Eidgenössisches Versicherungsgericht
Tribunale federale delle assicurazioni
Tribunal federal d'assicuranzas
Cour des assurances sociales
du Tribunal fédéral
Cause
{T 7}
U 278/04
Arrêt du 6 janvier 2006
IIIe Chambre
Composition
MM. les Juges Ferrari, Président, Lustenberger et Seiler. Greffière : Mme von Zwehl
Parties
R.________, recourante, représentée par Me Pierre Seidler, avocat, avenue de la Gare 42, 2800 Delémont,
contre
Winterthur Assurances, Société Suisse d'Assurances SA, General Guisan Strasse 40, 8401 Winterthur, intimée, représentée par
Me Jean-Claude Schweizer, avocat, avenue
de la Gare 1 / Boine 2, 2000 Neuchâtel,
Instance précédente
Tribunal administratif de la République et canton de Genève, Genève
(Jugement du 8 juin 2004)
Faits:
A.
A.a R.________, née en 1947, a travaillé comme documentaliste pour la société X.________ SA de 1980 à 1990; par la suite, elle a géré une boutique de vêtements de sport à Y.________ qu'elle a fermée fin avril 1997.
Le 21 mai 1986, la prénommée a été victime d'un accident de la circulation : son véhicule a été percuté à l'avant gauche par une autre voiture qui débouchait d'un chemin transversal. Selon le certificat médical établi à cette époque par le docteur B.________, médecin traitant, elle présentait un état après contusion-distorsion de la colonne cervicale avec des troubles de la concentration et était incapable de travailler jusqu'au 26 mai 1986. La Winterthur Assurances (ci-après : la Winterthur), auprès de laquelle R.________ était assurée contre le risque d'accidents, a pris en charge le cas. Le dossier de l'assurée a été classé dans le courant de l'année 1986 et son contenu détruit en 1996.
A.b Le 9 avril 2000, R.________ s'est adressée à la Winterthur en indiquant souffrir de troubles en relation avec l'événement accidentel du 21 mai 1986. L'assureur-accidents a recueilli divers renseignements médicaux. En particulier, il a invité le docteur B.________ à décrire l'évolution de l'état de santé de l'assurée après l'accident et requis l'avis de son médecin-conseil, le docteur K.________. Une expertise du docteur S.________ ainsi qu'un rapport du Professeur A.________, médecins mandatés dans le cadre de la demande AI déposée par R.________, ont été versés au dossier, de même que plusieurs comptes-rendus d'examens subis par la prénommée (voir les rapports des docteurs N.________, neurologue, I.________, FMH en médecine physique et réadaptation, et L.________, oto-rhino-laryngologue). Un diagnostic de troubles neuropsychologiques sévères, d'arthrose postérieure C2-C3-C4 à prédominance gauche sans discarthrose associée ainsi que d'arthrose de l'étage inférieur a été posé. Par décision du 8 février 2001, la Winterthur a nié l'existence d'un lien de causalité naturelle entre l'accident du 21 mai 1986 et les troubles présentés par l'assurée. Saisie d'une opposition, l'assureur-accidents a confié une expertise médicale pluridisciplinaire à la Clinique Z.________; les médecins de cet établissement ont conclu à un lien causal seulement possible (rapport du 22 janvier 2002). La Winterthur a dès lors confirmé sa prise de position initiale dans une nouvelle décision du 7 octobre 2002.
B.
L'assurée a déféré cette décision devant le Tribunal administratif de la République et canton Genève (aujourd'hui : Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève).
Après avoir tenu une audience de comparution personnelle des parties et entendu le docteur N.________, le tribunal cantonal a rejeté le recours (jugement du 8 juin 2004).
C.
R.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont elle requiert l'annulation. Elle conclut, sous suite de frais et dépens, principalement, à ce que la Winterthur soit condamnée à lui verser les prestations légales découlant de la LAA et, subsidiairement, à ce que la cause soit renvoyée à la juridiction cantonale pour une nouvelle expertise pluridisciplinaire.
La Winterthur conclut au rejet du recours. L'Office fédéral de la santé publique, de même que la caisse-maladie Helsana en sa qualité de tiers intéressé ont renoncé à se déterminer.
Considérant en droit:
1.
