Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
6B_103/2024
Arrêt du 5 novembre 2024
Ire Cour de droit pénal
Composition
Mme et MM. les Juges fédéraux
Jacquemoud-Rossari, Présidente,
Denys et Muschietti.
Greffière : Mme Kistler Vianin.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Yaël Hayat, avocate,
recourant,
contre
1. Ministère public de la République et canton de Genève,
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy,
2. B.B.________,
représentée par Me Maëlle Kolly, avocate,
3. C.B.________,
agissant par Margaux Broïdo, avocate,
4. D.C.________,
agissant par Margaux Broïdo, avocate,
intimés.
Objet
Viol, lésions corporelles simples aggravées, violation
du devoir d'assistance ou d'éducation; arbitraire,
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision, du 29 novembre 2023 (AARP/447/2023 P/13295/2017).
Faits :
A.
Par jugement du 24 mars 2023, le Tribunal correctionnel du canton de Genève, après avoir classé les faits qui se seraient déroulés en France concernant C.B.________, a acquitté A.________ de violation du devoir d'assistance et d'éducation au préjudice de D.C.________, de lésions corporelles simples, de menaces, de contrainte sexuelle et de viol concernant B.B.________, mais l'a reconnu coupable de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 et 2 al. 1 et 2 CP) et de violation du devoir d'assistance et d'éducation (art. 219 al. 1 CP) et l'a condamné - après avoir constaté une violation du principe de la célérité - à une peine pécuniaire de 270 jours-amende à 30 fr. le jour, sous déduction de 270 jours, dont 62 jours exécutés à titre de détention avant jugement et 208 au titre des mesures de substitution, avec sursis durant trois ans. A.________ a également été condamné à verser à C.B.________ et D.C.________ les sommes de 5'000 fr. et 500 fr. au titre de réparation de leur tort moral. Enfin, il a été renoncé à son expulsion facultative.
B.
Par arrêt du 29 novembre 2023, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise a rejeté l'appel formé par A.________, a déclaré irrecevable celui de B.B.________ et a admis partiellement l'appel joint du Ministère public genevois. En conséquence, elle a réformé le jugement attaqué en ce sens qu'elle a acquitté A.________ de contrainte sexuelle et de menaces, l'a déclaré coupable de viols commis à réitérées reprises, de lésions corporelles simples aggravées et de violation du devoir d'assistance ou d'éducation, lui a infligé, après constatation d'une violation du principe de la célérité, une peine privative de liberté de 36 mois, sous déduction de la détention avant jugement et de 138 jours au titre de la prise en considération de mesures de substitution, peine prononcée sans sursis à raison de neuf mois, A.________ étant mis pour le surplus au bénéfice du sursis partiel avec un délai d'épreuve de cinq ans, a prononcé en outre une peine pécuniaire de 270 jours-amende à 30 fr. le jour avec sursis pendant cinq ans, a ordonné l'expulsion de Suisse de A.________ pour une durée de dix ans, renonçant à ordonner le signalement de son expulsion dans le Système d'information Schengen (SIS) et, sur plan civil, a condamné l'intéressé à payer à titre de réparation du tort moral à D.C.________ une indemnité de 500 fr. et une indemnité de 5'000 fr. à C.B.________, renvoyant pour le surplus B.B.________, D.C.________ et C.B.________ à agir au civil.
En résumé, la cour cantonale a retenu les faits suivants:
B.a. A.________ et B.B.________ ont entretenu une relation amoureuse, de laquelle est issue C.B.________, née en 2006 à U.________. A.________ a quitté le pays pour la France peu avant sa naissance, mais a reconnu sa paternité le 7 octobre 2006. Pour sa part, B.B.________ a épousé un ressortissant suisse le 24 août 2006, qu'elle a rejoint à V.________ en 2007. Elle a confié sa fille C.B.________ à sa propre mère à U.________. En 2010, elle s'est séparée de son mari et s'est installée à W.________, où elle a donné naissance à D.C.________ en 2011. En 2013, une action en désaveu a été initiée, B.B.________ attribuant la paternité de D.C.________ à A.________, ce que ce dernier a confirmé. En 2014, C.B.________ est arrivée en Suisse, à W.________.
