dûment remplis et signés :  
a. Rapport NAS 950; 
b. Tableau de calcul de la participation conditionnelle au bénéfice. 
-..] 
Art. 10 Contrôle pour les années 2022, 2023 et 2024 
1 Pour chaque année concernée, les personnes morales doivent transmettre au Service, par courrier électronique, les documents suivants dûment remplis et signés :  
a. Auto-déclaration; 
b. Etats financiers définitifs, accompagnés du rapport de révision pour les entreprises soumises à une révision. 
Art. 11 Révocation 
-..] 
2 Le Service exige une restitution partielle ou totale de l'aide octroyée dans les cas suivants :  
a. violation des autres conditions ou charges auxquelles l'aide est subordonnée; 
b. en présence de comptabilisation d'opérations insolites à l'activité régulière de la société non justifiées, notamment la création de réserves latentes, d'amortissements directs ou immédiats ou une rémunération excessive. 
 
B.c. Le 3 novembre 2022, l'association A.________, B.________ Sàrl, C.________ SA, D.________ Sàrl, E.________, I.________ SA, F.________ Sàrl, G.________ et H.________ SA ont saisi conjointement la Cour constitutionnelle d'une requête contre le règlement du Conseil d'État précité du 5 octobre 2022, en concluant à son annulation (cause CCST.2022.0008).  
 
B.d. Par arrêt du 26 mai 2023, la Cour constitutionnelle a joint les causes CCST.2022.0004, CCST.2022.0005 et CCST.2022.0008. Elle a rayé du rôle les deux premières causes, qui concernaient l'art. 17 al. 2 de l'arrêté du 6 juillet 2022, modifiant celui du 2 décembre 2020, et la directive du 30 juin 2022, après avoir constaté que, d'un point de vue matériel, la directive du Conseil d'État du 30 juin 2022 avait été remplacée par le règlement du Conseil d'État du 5 octobre 2022 et que la question de la conformité au droit supérieur de cette directive et de la base légale sur laquelle celle-ci reposait, à savoir sur l'art. 17 al. 2 de l'arrêté susmentionné du 6 juillet 2022, ne revêtait désormais plus aucune portée propre. La Cour constitutionnelle a rejeté la requête dirigée contre le règlement (cause CCST.2022.0008).  
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, l'association A.________, B.________ Sàrl, C.________ SA, D.________ Sàrl, E.________, F.________ Sàrl, G.________ et H.________ SA demandent au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt de la Cour constitutionnelle du 26 mai 2023, ainsi que le règlement du Conseil d'État du 5 octobre 2022 et le "règlement du Conseil d'État du 6 juillet 2022". Les recourants expliquent que la dénomination "règlement du Conseil d'État du 6 juillet 2022" correspond à la directive susmentionnée du 30 juin 2022, laquelle aurait, selon eux, été adoptée par le Conseil d'État le 6 juillet 2022. Ils précisent ne requérir l'annulation de ce règlement que dans l'hypothèse où leur conclusion tendant à l'annulation du règlement du 5 octobre 2022 serait admise. Les recourants requièrent également l'effet suspensif au recours. 
Par ordonnance du 29 juin 2023, le Tribunal fédéral a accordé, à titre de mesure superprovisionnelle, l'effet suspensif au recours. 
La Cour constitutionnelle renonce à se déterminer sur le recours, ainsi que sur la requête d'effet suspensif. La Cheffe du Département de l'économie, de l'innovation, de l'emploi et du patrimoine du canton de Vaud (DEIEP; ci-après: le Département) conclut au rejet de la requête d'effet suspensif et, dans un courrier séparé, au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité. Les recourants répliquent. 
Le 20 juillet 2023, le Tribunal fédéral a rejeté la requête d'effet suspensif. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (cf. parmi d'autres, ATF 148 V 265 consid. 1.1). 
 
1.1. Le recours en matière de droit public est ouvert contre les actes normatifs cantonaux (art. 82 let. b LTF). Le règlement litigieux du 5 octobre 2022, de même que celui du 6 juillet 2022 constituent de tels actes.  
 
