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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_333/2019  
 
 
Arrêt du 5 novembre 2021  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Merz. 
Greffière : Mme Sidi-Ali. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par la Société rurale d'assurance 
de protection juridique FRV SA, 
par M. B.________, 
recourant, 
 
contre  
 
1. C.A.________, 
2. C.B.________, 
3. D.A.________, 
4. E.A.________, 
5. F.A.________, 
6. G.A.________, 
7. G.B.________, 
8. G.C.________, 
9. H.A.________, 
10. H.B.________. 
11. I.A.________, 
12. I.B.________, 
13. J.A.________, 
14. K.A.________, 
15. L.A.________, 
16. L.B.________, 
17. L.C.________, 
18. L.D.________, 
19. M.A.________, 
20. N.A.________, 
21. N.B.________, 
22. O.A.________, 
23. P.A.________, 
24. Q.A.________, 
25. Q.B.________, 
26. R.A.________, 
27. R.B.________, 
28. S.A.________, 
29. S.B.________, 
tous représentés par Me Pierre Chiffelle, avocat, 
intimés, 
 
Municipalité de Chessel, 
représentée par Me Jacques Haldy, avocat, 
Direction générale du territoire et du logement du canton de Vaud, 
avenue de l'Université 5, 1014 Lausanne Adm cant VD, 
Direction générale de l'environnement 
du canton de Vaud, Unité du Service juridique, rue Caroline 11, 1014 Lausanne, 
Direction générale de l'agriculture, de la viticulture et des affaires vétérinaires (DGAV), av. de Marcelin 29, 1110 Morges. 
 
Objet 
Permis de construire une installation de biogaz, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton 
de Vaud, Cour de droit administratif et public, 
du 16 mai 2019 (AC.2018.0132). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, exploitant agricole pratiquant essentiellement l'engraissement de bovins, est propriétaire de la parcelle n° 1 du cadastre de la commune de Chessel, d'une surface de 47'144 m2, colloquée en zone agricole selon le plan des zones approuvé par le Conseil d'État le 10 décembre 1974 et régie par le règlement communal du plan des zones (RC) approuvé à la même date. Il a déposé une demande d'autorisation de construire sur cette parcelle une installation de biogaz composée des éléments suivants: deux cuves en béton de 780 m3 (le digesteur) et 1880 m3 (le stockage du digestat), un local intermédiaire (entre les deux cuves) abritant des éléments électromécaniques (pompes, vannes, etc.), des locaux techniques nécessaires à la production d'énergie (comprenant une salle abritant le couplage chaleur-force, une salle avec chaufferie bois, un silo à bois déchiqueté, un bureau et une salle de commande) et un hangar (comprenant, d'une part, une fumière d'environ 230 m2 séparée en plusieurs casiers pour la réception des substrats solides à traiter [fumiers, déchets de céréales] et pour le stockage de la matière solide après digestion [fumier méthanisé] et, d'autre part, une zone pour le stockage de bois déchiqueté d'environ 55 m2). 
Les habitations les plus proches de l'installation projetée sont celles d'un quartier de villas situé à une centaine de mètres (103 m à la façade depuis la fumière et 100 m depuis la fosse à lisier couverte). 
Le projet, mis à l'enquête publique début 2017, a suscité plusieurs oppositions, notamment d'habitants de ce quartier de villas. 
 
B.  
Le 7 juin 2017, la Centrale des autorisations CAMAC du Département vaudois des infrastructures et des ressources humaines a établi une synthèse des autorisations et préavis des services cantonaux concernés. Celle-ci comprend différentes autorisations spéciales dont celle de la Direction générale de l'environnement (DGE) (notamment en matière d'énergie, de protection des eaux souterraines et de gestion des déchets) et l'autorisation spéciale délivrée par le Service cantonal du développement territorial (SDT) requise pour les constructions hors de la zone à bâtir. Elle comprend également un préavis positif de la DGE en ce qui concerne la protection de l'air (moyennant le respect de certaines conditions) et la lutte contre le bruit, ainsi qu'un préavis positif du Service de l'agriculture et de la viticulture moyennant le respect de certaines conditions. 
Le 7 mars 2018, la municipalité a informé les opposants de sa décision de lever les oppositions et de délivrer le permis de construire. 
Statuant sur recours des opposants au projet par arrêt du 16 mai 2019 après avoir notamment procédé à une inspection locale, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal (CDAP) a annulé les décisions contestées. Reconnaissant la conformité au droit du projet sous la plupart des aspects, les juges cantonaux ont considéré que la distance entre l'installation litigieuse et les habitations ne permettait pas de respecter la législation en matière de protection de l'air. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt cantonal en ce sens que le permis de construire une installation de biogaz sur sa parcelle est confirmé. Il conclut subsidiairement au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
La cour cantonale renonce à se déterminer et se réfère aux considérants de son arrêt. La DGE transmet les observations de sa "Direction de l'environnement industriel, urbain et rural, Air, climat et risques technologiques, Protection de l'air", ainsi que de sa Direction de l'énergie. Le SDT se détermine et conclut à l'admission du recours. La Direction générale de l'agriculture, de la viticulture et des affaires vétérinaires DGAV du canton de Vaud dépose des observations et indique maintenir le préavis positif qu'elle a formé. 
La commune se détermine et conclut au rejet du recours, précisant que lorsqu'elle avait délivré l'autorisation, les directives sur lesquelles s'est fondée la CDAP pour évaluer la distance minimale entre l'installation et les habitations n'avaient pas encore été publiées, qu'il n'y a plus de nécessité au sens de l'art. 34 al. 4 de l'ordonnance du 28 juin 2000 sur l'aménagement du territoire (OAT; RS 700.1) dès lors que les immeubles que le projet devait alimenter en chauffage ont été réalisés avec un autre système de chauffage, que la viabilité de l'installation à terme n'est pas démontrée et que des intérêts désormais prépondérants s'opposent au projet au vu notamment de la solution d'emplacement alternatif proposée par la commune. 
Les opposants se déterminent et concluent au rejet du recours. 
Consulté, l'Office fédéral de l'environnement (OFEV) indique qu'il tient l'arrêt cantonal pour conforme au droit fédéral. L'Office fédéral du développement territorial (ARE), qui a spontanément demandé à se déterminer dans la présente cause, conclut au renvoi de la cause au Tribunal cantonal pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Invité à le faire, l'institut fédéral Agroscope commente les nouvelles recommandations qu'il a édictées et leur application au cas d'espèce. 
Les parties et autorités concernées se déterminent dans de nouveaux échanges d'écritures à teneur desquelles elles maintiennent leurs positions respectives. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans une cause relevant du droit de la police des constructions et de l'aménagement du territoire (art. 82 let. a LTF), le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Le recourant a pris part à la procédure devant l'instance cantonale; il est particulièrement atteint par l'arrêt attaqué et a un intérêt digne de protection à sa modification, celui-ci annulant l'autorisation de construire une installation de biogaz qui lui a été délivrée. Il a ainsi qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF
Les autres conditions de recevabilité sont réunies si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière sur le recours. 
 
2.  
A titre de mesure d'instruction, le recourant requiert que l'OFEN soit interpellé, notamment "dans l'optique d'une pesée d'intérêts" pour que l'office puisse se déterminer sous l'angle de l'intérêt au "développement des ressources énergétiques vertes". Vu les considérants qui suivent, cet aspect du projet n'est pas de nature à modifier l'issue de la cause, les intérêts en présence n'ayant pas à être réévalués. 
Le recourant requiert par ailleurs que la DGE fasse savoir combien de plaintes elle a été amenée à enregistrer au sujet d'installations de biogaz agricoles dans le canton Vaud. La DGE a spontanément exposé ces éléments dans sa réponse, de sorte que cette requête est satisfaite. 
 
3.  
Le recourant se plaint d'une violation des art. 12 LPE (RS 814.01) et 3 de l'ordonnance du 16 décembre 1985 sur la protection de l'air (OPair; 814.318.142.1) ainsi que de l'annexe 2 ch. 512 OPair. Il fait valoir en substance que la cour cantonale aurait dû user du large pouvoir d'appréciation dont elle dispose et s'écarter de la nouvelle étude de la Station fédérale de recherches d'économie d'entreprise et de génie rural de Tänikon (FAT). 
 
3.1. En vertu de l'art. 11 al. 2 LPE, les pollutions atmosphériques, par quoi l'on entend les modifications de l'état naturel de l'air provoquées notamment par les odeurs (art. 7 al. 3 LPE; cf. FF 1979 III 778), sont limitées par des mesures prises à la source. La loi fédérale prévoit à cet égard une action à deux niveaux: des limitations fixées à titre préventif indépendamment des nuisances existantes, puis une limitation plus sévère des émissions s'il y a lieu de présumer que les atteintes, eu égard à la charge actuelle de l'environnement, seront nuisibles ou incommodantes. Pour les premières, il importe tout d'abord, à titre préventif, de limiter les émissions dans la mesure que permettent l'état de la technique et les conditions d'exploitation et pour autant que cela soit économiquement supportable (art. 11 al. 2 LPE). Des limitations fondées sur ces principes figurent dans des ordonnances qui fixent en particulier des valeurs limites d'émissions (art. 12 al. 1 let. a LPE) ou des prescriptions en matière de construction (art. 12 al. 1 let. b LPE). L'OPair comporte ainsi dans ses annexes 1 à 4 des dispositions relatives à la limitation préventive des émissions (cf. art. 3 OPair). Ces prescriptions s'appliquent aux nouvelles installations stationnaires (art. 3 al. 1 OPair), soit en particulier aux bâtiments et autres ouvrages fixes (art. 2 al. 1 let. a OPair), y compris les installations transformées, agrandies ou remises en état lorsque le changement laisse présager des émissions plus fortes ou différentes et lorsque l'on consent des dépenses supérieures à la moitié de ce qu'aurait coûté une nouvelle installation (art. 2 al. 4 Opair).  
S'agissant toujours des limitations préventives de base, le chiffre 512 de l'annexe 2 OPair impose, pour la construction d'une installation d'élevage traditionnel ou d'élevage intensif, le respect des distances minimales jusqu'à la zone habitée, requises par les règles de l'élevage. Une installation de biogaz érigée sur le bien-fonds destiné à l'élevage constitue une composante de l'installation d'élevage au sens de cette disposition (arrêt 1C_437/2009 du 16 juin 2010 consid. 6.3, in ZBl 2011 p. 209). Le chiffre 512, 2e phrase, annexe 2 OPair précise que "sont notamment considérées comme [règles de l'élevage] les recommandations de la Station fédérale de recherche d'économie d'entreprise et de génie rural". Il s'agit de la Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon, autrefois abrégée FAT, qui fait partie intégrante de l'Office fédéral de l'agriculture (OFAG) et qui a notamment pour tâches l'établissement de bases de décision pour la législation fédérale (art. 5 al. 1 let. b de l'ordonnance du 23 mai 2012 sur la recherche agronomique [ORAgr; RS 915.7]). 
Les règles édictant des distances minimales servent à maintenir la qualité de l'habitat des zones à bâtir voisines des zones agricoles (cf. art. 3 al. 3 let. b LAT [RS 700]). En même temps, la construction d'installations à des fins agricoles ne doit pas être rendue excessivement difficile dans la zone agricole (ATF 126 II 43 consid. 4a; arrêts 1C_534/2012 du 16 juillet 2013 consid. 3.1; 1C_306/2010 du 2 décembre 2010 consid. 3.2 et 3.3, in DEP 2011 p. 38). Pour les bâtiments situés en zone agricole, il appartient au maître d'ouvrage de démontrer qu'en vertu d'une pesée des intérêts dictée par l'art. 34 al. 4 let. b de l'ordonnance du 28 juin 2000 sur l'aménagement du territoire (OAT; RS 700.1), d'éventuels sites alternatifs ne seraient pas plus appropriés que le site choisi (arrêt 1C_437/2009 du 16 juin 2010 consid. 6.5). 
Le Rapport FAT n° 476 de 1996 "Distances minimales à observer pour les installations d'élevage d'animaux" est considéré depuis plus de vingt ans comme étant le document à valeur de recommandations au sens de l'OPair. En mars 2005, la FAT a mis en consultation en collaboration avec l'Office fédéral de l'environnement un projet de révision du rapport FAT n° 476. Vu les critiques auxquelles s'est heurté ce projet, celui ci a été retiré. Compte tenu du caractère déjà ancien du rapport FAT n° 476 (cf. ATF 133 II 370 consid. 6.2), les autorités se réfèrent toutefois régulièrement au projet de 2005. Si celui-ci, retiré, ne saurait avoir valeur de recommandation en lieu et place du rapport de 1996, la jurisprudence considère qu'il convient toutefois de s'en inspirer dans la mesure utile (arrêts 1C_260/2016 du 6 juin 2017 consid. 3.6, in DEP 2018 p. 22; 1C_318/2017 du 11 juillet 2018 consid. 5.1). En mars 2018, Agroscope a édité, sur mandat de l'OFEV et de l'OFAG, un nouveau document (Environnement Agroscope Science n° 59) intitulé "Bases relatives aux odeurs et à leur propagation, nécessaires pour déterminer les distances à observer par les installations d'élevage". Agroscope indique que ce document a été élaboré selon une procédure analogue à celle d'une aide à l'exécution. L'OFEV confirme que ce document fait office de "recommandation - parmi d'autres - au sens du chiffre 512 annexe 2 OPair destinée aux autorités d'exécution, à l'instar du projet de révision 2005". 
Selon la jurisprudence, les mesures de limitation préventive des émissions fondées sur l'art. 11 al. 2 LPE ne doivent pas être appliquées de manière rigide et absolue, mais dans le respect du principe de la proportionnalité garanti notamment par cette disposition, en particulier lorsqu'elles empêcheraient une exploitation normale de l'installation polluante. Dans cette perspective, l'autorité chargée d'appliquer les prescriptions du chiffre 512 de l'annexe 2 OPair ne saurait faire abstraction des circonstances concrètes en exigeant impérativement que la distance minimale soit respectée par rapport à la limite de la zone habitée voisine (arrêts 1P.336/1996 du 25 novembre 1996 consid. 3d, in DEP 1997 p. 205; 1C_289/2018 du 8 juillet 2019 consid. 2 et 3.3; 1C_318/2017 du 11 juillet 2018 consid. 6.1). En tout état, le Tribunal fédéral procède, lorsque les griefs en ce sens présentent une certaine pertinence, au contrôle du bien-fondé de l'application de telles règles (cf. arrêt 1A.275/2006 du 23 juillet 2007). 
 