B.b. À des dates indéterminées situées peu après l'arrivée en Suisse de sa fille C.B.________ en 2014 et jusqu'au 24 mai 2017, A.________ a frappé cette dernière à de très nombreuses reprises sur tout le corps (tête, bras, mains, dos, jambes et pieds). Avant de la brutaliser, il lui arrivait de la pousser dans une chambre, de fermer les volets et la porte. À réitérées reprises, il l'a frappée sur plusieurs parties du corps avec une ceinture pliée en deux, avec un bâton en bois et avec "un bout de fer". Il lui a par ailleurs donné des gifles et des fessées. Il lui a aussi, à une occasion, asséné, sans raison, un coup de pied au visage alors qu'elle se brossait les dents, lui occasionnant des coupures à la langue. Il lui a encore "balancé" un cintre dessus, lui causant de la sorte une lésion à l'avant-bras. Enfin, il lui a infligé des punitions physiques, en lui faisant "faire la chaise invisible", à savoir qu'elle devait simuler une position assise, ou "planter des choux", c'est-à-dire qu'elle devait se mettre sur un seul pied, toucher le sol avec l'un de ses doigts tout en gardant l'autre main dans le dos. Elle devait conserver l'équilibre ainsi le plus longtemps possible, ce qui lui occasionnait des douleurs. Si elle le perdait, A.________ la frappait avec une ceinture. A.________ a causé de la sorte à sa fille C.B.________ plusieurs lésions, cicatrisées et impossibles à dater.
B.c. À des dates indéterminées entre le début de l'année 2015 et le 24 mai 2017, A.________ a frappé l'enfant D.C.________, également fille de B.B.________. Il lui a notamment donné de grands coups, généralement avec le plat de la main, lui a administré des fessées et l'a battue avec une ceinture. Il lui a causé de la sorte des lésions cicatrisées.
B.d. À des dates indéterminées se situant entre le début de l'année 2015 et le 24 mai 2017, A.________ a frappé B.B.________ à plusieurs reprises avec, notamment, ses mains, une ceinture, le même bâton en bois utilisé pour battre C.B.________, le "tuyau" à savoir un câble avec une prise au bout, ainsi qu'avec une botte. Il l'a battue sur tout le corps (notamment le dos, les mains et les cuisses), lui occasionnant des lésions, qui ont laissé des cicatrices.
En sus des violences physiques, A.________ a exercé sur sa compagne des violences psychologiques, en dictant sa loi, B.B.________ redoutant ses réactions. Dans ce contexte de violence, souvent après l'avoir frappée, il lui faisait subir l'acte sexuel en la pénétrant vaginalement avec son sexe.
C.
Contre l'arrêt cantonal du 29 novembre 2023, A.________ dépose un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral. Il conclut, principalement, à la réforme du jugement attaqué en ce sens qu'il est acquitté des chefs d'accusation de viols commis à réitérées reprises, de lésions corporelles simples aggravées et de violation du devoir d'assistance ou d'éducation, qu'il est libéré de toute peine et qu'il est renoncé à son expulsion. À titre subsidiaire, il requiert l'annulation de l'arrêt attaqué et le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. En outre, il sollicite l'assistance judiciaire.
Considérant en droit :
1.
Le recourant critique l'établissement des faits, qu'il qualifie de manifestement inexact.
1.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF), à moins que celles-ci n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir pour l'essentiel de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation, mais aussi dans son résultat (ATF 148 IV 409 consid. 2.2; 146 IV 88 consid. 1.3.1; 143 IV 241 consid. 2.3.1 p. 244). Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 143 IV 500 consid. 1.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 145 IV 154 consid. 1.1).