La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA) est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de l'assurance-accidents. Cependant, le cas d'espèce reste régi par les dispositions de la LAA en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002, dès lors que le juge des assurances n'a pas à prendre en considération les modifications du droit ou de l'état de fait postérieures à la décision litigieuse du 7 octobre 2002 (ATF 127 V 467 consid. 1, 121 V 366 consid. 1b).
2.
2.1 La responsabilité de l'assureur-accidents s'étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle et adéquate avec l'événement assuré. Les prestations d'assurance sont donc également versées en cas de rechutes ou de séquelles (art. 11 OLAA). Selon la jurisprudence, il y a rechute lorsqu'une atteinte présumée guérie récidive, de sorte qu'elle conduit à un traitement médical ou à une (nouvelle) incapacité de travail. En revanche, on parle de séquelles ou de suites tardives lorsqu'une atteinte apparemment guérie produit, au cours d'un laps de temps prolongé, des modifications organiques ou psychiques qui conduisent souvent à un état pathologique différent. Les rechutes et suites tardives se rattachent donc par définition à un événement accidentel effectif. Corrélativement, elles ne peuvent faire naître une obligation de l'assureur-accidents (initial) de verser des prestations que s'il existe un lien de causalité naturelle et adéquate entre les nouvelles plaintes de l'intéressé et l'atteinte à la santé causée à l'époque par l'accident assuré (ATF 118 V 296 consid. 2c et les références; RAMA 1994 n° U 206 p. 327 consid. 2).
2.2 L'exigence afférente au rapport de causalité naturelle est remplie lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans l'événement dommageable de caractère accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout, ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire, en revanche, que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé; il faut et il suffit que l'événement dommageable, associé éventuellement à d'autres facteurs, ait provoqué l'atteinte à la santé physique ou psychique de l'assuré, c'est-à-dire qu'il se présente comme la condition sine qua non de celle-ci. Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 129 V 181 consid. 3.1, 406 consid. 4.3.1, 119 V 337 consid. 1, 118 V 289 consid. 1b et les références).
3.
3.1 Des éléments médicaux au dossier, les premiers juges ont retenu que la recourante avait été victime, en 1986, d'un accident du type «coup du lapin» et qu'elle en présentait encore aujourd'hui une grande partie du tableau clinique typique. Aucun médecin n'ayant toutefois pu conclure au degré de la vraisemblance prépondérante que ces symptômes étaient imputables audit accident, ils ont nié la responsabilité de la Winterthur.
3.2 Pour la recourante, les premiers juges ont fait une mauvaise lecture des rapports médicaux qu'elle a versés au dossier; leurs auteurs attesteraient de manière unanime qu'il existe un lien de causalité entre son invalidité et l'accident dont elle a été victime le 21 mai 1986. Par ailleurs, dès lors qu'il était établi qu'elle avait subi à cette époque un accident du type «coup du lapin» et qu'elle en présentait encore aujourd'hui le tableau clinique typique, l'existence d'un lien de causalité naturelle était donné. Si elle n'avait pas consulté de médecins pendant un certain temps, c'était uniquement parce qu'elle pensait que ses symptômes allaient disparaître petit à petit, ce qui ne s'est pas avéré être le cas.
4.
Il s'est écoulé 14 ans depuis la fin du traitement médical prodigué par le docteur B.________ en mai 1986 et l'annonce de la rechute à l'assureur-accidents en avril 2000. Bien que la recourante allègue n'avoir jamais connu de rémission, on doit constater que les consultations médicales qu'elle a effectuées dans les années suivant l'accident assuré ont concerné des problèmes de santé d'un autre ordre. Il ressort ainsi de son dossier médical (produit en cours de procédure cantonale) qu'elle a régulièrement été suivie par son gynécologue, le docteur E.________; même si celui-ci a mentionné que sa patiente s'était souvent plainte de céphalées lors de ses consultations (cf. rapport du 3 juin 2002), rien ne permet encore de leur retenir une origine accidentelle. R.________ s'est également rendue à plusieurs reprises chez le docteur C.________. Tout en précisant qu'il ne pouvait donner de renseignements avant l'année 1990 faute d'avoir conservé les pièces y relatives, ce médecin a déclaré lui avoir prescrit en avril 1994 des séances de physiothérapie en raison d'une chute; des radiographies de la colonne vertébrale avaient été établies à l'époque, lesquelles ne montraient aucune lésion visible (rapport du 20 octobre 2002). Quant au docteur B.