3.2.  
 
3.2.1. Le renvoi qu'opère le chiffre 512 annexe 2 OPair est un renvoi dynamique, de sorte qu'il convient de privilégier les bases techniques les plus récentes édictées par Agroscope, soit celles de 2018, qui constituent assurément une "recommandation" au sens de l'OPair, donc, en d'autres termes, qui constituent les règles de l'élevage requérant les distances minimales qu'il y lieu de respecter. Conformément à la jurisprudence citée ci-dessus et à l'appréciation d'Agroscope, les études d'Agroscope n'ont pas valeur strictement impérative, mais, édictées par des spécialistes, elles sont des directives qui guident l'administration dans l'application du droit fédéral. L'application des recommandations d'Agroscope doit laisser place à une certaine marge de manoeuvre dans la mesure que le nécessite le cas particulier. Cela ne signifie pas que l'autorité ne doive jamais appliquer strictement les distances calculées sur la base des recommandations les plus récentes. Mais, conformément à la pratique du Tribunal fédéral, il y a lieu de prendre en considération, d'une part, d'éventuelles critiques qui seraient généralisées et pertinentes, ainsi que, d'autre part, les circonstances particulières dont les bases de calcul des recommandations ne tiendraient pas compte.  
Quoi qu'en disent les parties, vu ce qui précède, la dénomination ou le contexte dans lequel ces règles sont édictées ne sont au demeurant pas décisifs pour déterminer si le rapport de 2018 peut être qualifié de recommandations au sens du chiffre 512 annexe 2 OPair. En bref, il y a lieu d'en tenir compte prioritairement, en tant que document le plus récent et émanant de l'institut fédéral spécialisé expressément désigné par la loi. Mais tant l'autorité d'exécution que les instances judiciaire disposent - dans les limites de leur pouvoir d'examen pour les secondes - d'une latitude de jugement dans l'application de ce document lors de la mise en oeuvre de l'OPair. Elles doivent en outre s'assurer, conformément à la jurisprudence exposée ci-dessus (consid. 3.1) que les recommandations s'inscrivent adéquatement dans le cadre légal dont elles assurent l'exécution, ce qui implique notamment un contrôle sommaire de leur pertinence. 
 
3.2.2. En l'occurrence, la distance prévue pour le projet entre l'installation et la première maison d'habitation est d'environ 100 m (103 m à la façade depuis la fumière et 100 m depuis la fosse à lisier couverte).  
La cour cantonale a appliqué strictement la distance minimale calculée selon la dernière étude de l'Agroscope (étude 2018), sans procéder à son propre contrôle matériel des critères utilisés par cette recommandation. Les calculs préconisés par l'étude Agroscope 2018 portent, selon les constatations de la cour cantonale, la distance minimale à 220 m. Ceux du rapport FAT n° 476 permettaient de s'en tenir à une plus petite distance minimale, à laquelle le projet était conforme. 
En substance, dans l'étude Agroscope 2018, la distance minimale est déterminée selon une courbe logarithmique exprimant une intensité d'odeur décroissante en fonction de la distance, jusqu'à atteindre une valeur seuil considérée comme niveau raisonnable d'intensité de l'odeur. Cette courbe logarithmique dépend donc de la puissance olfactive. La puissance olfactive est elle-même exprimée selon des formules mathématiques précises en fonction de la surface des différentes composantes de l'installation agricole dégageant des odeurs ou, dans certaines circonstances plus exceptionnelles (ce n'est pas le cas ici), en fonction du nombre d'animaux et de leur poids vif. Ces surfaces sont combinés à des facteurs fixes. Lorsqu'il existe une installation de biogaz dans l'exploitation, s'y ajoute un facteur fixe unique, indépendamment d'une donnée de surface ou propre à d'autres caractéristiques de l'installation, le facteur dit f Biog. Ce facteur fixe spécifique aux installations de biogaz est donc cumulé aux combinaisons entre les autres surfaces liées à l'installation (aire des animaux S Anim, ration d'ensilage S Ens_R, autres surfaces dégageant des odeurs dans le stock d'ensilage, d'engrais de ferme, de substrats et de résidus de fermentation S Stock) et les facteurs fixes ( f Anim, f Ens_R et f Stock) propres à chacune de ces surfaces.  
 
3.2.3. Le recourant critique ces bases de calculs de l'étude 2018 qui ne tiendraient pas suffisamment compte de la réalité de son installation à plusieurs égards.  
 
3.2.3.1. Il relève tout d'abord que le facteur fixe f Biog attribué aux installations de biogaz induit à lui seul une distance minimale de 201 m, indépendamment de toute caractéristique de l'installation. Il déplore ensuite l'absence de prise en compte, dans le cadre de la composante S Stock combinée au facteur fixe f Stock, la nature des substrats destinés à être traités dans l'installation.  
On constate en effet qu'au contraire de toutes les autres composantes de l'installation agricole, l'estimation des nuisances olfactives d'une installation de biogaz est déterminée en fonction d'un facteur fixe unique, quelle qu'en soit la taille, la capacité de traitement et la technologie. 
La réponse d'Agroscope, qui expose quels composants de l'installation sont pris en considération, ne permet pas d'expliquer l'absence de prise en compte des caractéristiques de l'installation de biogaz. Or, sans se pencher sur des aspects techniques complexes qu'il appartiendrait aux seuls spécialistes d'évaluer, il semble pertinent de retenir que la capacité de traitement, de même que le volume de substances effectivement traitées, sont des facteurs qui influenceront les émissions olfactives. De même, dans la mesure où les nuisances consignées dans les observations et relevés effectués pour définir les bases de calcul reposaient en grande partie sur des problématiques de fuite (cf. les déterminations de l'ARE sur ce point), il apparaît important d'intégrer dans l'évaluation de la distance les caractéristiques qualitatives de l'installation prévue. 
S'agissant par ailleurs du type de substrats destinés à alimenter l'installation, la formule de l'étude Agroscope 2018 n'en tient effectivement pas compte, ni dans la composante "autres surfaces dégageant des odeurs dans le stock d'ensilage, d'engrais de ferme, de substrats et de résidus de fermentation" ni, ainsi qu'on l'a vu, dans le paramètre lié à l'installation de biogaz. Agroscope relève pourtant dans ses déterminations les intensités variables d'odeurs selon le type de substrat. L'ARE se réfère en outre à une aide à l'exécution publiée conjointement par l'OFEV et l'OFAG qui distingue quatre niveaux de risque olfactif selon le type d'intrants, le type de stockage et la durée de stockage (OFEV/OFAG, Installations de méthanisation dans l'agriculture, 2016/2021, Annexe 1, p. 38 ss). 
La formule générale de détermination de la distance minimale ne tient ainsi pas compte de paramètres qui apparaissent pourtant décisifs dans la perception des nuisances olfactives, en particulier le type d'intrants qui sera traité dans l'installation de biogaz. 
 
3.2.3.2. Le recourant critique encore l'absence de prise en considération d'une éventuelle couverture des surfaces de stockage comme mesure de réduction des odeurs. Il est difficile en l'état de déterminer si cela est dû au fait que la couverture des surfaces est considérée comme un standard minimum, ou si, comme l'expose Agroscope dans sa prise de position, ce type de mesure n'aurait en fait aucun effet significatif sur l'intensité des odeurs perçues. Sur ce point, comme le relève le recourant, la couverture des substrats stockés faisait partie des mesures de réduction préconisées en 2013 encore (OFEN, AGROSCOPE/ K ECK/SCHRADE/FREI/KELLER/WEBER/MAGER, Geruchsquellen bei Biogasanlagen Situationsanalyse - Geruchsstoffkonzentration von Einzelquellen - Fahnenbegehungen bei einem Betrieb, 2013).  
A titre plus général, les mêmes arguments sont avancés de part et d'autre s'agissant de l'absence de prise en considération, dans la formule mathématique, d'autres éventuelles mesures de réduction des odeurs pour les aires de stockage. A tout le moins doit-on constater qu'une approche bien établie jusqu'ici (tendant à considérer que certaines mesures de réduction des odeurs avaient une incidence sur les nuisances olfactives) a été abandonnée dans l'étude Agroscope 2018 sans que les raisons en soient clairement données. 
 
3.2.3.3. Enfin, au contraire de l'opinion du recourant, il n'apparaît pas critiquable que les études aient porté sur une période de 25 jours "seulement" et de mai à octobre uniquement. Il est en effet légitime d'examiner la situation dans un contexte météorologique défavorable pour appréhender les scénarios les plus nuisibles contre lesquels la législation environnementale doit protéger. Quant au fait que seules 8 installations sur les 80 en service aient été examinées, Agroscope explique que 38 exploitants ont été interrogés et que, pour les relevés, des contraintes permettant d'assurer l'absence d'influences extérieures particulières ainsi que des mesures d'assainissement prévues mais non encore réalisées ont limité le choix des installations à étudier. L'institut conclut qu'en tout état, vu la diversité des exploitations et des multiples combinaisons entre installations d'élevage et installations de biogaz, la base de données est de qualité. Il rappelle en outre que l'étude 2018 se réfère également à des relevés effectués dans d'autres travaux de recherche.  
S'il n'y a pas de raison de douter de la qualité de la base de données d'Agroscope, il convient de conserver à l'esprit qu'elle n'est effectivement fondée que sur huit installations alors qu'il en existe environ dix fois plus et que les centrales concernées bénéficiaient d'une technologie quelque peu - voire beaucoup pour certaines - plus ancienne. 
 
3.2.3.4. En définitive, ainsi qu'on l'a vu ci-dessus (consid. 3.1), si Agroscope, désigné comme tel par la législation topique, est l'organe fédéral spécialisé de référence en la matière, il n'en demeure pas moins que la problématique de l'implantation d'une installation de biogaz est pluridisciplinaire et se trouve ainsi au carrefour des domaines de compétences de plusieurs organes fédéraux. Aussi, outre Agroscope, l'OFAG (dont dépend Agroscope), l'OFEV, l'ARE ou encore l'OFEN ont édicté des directives ou aides à l'exécution pertinentes en la matière. Ces textes apparaissent parfois contradictoires (cf. consid. 3.2.2.3), ce qui est regrettable - ce d'autant que ce sont parfois les mêmes scientifiques qui sont mandatés par ces différents organes. On peut comprendre cela comme la résultante d'une science complexe dont les connaissances, tout comme les techniques que celle-ci doit appréhender, sont évolutives.  
En tout état, il ressort tant de la jurisprudence que de l'examen des critiques examinées ci-dessus, formulées sur les dernières recommandations d'Agroscope, que l'application des règles qui découlent de ce texte doit s'accompagner d'une évaluation des circonstances propres au cas d'espèce. Les autorités d'exécution et de contrôle judiciaire, sauf à restreindre excessivement leur pouvoir d'examen, ne peuvent s'en tenir au strict résultat de l'application des formules mathématiques sans évaluer leur pertinence dans le cas concret en cause. Au contraire de ce qu'observaient les premiers juges, s'agissant des installations de biogaz, la recommandation de 2018 n'appréhende pas la situation de chaque exploitation de manière différenciée. Il reste dès lors nécessaire de procéder à une évaluation plus fine de la distance minimale requise, qui tiendrait compte des circonstances du cas d'espèce que n'englobe pas la formule de calcul de l'étude Agroscope 2018. 
 
3.2.4. En l'occurrence, le recourant met en avant les mesures particulières de réduction des odeurs prévues pour son installation (limitation aux substrats les moins odorants, tels que déchets de céréales, à l'exclusion de substrats à plus forte teneur en odeurs tels que restes de légumes, coupes de gazon, fumier de volaille; stockage du substrat dans un hangar couvert afin de limiter son exposition aux éléments; inspections régulières et entretien soigné de l'installation, ainsi que coordination optimale du volume du fermenteur et de l'alimentation du substrat; couverture du dispositif de dosage des solides afin de réduire les odeurs au repos et lors l'introduction du substrat). Si, à la lumière de ce qui a été observé ci-dessus, en particulier s'agissant du type de substrats, de telles mesures apparaissent de nature à influer sur la distance minimale devant être imposée entre l'installation du recourant et les habitations voisines, on ne peut concevoir dans le cas d'espèce qu'elles permettent de réduire de plus de la moitié la distance jugée supportable par le calcul théorique de la recommandation en vigueur. En effet, comme le concède le recourant, l'installation de biogaz en elle-même induit selon ce calcul une distance de 201 m, sans même qu'il soit tenu compte des autres éléments de l'exploitation. Dans de telles circonstances, il est vain d'examiner de plus près les spécificités de l'installation prévue et de son fonctionnement, en particulier les intrants qu'il est prévu d'y traiter, et les éventuelles autres mesures susceptibles d'entraîner une réduction des odeurs (cf. consid. 3.1 in fine). Même s'ils devaient contribuer à réduire dans une certaine mesure la distance minimale imposable, de tels éléments ne suffiraient manifestement pas à rendre acceptable, du point de vue de la protection de l'air, la faible distance séparant l'installation des premières habitations.  
Il s'ensuit que la cour cantonale, quand bien même elle s'est abstenue de procéder à une évaluation plus fine des circonstances, n'a pas violé le droit fédéral en refusant d'autoriser le projet, situé à 100 m des habitations les plus proches. 
 
4.  
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté, aux frais de son auteur, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Celui-ci versera en outre des dépens aux intimés, qui ont agi par l'intermédiaire d'un avocat (art. 68 al. 1 LTF). La commune, qui a agi dans l'exercice de ses attributions officielles, n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 francs, sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Une indemnité de dépens de 4'000 francs est accordée aux intimés, à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et de la Municipalité de Chessel, à la Direction générale du territoire et du logement du canton de Vaud, à la Direction générale de l'environnement du canton de Vaud, à la Direction générale de l'agriculture, de la viticulture et des affaires vétérinaires (DGAV), au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, à l'Office fédéral de l'environnement, à l'Office fédéral du développement territorial et à Agroscope. 
 
 
Lausanne, le 5 novembre 2021 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
La Greffière : Sidi-Ali