1.2. Les déclarations de la victime constituent un élément de preuve que le juge doit, dans l'évaluation globale de l'ensemble des éléments probatoires rassemblés au dossier, apprécier librement (arrêts 6B_732/2021 du 24 février 2022 consid. 2.3 et 6B_1498/2020 du 29 novembre 2021 consid. 3.1).
2.
Le recourant conteste la crédibilité des déclarations de l'intimée 3.
2.1. La cour cantonale a retenu que les déclarations de l'intimée 3 étaient dignes de foi, alors qu'elle a considéré que les explications du recourant étaient dénuées de force probante. Elle s'est fondée sur plusieurs éléments (cf. arrêt attaqué p. 40 ss).
Elle a relevé que le récit de l'enfant était très précis et riche en détails (notamment quant à la nature des objets utilisés ou des postures à tenir, l'unique coup de pied au visage, le pliage de la ceinture, la fermeture des rideaux ou des volets, la durée et les causes des punitions), que l'enfant décrivait les douleurs ressenties mais également ses émotions (tristesse, colère, culpabilité et perte d'appétit), ainsi que les conséquences matérielles des coups reçus (traits noirs, parfois sanguinolents, langue coupée). La fillette était demeurée mesurée et constante dans son propos devant ses différents interlocuteurs, maintenant ses allégations malgré le temps écoulé, la perte de sa famille, la culpabilité, la crainte de représailles, son hospitalisation et son placement en foyer. La cour cantonale n'a décelé aucun bénéfice secondaire que l'enfant aurait pu tirer de ses dénonciations, dès lors qu'elle avait déclaré aimer son père et ne pas lui souhaiter d'ennuis.
La fillette avait été soumise à une expertise de crédibilité, qui avait conclu à la crédibilité de ses déclarations avec un score particulièrement élevé. Cette expertise soulignait que l'enfant avait su précisément décrire et contextualiser les événements, tout en ayant résisté à plusieurs reprises aux questions directives ou suggestives et admis spontanément ne pas connaître la réponse ou l'avoir oubliée, de sorte qu'elle n'avait pas donné l'impression de vouloir satisfaire à tout prix l'adulte. En outre, aucune forme de pression ou de coercition n'avait été relevée.
La cour cantonale a également relevé que l'intimée 3 s'était ouverte des mauvais traitements qu'elle subissait de la part de son père à son amie, puis à sa maîtresse, parce qu'elle "en avait eu marre", entamant ainsi une démarche qui lui était propre.
En outre, la cour cantonale a constaté que les photographies et le constat médical faits immédiatement après les premières révélations de l'enfant venaient corroborer ses dires. Il y était constaté des nombreuses lésions compatibles avec les maltraitances décrites.
La cour cantonale a ajouté que l'expertise familiale, menée lors de la procédure civile, avait relevé chez l'enfant un état de stress post-traumatique en lien avec les maltraitances subies.
Enfin, le fait que sa mère et sa soeur avaient décrit un vécu commun avait achevé de convaincre la cour cantonale de la crédibilité de l'intimée 3, étant précisé que la mère avait confirmé dans une large mesure les châtiments subis par sa fille.
2.2. Le recourant remet en cause la validité de l'expertise de crédibilité de l'intimée 3.
2.2.1. Comme tous les autres moyens de preuve, les expertises sont soumises à la libre appréciation du juge. Celui-ci ne peut cependant pas s'écarter d'une expertise sans motifs pertinents. Il doit examiner, en se fondant sur les autres moyens de preuve administrés et sur les arguments des parties, si de sérieuses objections font obstacle au caractère probant des conclusions de l'expertise. En se fondant sur une expertise non concluante, le juge peut tomber dans l'arbitraire. Tel peut être le cas si l'expert n'a pas répondu aux questions posées, si ses conclusions sont contradictoires ou si, de toute autre façon, l'expertise est entachée de défauts à ce point évidents et reconnaissables, même sans connaissances spécifiques, que le juge ne pouvait tout simplement pas les ignorer (ATF 141 IV 369 consid. 6.1 p. 373 et les références citées).