________, qui avait traitée l'assurée dans les suites immédiates de l'événement du 21 mai 1986, il a indiqué avoir fait mention dans ses notices d'une colonne cervicale indolore et fonctionnelle, ainsi que d'un status neurologique normal avec quelques céphalées résiduelles dès le 24 mai 1986; il ne trouvait par la suite aucune référence à des problèmes de santé qu'il aurait pu relier à l'accident en cause (rapport du 23 mai 2000). L'existence de troubles neuropsychologiques (ralentissement, difficultés de concentration et mnésiques, ainsi qu'un léger trouble de l'équilibre) est documentée pour la première fois dans un rapport du docteur N.________ du 8 septembre 1999. Dans ce rapport, le médecin précité semble imputer ces troubles à l'accident de la circulation de 1986 («R.________ présente, suite à un accident et probablement un traumatisme crânien mineur et peut-être une entorse cervicale discrète, [...]»). Entendu en cours de procédure cantonale, le docteur N.________ a toutefois relativisé ses propos, précisant que si les symptômes observés étaient selon lui «compatibles avec un syndrome post-commotionnel et un status après entorse cervicale», il lui était toutefois «difficile», treize ans plus tard, de parler de leur origine (cf. procès-verbal de comparution personnelle du 26 janvier 2004). Dans un rapport du 30 septembre 1999, le docteur L.________ a fait état de «discrètes anomalies des voies vestibulo-oculomotrices (qui) pourrai(en)t correspondre aux séquelles d'un ancien déficit vestibulaire brusque». Pour sa part, le docteur I.________ (de la Clinique W.________) a estimé que les dysfonctions cervicales qu'il avait constatées chez l'assurée au terme d'un examen pratiqué au mois de décembre 1999 entraient dans le cadre de «séquelles de l'accident» [de 1986] (attestation du 18 janvier 2000). Les docteurs S.________ et K.________ ainsi que les médecins de la Clinique Z.________, en revanche, concluent clairement à l'absence d'un lien de causalité ou à un rapport causal seulement possible (voir leurs rapports respectifs des 20 août 1999, 22 janvier 2001 et 22 janvier 2002). Selon ces médecins, plusieurs éléments plaident en faveur de cette conclusion : le long intervalle qui s'est écoulé entre l'accident et la rechute durant lequel l'assurée n'a jamais consulté de médecin pour des plaintes similaires, l'évolution rapidement favorable de la symptomatologie après l'accident, ainsi que la reprise d'une activité professionnelle régulière de 1986 jusqu'en 1997.
En l'espèce, et quoi qu'en dise la recourante, aucun médecin ne s'est prononcé dans le sens d'une relation de causalité probable entre ses troubles et l'accident assuré. Les considérations des docteurs N.________ et L.________ rejoignent en vérité celles des médecins de la Clinique Z.________. L'absence d'un tel rapport causal n'est pas non plus sérieusement contredite par l'opinion du docteur I.________ qui a, dans un deuxième temps, rendu un avis nettement plus nuancé sur la question de la causalité naturelle [voir son rapport du 26 juin 2000 établi à l'intention de la Winterthur, dans lequel il mentionne la présence d'une hypermobilité relative en C4-C5 «qui aurait pu témoigner d'une séquelle d'entorse ligamentaire liée à son accident antérieur»]. Qu'aucun des spécialistes ayant examiné la recourante n'ait été en mesure d'évoquer une autre étiologie pour expliquer l'état dans lequel elle se trouve n'est pas suffisant pour admettre l'existence du lien de causalité litigieux ou de sa vraisemblance. On rappellera que même en présence d'un tableau clinique typique des accidents de type «coup du lapin», les plaintes doivent, médicalement, être attribuées à une atteinte à la santé qui apparaît, avec un degré de vraisemblance prépondérante, comme la conséquence de l'accident (ATF 119 V 338 consid. 2). Or, au vu de la longue période de latence qui a précédé l'annonce de la rechute, on peut sérieusement douter que les troubles présentés par la recourante puisse être attribués à un traumatisme de type «coup du lapin» à la colonne vertébrale ou d'un traumatisme analogue. Celle-ci doit, partant, supporter les conséquences de l'absence de preuve d'un tel rapport de causalité.
Le jugement entrepris n'est pas critiquable et le recours se révèle mal fondé.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.
3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à Helsana Assurances SA, Lausanne, au Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office fédéral de la santé publique.
Lucerne, le 6 janvier 2006
Au nom du Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre: La Greffière: