Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
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{T 0/2}
2C_204/2014
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Arrêt du 5 mai 2014
IIe Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Seiler, Juge présidant,
Aubry Girardin et Donzallaz.
Greffier: M. Dubey.
Participants à la procédure
A.________, représenté par Me Claude Brügger, avocat,
recourant,
contre
1.
Service des Migrations, Office de la population et des migrations du canton de Berne,
2.
Direction de la police et des affaires militaires du canton de Berne.
Objet
Non-prolongation d'autorisation de séjour - renvoi,
recours contre le jugement du Tribunal administratif du canton de Berne, Cour des affaires de langue française, du 27 janvier 2014.
Considérant en fait et en droit:
1.
A.________, ressortissant turc né le *** 1967, est entré en Suisse en 2007. Il a épousé une Suissesse le 11 juillet 2008 et obtenu une autorisation de séjour pour regroupement familial. Les époux ont cessé la vie commune en avril 2010 sans avoir d'enfant. Le divorce a été prononcé le 21 janvier 2014.
Par décision du 28 février 2012, le Service des migrations du canton de Berne a refusé de prolonger l'autorisation de séjour de l'intéressé et prononcé son renvoi de Suisse. Par décision du 4 septembre 2013, la Direction de la police et des affaires militaires du canton de Berne a rejeté le recours déposé contre la décision du 28 février 2012.
2.
Par jugement du 27 janvier 2014, le Tribunal administratif du canton de Berne a rejeté le recours que l'intéressé a interjeté contre la décision du 4 septembre 2013 de la Direction de la police et des affaires militaires du canton de Berne. Ni les conditions de l'art. 49 LEtr ni les conditions de l'art. 50 al. 1 let. a ni celles de l'art. 50 al. 1 let. b LEtr n'étaient réunies. En particulier, il n'existait pour justifier la prolongation de l'autorisation de séjour ni de violences conjugales d'une gravité suffisante ni de circonstances qui permettaient de considérer que la réintégration dans le pays d'origine était fortement compromise.
3.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler le jugement rendu le 27 janvier 2014 par le Tribunal administratif du canton de Berne. Après un exposé des faits en partie divergent de celui de l'arrêt attaqué, il se plaint de la violation des art. 49 et 50 LEtr.
La Direction de la police et des affaires militaires et le Service des migrations du canton de Berne ont produit leur dossier. Il n'a pas été ordonné d'échange des écritures.
Par ordonnance du 27 février 2014, le Juge présidant la IIe Cour de droit public a accordé l'effet suspensif au recours.
4.
D'après l'art. 83 let. c ch. 2 et ch. 5 LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ainsi que contre celles qui concernent les dérogations aux conditions d'admission. Selon la jurisprudence, il suffit, sous l'angle de la recevabilité, qu'il existe un droit potentiel à l'autorisation, étayé par une motivation soutenable, pour que cette clause d'exclusion ne s'applique pas et que, partant, la voie du recours en matière de droit public soit ouverte. La question de savoir si les conditions d'un tel droit sont effectivement réunies relève du fond (ATF 136 II 177 consid. 1.1 p. 179).
En l'occurrence, le recourant se prévaut de manière soutenable notamment de l'art. 50 al. 1 let. b LEtr. Son recours échappe au motif d'irrecevabilité de l'art. 83 let. c ch. 2 LTF. La voie du recours en matière de droit public est donc ouverte. Son recours est en revanche irrecevable en tant qu'il s'appuie sur l'art. 30 LEtr (cf. art. 83 let. c ch. 5 LTF).
5.
Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (cf. art. 105 al. 1 LTF). Le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF), ce que la partie recourante doit démontrer d'une manière circonstanciée, conformément aux exigences de motivation des art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF (cf. ATF 133 II 249 consid. 1.4.3 p. 254 s.). La notion de " manifestement inexacte" correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 136 II 447 consid. 2.1 p. 450).
