Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
2P.334/2005 /fzc
Arrêt du 6 mars 2006
IIe Cour de droit public
Composition
MM. les Juges Merkli, Président,
Wurzburger et Meylan, Juge suppléant.
Greffier: M. de Mestral.
Parties
X.________,
recourant,
contre
Département de l'économie et de la santé du canton de Genève, rue de l'Hôtel-de-Ville 14, case postale 3984, 1211 Genève 3,
Tribunal administratif du canton de Genève, rue du Mont-Blanc 18, case postale 1956, 1211 Genève 1.
Objet
Art. 9 Cst. (amende, suspension de la validité du certificat de capacité),
recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal adminis-tratif du canton de Genève du 20 septembre 2005.
Faits:
A.
Par arrêté du 13 février 2003, le Département de justice, police et sécurité du canton de Genève (devenu le Département des institutions; ci-après: le département), dont relevait à l'époque la législation relative à la restauration, les débits de boissons et l'hébergement (compétence transférée depuis lors au Département de l'économie et de la santé), a autorisé X.________ à exploiter le café-restaurant à l'enseigne "Y.________", puis par arrêté du 12 avril 2004, le café-restaurant "Z.________". X.________ a engagé A.________, qui n'était pas titulaire d'un certificat de capacité, comme directeur du "Y.________". Dans le cadre de l'exploitation du "Z.________", il s'est attaché les services des précédents employés de l'établissement, soit B.________ et C.________, selon contrats de travail conclus oralement entre les parties.
Le 4 décembre 2004, du bruit provenant du "Z.________" dérangeait gravement le voisinage; des boissons alcooliques étaient servies à des personnes en état d'ébriété; le registre du personnel n'était pas tenu à jour et le responsable sur place n'était ni compétent, ni instruit de ses devoirs. Le même jour, les gendarmes ont dû intervenir en raison d'une bagarre qui avait éclaté devant l'établissement. A raison de ces faits, le Service des autorisations et patentes (ci-après: le service des autorisations) a, par décision du 7 mars 2005, infligé à X.________ une amende administrative de 800 francs.
Le 26 décembre 2004, un bruit excessif provenait du "Z.________"; le même jour, ainsi que le 9 janvier 2005, une animation musicale et dansante a été organisée sans autorisation. A raison de ces faits, le service des autorisations a, par décision du 28 février 2005, infligé à X.________ une amende administrative de 1'000 francs.
Le 19 février 2005, au "Z.________", une bagarre impliquant une quinzaine de personnes a éclaté sans que le personnel ne fasse appel à la police. La bagarre avait commencé entre un serveur pris de boisson et des clients également en état d'ébriété et s'était poursuivie à l'extérieur, engendrant des inconvénients graves pour le voisinage. A raison de ces faits, le service des autorisations a, par décision du 22 avril 2005, infligé à X.________ une amende administrative d'un montant de 1'500 francs.
Le 27 février 2005, une bagarre a eu lieu dans le "Z.________" au cours de laquelle un client a été blessé au visage par un autre consommateur armé d'un cutter; le remplaçant de X.________ n'a pas fait appel à la police. En outre, une animation musicale était à nouveau organisée sans autorisation et des boissons alcooliques servies à des personnes en état d'ébriété. Les responsables sur place n'étaient ni compétents ni instruits de leurs devoirs. A raison de ces faits, le département a, par décision du 27 avril 2005, infligé à X.________ une amende administrative d'un montant de 1'500 francs.
Le 20 mars 2005, deux personnes - qui n'avaient pas été engagées par X.________ - ont déployé une activité professionnelle au "Z.________", sans être au bénéfice d'une autorisation de travail. Ces faits sont constatés dans un rapport de gendarmerie du 26 avril 2005 dont il ressort que ce serait B.________ et C.________ qui s'occuperaient personnellement de la gestion de l'établissement et de l'engagement du personnel. De quatorze contrôles effectués dans cet établissement entre le 3 avril 2004 et le 5 janvier 2005 à différentes heures de la journée et de la soirée, il résulte que la présence de X.________ sur les lieux n'a été constatée qu'à trois reprises; il était remplacé par l'un des deux prénommés. Lors de dix-huit contrôles effectués dans l'établissement "Y.________" entre le 10 mars et la mi-mai 2005, la présence de X.________ sur les lieux n'a été constatée qu'une seule fois, alors que A.________ était systématiquement présent. A raison de ces faits, le département a, par décision du 4 juillet 2005, suspendu pour une durée de douze mois la validité du certificat de capacité de X.________ et lui a infligé une amende de 4'000 fr. pour avoir servi de prête-nom dans le cadre de l'exploitation des établissements "Z.________" et "Y.________".