2.2.2. En l'espèce, la cour cantonale a estimé qu'il n'y avait pas lieu de s'écarter de l'expertise de crédibilité, qui avait conclu que les déclarations de la fillette étaient crédibles. L'audition avait été menée conformément au protocole d'audition des enfants victimes d'infractions graves (EVIG) du National Institute of Child Health and Human Development (NICHD). Les experts avaient ensuite utilisé la méthode SVA ("Statement Validity Analysis"), analogue à la méthode dite de l'analyse du témoignage, qui est préconisée par le Tribunal fédéral (arrêts 6B_288/2017 du 19 janvier 2018 consid. 2.2; 6B_693/2015 du 31 mars 2016 consid. 2.5 et 6B_539/2010 du 30 mai 2011 consid. 2.2.3). Le score selon la grille SVA était de 11 sur 19, à savoir particulièrement élevé.
Les experts avaient cité encore plusieurs éléments qui venaient augmenter la crédibilité de l'intimée 3. À de nombreuses reprises, l'enfant avait évoqué son ressenti (sa tristesse, son impuissance, des pertes d'appétit, etc.). Elle avait également mentionné à plusieurs reprises les états de colère de son père. Elle s'était montrée capable de résister face à l'inspectrice en charge de son audition, mentionnant des blancs de mémoire ou ne pas se souvenir précisément de certains éléments ou moments. Elle avait également fait référence à des éléments extérieurs, qui sont spécifiques à ce type de maltraitance (le fait que le père ferme la porte et les volets pour que les voisins n'entendent pas; le fait que la mère minimise les violences subies). Elle avait souvent relaté les violences subies à son amie; elle avait également dévoilé les agissements de son père à sa maîtresse, son discours étant resté constant au travers des différents professionnels de la santé et de la police qu'elle a rencontrés par la suite. Enfin, le constat médical effectué mentionnait de nombreuses cicatrices compatibles avec les dires de l'enfant.
2.2.3. Le recourant relève un certain nombre d'éléments, qui, selon lui, permettraient de remettre en cause les conclusions de l'expert.
Il fait valoir que l'expert n'aurait pas tenu compte de la procédure P/24712/2014 ouverte à la suite de la plainte pénale déposée par l'intimée 2 le 17 décembre 2014, lors de laquelle l'intimée 3, filmée conformément au protocole d'audition des enfants victimes d'infractions graves (EVIG), avait déclaré qu'elle-même et sa soeur ne faisaient pas l'objet de maltraitance (arrêt attaqué p. 6 s.). Ce grief est infondé. La mission des experts portait sur le contenu d'une audition précise, concernant les maltraitances vécues par l'intimée 3, par opposition aux précédentes déclarations qui portaient sur les maltraitances subies par la mère de l'intimée 3 alors que cette dernière venait d'arriver en Suisse. Entendue par le ministère public, l'experte a déclaré du reste expressément que la première audition EVIG de l'intimée 3 faite en 2014 n'aurait été d'aucune utilité pour analyser sa crédibilité en 2017 (arrêt attaqué p. 11).
Le recourant soutient également que l'intimée 2 avait pu voir et s'entretenir avec sa fille juste avant son audition. Les experts n'ont toutefois constaté aucune forme de pression ou de coercition. À suivre le raisonnement du recourant, aucune expertise de crédibilité ne serait valable lorsqu'un enfant mineur vit avec ses parents.
Par ses arguments, le recourant ne relève en définitive aucune contradiction interne à l'expertise, ne suggère pas que l'expert n'aurait pas répondu aux questions posées, ni que ses conclusions sont contradictoires ou que l'expertise serait entachée de défauts à ce point évidents et reconnaissables, même sans connaissances spécifiques. Il ne soulève aucun motif pertinent qui justifierait de s'écarter de l'expertise.