Lorsque, comme en l'espèce, la partie recourante n'a pas expliqué de manière circonstanciée en quoi les deux conditions de l'art. 97 al. 1 LTF seraient réalisées, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte attaqué.
6.
Le recourant se plaint de la violation de l'art. 49 LEtr. Selon lui, il aurait fait vie commune avec son épouse durant plus de trois ans.
6.1. Selon l'art. 42 LEtr, l'existence de ménage commun est une condition du droit à une autorisation de séjour et à sa prolongation (al. 1). L'exigence du ménage commun est abandonnée lorsque la communauté familiale est maintenue et que des raisons majeures justifiant l'existence de domiciles séparés peuvent être invoquées (art. 49 LEtr), ces conditions étant cumulatives (arrêts 2C_759/2010 du 28 janvier 2011 consid. 4.2). Les motifs susceptibles de constituer une raison majeure visent des situations exceptionnelles, fondées avant tout sur des raisons d'ordre professionnel ou familiales (cf. arrêt 2C_593/2011 du 19 mars 2012 consid. 3.1.1). La décision librement consentie des époux de " vivre ensemble séparément " ( "living apart together ") en tant que telle et sans résulter d'autres motifs ne constitue pas une raison majeure au sens de l'art. 49 LEtr (cf. arrêts 2C_207/2011 du 5 septembre 2011 consid. 4.2; 2C_792/2010 du 25 mai 2011 consid. 3.1; 2C_388/2009 du 9 décembre 2009 consid. 4). De manière générale, il appartient à l'étranger d'établir l'existence de raisons majeures au sens de l'art. 49 LEtr, ainsi que le maintien de la communauté familiale en dépit des domiciles séparés. Cela vaut d'autant plus que cette situation a duré longtemps, car une séparation d'une certaine durée fait présumer que la communauté familiale a cessé d'exister (arrêt 2C_575/2009 du 1er juin 2010 consid. 3.5, où la séparation avait duré plus d'une année).
6.2. En l'espèce, l'instance précédente a dûment exposé, de manière détaillée, les motifs pour lesquels elle a jugé que la communauté conjugale a été rompue dès avril 2010 (arrêt attaqué consid. 2.1.2). Ces motifs sont convaincants. Il peut être renvoyé aux considérants de l'arrêt attaqué sur ce point (art. 109 al. 3 LTF). Les arguments que le recourant expose à l'appui de son grief reposent sur des faits qui ne ressortent pas de l'arrêt attaqué. Ils ne lui sont d'aucun secours. Le grief de violation de l'art. 49 LEtr est rejeté. La vie commune des époux n'ayant pas duré plus de trois ans, il n'est pas nécessaire d'examiner les conditions de maintien du permis de séjour posées par l'art. 50 al. 1 let. a LEtr ni les griefs que le recourant a formulé à cet égard.
7.
Le recourant se plaint de l'application de l'art. 50 al. 1 let. b LEtr.
7.1. L'art. 50 al. 1 let. b LEtr permet au conjoint étranger de demeurer en Suisse après la dissolution de l'union conjugale, lorsque la poursuite de son séjour s'impose pour des raisons personnelles majeures. L'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEtr vise à régler les situations qui échappent aux dispositions de l'art. 50 al. 1 let. a LEtr, soit parce que le séjour en Suisse durant le mariage n'a pas duré trois ans, soit parce que l'intégration n'est pas suffisamment accomplie, ou encore parce que ces deux aspects font défaut mais que - eu égard à l'ensemble des circonstances - l'étranger se trouve dans un cas de rigueur après la dissolution de la famille (cf. ATF 137 II 345 consid. 3.2.1 p. 348 s.). A cet égard, c'est la situation personnelle de l'intéressé qui est décisive et non l'intérêt public que revêt une politique migratoire restrictive. Il s'agit par conséquent uniquement de décider du contenu de la notion juridique indéterminée " raisons personnelles majeures " et de l'appliquer au cas d'espèce, en gardant à l'esprit que l'art. 50 al. 1 let. b LEtr confère un droit à la poursuite du séjour en Suisse. Comme il s'agit de cas de rigueur survenant à la suite de la dissolution de la famille, en relation avec l'autorisation de séjour découlant du mariage, les raisons qui ont conduit à sa dissolution revêtent de l'importance. L'admission d'un cas de rigueur personnel survenant après la dissolution de la communauté conjugale suppose que, sur la base des circonstances d'espèce, les conséquences de la perte de séjour pour la vie privée et familiale de la personne étrangère soient d'une intensité considérable (cf. ATF 138 II 393 consid. 3.1 p. 394 s.). Le Tribunal fédéral a mis en lumière un certain nombre de situations dans lesquelles la poursuite du séjour en Suisse peut s'imposer, qui ne sont toutefois pas exhaustives. Parmi celles-ci figurent notamment les violences conjugales et/ou la réintégration fortement compromise dans le pays d'origine (art. 50 al. 2 LEtr; cf. ATF 138 II 393 consid. 3 p. 394 ss et les références citées). Les critères énumérés par l'art. 31 al. 1 OASA peuvent également entrer en ligne de compte, même si, considérés individuellement, ils ne suffisent pas à fonder un cas de rigueur (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 p. 349; 137 II 1 consid. 4.1 p. 7 s.; THOMAS HUGI YAR, Von Trennungen, Härtefällen und Delikten, Annuaire du droit de la migration 2012/2013, p. 78 s.).
S'agissant de la violence conjugale, la personne admise dans le cadre du regroupement familial doit établir qu'on ne peut plus exiger d'elle qu'elle poursuive l'union conjugale, parce que cette situation risque de la perturber gravement. La violence conjugale doit par conséquent revêtir une certaine intensité (ATF 138 II 393 consid. 3.1 p. 395). La notion de violence conjugale inclut également la violence psychologique. A l'instar de violences physiques, seuls des actes de violence psychique d'une intensité particulière peuvent justifier l'application de l'art. 50 al. 1 let. b LEtr (ATF 138 II 229 consid. 3 p. 232 ss).
Quant à la réintégration sociale dans le pays de provenance, l'art. 50 al. 2 LEtr exige qu'elle semble fortement compromise. La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (ATF 137 II 345 consid. 3.2.2 p. 349). Le simple fait que l'étranger doive retrouver des conditions de vie qui sont usuelles dans son pays de provenance ne constitue pas une raison personnelle majeure au sens de l'art. 50 LEtr, même si ces conditions de vie sont moins avantageuses que celles dont cette personne bénéficie en Suisse (cf. arrêt 2C_1188/2012 du 17 avril 2013 consid. 4.1).
7.2. L'instance précédente a jugé à bon droit que les problèmes d'alcoolisme de l'épouse ne constituaient pas de la violence conjugale à l'encontre du recourant, parce qu'il n'était pas établi que ces problèmes aient eu des conséquences psychiques ou physiques propres à le perturber gravement. Le recourant se borne sur ce point à affirmer l'inverse, c'est-à-dire qu'il a été démontré qu'il avait été victime de violences conjugales en raison de l'alcoolisme de son épouse, sans exposer en quoi l'instance précédente aurait établi les faits de manière manifestement inexacte ou apprécié les preuves de manière arbitraire. Le grief est par conséquent rejeté.
7.3. L'instance précédente a ensuite nié, à bon droit également, que la réintégration du recourant dans son pays d'origine était fortement compromise. Elle a rappelé à cet effet que le recourant avait passé les quarante premières années de sa vie dans son pays d'origine et qu'il y était retourné pour s'occuper de sa mère gravement malade. Il peut être renvoyé au considérant de l'arrêt attaqué (consid. 2.4.3) sur ce point également (art. 109 al. 3 LTF).
