Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_99/2022  
 
 
Arrêt du 6 février 2023  
 
IIIe Cour de droit public  
 
Composition 
M. et Mmes les Juges fédéraux Parrino, Président, Moser-Szeless et Scherrer Reber. 
Greffier : M. Berthoud. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Charles Guerry, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Office de l'assurance-invalidité 
du canton de Fribourg, 
route du Mont-Carmel 5, 1762 Givisiez, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Fribourg du 11 janvier 2022 (605 2021 222). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Par décision du 16 août 2012, l'Office de l'assurance-invalidité du canton de Fribourg (ci-après: l'office AI) a rejeté la demande de prestations que A.________ avait déposée le 25 août 2011.  
 
A.b. Le 10 avril 2013, l'assurée a présenté une nouvelle demande de prestations à l'office AI, annonçant souffrir d'une dépression et être totalement incapable de travailler depuis le mois de septembre 2012. Par décision du 10 juillet 2014, l'office AI a rejeté la demande en se fondant sur un rapport d'expertise de la Clinique B.________ du 21 mars 2014. Confirmée en dernier lieu par le Tribunal fédéral (arrêt 9C_587/2016 du 12 décembre 2016), cette décision a toutefois été annulée à l'occasion d'une procédure de révision liée aux dysfonctionnements survenus au sein de la Clinique B.________ (arrêt 9F_5/2018 du 16 août 2018).  
A la suite de cet arrêt, l'office AI a mis en oeuvre une expertise bidisciplinaire qui a été confiée à SMEX SA, Swiss Medical Expertise, à Neuchâtel. Le docteur C.________, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, et la doctoresse D.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, ont déposé leur rapport le 1er avril 2019. Un rapport complémentaire a été établi le 14 août 2019 par la doctoresse D.________. Consécutivement à un renvoi pour des motifs formels (arrêt 9C_496/2020 du 12 avril 2021), l'office AI a nié le droit de l'assurée à une rente, faute d'invalidité, par décision du 20 septembre 2021. 
 
B.  
A.________ a déféré cette décision au Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, qui l'a déboutée par arrêt du 11 janvier 2022. 
 
C.  
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt dont elle demande l'annulation. A titre principal, elle conclut à l'octroi d'une rente entière d'invalidité. A titre subsidiaire, elle demande le renvoi du dossier à l'office AI pour instruction médicale complémentaire et nouvelle décision. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours en matière de droit public peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il statue par ailleurs sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend s'en écarter doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées sinon un état de fait divergent ne peut pas être pris en considération. 
 
2.  
Les constatations de l'autorité cantonale de recours sur l'atteinte à la santé, la capacité de travail de la personne assurée et l'exigibilité - pour autant qu'elles ne soient pas fondées sur l'expérience générale de la vie - relèvent d'une question de fait et ne peuvent donc être contrôlées par le Tribunal fédéral que sous un angle restreint (ATF 132 V 393 consid. 3.2). On rappellera, en particulier, qu'il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une solution autre que celle de l'autorité cantonale semble concevable, voire préférable (ATF 141 I 70 consid. 2.2; 140 I 201 consid. 6.1). Pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable; il faut encore que cette décision soit arbitraire dans son résultat (ATF 141 I 49 consid. 3.4). 
 
3.  
 
3.1. Le litige a trait au droit de la recourante à une rente entière de l'assurance-invalidité. Compte tenu des motifs et conclusions du recours, il porte plus particulièrement sur le point de savoir si les premiers juges étaient en droit de se fonder sur l'expertise psychiatrique de la doctoresse D.________ pour évaluer la nature des atteintes à la santé psychique de l'assurée et leur caractère incapacitant.  
 
3.2. L'arrêt attaqué expose de manière complète les dispositions légales et les principes jurisprudentiels relatifs à la notion d'invalidité (art. 7 et 8 al. 1 LPGA en relation avec l'art. 4 al. 1 LAI) et à son évaluation (art. 16 LPGA et art. 28a LAI), en particulier s'agissant du caractère invalidant de troubles psychiques (ATF 143 V 409; 143 V 418; 141 V 281). Il rappelle également les règles applicables aux nouvelles demandes de prestations (art. 17 LGPA et 87 RAI) ainsi qu'à la valeur probante des rapports médicaux (ATF 134 V 231 consid. 5.1; 125 V 351 consid. 3). Il suffit d'y renvoyer, étant précisé que sont applicables les dispositions en vigueur jusqu'au 31 décembre 2021, soit avant l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2022, de la modification de la loi fédérale sur l'assurance-invalidité du 19 juin 2020 (Développement continu de l'AI; RO 2021 705), compte tenu de la date de la décision administrative litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et les références).  
 
4.  
 
4.1. La recourante fait grief à l'instance précédente d'avoir établi les faits de façon manifestement inexacte et d'avoir accordé à tort une pleine valeur probante à l'expertise psychiatrique de la doctoresse D.________. Elle soutient que les conclusions de l'experte ne s'appuient pas sur une évaluation à l'aune des indicateurs exposés à l'ATF 141 V 281. Singulièrement, elle reproche à l'experte d'avoir nié toute incapacité de travail durable en admettant à tort que le trouble obsessionnel compulsif (TOC) dont elle souffre est curable et que ce trouble psychique est surmontable à condition de suivre un traitement médical approprié au lieu de consommer de l'alcool. En se référant notamment à l'avis de ses médecins-traitants, les docteurs E.________ et F.________, l'assurée soutient qu'elle est invalide.  
 
4.2. On relèvera préalablement qu'il appartient aux médecins d'évaluer l'état de santé d'une personne assurée (c'est-à-dire, de procéder aux constatations nécessaires en effectuant des examens médicaux appropriés, de tenir compte des plaintes de l'intéressé et de poser les diagnostics). En particulier, poser un diagnostic relève de la tâche exclusive des médecins. Il leur appartient aussi de décrire l'incidence de ou des atteintes à la santé constatées sur la capacité de travail. Leur compétence ne va cependant pas jusqu'à trancher définitivement cette question mais consiste à motiver aussi substantiellement que possible leur point de vue, qui constitue un élément important de l'appréciation juridique visant à évaluer quels travaux sont encore exigibles de l'assuré. Il revient en effet aux organes chargés de l'application du droit (soit à l'administration ou au tribunal en cas de litige) de procéder à l'appréciation définitive de la capacité de travail de l'intéressé (ATF 140 V 193 consid. 3.2; arrêt 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 7.1).  
On ajoutera que l'évaluation de la capacité de travail par un médecin psychiatre est soumise à un contrôle (libre) des organes chargés de l'application du droit à la lumière de l'ATF 141 V 281 (ATF 145 V 361 consid. 4.3), dont les principes ont ultérieurement été étendus à l'ensemble des troubles psychiques ou psychosomatiques (cf. ATF 143 V 409 et 418; ATF 145 V 215). 
 
4.3.  
 
4.3.1. Les premiers juges se sont prononcés sur les griefs que la recourante renouvelle à l'encontre de l'évaluation du caractère incapacitant de ses troubles obsessionnels compulsifs (TOC) par la doctoresse D.________. A cet égard, ils ont relevé que les TOC ne peuvent être considérés comme définitivement invalidants que dans un contexte de suivi TPPI (traitement psychiatrique-psychothérapeutique intégré) et d'arrêt de la consommation de l'alcool avec, malgré un traitement mis en place, la persistance des symptômes de même gravité. Pour l'instance précédente, contrairement à ce que voudrait en déduire la recourante, cette appréciation de l'experte ne permet pas de retenir que celle-ci n'aurait pas évalué la capacité de travail actuelle et concrète, mais seulement une capacité de travail hypothétique soumise à la condition du suivi d'un traitement médical approprié et d'un arrêt de la consommation d'alcool. Les juges cantonaux ont constaté que la recourante dispose de ressources suffisantes pour exercer une activité professionnelle adaptée qui se déroulerait dans un environnement bien plus favorable que son contexte familial; assorties d'un traitement psychiatrique, ses ressources existent concrètement indépendamment de la consommation d'alcool qui n'est pas incapacitante en tant que telle.  
 