B.
Entendu par le service des autorisations le 27 janvier 2005, X.________ avait notamment annoncé être en possession d'un certificat médical lui permettant de ne travailler qu'à 50%. X.________ a cessé l'exploitation du "Z.________" à compter du 11 avril 2005. Le 16 mai suivant, en raison de problèmes de santé, il a requis du service des autorisations, une autorisation d'exploiter à titre précaire en faveur de A.________.
C.
X.________ a, en date du 6 avril 2005, recouru au Tribunal administratif du canton de Genève contre les décisions du département des 28 février et 7 mars 2005; en date du 25 mai 2005 contre la décision du 22 avril 2005; en date du 1er juin 2005 contre la décision du 27 avril 2005; et en date du 4 août 2005 contre la décision du 4 juillet 2005.
Statuant en un seul arrêt, du 20 septembre 2005, le Tribunal administratif a déclaré irrecevable, comme tardif, le recours dirigé contre la décision du 27 avril 2005; il a partiellement admis les autres au motif que X.________ devait se voir infliger une sanction d'ensemble suite à un examen global de sa situation. Le Tribunal administratif a annulé les décisions des 28 février, 7 mars, 22 avril et 4 juillet 2005, infligé à X.________ une amende unique de 7'300 fr. et confirmé la suspension de la validité de son certificat de capacité pour une durée de douze mois.
D.
Agissant par la voie du recours de droit public, X.________ demande l'annulation de l'arrêt du 20 septembre 2005 du Tribunal administratif pour constatation arbitraire des faits dans le cadre de l'application des règles cantonales genevoises concernant la délivrance, le maintien et la suspension d'une autorisation d'exploiter.
Sans formuler d'observations, le Tribunal administratif déclare persister dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le département conclut au rejet du recours.
Le 20 février 2006, le recourant a fait parvenir céans un mémoire de réplique et deux pièces nouvelles.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 131 I 57 consid. 1 p. 59, 145 consid. 2 p. 147, 153 consid. 1 p. 156, 266 consid. 2 p. 267; 131 II 58 consid. 1 p. 60, 137 consid. 1 p. 140, 352 consid. 1 p. 353, 361 consid. 1 p. 364, 571 consid. 1 p. 573; 131 IV 142 consid. 1 p. 143; 130 I 312 consid. 1 p. 317 et la jurisprudence citée).
1.1 Le présent recours est dirigé contre une décision fondée exclusivement sur le droit public cantonal et prise en dernière instance cantonale. En tant que destinataire de la décision attaquée, le recourant a qualité pour agir.
Le recourant a fait parvenir céans un mémoire de réplique. Comme il n'y a été ni invité, ni autorisé, cette écriture est irrecevable et doit être retranchée du dossier.
1.2 Le recours de droit public n'est recevable que contre une décision prise en dernière instance cantonale. Il résulte de cette règle que des moyens de fait ou de droit qui n'ont pas été soumis à l'autorité de dernière instance cantonale ne peuvent, en principe, être soulevés devant le Tribunal fédéral.
Lorsque le recours est formé pour arbitraire, cette solution se déduit en outre de cette considération qu'une autorité ne saurait encourir ce grief pour n'avoir pas tenu compte dans sa décision d'éléments qui ne lui avaient précisément pas été soumis.
Il y a donc lieu de retrancher du dossier les pièces produites pour la première fois céans avec le mémoire de réplique, au demeurant hors du délai de recours.
1.3 En vertu de l'art. 90 al. 1 lettre b OJ, l'acte de recours doit, à peine d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés et préciser en quoi consiste la violation. Lorsqu'il est saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas à vérifier de lui-même si l'arrêt entrepris est en tous points conforme au droit et à l'équité. Il n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours. Le recourant ne saurait se contenter de soulever de vagues griefs ou de renvoyer aux actes cantonaux (ATF 130 I 258 consid. 1.3 p. 261, 26 consid. 2.1 p. 31; 129 III 626 consid. 4 p. 629; 129 I 113 consid. 2.1 p. 120, 185 consid. 1.6 p. 189; 125 I 71 consid. 1c p. 76; 115 Ia 27 consid. 4a p. 30; 114 Ia 317 consid. 2b p. 318). En outre, dans un recours pour arbitraire fondé sur l'art. 9 Cst., l'intéressé ne peut se contenter de critiquer l'arrêt attaqué comme il le ferait dans une procédure d'appel où l'autorité de recours peut revoir librement l'application du droit. Il doit préciser en quoi cet arrêt serait arbitraire, ne reposerait sur aucun motif sérieux et objectif, apparaîtrait insoutenable ou heurterait gravement le sens de la justice (ATF 128 I 295 consid. 7a p. 312; 125 I 492 consid. 1b p. 495 et la jurisprudence citée; notamment: ATF 110 Ia 1 consid. 2a p. 3/4).