Le recourant objecte en vain qu'il est bien, voire très bien, intégré en Suisse, qu'il y a fondé une entreprise qui donne du travail à plusieurs employés et qu'il n'a jamais été aidé par l'assistance publique et s'emploie aussi en vain à minimiser les atteintes à l'ordre public qu'il a commises par excès de vitesse et pour séjour illégal. En effet, la question de l'intégration du recourant en Suisse, sur laquelle l'instance précédente s'est penchée inutilement en l'espèce, n'est pas déterminante au regard des conditions de l'art. 50 al. 1 let. b LEtr, qui ne prend en considération de telles circonstances au sens de la jurisprudence qu'en tant qu'elles permettent au recourant d'invoquer des raisons personnelles majeures, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. L'art. 50 al. 1 let. b LEtr ne s'attache qu'à l'intégration - qui doit être fortement compromise - qui aura lieu dans le pays d'origine. Le grief est rejeté.
8.
Le recourant se prévaut enfin du droit au respect de sa vie privée tel qu'il est garanti par l'art. 8 CEDH (mémoire, p. 13 s.). Il est douteux que la motivation du grief réponde aux exigences accrues de l'art. 106 al. 2 LTF. Cette question peut demeurer ouverte le grief devant être rejeté.
8.1. Sous l'angle étroit de la protection de la vie privée, l'art. 8 CEDH n'ouvre le droit à une autorisation de séjour qu'à des conditions très restrictives. L'étranger doit en effet établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire. Le Tribunal fédéral n'adopte pas une approche schématique qui consisterait à présumer, à partir d'une certaine durée de séjour en Suisse, que l'étranger y est enraciné et dispose de ce fait d'un droit de présence dans notre pays. Il procède bien plutôt à une pesée des intérêts en présence, en considérant la durée du séjour en Suisse comme un élément parmi d'autres (cf. ATF 130 II 281 consid. 3.2.1 p. 286 et les arrêts cités). Les années passées dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance - par exemple en raison de l'effet suspensif attaché à des procédures de recours - ne doivent normalement pas être prises en considération dans l'appréciation ou alors seulement dans une mesure très restreinte (cf. ATF 134 II 10 consid. 4.3 p. 23 s.; 130 II 281 consid. 3.3 p. 289). Le Tribunal fédéral a notamment retenu en faveur d'un étranger installé depuis plus de onze ans en Suisse qu'il avait développé dans notre pays des liens particulièrement intenses dans les domaines professionnel (création d'une société à responsabilité limitée; emploi à la Délégation permanente de l'Union africaine auprès de l'ONU) et social (cumul de diverses charges auprès de l'Eglise catholique) et que, sans le décès de son épouse suisse, avec laquelle il partageait sa vie, l'intéressé pouvait légitimement espérer la prolongation de son autorisation de séjour (cf. arrêt 2C_266/2009 du 2 février 2010).
8.2. En l'espèce, comme l'a constaté dans le détail et de manière convaincante l'instance précédente, le recourant n'a résidé en Suisse légalement que 4 ans. Depuis 2011, il est au bénéfice d'une simple tolérance cantonale. Les relations professionnelles, dans le domaine de la restauration, dont il fait état, ne sauraient être qualifiées de liens particulièrement intenses qui vont largement au-delà de l'intégration ordinaire au sens de la jurisprudence. Dans ces conditions, le recourant ne peut se prévaloir du respect de la vie privée garanti par l'art. 8 CEDH. Le grief est rejeté dans la mesure où il est recevable.
9.
9.1. En jugeant que le recourant n'a pas droit à la prolongation de son permis de séjour, l'instance précédente n'a violé ni les art. 49 et 50 LEtr ni l'art. 8 CEDH.
9.2. Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours en matière de droit public dans la mesure où il est recevable. Succombant, le recourant doit supporter les frais de la procédure fédérale (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens ( art. 68 al. 1 et 3 LTF ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, à la Direction de la police et des affaires militaires, au Service des migrations et au Tribunal administratif du canton de Berne, Cour des affaires de langue française, ainsi qu'à l'Office fédéral des migrations.
Lausanne, le 5 mai 2014
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Juge présidant: Seiler
Le Greffier: Dubey