1.2. D'après l'art. 87 LTF, le recours en matière de droit public est directement recevable devant le Tribunal fédéral contre les actes normatifs cantonaux ne pouvant pas faire l'objet d'un recours cantonal. En revanche, selon l'art. 87 al. 2 LTF, lorsque le droit cantonal instaure une voie de recours contre les actes normatifs, l'art. 86 al. 1 let. d LTF, qui prévoit que le recours est recevable contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance, pour autant que le recours devant le Tribunal administratif fédéral ne soit pas ouvert, est applicable.  
 
1.3. Lorsque le droit cantonal prévoit une voie de droit contre un tel acte normatif, comme c'est le cas en l'espèce (cf. art. 136 al. 2 let. a de la Constitution du canton de Vaud du 14 avril 2003 [Cst./VD; RS/VD 101.01] et art. 3 al. 2 let. b de la loi vaudoise du 5 octobre 2004 sur la juridiction constitutionnelle [LJC/VD; RS/VD 173.32]), c'est la décision de l'autorité cantonale validant la norme qui doit être attaquée, mais le recours au Tribunal fédéral n'en reste pas moins un recours contre un acte normatif. Partant, les exceptions à la recevabilité du recours en matière de droit public contre les décisions (art. 83 LTF) n'entrent pas en considération (ATF 149 I 81 consid. 3.3.4; 148 I 160 consid. 1.2). Il s'ensuit que le présent recours en matière de droit public, dirigé contre l'arrêt du Tribunal cantonal est recevable en vertu de l'art. 82 let. b LTF, sans qu'il y ait lieu de se demander si l'art. 83 let. k LTF s'applique.  
 
1.4. S'il existe, comme en l'espèce, une juridiction constitutionnelle cantonale, on peut, devant le Tribunal fédéral, conclure non seulement à l'annulation de la décision de dernière instance cantonale, mais également à celle de l'acte normatif cantonal soumis à examen (ATF 149 I 81 consid. 3.3.6; 148 I 160 consid. 1.3).  
 
1.5. Les recourants ont pris part à la procédure devant l'autorité précédente (art. 89 al. 1 let. a LTF). Selon l'arrêt attaqué, les recourants 2 à 8 ont tous une activité dans le domaine de la restauration au sens large et ont bénéficié à ce titre d'aides pour cas de rigueur au sens de l'arrêté cantonal du 2 décembre 2020. Ils sont donc directement concernés par les mesures de suivi, de contrôle et de révocation des aides mises en place dans le règlement du Conseil d'État du 5 octobre 2022. Ils ont ainsi un intérêt digne de protection à l'annulation ou à la modification de ce règlement (art. 89 al. 1 let. b LTF) et ont partant qualité pour recourir (concernant les conditions de celle-ci dans le cadre d'un recours abstrait, cf. ATF 149 I 81 consid. 4.2; 148 I 160 consid. 1.4).  
La qualité pour recourir peut également être reconnue à l'Association A.________. Celle-ci a en effet aussi pris part à la procédure devant la Cour constitutionnelle et poursuit, conformément à ses statuts, notamment le but de représenter et de défendre les intérêts de la branche de la restauration et des établissements nocturnes, ainsi que de défendre les intérêts de ses membres, lesquels sont, selon l'arrêt attaqué, susceptibles d'être touchés par le règlement attaqué (cf. ATF 142 II 80 consid. 1.4.2; 137 II 40 consid. 2.6.4; arrêt 1C_188/2018 du 13 février 2019 consid. 1.2 non publié aux ATF 145 I 73). 
 
1.6. Au surplus, le présent recours a été interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF, l'art. 101 LTF ne s'appliquant pas lorsqu'une Cour constitutionnelle cantonale a statué au préalable; cf. ATF 148 I 160 consid. 1.5 et la référence) à l'encontre d'une décision finale (art. 90 LTF). La voie du recours en matière de droit public est dès lors ouverte.  
 
2.  
 