2.3. Le recourant relève encore que personne ne s'est rendu compte des prétendues violences avant les confidences de l'intimée 3 à l'école. En effet, le Service de protection des mineurs qui suivait la famille pendant toute la période pénale n'avait rien constaté, et il ressortait que l'enfant allait bien des dires de l'enseignante et du pédiatre qui la suivait. Au vu des nombreux autres éléments établissant les maltraitances subies par l'intimée 3, ces arguments ne sont d'aucune pertinence.
3.
Le recourant soutient que la cour cantonale a versé dans l'arbitraire en retenant qu'il avait également frappé l'intimée 4.
3.1. La cour cantonale a retenu que le recourant avait également maltraité l'intimée 4 sur la base des éléments suivants (cf. arrêt attaqué p. 42 s.).
Si la petite fille avait refusé de parler durant son audition EVIG du 31 mai 2017, elle s'était confiée à l'infirmier scolaire, puis, lors de l'expertise familiale le 30 novembre 2018, elle avait spontanément déclaré que son père les tapait elle et sa soeur, avant de se figer, le regard dans le vide (arrêt attaqué p. 22).
La cour cantonale a constaté que la petite fille présentait des cicatrices semblables à celle de sa soeur, lesquelles étaient compatibles avec les dires de l'enfant. Ces cicatrices ne laissaient planer aucun doute sur le fait que l'enfant avait aussi reçu des coups de ceinture.
La cour cantonale a relevé que l'intimée 3 avait rencontré beaucoup de difficultés à confier que sa soeur avait subi des mauvais traitements et que la mère n'avait rapporté que des fessées.
Elle a noté que le comportement de l'intimée 4 trahissait également un certain mal-être: la directrice de l'école avait été la première à rapporter qu'elle était agressive et souvent en colère.
Enfin, l'enfant ne tirait aucun bénéfice secondaire à dénoncer son père. Au contraire, son refus de s'exprimer à la police et ses inquiétudes concernant une potentielle incarcération de son père dénotaient une volonté de le protéger.
3.2. Le recourant conteste les faits. Il fait notamment valoir que les confidences que l'intimée 4 aurait faites à l'infirmier scolaire n'auraient pas été spontanées, puisqu'elles auraient eu lieu plus d'un mois après celles de sa soeur et que sa mère n'aurait parlé que de fessées. Cette argumentation ne satisfait pas aux exigences de motivation posées à l'art. 106 al. 2 LTF et, partant, est irrecevable. Les éléments retenus par la cour cantonale pour retenir le bien-fondé des déclarations de l'intimée 4 sont pertinents et convaincants. Le raisonnement de la cour cantonale n'est en rien entaché d'arbitraire.
4.
Le recourant fait valoir que la cour cantonale aurait établi les faits de façon manifestement inexacte en retenant que les déclarations de l'intimée 2 étaient crédibles.
4.1. La cour cantonale a qualifié de crédibles les déclarations de l'intimée 2, dans la mesure où celles-ci étaient corroborées par plusieurs éléments (cf. arrêt attaqué p. 43 ss).
Il ressortait d'abord des témoignages de l'intimée 3, ainsi que, dans une moindre mesure, de ceux de l'intimée 4 que le recourant battait leur mère.
La cour cantonale a relevé que les cicatrices que présentait l'intimée 2 devaient être appréciées comme un indice corroboratif, même si elles ne pouvaient pas être rattachées avec certitude à l'un ou l'autre coups reçus pendant la période pénale.
4.2. Le recourant critique le raisonnement de la cour cantonale sur deux points.
Premièrement, il fait valoir que la procédure P/24712/2014 initiée à la suite d'une plainte de l'intimée 2 avait été clôturée par une ordonnance de classement du 10 mars 2015 et que cette dernière avait été condamnée pour une dénonciation calomnieuse par ordonnance pénale du même jour. Pour le recourant, cette condamnation entache la crédibilité de l'intimée 2. Comme l'a relevé la cour cantonale, les rétractations ne sont pas insolites chez la victime. En outre, la cour cantonale a constaté à juste titre que la présente procédure n'avait pas été initiée par l'intimée 2 et qu'elle avait tenté au début de protéger le recourant.
En second lieu, selon le recourant, les déclarations de l'intimée 2 contiendraient des variations sur des éléments essentiels, notamment sur la description des objets que le recourant utilisait pour la frapper. La cour cantonale n'a pas nié que l'intimée 2 avait varié dans ses déclarations à ce sujet, mais elle a considéré que ces variations ne procédaient pas d'exagération crasse qui suffirait à la discréditer.
Au vu de l'ensemble des éléments mentionnés ci-dessus (cf. 4.1), la cour cantonale n'a pas versé dans l'arbitraire en considérant les déclarations de l'intimée 2 comme crédibles, malgré ses rétractations en 2014 et les variations dans son discours. Les griefs soulevés sont infondés.
5.
Le recourant dénonce une violation de l'art. 190 al. 1 CP.
5.1. Aux termes de l'art. 190 al. 1 CP (en vigueur jusqu'au 30 juin 2024), se rend coupable de viol celui qui, notamment en usant de menace ou de violence, en exerçant sur sa victime des pressions d'ordre psychique ou en la mettant hors d'état de résister, aura contraint une personne de sexe féminin à subir l'acte sexuel.
Comme moyen de contrainte, la loi cite notamment la violence et les pressions psychiques.
La violence désigne l'emploi volontaire de la force physique sur la personne de la victime dans le but de la faire céder (ATF 122 IV 97 consid. 2b p. 100). Il n'est pas nécessaire que la victime soit mise hors d'état de résister ou que l'auteur la maltraite physiquement. Une certaine intensité est néanmoins requise. La violence suppose non pas n'importe quel emploi de la force physique, mais une application de cette force plus intense que ne l'exige l'accomplissement de l'acte dans les circonstances ordinaires de la vie (ATF 87 IV 68).
En introduisant la notion de "pressions psychiques", le législateur a voulu viser les cas où la victime se trouve dans une situation sans espoir, sans pour autant que l'auteur ait recouru à la force physique ou à la violence (ATF 131 IV 107 consid. 2.2). Constituent une pression psychique suffisante des comportements laissant craindre des actes de violence à l'encontre de la victime ou de tiers, notamment des menaces de violence contre des proches, ou, dans des relations de couple, des situations d'intimidation, de tyrannie permanente ou de perpétuelle psycho-terreur (ATF 131 IV 167 consid. 3.1). Par exemple, un climat de psycho-terreur entre époux peut, même sans violence, exercer une influence telle sur la volonté que la victime estime, de manière compréhensible, qu'elle n'a pas de possibilité réelle de résister (ATF 126 IV 124 consid. 3b et c).
5.2. Au vu des faits constatés, la cour cantonale a admis à juste titre que le climat de violences intrafamiliales dans lequel l'intimée 2 et ses filles étaient plongées rendait compréhensible le fait que l'intimée 2 a souvent préféré se soumettre à l'acte sexuel, ce d'autant plus qu'il signifiait vraisemblablement la fin de ses tourments. En outre, dans la mesure où l'intimée 2 était attachée et en culotte durant les sévices, les actes sexuels qui se sont produits dans ce cadre sont constitutifs de de violence.
La cour cantonale n'a en conséquence pas violé le droit fédéral en condamnant le recourant pour viols à réitérées reprises.
6.
Le recourant n'articule aucun grief recevable relatif à l'expulsion. Sa conclusion tendant à la renonciation à l'expulsion est ainsi irrecevable.
7.
Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
Comme il était dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF) et le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera toutefois fixé en tenant compte de sa situation financière qui n'apparaît pas favorable.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision.
Lausanne, le 5 novembre 2024
Au nom de la Ire Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : Jacquemoud-Rossari
La Greffière : Kistler Vianin