4.3.2. Contrairement à l'opinion de la recourante, le rapport d'expertise de la doctoresse D.________ du 1er avril 2019 et son complément du 14 août 2019 ont valeur probante. L'experte y a notamment détaillé l'anamnèse de la recourante, retracé son contexte social et procédé à un examen clinique; elle a également analysé la personnalité de la recourante, ses capacités, ses ressources et ses difficultés, et s'est prononcée sur la cohérence et la plausibilité. La doctoresse D.________ n'a fait état d'aucun diagnostic ayant une incidence sur la capacité de travail. Sans incidence sur celle-ci, elle a diagnostiqué un trouble anxieux et dépressif mixte (F41.2) ainsi que des troubles obsessionnels compulsifs avec comportement compulsif (rituel obsessionnel au premier plan; F42.1). Pour l'experte, la consommation d'alcool visait à maîtriser le comportement compulsif et il ne s'agissait pas d'une addiction; la capacité de travail était entière dans une activité adaptée aux limitations de l'assurée.  
 
4.3.3. La recourante tente de substituer sa propre appréciation à celle des premiers juges qui ont suivi les conclusions de la doctoresse D.________, en exposant sa propre évaluation de la situation et en soutenant que son TOC est incapacitant. Elle présente simplement une vision des choses différente, ce qui ne suffit pas à invalider l'expertise psychiatrique en cause, respectivement démontrer que l'appréciation qu'en a faite la juridiction cantonale serait insoutenable. Son argumentation, qui consiste à mettre en cause la pertinence de l'avis de l'experte sur plusieurs éléments (atteintes à la santé, ressources mobilisables, cohérence, contexte social et personnalité), ne met toutefois pas en lumière d'erreurs ou de contradictions significatives susceptibles de jeter le doute sur les conclusions de la doctoresse D.________ ou de les infirmer, singulièrement dans la mesure où elles se rapportent aux ressources mobilisables.  
A cet égard, il n'est pas arbitraire de retenir que la recourante dispose de ressources suffisantes pour réintégrer le monde du travail, dès lors que l'experte a constaté différentes limitations - dûment prises en compte par la juridiction cantonale - qu'elle a reprises pour décrire l'environnement dans lequel l'assurée pouvait mettre à profit sa capacité entière de travail résiduelle, malgré la peur de la contamination entravant l'assurée dans ses capacités relationnelles. S'agissant de l'addiction alléguée à l'alcool, il n'est pas davantage insoutenable de suivre l'appréciation de la doctoresse D.________ qui exclut cette éventualité, puisque la recourante a elle-même admis qu'elle s'alcoolise pour obtenir un effet sédatif, c'est-à-dire "pour arrêter son cerveau". La recourante ne critique par ailleurs pas de manière circonstanciée les constatations des premiers juges selon lesquels l'experte a évalué la capacité de travail actuelle et concrète, en indiquant que les limitations mises en évidence pouvaient être améliorées par le traitement psychothérapeutique préconisé. Il en va de même en ce qui concerne les constatations cantonales sur les motifs expliquant l'absence de collaboration de la recourante au traitement médical. Il ne suffit pas de citer le suivi thérapeutique de l'assurée, alors que l'experte a retenu que celle-ci avait bénéficié d'un traitement jusqu'en octobre 2018, mais l'avait interrompu au jour de l'expertise (cf. aussi complément d'expertise du 14 août 2019). Dès lors, il n'apparaît aucunement arbitraire de déduire avec l'instance précédente, en se fondant sur l'expertise psychiatrique, que les effets des TOC peuvent être atténués voire surmontés à la condition de suivre un traitement psychiatrique approprié, au lieu de consommer de l'alcool. La seule mention des traitements prodigués par ses médecins-traitants, les docteurs E.________ puis F.________, ne suffit pas non plus à invalider les conclusions de l'experte. 
 
4.4. Vu ce qui précède, il n'y a pas lieu de s'écarter de l'appréciation de la juridiction cantonale qui aboutit à la confirmation du rejet de la nouvelle demande, faute d'invalidité ouvrant droit à des prestations. Le recours est infondé.  
 
5.  
La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 6 février 2023 
 
Au nom de la IIIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Parrino 
 
Le Greffier : Berthoud