2.1. Dans le cadre d'un contrôle abstrait des normes cantonales, le Tribunal fédéral examine librement la conformité de l'acte normatif litigieux aux droits fondamentaux, à condition que ceux-ci soient invoqués et motivés conformément aux exigences découlant de l'art. 106 al. 2 LTF). Lors de cet examen, le Tribunal fédéral s'impose toutefois une certaine retenue eu égard notamment aux principes découlant du fédéralisme et à la proportionnalité. Dans ce contexte, il est décisif que la norme mise en cause puisse, d'après les principes d'interprétation reconnus, se voir attribuer un sens compatible avec les dispositions du droit supérieur invoquées. Pour en juger, il faut notamment tenir compte de la portée de l'atteinte aux droits fondamentaux en cause, de la possibilité d'obtenir ultérieurement, par un contrôle concret de la norme, une protection juridique suffisante, ainsi que des circonstances dans lesquelles ladite norme sera appliquée (ATF 148 I 160 consid. 2 et les références).  
Le juge ne doit pas se borner à traiter le problème de manière purement abstraite, mais il lui incombe de prendre en compte dans son analyse la vraisemblance d'une application conforme au droit supérieur. Les explications de l'autorité cantonale sur la manière dont celle-ci applique ou envisage d'appliquer la disposition contestée doivent également être prises en considération. Si une réglementation de portée générale apparaît comme défendable au regard des droits fondamentaux en cause dans des situations normales, telles que le législateur pouvait les prévoir, l'éventualité que, dans certains cas, son application puisse se révéler contraire aux droits fondamentaux ne saurait en principe justifier une intervention du juge au stade du contrôle abstrait des normes (ATF 148 I 160 consid. 2 et les références). 
 
2.2. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits constatés par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 148 I 160 consid. 3 et les références). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, la partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte attaqué (ATF 148 I 160 consid. 3 et les références). Ces règles s'appliquent lorsque le droit cantonal instaure une voie de recours contre les actes normatifs cantonaux et qu'une juridiction constitutionnelle cantonale a, dans le cadre d'un contrôle abstrait, constaté des faits (ATF 148 I 160 consid. 3).  
En l'occurrence, les recourants présentent certains faits de façon partiellement appellatoire, sans invoquer ni l'arbitraire, ni une constatation manifestement inexacte des faits. Le Tribunal fédéral ne peut pas en tenir compte. Il statuera donc sur la base des faits tels qu'ils ressortent de l'arrêt attaqué. 
 
3.  
L'objet du litige porte sur l'obligation imposée aux entreprises bénéficiaires d'effectuer, à leur frais, un audit ou une auto-déclaration impliquant une obligation d'auto-dénonciation telle que prévue par les art. 6 ss du règlement du 5 octobre 2022. Les recourants ne contestent pas la radiation du rôle des requêtes dirigées contre l'art. 17 al. 2 de l'arrêt du Conseil d'État du 6 juillet 2022 et la directive du 30 juin 2022 prononcée par l'autorité précédente. 
 
4.  
Les recourants invoquent tout d'abord une violation des principes de la légalité et de la séparation des pouvoirs. 
 
4.1. Le principe de la séparation des pouvoirs, garanti par l'art. 89 Cst./VD, impose le respect des compétences établies par le droit constitutionnel en interdisant à un organe de l'Etat d'empiéter sur les compétences d'un autre organe. Il défend en particulier au pouvoir exécutif d'édicter des dispositions qui devraient figurer dans une loi, cette attribution revenant au pouvoir législatif. L'exécutif cantonal doit en principe se limiter à adopter des dispositions d'exécution, à moins qu'il ne puisse se fonder sur une délégation législative adoptée par le législateur cantonal ou découlant directement de la constitution cantonale (cf. art. 120 al. 2 Cst./VD; ATF 138 I 196 consid. 4.1; 134 I 269 consid. 4.2; arrêt 2C_414/2022 du 12 juillet 2023 consid. 5.2 destiné à la publication). Le Tribunal fédéral examine à cet égard librement l'interprétation des normes constitutionnelles cantonales pertinentes, mais vérifie uniquement sous l'angle restreint de l'arbitraire si les règles de répartition des compétences fixées par des normes cantonales de rang inférieur ont été respectées (cf. ATF 147 I 478 consid. 3.1.1; arrêt 2C_414/2022 du 12 juillet 2023 consid. 5.2 destiné à la publication).  
 