Il est douteux que le présent recours satisfasse à ces exigences. La question souffre cependant de demeurer indécise, vu le sort qui, de toute manière, doit être réservé à ce recours.
2.
2.1 Le recourant se plaint exclusivement d'une violation de l'art. 9 Cst. Il reproche au Tribunal administratif de n'avoir pas tenu compte de son incapacité de travail qu'il aurait alléguée et prouvée; il en résulterait une constatation arbitraire des faits de la cause.
Le Tribunal administratif ne pourrait cependant se voir reprocher une constatation arbitraire des faits de la cause que s'il avait, contre toute évidence, nié la réalité de ladite incapacité de travail - ce que le recourant lui-même ne prétend pas - ou si ce fait lui avait échappé - ce qui n'est pas davantage le cas. L'état de fait de l'arrêt déféré mentionne l'allusion faite par le recourant lors de son audition du 27 janvier 2005 à une incapacité de travail de 50%. Le Tribunal administratif signale aussi les problèmes de santé invoqués par le recourant à l'appui de sa requête du 16 mai 2005 au service des autorisations pour obtenir une autorisation d'exploiter à titre précaire en faveur de A.________.
2.2 En réalité, le grief tel qu'il est articulé paraît relever plutôt de la problématique du droit d'être entendu, droit que le Tribunal administratif aurait violé en ne tenant pas compte d'un fait régulièrement allégué et prouvé.
Entendu de la sorte, le grief est manifestement mal fondé, dans la mesure où il n'est pas déjà irrecevable faute de motivation suffisante. Le Tribunal administratif ne saurait en effet se voir reprocher à ce titre de n'avoir pas tenu compte de l'incapacité de travail du recourant qu'autant que ce fait revêtait un caractère pertinent, qu'autant, en d'autres termes, qu'il était de nature à influer sur l'issue de la cause.
Tel n'est cependant pas le cas. Le recourant perd en effet du vue que son incapacité de travail ne le dispensait nullement d'accomplir les obligations qui lui incombaient en sa qualité de seul exploitant autorisé des deux établissements en question et de seul titulaire d'un certificat de capacité: à savoir notamment, d'en assurer la bonne marche en désignant, s'il était empêché d'agir personnellement, des remplaçants possédant les compétences nécessaires et dûment instruits de leurs devoirs (art. 21 et 22 de la loi genevoise du 17 décembre 1987 sur la restauration, le débit de boissons et l'hébergement; LRDBH/GE, RSGE I 2 21), ce qui n'a manifestement pas été le cas. Son incapacité de travail ne pouvait donc en aucune manière excuser les graves désordres sanctionnés par l'amende administrative dont il a fait l'objet, ni justifier qu'il en soit tenu compte dans la fixation de son montant.
Cette incapacité de travail ne déliait pas d'avantage le recourant de l'interdiction légale du prête-nom. Or, le recourant ne démontre nullement que les éléments de fait qui ont conduit le Tribunal administratif à retenir cette infraction comme consommée ne pouvait s'expliquer que par l'empêchement où il se trouvait lui-même du fait de ses problèmes de santé. En d'autres termes, le recourant ne démontre nullement que la prise en compte de cette incapacité de travail aurait dû conduire le Tribunal administratif, à peine de verser dans l'arbitraire, à l'exonérer du grief d'avoir enfreint cette interdiction.
3.
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Manifestement mal fondé dans cette même mesure, il doit être traité selon la procédure simplifiée de l'art. 36a OJ. Succombant, le recourant doit supporter un émolument judiciaire ( art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ ). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens (art. 159 al. 1 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant, au Département de l'économie et de la santé et au Tribunal administratif du canton de Genève.
Lausanne, le 6 mars 2006
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier: