Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
7B_6/2024
Arrêt du 6 mai 2024
IIe Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Abrecht, Président,
Koch, Hurni, Kölz et Hofmann,
Greffière : Mme Kropf.
Participants à la procédure
Ministère public de l'État de Fribourg, case postale 1638, 1701 Fribourg,
recourant,
contre
A.________,
représenté par Me Christian Delaloye, avocat,
intimé.
Objet
Procédure pénale; retranchement de pièces du dossier,
recours contre l'arrêt de la Chambre pénale du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg du 30 novembre 2023 (502 2023 199+200).
Faits :
A.
A.a. A.________ fait l'objet d'une instruction pénale en Suisse pour crime contre la loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants et les substances psychotropes (LStup; RS 812.121) et pour blanchiment d'argent. Il lui est notamment reproché d'avoir dirigé depuis l'étranger un réseau de stupéfiants en Suisse.
Le prévenu a été arrêté en Espagne, puis extradé vers la Suisse où il a été placé en détention avant jugement.
A.b. L'enquête a débuté en juin 2020 et le Ministère public du canton de Fribourg (ci-après : le Ministère public) a ordonné, le 23 juin 2020, des "recherches secrètes", lesquelles ont fait l'objet d'un rapport d'enquête déposé le 14 janvier 2022. Dans ce cadre, la police a eu des contacts par messages avec un inconnu se trouvant vraisemblablement à l'étranger pour des achats contrôlés de stupéfiants en Suisse.
Ledit étranger désirant garder contact avec l'un des policiers, celui-ci a été remplacé par un agent infiltré. Une "investigation secrète" a alors été ordonnée par le Ministère public, puis autorisée par le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : le TMC; cf. ses décisions des 30 juillet, 20 août, 15 septembre 2020, 21 janvier et 27 juillet 2021). Un rapport d'enquête compilant les échanges entre les agents infiltrés et le prévenu a été déposé le 19 janvier 2022; il a été complété le 29 juin 2022 sur requête de la défense.
A.c. Par requête du 3 juillet 2023, complétée le 14 août 2023, le prévenu a sollicité le retranchement des échanges avec les agents infiltrés zzz, yyy et www, à l'exclusion de ceux intervenus entre le 29 septembre et le 1er octobre 2020, ainsi qu'entre le 4 et le 19 mai 2021. Il a invoqué une violation du principe de la territorialité, dès lors qu'il ne se trouvait pas en Suisse lors de ces échanges et qu'aucune commission rogatoire ne couvrait ces mesures d'instruction.
Le Ministère public a rejeté cette requête par ordonnance du 21 août 2023.
B.
Par arrêt du 30 novembre 2023, la Chambre pénale du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg (ci-après : la Chambre pénale) a partiellement admis le recours formé par A.________ contre cette ordonnance, qu'elle a annulée dans la mesure où le Ministère public refusait de retirer du dossier les échanges entre le prévenu et les agents infiltrés zzz, yyy et www. Elle a renvoyé la cause au Ministère public pour qu'il opère un tri parmi les résultats des investigations secrètes en examinant les pays qui avaient été touchés par les mesures litigieuses lorsque le prévenu ne se trouvait pas en Suisse au moment de leur récolte et le droit applicable en fonction du pays en cause; pour qu'il examine si certains résultats obtenus ont été couverts par une demande d'entraide et rende une décision précisant quels résultats des investigations secrètes seraient, selon lui, exploitables et sur quelle base légale; et pour qu'il ordonne, notamment en l'absence de traité international autorisant la mesure d'investigation secrète sans autre formalité, la destruction immédiate des éléments recueillis illicitement, ainsi que de ceux pour lesquels il n'arriverait pas à identifier le pays dans lequel se trouvait le prévenu au moment de leur récolte (cf. consid. 2.4 in fine p. 8).
C.
Par acte du 29 décembre 2023, le Ministère public interjette un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet arrêt, en concluant principalement à sa réforme en ce sens que les échanges entre le prévenu et les agents infiltrés zzz, yyy et www demeurent exploitables et soient maintenus au dossier. À titre subsidiaire, il demande l'annulation de l'arrêt attaqué et le renvoi de la cause à l'autorité précédente.
Invitée à se déterminer, la cour cantonale a renoncé à formuler des observations. A.________ (ci-après : l'intimé) a conclu à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet; il a également demandé l'octroi de l'assistance judiciaire. Le 31 janvier 2024, respectivement le 9 février 2024, le recourant et l'intimé ont renoncé à déposer des déterminations complémentaires.
Considérant en droit :
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 149 IV 9 consid. 2).
1.1. Dans le cadre d'un recours en matière pénale, le Tribunal fédéral contrôle uniquement l'application correcte par l'autorité cantonale du droit fédéral en vigueur au moment où celle-ci a statué (ATF 145 IV 137 consid. 2.6 ss; 129 IV 49 consid. 5.3), respectivement à la date de la décision de première instance (cf. art. 453 al. 1 CPP; ATF 137 IV 145 consid. 1.1; 137 IV 219 consid. 1.1). L'ordonnance du recourant à l'origine de la présente cause ayant été rendue le 21 août 2023 et l'arrêt attaqué le 30 novembre 2023, il n'y a donc pas lieu en l'espèce de prendre en compte les modifications du Code de procédure pénale entrées en vigueur au 1er janvier 2024 (RO 2023 468; arrêts 7B_234/2024 du 14 mars 2024 consid. 1.3; 7B_1009/2023 du 6 février 2024 consid. 1.2).
1.2. L'arrêt attaqué a été rendu au cours d'une procédure pénale par une autorité statuant en tant que dernière instance cantonale (art. 80 LTF). Il est donc susceptible d'un recours en matière pénale au sens des art. 78 ss LTF.
1.3. Le recours est signé par le Procureur général et le représentant du Ministère public fribourgeois en charge du dossier de la cause, lesquels disposent tous les deux de la qualité pour recourir au Tribunal fédéral (cf. art. 81 al. 1 let. b ch. 3 LTF, 66 al. 1 de la loi fribourgeoise du 31 mai 2010 sur la justice [LJ; RS/FR 130.1], 2 al. 3 et 6 al. 2 du règlement fribourgeois du 14 mars 2011 du Ministère public relatif à son organisation et à son fonctionnement [ROF; RS/FR 132.11]; ATF 142 IV 196 consid. 1.3, 1.5 et 1.6; arrêt 6B_138/2023 du 18 octobre 2023 consid. 1.2).
1.4. L'arrêt attaqué, relatif à l'exploitation de moyens de preuve, ne met pas un terme à la procédure pénale menée par le recourant contre l'intimé.
Vu son caractère incident, le recours en matière pénale contre une telle décision n'est recevable qu'en présence d'un risque de préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, l'hypothèse visée à l'art. 93 al. 1 let. b LTF n'entrant pas en considération (ATF 144 IV 127 consid. 1.3). Le préjudice irréparable au sens de la disposition susmentionnée se rapporte à un dommage de nature juridique qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision favorable au recourant (ATF 148 IV 155 consid. 1.1; 144 IV 127 consid. 1.3.1).
1.4.1. Une décision de renvoi n'est en général pas susceptible de causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (ATF 143 IV 175 consid. 2.3; arrêt 7B_171/2023 du 6 novembre 2023 consid. 3.2 et les arrêts cités).
Il en va toutefois autrement lorsque l'autorité inférieure appelée à statuer à nouveau est contrainte de rendre une décision qu'elle juge contraire au droit sans pouvoir ensuite la remettre en cause devant l'autorité de recours, respectivement devant le Tribunal fédéral (AT 144 IV 377 consid. 1; 142 V 26 consid. 1.2; arrêts 6B_931/2022 du 23 août 2023 consid. 1.1; 7B_14/2022 du 15 août 2023 consid. 3.1.2; 6B_215/2022 du 25 août 2022 consid. 1.3.3 et les arrêts cités).
1.4.2. Les décisions relatives à l'administration ou à l'exploitation des preuves (cf. art. 140 et 141 CPP ) ne sont en principe pas de nature à entraîner un dommage juridique irréparable (ATF 144 IV 127 consid. 1.3.1; 144 IV 90 consid. 1.1.3; 143 IV 387 consid. 4.4; arrêts 7B_253/2023 du 31 août 2023 consid. 5; 7B_44/2023 du 24 août 2023 consid. 1.2.2; 7B_1/2023 du 18 juillet 2023 consid. 1.1).
En cas de retrait de pièces du dossier, le Tribunal fédéral a cependant admis - même en l'absence d'un risque de perte définitive des moyens de preuve litigieux (arrêt 1B_510/2019 du 14 janvier 2020 consid. 2.2) - l'existence d'un risque de préjudice irréparable pour le ministère public lorsque, sans l'élément de preuve en cause, l'accusation est entravée au point de rendre impossible ou à tout le moins particulièrement difficile la continuation de la procédure pénale (ATF 141 IV 284 consid. 2.4; arrêts 7B_120/2022 du 5 octobre 2023 consid. 1.1; 1B_391/2021 du 4 février 2022 consid. 1.2; 1B_282/2021 du 23 novembre 2021 consid. 2.1; 1B_444/2020 du 17 septembre 2020 consid. 2.2; 1B_117/2016 du 21 mars 2017 consid. 1.4).
Dans l'hypothèse inverse - soit lorsque le maintien au dossier de moyens de preuve prétendument illicites est contesté -, un risque de préjudice irréparable est admis, à titre d'exception, lorsque la loi prévoit expressément la restitution immédiate, respectivement la destruction immédiate, des preuves illicites (cf. notamment l'ancien art. 248 [RO 2010 1881], art. 271 al. 3, 277 et 289 al. 6 CPP). Il en va de même quand, en vertu de la loi ou de circonstances spécifiques liées au cas d'espèce, le caractère illicite des moyens de preuve s'impose d'emblée. De telles circonstances ne peuvent être admises que dans la situation où l'intéressé fait valoir un intérêt juridiquement protégé particulièrement important à un constat immédiat du caractère inexploitable de la preuve (ATF 144 IV 127 consid. 1.3.1; arrêts 7B_981/2023 du 29 janvier 2024 consid. 1.3; 7B_815/2023 du 18 décembre 2023 consid. 1.1; 6B_267/2022 du 1er février 2023 consid. 2.4).
1.4.3. Il appartient dans tous les cas au recourant d'alléguer et de démontrer la réalisation des conditions d'application de l'art. 93 al. 1 let. a LTF pour que son recours au Tribunal fédéral soit recevable (cf. art. 42 al. 2 LTF; ATF 148 IV 155 consid. 1.1; 141 IV 284 consid. 2.3 et 2.4: arrêt 1B_391/2021 du 4 février 2022 consid. 1.2).
1.4.4. En l'espèce, le renvoi de la cause impose au recourant de procéder à un tri des éléments résultant de l'investigation secrète, puis de détruire ceux qui auraient été récoltés alors que l'intimé se trouvait à l'étranger et qui n'auraient pas été autorisés par le biais de l'entraide internationale ou ne le seraient pas, sans autre formalité, en vertu d'un traité international. Or le recourant reconnaît d'ores et déjà n'avoir pas déposé de demande d'entraide en lien avec l'investigation secrète (cf. ch. 3 p. 2 du recours) et ne se prévaut pas dans le cadre de la présente cause, y compris sur le fond, de disposition d'un accord international permettant la mesure litigieuse. Dans une telle configuration, le recourant ne paraît donc pas avoir d'autre choix que d'ordonner la destruction d'éléments de preuve dont il soutient pourtant qu'ils auraient été obtenus de manière licite. En tant qu'autorité désignée pour procéder à ces mesures, il ne pourra pas non plus s'y opposer en formant un recours contre son propre prononcé. L'arrêt de renvoi attaqué, qui ne semble ainsi laisser aucune marge de manoeuvre au recourant, est donc susceptible de lui causer un préjudice qu'aucune décision ultérieure ne serait à même de réparer.
Cette conclusion s'impose d'autant plus en l'occurrence où l'autorité précédente a ordonné la destruction immédiate des pièces qui auraient été récoltées illicitement en application de l'art. 289 al. 6 CPP. Le recourant ne pourra ainsi plus soumettre ces éléments à un nouvel examen de leur licéité devant le juge du fond et requérir leur réintégration au dossier (a contrario art. 141 al. 5 CPP; pour des exemples, arrêts 1B_444/2020 du 17 septembre 2020 consid. 2.3 et 1B_510/2019 du 14 janvier 2020 consid. 2.2).
1.5. Pour le surplus, les autres conditions de recevabilité étant réunies - dont le dépôt du recours en temps utile (cf. 46 al. 1 let. c et 100 al. 1 LTF) -, il y a lieu d'entrer en matière.
2.
2.1. Invoquant les art. 141 - dans sa teneur jusqu'au 31 décembre 2023 (RO 2010 1881) -, 285a, 286, 289 CPP et 30 EIMP (RS 351.1), le recourant reproche à l'autorité précédente d'avoir considéré que l'investigation secrète mise oeuvre en Suisse aurait eu des effets directs à l'étranger en violation du principe de la territorialité. Il soutient également que les éléments de preuve proviendraient des analyses des téléphones de l'intimé et des agents infiltrés; cela ne serait donc pas le résultat de l'investigation secrète ou des preuves dérivées de celle-ci.
2.2.
2.2.1. Selon l'art. 140 CPP, les moyens de contrainte, le recours à la force, les menaces, les promesses, la tromperie et les moyens susceptibles de restreindre les facultés intellectuelles ou le libre arbitre sont interdits dans l'administration des preuves (al. 1); ces méthodes sont interdites même si la personne concernée a consenti à leur mise en oeuvre (al. 2).
Les preuves administrées en violation de l'art. 140 CPP ne sont en aucun cas exploitables; il en va de même lorsque le présent code dispose qu'une preuve n'est pas exploitable (art. 141 al. 1 CPP). Les preuves qui ont été administrées d'une manière illicite ou en violation de règles de validité par les autorités pénales ne sont pas exploitables, à moins que leur exploitation soit indispensable pour élucider des infractions graves (art. 141 al. 2 CPP). Les preuves qui ont été administrées en violation de prescriptions d'ordre sont exploitables (art. 141 al. 3 CPP). À teneur de l'ancien art. 141 al. 4 CPP (RO 2010 1881), relatif aux preuves dites dérivées, si un moyen de preuve est recueilli grâce à une preuve non exploitable au sens de l'art. 141 al. 2 CPP - art. 141 al. 1 et 2 CPP selon la version de l'art. 141 al. 4 CPP en vigueur dès le 1er janvier 2024 (RO 2023 468) -, il n'est pas exploitable lorsqu'il n'aurait pas pu être recueilli sans l'administration de la première preuve. Les pièces relatives aux moyens de preuves non exploitables doivent être retirées du dossier pénal, conservées à part jusqu'à la clôture définitive de la procédure, puis détruites (art. 141 al. 5 CPP).
2.2.2. Les circonstances du cas d'espèce sont déterminantes pour l'examen de l'exploitabilité d'une preuve dite dérivée au sens de l'art. 141 al. 4 CPP (arrêt 7B_257/2022 du 4 décembre 2023 consid. 3.2.4 et les arrêts cités). Dans la mesure où l'illicéité de cette preuve doit être retenue déjà au stade de l'instruction, ce moyen de preuve doit être retiré du dossier en application de l'art. 141 al. 5 CPP (arrêt 1B_93/2021 du 19 juillet 2021 consid. 4).
2.3. À teneur de l'art. 285a CPP, il y a "investigation secrète" ("verdeckte Ermittlung", "inchiesta mascherata"; également désignée, notamment dans le contexte international, comme "enquête discrète" ou "operazioni di infiltrazione") lorsque des membres d'un corps de police ou des personnes engagées à titre provisoire pour accomplir des tâches de police nouent de manière trompeuse, sous le couvert d'une fausse identité attestée par un titre (identité d'emprunt), des contacts avec des individus dans l'intention d'instaurer avec eux une relation de confiance et d'infiltrer un milieu criminel afin d'élucider des infractions particulièrement graves.
2.3.1. Vu la systématique de la loi, les art. 285a ss CPP sont des mesures de contrainte. Ces dispositions se trouvent en effet à la section 5 du chapitre 8 relatif aux mesures de surveillance secrètes, lequel se situe au titre 5 du Code de procédure pénale consacré aux mesures de contrainte.
Contrairement aux "recherches secrètes" des art. 298a ss CPP ("verdeckte Fahnung", "indagine in incognito"), l'investigation secrète requiert une forme qualifiée de tromperie via l'usage de titres. Elle s'étend en outre habituellement sur une plus longue durée, généralement sur plusieurs mois. Elle a pour but de permettre l'infiltration du milieu criminel et l'instauration d'une véritable relation de confiance avec la personne visée; enfin, elle doit être autorisée par le tribunal des mesures de contrainte (cf. art. 289 CPP; ATF 148 IV 82 consid. 5.1.3; 143 IV 27 consid. 2.4).
Au regard notamment de ces caractéristiques - dont l'usage de titres trompeurs et les contacts en découlant -, une investigation secrète se distingue aussi de l' "observation" au sens des art. 282 s. CPP ("Observation", "osservazione di persone e cose"). Lors de ce type d'activité, les policiers n'ont aucun contact direct avec la personne faisant l'objet de la surveillance et n'agissent que dans l'espace public (ATF 148 IV 82 consid. 5.1.2); l'observation peut d'ailleurs être ordonnée par la police pour un mois et ne présuppose pour être prolongée que l'autorisation du ministère public (cf. art. 282 al. 2 CPP).
2.3.2. S'agissant de l'étendue de l'intervention de l'agent infiltré, le ministère public donne les instructions nécessaires à la personne de contact et à l'agent infiltré avant le début de la mission (art. 290 CPP). Ce dernier accomplit sa mission en se conformant aux instructions et rend compte de manière complète et régulière à la personne de contact ( art. 292 al. 1 et 2 CPP ).
Selon l'art. 293 al. 1 CPP, il est interdit à un agent infiltré d'encourager un tiers à commettre des infractions de manière générale ou de l'inciter à commettre des infractions plus graves et son intervention doit se limiter à la concrétisation d'une décision existante de passer à l'acte. L'activité d'un agent infiltré ne doit avoir qu'une incidence mineure sur la décision d'un tiers de commettre une infraction concrète (art. 293 al. 2 CPP). Si cela est nécessaire pour préparer le marché principal, l'agent infiltré est habilité à effectuer des achats probatoires et à démontrer sa capacité économique (art. 293 al. 3 CPP). Si l'agent infiltré a dépassé les limites de la mission autorisée, le juge en tient compte de manière appropriée lors de la fixation de la peine; il peut également libérer de toute peine la personne ainsi influencée (art. 293 al. 4 CPP).
Ce dernier alinéa peut s'appliquer lorsque l'agent est infiltré dans un milieu criminel - actif notamment dans un trafic de stupéfiants - et que, dans ce cadre, il influence la décision de la personne visée par la mesure de passer à l'acte afin de découvrir des infractions pas encore réalisées (ATF 148 IV 205 consid. 2.8.2). L'investigation secrète - qui viole en soi l'interdiction de la tromperie prévue à l'art. 140 al. 1 CPP - ne signifie en effet pas que les autres garanties de cet article (soit l'interdiction des moyens de contrainte, de l'usage de la force, des menaces et des moyens susceptibles d'altérer les facultés intellectuelles ou le libre arbitre) perdraient leur validité (ATF 148 IV 205 consid. 2.8.8).
2.3.3. Lors d'investigation secrète, la mission d'un agent infiltré est soumise à l'autorisation du tribunal des mesures de contrainte (art. 289 al. 1 à 5 CPP, alinéas relatifs à la procédure et aux conditions d'autorisation). Le ministère public met fin sans délai à la mission si l'autorisation n'est pas accordée ou si aucune autorisation n'a été demandée (art. 289 al. 6 1re phrase CPP). Tous les documents et enregistrements établis pendant l'investigation doivent être immédiatement détruits (art. 289 al. 6 2e phrase CPP). Les informations recueillies dans le cadre de l'investigation secrète ne peuvent pas être exploitées (art. 289 al. 6 3e phrase CPP).
Si la nature de la mesure implique une certaine tromperie - laquelle doit être exercée dans le respect de la mission (cf. art. 293 CPP; consid. 2.3.2 ci-dessus) -, il s'agit pour le surplus d'un cas d'inexploitabilité absolue (cf. art. 141 al. 1 2e phrase CPP; ATF 148 IV 205 consid. 2.8.8 et 2.9; JOSITSCH/SCHMID, Praxiskommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 4e éd. 2023, n° 17 ad art. 289 CPP; TANJA KNODEL, in Basler Kommentar, Strafprozessordnung/Jugendstrafprozessordnung, 3e éd. 2023, nos 26 et 28 ad art. 289 CPP; SABINE GLESS, in Basler Kommentar, Strafprozessordnung/Jugendstrafprozessordnung, 3e éd. 2023, nos 48 et 52f ad art. 141 CPP; JEANNERET/GAUTIER/RYSER, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd. 2019, n° 23 ad art. 289 CPP).
2.4.
2.4.1. En vertu du principe de la territorialité, un État ne peut en principe exercer les prérogatives liées à sa souveraineté - dont le pouvoir répressif - qu'à l'intérieur de son propre territoire (ATF 146 IV 36 consid. 2.2 p. 41; 143 IV 21 consid. 3.2; arrêts 7B_273/2023 du 11 avril 2024 consid. 2; 7B_159/2022 du 11 janvier 2024 consid. 5.1 destiné à la publication; 7B_120/2022 du 5 octobre 2023 consid. 2.4.2.1). Les États se doivent ainsi de respecter réciproquement leur souveraineté (ATF 146 IV 36 consid. 2.2 p. 41 et les arrêts cités; arrêt 7B_273/2023 du 11 avril 2024 consid. 2; LAURENT MOREILLON, Petit commentaire, Loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale, 2024, n° 3 ad de la partie générale).
Eu égard à ces principes, un État n'est pas habilité à effectuer des mesures d'instruction et de poursuite pénale sur le territoire d'un autre État sans le consentement de ce dernier. Les actes de puissance publique accomplis par un État ou par ses agents sur le territoire d'un autre État sans un tel accord sont inadmissibles et constituent une atteinte à la souveraineté et à l'intégrité territoriale de l'État concerné, ce qui est une violation du droit international public. Une violation du principe de la territorialité peut aussi intervenir lorsque l'État poursuivant se procure par des moyens jugés objectivement déloyaux des éléments de preuve ou des biens frappés de mesures conservatoires, notamment en violation des règles régissant l'entraide internationale en matière pénale. Il n'est pas nécessaire que l'autorité ait agi sur le sol étranger pour porter atteinte à la souveraineté de l'État étranger; il suffit que ses actes aient des effets sur le territoire de cet État (ATF 146 IV 36 consid. 2.2 p. 41 ss et les nombreuses références citées; arrêts 7B_273/2023 du 11 avril 2024 consid. 2; 7B_120/2022 du 5 octobre 2023 consid. 2.4.2.1). À l'inverse, l'acte officiel accompli sur un territoire étranger mais ne développant aucun effet sur ce territoire ne porte pas atteinte à la souveraineté étrangère (NICOLAS BOTTINELLI, in Commentaire romand, Code pénal II, 2017, n° 19 ad art. 299 CP).
2.4.2. Par actes officiels, il faut entendre les actes qui, par leur nature, relèvent de la compétence d'une autorité ou d'un fonctionnaire dans l'État étranger; il faut en outre que les actes en cause soient entrepris dans l'intérêt de la Suisse (ESTHER OMLIN, in Basler Kommentar, Strafrecht, 4e éd. 2019, n° 12 ad art. 299 CP; BOTTINELLI, op. cit., n° 8 ad art. 299 CP). Un acte peut être considéré comme officiel même s'il n'est pas assorti de l'usage ou de la menace de la contrainte (BOTTINELLI, op. cit., n° 8 ad art. 299 CP; voir également ATF 148 IV 66 consid. 1.4.1 et 1.4.2; MARKUS HUSMANN, in Basler Kommentar, Strafrecht, 4e éd. 2019, nos 21 ss ad art. 271 CP).
Il faut de plus que l'atteinte à la souveraineté étrangère ait une portée d'une certaine importance; de simples conversations téléphoniques avec des personnes appelées à donner des renseignements sises à l'étranger ne constituent pas une telle atteinte tant qu'elles sont effectuées par les personnes entendues sur une base volontaire (OMLIN, op. cit., n° 14 ad art. 299 CP). Pour qu'une partie puisse être considérée comme contrainte par l'autorité suisse à récolter des preuves à l'étranger, il faut qu'elle ait été invitée à procéder à la récolte de ces moyens de preuve sous la menace de sanctions; de simples conséquences procédurales liées au refus de produire la preuve ne constituent pas de telles sanctions (BOTTINELLI, op. cit., n° 16 ad art. 299 CP). Une invitation faite à une partie ou à un participant à la procédure de se rendre en Suisse ou de prendre contact avec les autorités suisses peut être considérée comme une simple communication, quel que soit le mode de transmission, tant qu'elle ne contient aucune menace de contrainte, respectivement tant que l'absence de toute réponse ou le refus de se rendre en Suisse n'entraîne pas non plus de conséquence juridique pour la personne concernée (BOTTINELLI, op. cit., n° 33 ad art. 299 CP; voir en matière de notification, MARIA LUDWICZAK GLASSEY, Petit commentaire, Loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale, 2024, n° 3 ad art. 64 EIMP).
Pour déterminer si un acte officiel - qui n'a physiquement pas été effectué sur le territoire étranger (soit en particulier lors de connexions numériques) - viole le principe de la territorialité, il faudrait, selon HUSMANN, examiner si un accès vers l'étranger a été mis en place dans le but d'exécuter l'acte officiel ou si cet accès - ou système - était préexistant, indépendamment d'un tel objectif (cf. l'utilisation des possibilités usuelles de connexion en différents lieux ou pays offertes par le site en cause relevées dans l'ATF 146 IV 36 consid. 2.3 p. 46; MARKUS HUSMANN, BGer 1B_164/2019 [zur Publikation vorgesehen] : Tragweite des Territorialitätsprinzips hinsichtlich der Verwendung von Aufzeichnungen, die von geheimen, in der Schweiz bewilligten technischen Überwachungsmassnahmen stammen, in AJP/PJA 3/2020 p. 364 ss [ci-après : AJP/PJA 3/2020], ad E/1 p. 371).
2.4.3. À titre d'exemples d'actes officiels devant respecter le principe de la territorialité et la souveraineté d'un autre État, entrent notamment en considération les mesures de contrainte, dont font partie la surveillance de la correspondance par poste et des télécommunications, l'obtention de données auprès d'un fournisseur de services Internet domicilié à l'étranger, les mesures techniques de surveillance comme les écoutes, l'observation transfrontalière et l'investigation secrète (ATF 146 IV 36 consid. 2.2 p. 42 s.; arrêt 7B_120/2022 du 5 octobre 2023 consid. 2.4.2.1; LUDWICZAK GLASSEY, op. cit., n° 2 ad art. 64 EIMP; DUPUIS ET AL., Petit commentaire, Code pénal, 2e éd. 2017, n° 6 ad art. 271 CP; ROBERT ZIMMERMANN, La coopération judiciaire internationale en matière pénale, 5e éd. 2019, n. 287 p. 300 et n. 434 p. 473; STEFAN HEIMGARTNER, in Basler Kommentar, Internationales Strafrecht, 2015, n° 9 ad art. 64 EIMP). En particulier et vu leur nature, l'observation transfrontalière et l'investigation secrète peuvent porter atteinte au principe de la territorialité et à la souveraineté puisqu'elles impliquent des actions des agents d'un État sur le territoire d'un autre État (ATF 146 IV 36 consid. 2.2 p. 43). En l'absence de traité, constitue également un acte officiel la notification postale directe avec menace de sanction ou d'autres conséquences juridiques (OMLIN, op. cit., n° 14 ad art. 299 CP; BOTTINELLI, op. cit., nos 12 et 32 ad art. 299 CP).
2.4.4. Sous réserve des cas permettant la transmission - notamment anticipée - de moyens de preuve (cf. en particulier art. 67a et 80d bis EIMP ), une mesure de contrainte sur le territoire d'un autre État ne peut en règle générale être mise en oeuvre qu'en vertu du droit international (traité, accord bilatéral, droit international coutumier) ou, à défaut du consentement - en principe préalable - de l'État requis dans le respect des règles régissant l'entraide (ATF 146 IV 36 consid. 2.2 p. 45 et les arrêts cités; voir également ZIMMERMANN, op. cit., n. 285 p. 299).
La nécessité de l'existence d'un traité international a été en particulier confirmée par le Tribunal fédéral pour la mise en oeuvre d'une investigation secrète; en effet, compte tenu des moyens techniques modernes de communication, le contrôle des échanges entre l'agent infiltré (étranger) et l'autorité requérante (étrangère) qui l'a mandaté est impossible, ce qui ouvre une brèche importante dans le principe fondamental selon lequel des informations ne peuvent être transmises à l'État requérant qu'à la faveur d'une ordonnance de clôture (ATF 132 II 1 consid. 3.3, 3.4 et 3.5). ZIMMERMANN estime cependant que l'exigence posée par le Tribunal fédéral en lien avec la nécessité d'un traité est excessive et que la question devrait être examinée sous l'angle de la licéité de la mesure dans l'État requérant (cf., par analogie, art. 76 let. c EIMP) : si le droit étranger permet l'enquête discrète, celle-ci devrait aussi pouvoir être mise en oeuvre en Suisse; la solution du Tribunal fédéral dans l'arrêt précité constituerait également une entorse au principe de faveur (ZIMMERMANN, op. cit., n. 436 p. 475).
Lorsqu'une mesure de surveillance secrète par des moyens techniques a déjà été effectuée et qu'une demande d'entraide a posteriori n'entre pas en considération pour la valider, faute de pouvoir garantir la réciprocité (cf. art. 30 EIMP; voir cependant l'entrée en vigueur le 1er juillet 2021 de l'art. 80d bis EIMP [RO 2021 360; FF 2018 6469], lequel permet à présent, à certaines conditions, la transmission anticipée d'informations et de moyens de preuve), l'existence d'une disposition d'un traité présuppose aussi qu'aucune formalité préalable ne doive être respectée, d'une part, dans l'État requérant (demande ou annonce de la mesure avant sa mise en oeuvre) ou, d'autre part, dans l'État requis notamment en raison de son droit interne (procédure judiciaire - peut-être aussi antérieure à toute mise en oeuvre - d'autorisation). En l'absence de telles dispositions, les résultats des mesures de surveillance secrètes non autorisées doivent être immédiatement détruites (arrêt 1B_302/2020 du 15 février 2021 consid. 3.4.3 et les arrêts cités; voir également ATF 138 IV 169 consid. 3.1 relevant que les informations résultant d'une surveillance téléphonique opérée à l'étranger sans les autorisations requises par le droit du pays concerné sont absolument inexploitables).
2.5.
2.5.1. Selon l'art. 19 par. 1 du Deuxième protocole additionnel du 8 novembre 2001 à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale [RS 0.351.12; ci-après : PAII CEEJ]) - traité auquel tant la Suisse que l'Espagne sont parties -, la Partie requérante et la Partie requise peuvent convenir de s'entraider pour la réalisation d'enquêtes pénales menées par des agents intervenant en secret ou sous une identité fictive (enquêtes discrètes). Les autorités compétentes de la Partie requise décident dans chaque cas d'espèce de la réponse à donner à la demande, en tenant dûment compte de la loi et des procédures nationales, et les deux Parties conviennent, dans le respect de leur loi et de leurs procédures nationales, de la durée de l'enquête discrète, de ses modalités précises et du statut juridique des agents concernés (art. 19 par. 2 PAII CEEJ). Les enquêtes discrètes sont menées conformément à la loi et aux procédures nationales de la Partie sur le territoire de laquelle elles se déroulent et les Parties concernées coopèrent pour en assurer la préparation et la direction, et pour prendre des dispositions pour la sécurité des agents intervenant en secret ou sous une identité fictive (art. 19 par. 3 PAII CEEJ). Toute Partie, au moment de la signature ou au moment du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion, par déclaration adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, indiquera les autorités qu'elle désigne comme compétentes aux fins du paragraphe 2 de l'art. 19 PAII CEEJ, toute Partie, pouvant, par la suite, à tout moment et de la même manière, changer les termes de sa déclaration (art. 19 par. 4 PAII CCEJ).
Sauf pour ce qui a trait à la responsabilité pénale et civile, expressément réglementées aux art. 21 s. PAII CEEJ, l'engagement d'un agent infiltré sur le territoire étranger doit donc faire l'objet d'un accord entre l'État requis et l'État requérant et, pour ce faire, il faut se reporter au droit interne des deux États concernés; la décision sur la demande et son exécution sont en revanche prises conformément au droit de l'État requis (Office fédéral de la justice [ci-après : l'OFJ], L'entraide judiciaire internationale en matière pénale, Directives [ci-après : les Directives de l'OFJ], 9e éd. 2009, ch. 3.6.4 p. 70; https://www.rhf.admin.ch/rhf/fr/home/strafrecht/wegleitungen.html, consulté le 5 mars 2024, 15h18). Dans ce contexte, une demande d'assistance peut être déposée non seulement pour permettre à un agent infiltré d'agir sur le territoire de l'État requis, mais également pour pouvoir faire appel à un agent infiltré de l'État requis dans une enquête effectuée sur le territoire de l'État requérant; il pourrait même être imaginé que l'État requérant demande à l'État requis de mettre à sa disposition un agent infiltré pour une enquête menée sur son propre territoire (MOREILLON, op. cit., n° 159 ad de la partie générale). Selon les Directives de l'OFJ, les rapports de l'agent infiltré qui a reçu, sur la base d'une demande d'entraide, l'autorisation d'enquêter en Suisse, doivent également être adressés en copie à l'autorité suisse compétente pour l'exécution de la demande d'entraide (les Directives de l'OFJ, op. cit., ch. 3.6.4 p. 70).
2.5.2. L'Accord du 14 juin 1985 de Schengen - espace auquel appartient notamment l'Espagne (cf. https://european-union.europa.eu/principles-countries-history/country-profiles/spain_fr, consulté le 25 mars 2024, 15h39) - tend également à renforcer la coopération policière et judiciaire (MOREILLON, op. cit., n° 241 ad de la partie générale).
S'agissant de la coopération policière (cf. les 39 à 47 de la Convention d'application du 19 juin 1990 de l'Accord de Schengen [ci-après : CAAS], https://www.rhf.admin.ch/rhf/fr/home/strafrecht/
rechtsgrundlagen/multilateral/sdue.html, consulté le 25 mars 2024, 15h16), la CAAS permet en substance l'assistance aux fins de la prévention et de la recherche de faits punissables, pour autant que le droit national ne réserve pas la demande aux autorités judiciaires et que la demande ou son exécution n'implique pas l'application de mesures de contrainte par la partie contractante requise. L'art. 40 CAAS consacre l'observation policière et le droit de suite lorsqu'il s'agit, dans l'urgence, de traverser les frontières d'un État pour se rendre dans un autre État. Quant à l'art. 41 CAAS, il règle les situations de flagrant délit et de poursuite d'un pays à l'autre. Ces deux dispositions visent notamment les cas où les faits sont susceptibles d'être constitutifs d'un trafic de stupéfiants (MOREILLON, op. cit., nos 242 s. ad de la partie générale).
En ce qui concerne ensuite l'entraide judiciaire en matière pénale (cf. les art. 48 à 53 CAAS), la CAAS - qui complète la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 (CEEJ; RS 0.351.1) - consacre à son art. 49 le principe de l'entraide judiciaire accordée de façon la plus large possible, notamment dans les situations énumérées aux lettres a à f de cette disposition (MOREILLON, op. cit., nos 245 s. ad de la partie générale).
2.5.3. En matière de trafic de stupéfiants, la Suisse a également pris différents engagements au niveau international. Elle est ainsi notamment partie à la Convention unique sur les stupéfiants du 30 mars 1961 (RS 0.812.121.0; ci-après : la Convention unique), au Protocole du 25 mars 1972 portant amendement de la Convention unique (RS 0.812.121; ci-après : le Protocole; voir également RS 0.812.121.01), à la Convention des Nations Unies du 20 décembre 1988 contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes (RS 0.812.121.03; ci-après : la Convention ONU), à la Convention internationale du 19 février 1925 relative aux stupéfiants (RS 0.812.121.4) et à la Convention du 26 juin 1936 pour la répression du trafic illicite des drogues nuisibles (RS 0.812.121.06).
En particulier, la Convention ONU tend à promouvoir la coopération des parties de telle sorte qu'elles puissent s'attaquer avec plus d'efficacité aux divers aspects du trafic illicite des stupéfiants et des substances psychotropes ayant une dimension internationale (cf. art. 2). Elle oblige notamment les États parties à prendre les mesures nécessaires pour poursuivre pénalement tout acte commis intentionnellement et portant sur la production, la fabrication, l'extraction, la préparation, l'offre, la mise en vente, la distribution, la livraison à quelque condition que ce soit, le courtage, l'expédition (en transit ou non), le transport, l'importation et l'exportation de tout stupéfiant (cf. art. 3, dont les paragraphes 2 et 6 à 8 font l'objet de réserves de la part de la Suisse [MOREILLON, op. cit., n° 219 ad de la partie générale]). Son art. 4 établit également la compétence juridictionnelle des États parties (MOREILLON, op. cit., n° 216 ad de la partie générale; MARC HENZELIN, in Commentaire romand, Code pénal 1, 2e éd. 2021, n° 13 ad art. 6 CP). Elle contient aussi des dispositions concrètes dans le domaine de la coopération judiciaire en matière pénale, telles que l'entraide judiciaire ou son refus (cf. art. 7), et sur d'autres formes de coopération et d'information pour renforcer l'efficacité de l'action de détection et de répression, tant dans le système judiciaire qu'administratif concerné (cf. art. 9; MOREILLON, op. cit., no 217 ad de la partie générale).
2.5.4. On peut encore signaler la Convention de Budapest du 23 novembre 2001 sur la cybercriminalité (CCC; RS 0.311.43), à laquelle sont parties la Suisse et l'Espagne.
Cette convention tend à harmoniser les règles de procédure pénale, permettant notamment la collecte en temps réel des données transmises au moyen d'un système informatique (cf. art. 20 et 21 CCC), ainsi que la compétence territoriale (cf. art. 22 CCC). Les parties ont également une obligation de coopérer (cf. art. 23 CCC; voir sur la coopération judiciaire, MOREILLON, op. cit., no 225 ad de la partie générale). Selon l'art. 32 CCC, une Partie peut, sans l'autorisation d'une autre Partie, accéder à des données informatiques stockées accessibles au public (source ouverte), quelle que soit la localisation géographique de ces données (let. a), ou accéder à, ou recevoir au moyen d'un système informatique situé sur son territoire, des données informatiques stockées situées dans un autre État, si la Partie obtient le consentement légal et volontaire de la personne légalement autorisée à lui divulguer ces données au moyen de ce système informatique (let. b; sur cette lettre en particulier, voir BOTTINELLI, op. cit., nos 28 ss ad art. 299 CP).
2.6.
2.6.1. Dans le cadre de causes comportant un élément d'extranéité, une violation du principe de la territorialité a été admise lorsqu'en l'absence d'une demande d'entraide ou d'un traité international ne prévoyant aucune formalité préalable, une balise permettant la localisation et des micros ont été apposés - certes en Suisse - sur un véhicule, lequel s'est ensuite rendu à l'étranger où ont eu lieu des enregistrements (ATF 146 IV 36 consid. 2.3; arrêts 7B_273/2023 du 11 avril 2024 consid. 2 et 3; 1B_93/2021 du 19 juillet 2021 consid. 2). L'observation opérée sur le territoire étranger par un détective privé - à la suite cependant en substance d'informations que celui-ci avait reçues du ministère public - viole également le principe précité, dès lors qu'en l'absence d'une demande d'entraide ou d'un traité autorisant cette mesure sans autre formalité, les autorités pénales suisses n'auraient pas pu procéder sur le territoire étranger (arrêt 7B_120/2022 du 5 octobre 2023 consid. 2.4).
Les autorités suisses ne peuvent pas non plus s'adresser directement à un fournisseur de services Internet "dérivés" se trouvant à l'étranger (ATF 143 IV 270 consid. 4.7; 141 IV 108). Dans la mesure où une société suisse (V.________ Suisse) n'a pas accès aux données requises - lesquelles se trouvent à l'étranger -, les autorités suisses doivent procéder par le biais de l'entraide internationale pour obtenir leur transmission de la part de la société étrangère (V.________ Irlande ou V.________ États-Unis) les détenant (ATF 143 IV 270 consid. 4.8; 143 IV 21 en lien notamment avec la CCC; voir également arrêt 1B_142/2016 du 16 novembre 2016 consid. 3 et BOTTINELLI, op. cit., no 31 ad art. 299 CP).
2.6.2. Le principe de la territorialité n'est en revanche pas violé par une surveillance en Suisse d'un numéro étranger, pour autant que le titulaire du raccordement en question ou son interlocuteur - alors les personnes surveillées - soit connecté à un réseau de téléphonie mobile suisse (ATF 146 IV 36 consid. 2.3 p. 46; arrêt 6B_228/2018 du 22 août 2018 consid. 1.3; BOTTINELLI, op. cit., n° 26 ad art. 299 CP; CLAUDIO RIEDI, Auslandsbeweise und ihre Verwertung im schweizerischen Strafverfahren, 2018, n° II p. 301; THOMAS HANSJAKOB, Überwachungsrecht der Schweiz, Kommentar zu Art. 269 ff. StPO und zum BÜPF, 2018, n° 391 p. 116; d'un autre avis, HUSMANN, AJP/PJA 3/2020, op. cit., ad C/1 p. 369). Il en va de même de la possibilité pour les autorités suisses, grâce à l'obtention licite d'un mot de passe, d'accéder, depuis la Suisse, à des données conservées sur un serveur situé à l'étranger (ATF 146 IV 36 consid. 2.3 p. 46; 143 IV 270 consid. 7.10; BOTTINELLI, op. cit., n° 31 ad art. 299 CP); dans une telle configuration, elles ont en effet uniquement utilisé, et non mis en place pour ce faire, les possibilités usuelles de connexion en différents lieux ou pays - dont la Suisse - offertes par le site en cause (ATF 146 IV 36 consid. 2.3 p. 46; pour un avis critique, HUSMANN, AJP/PJA 3/2020, op.cit., ad C/1 p. 369).
Selon BOTTINELLI, il n'y a pas non plus de violation de la souveraineté étrangère lorsque l'activité de l'autorité suisse consiste à intercepter des moyens de preuves qui, bien que non destinés à la Suisse, transitent sur son territoire ou dans l'espace aérien suisse, ou atteignent le territoire suisse (BOTTINELLI, op. cit., n° 26 ad art. 299 CP). En particulier la technique dite de "Kopfschaltung" permet notamment d'intercepter en Suisse des communications provenant du raccordement surveillé - suisse ou étranger - utilisé depuis l'étranger, tant que la communication transite par la Suisse (HANSJAKOB, op. cit., n° 392 ss p. 117, qui relève en particulier que ladite technique est principalement utilisée afin de surveiller un fournisseur de stupéfiants étranger, identifié par le biais d'une surveillance portant sur un acheteur en Suisse, dans le but de découvrir d'autres clients en Suisse; BOTTINELLI, op. cit., n° 26 ad art. 299 CP).
En matière de surveillance de la "téléphonie Internet" par le biais d'un programme informatique ("GovWare"), HANSJAKOB indique que la localisation des participants n'est pas possible. Il préconise cependant - ce qui exclurait donc une violation du principe de la territorialité - que, dans la mesure où les données sont disponibles en Suisse, leur exploitation soit autorisée dans ce pays en raison du fait que l'installation du logiciel a été ordonnée dans ce pays ou au motif qu'en matière de trafic Internet, le cheminement - lequel peut typiquement passer par des serveurs se trouvant à l'étranger - ne peut pas être déterminé (HANSJAKOB, op. cit., n° 403 p. 119).
2.7.
2.7.1. Dans le présent cas, il peut tout d'abord être rappelé que l'enquête en cours vise à démanteler un trafic de stupéfiants dont le résultat se produit en Suisse. On relèvera également que, dans ce domaine, la Confédération helvétique a pris un certain nombre d'engagements sur le plan international, notamment en matière de poursuites pénales, respectivement dispose, le cas échéant, d'une compétence juridictionnelle universelle (cf. consid. 2.5.3 ci-dessus et art. 6 CP; voir sur cette disposition, HENZELIN, op. cit., ad art. 6 CP).
Il n'est ensuite pas contesté que, dans le cadre de l'instruction pénale faisant l'objet de la présente procédure, des investigations secrètes ont été mises en oeuvre et qu'elles ont été valablement autorisées selon le CPP. Sous réserve d'une rencontre en France avec l'intimé
- déplacement dûment autorisé par les autorités françaises -, les agents infiltrés sont demeurés sur le territoire suisse, lieu depuis lequel ils ont échangé, par le biais a priori uniquement de messages (cf. consid. 2.4 p. 6 de l'arrêt attaqué), avec l'intimé localisé essentiellement à l'étranger et donné suite, le cas échéant, aux instructions reçues de celui-ci (cf. notamment ch. 2 p. 3 du recours; a priori dans ce même sens, cf. ad 2 p. 5 des observations de l'intimé). Il est enfin établi qu'aucune mesure de surveillance secrète ne visait le raccordement de l'intimé (cf. consid. 2.4 p. 6 s. de l'arrêt attaqué).
En l'absence d'action proprement dite sur un territoire étranger de la part des agents infiltrés suisses, il s'agit de déterminer si l'échange des messages entre les agents infiltrés, en Suisse, et l'intimé, à l'étranger, respectivement l'envoi par les premiers de messages, constitue un acte officiel développant des effets contraignants sur le territoire d'un État tiers, qui porterait atteinte à la souveraineté dudit pays.
2.7.2. À cet égard et selon la Chambre pénale, l'acte de puissance publique était l'investigation secrète; cette mesure impliquait la mise en oeuvre d'agents anonymes qui allaient avoir des contacts sous différentes formes avec l'intimé pour constater et prouver un acte punissable; l'agent infiltré, par ses actions, récoltait des moyens de preuve qui, même s'il se limitait à agir depuis la Suisse, pouvaient avoir des répercussions hors du territoire suisse. La cour cantonale a considéré qu'on ne se trouvait ainsi pas dans le cas où la récolte des informations se faisait par une connexion spontanée à un raccordement suisse, respectivement par l'utilisation des possibilités usuelles de connexion offertes en Suisse; l'emploi par l'agent infiltré de son téléphone cellulaire via des messageries pour échanger avec l'intimé à l'étranger représentait le système spécifiquement mis en place par l'autorité pour récolter des informations qu'elle n'aurait pas pu obtenir autrement (cf. ATF 146 IV 136 et consid. 2.4.2 in fine ci-dessus). L'autorité précédente a ainsi estimé que les contacts avec l'agent infiltré avaient été imposés à l'intimé, contrainte qui avait donc eu des effets à l'étranger; dans une telle configuration, la mesure d'instruction aurait donc dû être couverte par des demandes d'entraide déposées auprès des pays concernés ou prévue explicitement dans un traité international (cf. consid. 2.4 p. 7 s. de l'arrêt attaqué).
2.8. Ce raisonnement ne peut toutefois pas être suivi dans le cas d'espèce.
2.8.1. Tout d'abord, l'investigation secrète est prévue par le droit de procédure suisse, respectivement par certains traités internationaux. Elle a en outre été valablement autorisée selon le droit suisse. On ne saurait donc, sans autre élément, considérer qu'une investigation secrète constituerait en soi un procédé déloyal contraire notamment à l'art. 140 al. 1 CPP ou au principe de la bonne foi.
Certes, on ne se trouve pas dans l'hypothèse d'une simple connexion entre un numéro étranger, par le biais du réseau de téléphonie suisse, et un numéro sous surveillance secrète - dûment autorisée dans ce pays - où les deux interlocuteurs échangent en soi librement sans que les autorités pénales puissent influencer le moment ou le contenu de leurs conversations (cf. consid. 2.6.2 ci-dessus). Cela étant, dans le cadre d'une investigation secrète, dont le but tend à récolter des moyens de preuve notamment en vu d'un éventuel renvoi en jugement, l'agent infiltré ne doit agir que dans les limites de sa mission : il lui est ainsi interdit d'encourager un tiers à commettre des infractions (cf. art. 293 al. 1 CPP) et son activité ne doit avoir qu'une incidence mineure sur la décision du tiers de commettre l'infraction (cf. art. 293 al. 2 CPP; voir consid. 2.3.2 ci-dessus). Si l'intimé se prévaut d'échanges initiés par les agents (cf. ad 3 p. 7 de ses déterminations), il ne prétend cependant pas expressément que ceux-ci l'auraient alors incité à commettre des infractions, notamment plus graves que celles envisagées; il ne cite d'ailleurs pas les propos exacts tenus par les agents infiltrés, se limitant à renvoyer aux pièces du dossier. La contestation relative à l'étendue de la mission ou à l'éventuel excès des actes des agents infiltrés relève en tout état de cause de la compétence du juge du fond (cf. en particulier l'art. 293 al. 4 CPP; voir consid. 2.3.2 ci-dessus).
2.8.2. Le moyen utilisé par les agents infiltrés pour mener leur mission, soit des échanges par le biais de messageries sur des téléphones cellulaires, ne prête pas non plus le flanc à la critique.
Dans le cadre de trafics de stupéfiants, ce mode de procéder est en effet usuel (ATF 142 IV 289 consid. 3.2; arrêts 1B_416/2018 du 3 octobre 2018 consid. 2.3; 1B_425/2010 du 22 juin 2011 consid. 3.3) et donc propre à faire progresser l'enquête. Ce type d'infraction ne se limite en outre généralement pas à un seul territoire étatique, la composante internationale étant quasiment toujours la norme en matière de stupéfiants. Or l'usage d'un téléphone cellulaire - a fortiori lors de l'échange de messages par le biais notamment de l'application Threema (cf. consid. 2.4 p. 7 de l'arrêt attaqué et le rapport complémentaire de la police de sûreté du 29 juin 2022 relevant les échanges intervenus par la messagerie Facebook et les applications sécurisées Threema et WickrMe) - ne permet pas de localiser immédiatement son interlocuteur (dans ce sens, RIEDI, op. cit., n° III p. 302). En effet, les modes de communication actuels permettent de masquer un numéro ou de se connecter sans difficulté à un réseau de téléphonie étranger sans disposer d'un numéro de ce pays, voire de communiquer par le biais d'Internet notamment en utilisant des applications de messageries instantanées comme celles susmentionnées (cf. également les possibilités offertes par la "téléphonie Internet"). Il ne peut pas non plus être imposé aux autorités de poursuite pénale d'imaginer à l'avance toutes les connexions internationales pouvant, hypothétiquement, entrer en considération dans le cadre de leur enquête, respectivement de s'adresser, préalablement et préventivement, à toutes les autorités susceptibles d'être concernées.
Sur le vu de ce qui précède, le mode utilisé pour mener l'investigation secrète ne permet pas non plus en l'occurrence de retenir que celle-ci aurait déployé des effets sur un territoire étranger.
2.8.3. Dans le présent cas, il doit être tout d'abord constaté que l'investigation secrète a été ordonnée afin d'enquêter en Suisse pour démanteler un trafic de stupéfiants développé sur le territoire helvétique. Même si des implications internationales dans ce domaine sont usuelles, la mise en oeuvre d'agents infiltrés ne tendait par conséquent pas d'entrée de cause à permettre aux autorités suisses d'obtenir des informations ou des contacts situés à l'étranger, notamment en contournant les règles en matière d'entraide. Les agents infiltrés ont ensuite procédé par le biais d'un mode de communication sis en Suisse, en utilisant un appareil permettant, depuis ce pays, un accès direct aux échanges litigieux. C'est en particulier en Suisse - lieu du trafic sous enquête - qu'ils ont pris connaissances des messages envoyés par l'intimé et qu'ils ont donné suite aux instructions données par ce dernier. Quant à l'envoi - également par le biais d'appareils se trouvant sur le territoire suisse - par les agents infiltrés de messages, dont l'intimé a pris connaissance à l'étranger, et en l'absence de toute argumentation précise sur le contenu des échanges (cf. consid. 2.8.1 ci-dessus), on ne saurait y voir dans le cas d'espèce autre chose qu'une simple invitation à communiquer, laquelle ne développe aucun effet contraignant et ne s'apparente donc pas à un moyen de pression quelconque : l'intimé était, en tout temps, libre de répondre à ces sollicitations ou d'y mettre un terme; il était également libre du contenu qu'il entendait donner à ses réponses. Il est enfin incontestable que les actes sollicités en Suisse par l'intimé sont illicites; l'éventualité d'une condamnation pénale dans ce pays en raison de l'exploitation des moyens de preuve recueillis au cours de la mesure secrète ne constitue ainsi pas en soi un moyen de contrainte développant des effets à l'étranger, étant d'ailleurs rappelé qu'un prévenu ne dispose pas d'un droit à ce que les autorités mettent un terme immédiat à ses activités illégales (ATF 144 IV 23 consid. 4.3; 140 IV 40 consid. 4.4.2). L'intimé ne soutient enfin pas que son extradition découlerait - exclusivement - des résultats de l'investigation secrète ou qu'une procédure pénale étrangère serait ouverte à son encontre.
En définitive, dans les circonstances de l'espèce, les échanges opérés par des messageries depuis un téléphone cellulaire entre des agents infiltrés suisses, se trouvant dans ce pays, et l'intimé, a priori à l'étranger, ne constituent pas des actes officiels développant des effets sur un territoire étranger. L'investigation secrète ordonnée dans le présent cas, qui permet également à la Suisse de respecter ses obligations internationales (cf. en particulier consid. 2.5.2 et 2.5.3
ci-dessus), ne viole par conséquent pas le principe de la territorialité et le recours se révèle bien fondé sur ce point.
2.9. Vu l'issue du litige découlant des considérations qui précèdent, il n'y a plus lieu d'examiner les griefs en lien avec l'exploitation des preuves dites dérivées - lesquelles sont donc en principe licites - et ceux tendant à démontrer que les échanges litigieux sont en tout état de cause exploitables puisqu'ils proviennent également de l'analyse des téléphones cellulaires utilisés, dont celui de l'intimé.
3.
Il s'ensuit que le recours doit être admis. L'arrêt attaqué sera réformé en ce sens que l'ordonnance du 21 août 2023 refusant de retrancher du dossier les échanges entre l'intimé et les agents infiltrés zzz, yyy et www est confirmée. La cause sera renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision sur les frais et indemnités de la procédure cantonale de recours ( art. 67 et 68 al. 5 LTF ).
L'intimé a demandé l'octroi de l'assistance judiciaire (cf. art. 64 al. 1 LTF). Les conditions y relatives étant réunies, il y a lieu d'admettre cette requête et de désigner Me Christian Delaloye en tant qu'avocat d'office de l'intimé pour la procédure fédérale et de lui allouer une indemnité à titre d'honoraires, qui sera supportée par la caisse du Tribunal fédéral (cf. art. 64 al. 2 LTF). L'intimé est toutefois rendu attentif à son obligation de rembourser la caisse du Tribunal fédéral s'il retrouve ultérieurement une situation financière lui permettant de le faire (cf. art. 64 al. 4 LTF). Il ne sera pas perçu de frais judiciaires (cf. art. 64 al. 1 LTF), ni alloué de dépens (cf. art. 68 al. 3 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est admis. L'arrêt du 30 novembre 2023 de la Chambre pénale du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg est réformé en ce sens que l'ordonnance du 21 août 2023 du Ministère public du canton de Fribourg est confirmée. La cause est renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision sur les frais et indemnités de la procédure cantonale de recours.
2.
La requête d'assistance judiciaire est admise.
2.1. Me Christian Delaloye est désigné comme avocat d'office de l'intimé et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral.
2.2. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre pénale du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg.
Lausanne, le 6 mai 2024
Au nom de la IIe Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Abrecht
La Greffière : Kropf