 
4.2. Le principe de la légalité, consacré à l'art. 5 al. 1 Cst., exige que les autorités n'agissent que dans le cadre fixé par la loi. Au contraire du principe de la suprématie du droit fédéral (art. 49 al. 1 Cst.), le principe de la légalité et de la hiérarchie des normes ne constitue pas (hormis en matière pénale et fiscale) un droit constitutionnel distinct. Il s'agit d'un principe constitutionnel qui, en relation avec une mesure de droit cantonal, ne peut pas être invoqué séparément, mais seulement en relation avec la violation, notamment, du principe de la séparation des pouvoirs, de l'égalité, de l'interdiction de l'arbitraire ou d'un droit fondamental spécial (ATF 149 I 329 consid. 6.2; 140 I 381 consid. 4.4; 136 I 241 consid. 2.5; 134 I 322 consid. 2.1), ce que font les recourants, de sorte que le grief est admissible.  
 
4.3. L'exigence de la base légale signifie que les actes étatiques doivent trouver leur fondement dans une loi au sens matériel, qui soit suffisamment précise et déterminée et qui émane de l'autorité constitutionnellement compétente (ATF 141 II 169 consid. 3.1; 131 II 13 consid. 6.5.1; 128 I 113 consid. 3c).  
L'exigence de précision de la norme (ou de densité normative) est relative et varie selon les domaines. Elle dépend notamment de la gravité des atteintes qu'elle comporte aux droits fondamentaux (ATF 141 V 688 consid. 4.2.2; 140 I 381 consid. 4.4; 131 II 13 consid. 6.5.1). Dans le domaine des contributions publiques ou des restrictions des libertés, les exigences d'une base légale sont en général très strictes (ATF 133 V 402 consid. 3.2; 132 I 117 consid. 4.2; 132 II 371 consid. 2.1; 130 I 65 consid. 3.1 et 3.3). En matière d'administration des prestations, les exigences requises sont moins sévères. Le rang de la norme et son degré de précision dépendent du genre de la décision Pour les prestations sociales régulières et renouvelables et pour certaines subventions, où le respect du principe de la légalité doit garantir l'égalité de traitement et l'objectivité des critères d'attribution, il est en tout cas nécessaire, au risque de violer le principe de la séparation des pouvoirs, de définir dans la loi les lignes fondamentales de l'intervention de l'État. Il en va ainsi du cercle des bénéficiaires, de la manière de fixer la prestation et des conditions de son octroi. En revanche, les modalités concrètes des prestations peuvent figurer dans une ordonnance (ATF 134 I 313 consid. 5.4; 118 Ia 46 consid. 5b; arrêt 9C_776/2020 du 7 juillet 2022 consid. 7.1). 
 
4.4. Aux termes de l'art. 17 du décret du Grand Conseil du 15 décembre 2020 :  
 
1 Le Département est chargé du suivi et du contrôle des aides.  
2 Les bénéficiaires d'aide sont tenus de lui présenter toutes informations et toutes pièces nécessaires au contrôle du respect des conditions d'octroi, notamment leurs pièces comptables et tout autre document jugé pertinent.  
3 Au surplus, les dispositions de la loi du 22 février 2005 sur les subventions relatives à leur suivi, leur contrôle et leur révocation, ainsi qu'à la prescription et aux dispositions pénales, sont applicables par analogie aux aides octroyées en application du présent décret.  
L'art. 27 de la loi cantonale du 22 février 2005 sur les subventions (LSubv; RS/VD 610.15) prévoit: 
 
1 L'autorité compétente s'assure que les subventions accordées sont utilisées de manière conforme à l'affectation prévue et que les conditions et les charges auxquelles elles sont soumises sont respectées par le bénéficiaire.  
2 L'autorité compétente met en place une procédure de suivi et de contrôle des subventions sous l'angle de leur adéquation aux principes définis par la loi.  
-..] 
Selon l'art. 8 al. 2 du règlement cantonal du 22 novembre 2006 d'application de la LSubv (RLSubv; RS/VD 610.15.1), l'autorité compétente en matière d'octroi de la subvention formalise les procédures de suivi et de contrôle des subventions, en fonction de la nature, du montant, du type et des caractéristiques de la subvention concernée, conformément aux lois spéciales et aux directives du Conseil d'État. 
 
4.5. Dans l'arrêt attaqué, la Cour constitutionnelle retient que les procédures de contrôle mises en place ne sont ni invasives, ni particulièrement contraignantes. Elle estime que l'art. 17 du décret constitue une base légale suffisante pour permettre au Conseil d'État d'édicter la réglementation litigieuse. En substance, elle considère que cette réglementation s'inscrit dans le cadre légal défini notamment par la LSubv, à laquelle renvoie l'art. 17 al. 3 dudit décret, ainsi que, par extension, au RLSubv. Il se fonde en particulier sur l'art. 27 al. 1 et 2 LSubv et sur l'art. 8 al. 2 RLSubv.  
 
4.6. Les recourants précisent qu'ils ne contestent aucunement les contrôles, dont le Département a la charge conformément à l'art. 17 al. 1 du décret, mais considèrent que la base légale permettant de leur imposer la réalisation de ces contrôles par un tiers à leur frais, avec une obligation d'auto-incrimination, fait défaut. Aucune disposition de la LSubv ne contraint le bénéficiaire de subventions à réaliser un audit ou une auto-déclaration du respect des obligations légales et à s'auto-incriminer le cas échéant. En outre, ils font valoir que l'art. 17 al. 3 du décret ne renvoie qu'à la loi et non à son règlement d'exécution. Les recourants estiment également que l'art. 17 al. 2 du décret porte sur la marge d'appréciation du Département dans les documents à remettre et non sur la marge d'appréciation du Conseil d'État dans la mise en oeuvre du décret. Enfin, en matière de prise en charge des coûts, ils considèrent que l'on ne peut pas faire un parallèle entre le système prévu par la législation sur les subventions, en particulier, par l'art. 9 al. 4 RLSubv qui prévoit que les frais liés à la tenue de la comptabilité et à l'organe de révision sont mis à la charge du bénéficiaire de la subvention, et celui portant sur les aides en cause. Dans le premier cas, il s'agit, selon eux, d'une garantie de bonne tenue des comptes et toute entité qui refuse une révision ordinaire ou restreinte peut opter pour un autre mode de financement que des subventions, alors que dans le second cas, il s'agit d'une exigence a posteriori qui vise à rechercher des motifs de révocation des aides octroyées.  
 
4.7. En l'espèce, il y a d'emblée lieu de constater que l'art. 17 al. 2 du décret permet au Conseil d'État de préciser par voie réglementaire les documents "jugé[s] pertinent[s]". Or, sur cette base, il n'est pas insoutenable de prétendre que le Conseil d'État pouvait exiger la remise d'une auto-déclaration et d'un rapport conforme à la norme d'audit suisse 950.  
 
4.8. En outre, il n'est pas arbitraire de fonder la compétence réglementaire litigieuse du Conseil d'État sur des dispositions de la LSubv, à laquelle renvoie l'art. 17 al. 3 du décret. La formulation de l'art. 17 al. 1 du décret, qui prévoit que le Département est chargé du suivi et du contrôle des aides, ne s'oppose pas à la mise en place d'une contribution accrue des bénéficiaires dans la procédure de contrôle fondée sur l'art. 17 al. 3 du décret.  
L'art. 27 al. 2 LSubv donne la compétence à l'autorité compétente de mettre en place une procédure de suivi et de contrôle et, n'en déplaise aux recourants, il n'apparaît pas que les exigences litigieuses iraient manifestement au-delà de la compétence précitée. A cet égard, le Département explique dans son mémoire de réponse du 29 septembre 2023, sans être remis en question par les recourants sur ce point, que les réviseurs agréés chargés des rapports NAS 950 en cause ne feront que contrôler le respect de la réglementation cantonale, selon les instructions que le Département aura lui-même établies et que les réviseurs n'interviendront pas en tant qu'organismes d'autorégulation habilités à fixer les règles applicables. On ne voit dès lors pas, dans les présentes circonstances, que la marge de manoeuvre laissée dans l'établissement de la procédure de contrôle interdirait au Conseil d'État de déléguer une part du contrôle à un tiers, dans la mesure où le Département reste seul compétent pour décider au final quelle opération comptable est admissible et quelles sont les conséquences des éventuelles irrégularités constatées. Le Département retient à juste titre dans son mémoire de réponse que l'auto-déclaration et le rapport d'audit relèvent des travaux nécessaires à la prise de décision et que de tels travaux peuvent en principe, sauf disposition légale contraire, être délégués (cf. ATF 114 Ib 244 consid. 3; MOOR/BELLANGER/TANQUEREL, Droit administratif, vol. III, 2ème éd. 2018, ch. 1.2.3.4. p. 48). Les réviseurs en cause doivent être considérés comme des auxiliaires externes, non investi de puissance publique. Le recours à ceux-ci peut donc être prévu au travers d'une ordonnance législative, voire le cas échéant, par le biais d'une ordonnance administrative (cf. ATF 138 I 196 consid. 4.4). 
 
4.9. Il n'est pas non plus insoutenable de considérer que le renvoi à la LSubv porte aussi sur le règlement d'exécution de cette loi, ce dernier ne faisant que préciser cette première. Or, l'art. 9 al. 3 RLSubv prévoit que l'autorité compétente peut imposer des conditions supplémentaires au bénéficiaire quant à la tenue de sa comptabilité ou la révision de ses comptes. En outre, l'art. 9 al. 4 RLSubv, en lien avec l'art. 17 al. 2 LSubv, qui concerne la mise à la charge du bénéficiaire de subventions des honoraires de l'organe de révision et des coûts de la tenue de la comptabilité, fonde également, de façon soutenable, une base légale suffisante pour mettre les coûts des mesures contestées à la charge des bénéficiaires de l'aide (cf. art. 17 al. 3 du décret).  
 
4.10. Enfin, on relèvera également que l'art. 19 al. 2 du décret prévoit que le Conseil d'État a la compétence d'adapter le dispositif des aides financières en question, à l'exception des art. 1, 2, 3 et 20 du décret. L'art. 17 du décret n'appartenant pas aux dispositions intangibles mentionnées par l'art. 19 al. 2 du décret, il ne serait pas insoutenable de se référer à cette disposition pour fonder les exigences réglementaires en cause, étant précisé que, dans l'arrêt attaqué, la Cour constitutionnelle laisse la question ouverte (consid. 6/c).  
 
4.11. Il découle de l'ensemble de ce qui précède que le législateur a laissé une importante marge de manoeuvre à l'exécutif pour réglementer les modalités du contrôle qui sera effectué par les autorités. La Cour constitutionnelle ne prête ainsi pas le flanc à la critique lorsqu'elle constate que le règlement litigieux repose sur une base légale suffisante, étant rappelé sur ce point que les exigences en matière de base légale sont moins strictes lorsque, comme en l'espèce, le cas porte sur une administration de prestations (cf. supra consid. 4.3) et que la matière en cause (nécessité de fournir une aide rapide aux entreprises dans le cadre d'une pandémie) justifie de laisser une marge de manoeuvre importante à l'exécutif dans la mise en place du contrôle devant intervenir a posteriori.  
Par ailleurs, il y a lieu de relever qu'en cas de demande de remboursement partiel ou total de l'aide reçue, l'entreprise bénéficiaire conservera la possibilité de faire valoir ses droits, y compris en s'en prenant à la façon dont la réglementation attaquée a été appliquée dans sa situation, en recourant contre la décision de révocation. 
Les griefs de violation du principe de la légalité et de celui de la séparation des pouvoirs doivent partant être rejetés. 
 
5.  
Les recourants se plaignent aussi d'une violation du principe de la liberté économique. 
 
5.1. Aux termes de l'art. 27 Cst., la liberté économique est garantie (al. 1). Elle comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique lucrative privée et son libre exercice (al. 2). La liberté économique protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu. Elle peut être invoquée tant par les personnes physiques que par les personnes morales. Des restrictions cantonales à la liberté économique sont admissibles, mais elles doivent reposer sur une base légale, être justifiées par un intérêt public prépondérant et respecter le principe de proportionnalité (cf. art. 36 al. 1 à 3 Cst.) (ATF 143 II 598 consid. 5.1 et les références).  
 
5.2. Le Tribunal cantonal a indiqué qu'il peinait à percevoir en quoi les modalités de contrôle des aides que les recourants avaient reçues, telles qu'elles ont été définies dans le règlement du Conseil d'État du 5 octobre 2022, les entraveraient - directement ou indirectement - dans l'exercice de leur activité économique et porteraient atteinte ainsi à leur liberté économique, telle qu'elle est définie à l'art. 27 Cst. Il a toutefois laissé cette question ouverte après avoir constaté que les conditions posées par l'art. 36 Cst. étaient remplies.  
 
5.3. Les recourants font valoir que les aides financières en question doivent être considérées comme des indemnités pour le dommage subi en raison des restrictions de leur activité économique imposées par décisions des autorités. Leur situation différerait donc de celle des entreprises qui choisissent volontairement d'assumer une activité d'intérêt public au moyen de subventions. Pour autant qu'on les comprenne, ils font essentiellement valoir que l'exigence de produire un rapport NAS 950 aurait pour effet de les obliger à revoir leur comptabilité ce qui pourrait avoir des conséquences notamment fiscales et porterait atteinte à leur liberté entrepreneuriale. La sévérité des sanctions, qui peut aller jusqu'au remboursement complet de l'aide reçue, porte selon eux gravement atteinte à leur liberté économique.  
 
5.4. En l'occurrence, il est indéniable que les activités lucratives dans la restauration sont protégées par l'art. 27 Cst. Cela étant, les recourants n'expliquent pas et on ne voit pas en quoi les mesures de contrôle litigieuses seraient propres à les limiter dans le libre exercice de leur activité économique. En particulier, la production du rapport d'audit en question - qui, selon l'arrêt attaqué, ne concerne que 363 entreprises sur un total de 3'576 - a uniquement pour objectif de vérifier si les entreprises bénéficiaires remplissent les conditions de l'octroi de l'aide en cause et ainsi d'examiner certaines rubriques spécifiques des comptes. A cet égard, il ressort de l'arrêt attaqué que "le mandataire doit planifier et réaliser ses procédures d'audit de façon à pouvoir constater avec une assurance limitée le respect des conditions pour l'octroi de l'aide pour cas de rigueur. [...], la norme d'audit NAS 950 n'est pas une norme comptable spécifique qui requerrait [de la part des recourants] l'établissement d'une nouvelle comptabilité, mais vise uniquement à déterminer la nature et l'étendue des contrôles à effectuer par le réviseur agréé" (consid. 7/b/bb/bbb; cf. également l'art. 4 du règlement qui précise la portée du contrôle). Comme le relève à juste titre le Département dans son mémoire de réponse, le rapport demandé n'entrave ainsi en rien les choix entrepreneuriaux des entreprises concernées. En outre, même la sanction la plus lourde, soit celle du remboursement de l'intégralité de l'aide reçue, ne conduit pas non plus à une limitation juridique de l'exercice de leur activité économique. La cessation de l'activité qui pourrait être entraînée par l'impossibilité de rembourser le prêt n'est pas pertinente, même si cette conséquence pratique ne doit pas être négligée de la part des autorités, qui se sont engagées à faire preuve de mesure (cf. infra consid. 5.5 in fine).  
Sur le vu de ce qui précède, le grief de violation de la liberté économique doit être écarté, faute d'atteinte. De plus, en lien avec une éventuelle atteinte à la liberté économique, les recourants ne se prononcent pas sur les entreprises bénéficiaires qui doivent procéder à une auto-déclaration (art. 6, 8 et 10 du règlement). Ils n'indiquent ainsi pas en quoi cette mesure les entraverait dans le libre exercice de leur activité lucrative. Le recours ne remplit pas sur ce point les exigences de motivation accrues de l'art. 106 al. 2 LTF
 
5.5. Par surabondance, on relèvera que la Cour constitutionnelle ne prête pas le flanc à la critique lorsqu'elle retient que les conditions de l'art. 36 Cst. étaient réunies. En effet, les mesures en cause reposent sur une base légale suffisante (cf. supra consid. 4). Il existe un intérêt public évident à garantir que les aides allouées ont été utilisées conformément à leur but et dans le respect des charges et des conditions imposées. Les mesures en cause permettent de plus de s'assurer que toutes les entreprises bénéficiaires feront l'objet d'un contrôle, ce qui est, du reste conforme à l'égalité de traitement. Enfin, ces mesures respectent le principe de la proportionnalité. En effet, il ressort des faits de l'arrêt attaqué, qui lient le Tribunal fédéral, que les mesures litigieuses sont supportables. Si le coût du rapport NAS 950 n'est pas négligeable (entre 5'000 et 20'000 fr.), il reste acceptable au regard du montant perçu (soit une participation de 2 et 8 % pour une aide de 250'000 fr.). Au demeurant, les recourants semblent perdre de vue que, selon l'art. 1 al. 3 du décret, ils ne disposent pas d'un droit à cet aide. Enfin, la Cour constitutionnelle constate également que le Conseil d'État s'est engagé à faire preuve de mesure dans le contrôle des aides octroyées: respect du droit d'être entendu, absence de révocation automatique des décisions d'octroi pour de simples erreurs ou imprécisions, seules des déclarations frauduleuses ou des violations des restrictions à l'utilisation de l'aide pourront donner lieu à une procédure de révocation, absence de révocation automatique en cas de retard dans la remise des documents requis, sauf en cas d'impossibilité d'obtenir les informations demandées, en dépit de multiples rappels (arrêt attaqué consid. 7/b/bb/eee).  
Enfin, l'entreprise bénéficiaire qui considérerait que dans son cas d'espèce les mesures de contrôle en cause conduisent à des efforts disproportionnés conservera une protection juridique suffisante par le biais d'un contrôle concret de la réglementation attaquée. 
 
6.  
Les recourants dénoncent une violation des règles de la bonne foi. Ils reprochent au Conseil d'État d'imposer rétroactivement de nouvelles conditions à l'octroi des aides, qui a défaut de réalisation entraînent la révocation de celles-ci. Ils font valoir que toutes les entreprises qui ont fait la demande d'aides se sont soumises aux dispositions du décret et de l'arrêté, sans avoir de raison de redouter qu'il leur soit par la suite demandé de réaliser, à leurs frais, une auto-déclaration complexe ou un audit par un réviseur agréé. 
En l'occurrence, les recourants perdent de vue que les dispositions litigieuses ne constituent pas de nouvelles conditions d'octroi. Elles portent sur le contrôle du respect desdites conditions et viennent réglementer un état de choses, qui bien qu'ayant pris naissance dans le passé, se prolonge au moment de l'entrée en vigueur du nouveau droit. Il s'agit ainsi d'une rétroactivité improprement dite, en principe admissible, sous réserve du respect des droits acquis (ATF 148 V 162 consid. 3.2.1; 146 V 364 consid. 7.1; 144 I 81 consid. 4.1; 140 V 154 consid. 6.3.2; arrêt 9C_648/2022 du 9 janvier 2024 consid. 6.1 destiné à la publication). Les recourants invoquent ainsi en vain le principe de non-rétroactivité. 
En outre, le Tribunal cantonal retient à raison que les recourants ne pouvaient pas ignorer que le respect des conditions d'octroi ferait l'objet d'un contrôle subséquent et que les cantons disposeraient, pour ce faire, de toute latitude pour demander tous les renseignements jugés utiles, ces principes ayant été fixés au moment de l'adoption des textes légaux pertinents (cf. art. 12a al. 2 de la loi fédérale du 25 septembre 2020 sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l'épidémie de COVID-19 [loi COVID-19; RS 818.102]; art. 6, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2021, et art. 11 al. 1 de l'ordonnance fédérale du 25 novembre 2020 concernant les mesures pour les cas de rigueur destinés aux entreprises en lien avec l'épidémie de COVID-19 [Ordonnance COVID-19 cas de rigueur; RS 951.262]; art. 17 de l'arrêté du Conseil d'État du 2 décembre 2020 et art. 17 du décret). Les recourants ne peuvent ainsi pas se prévaloir de la bonne foi en prétendant qu'ils ne pouvaient pas s'attendre à être soumis à de nouvelles règles en matière de contrôle. 
 
7.  
Au vu de ce qui précède, le recours, dans la mesure où il porte sur l'annulation du règlement attaqué, est infondé. Ce règlement restant en vigueur, la conclusion des recourants tendant à l'annulation du règlement du Conseil d'État du 6 juillet 2022 est sans objet. Le recours doit partant être rejeté, dans la mesure où il n'est pas sans objet. 
 
8.  
Succombant, les recourants supportent les frais judiciaires, solidairement entre eux (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Il ne sera pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté, dans la mesure où il n'est pas sans objet. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge des recourants solidairement entre eux. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourants, au Département de l'économie, de l'innovation, de l'emploi et du patrimoine du canton de Vaud (DEIEP), au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour constitutionnelle, et au Secrétariat d'État à l'économie SECO. 
 
 
Lausanne, le 5 avril 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : A. de Chambrier