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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_429/2022  
 
 
Arrêt du 7 mars 2023  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Jametti, Présidente, Hohl et Kiss. 
Greffier : M. Douzals. 
 
Participantes à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Mes Jean-Marc Reymond et Aude Schmid, avocats, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________ SA, 
représentée par Me Alain Ribordy, avocat, 
intimée. 
 
Objet 
avis comminatoire (art. 257d al. 1 CO); interprétation; facilités de paiement, 
 
recours en matière civile contre l'arrêt rendu 
le 19 août 2022 par la IIe Cour d'appel civil 
du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg (102 2022 9). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. En 2013, B.________ SA (ci-après: la locataire, la demanderesse ou l'intimée) a pris à bail un premier local commercial au rez-de-chaussée d'un immeuble à U.________, dont le dernier loyer est de 4'356 fr. 25 par mois, ainsi que des places de parking pour un loyer de 60 fr. par mois chacune, puis, en 2014, un deuxième local commercial au 1 er étage dont le dernier loyer est de 2'788 fr. par mois et un troisième local commercial dont le dernier loyer est de 218 fr., frais accessoires en sus pour tous. Les locaux étaient loués sans rénovation. Par avenants du 12 avril 2018, les contrats de bail ont été transférés à A.________ SA (ci-après: la bailleresse, la défenderesse ou la recourante), en tant que bailleresse, et les loyers fixés aux montants précités.  
L'aménagement d'un fitness dans les locaux ne correspondant pas à la zone d'activité, une procédure d'enquête en vue d'un changement d'affectation était nécessaire. En 2016 et 2017, la mise en conformité de l'aménagement de locaux de physiothérapie et de fitness a été refusée par le Lieutenant de Préfet du district de la Veveyse, puis par la II e Cour administrative du Tribunal cantonal fribourgeois. Par arrêt du 5 décembre 2018 de la même Cour, un délai de trois mois a été imparti à la locataire pour mettre un terme à l'activité non conforme et vider les locaux aménagés illégalement.  
La locataire a libéré les locaux le 30 novembre 2019 et un état des lieux a été fait le 2 décembre 2019. 
 
A.b. Dans l'intervalle, le 13 août 2018, la locataire étant en retard dans le paiement des loyers, la bailleresse lui avait adressé une mise en demeure pour un montant total de 40'607 fr. 85 et indiqué que, sans paiement de l'intégralité de ce montant dans les 30 jours, les contrats de bail seraient résiliés conformément à l'art. 257d CO. La portée de cet avis comminatoire sera discutée plus en détail dans les considérants de droit.  
Par courrier du 24 août 2018, la bailleresse a confirmé à la locataire les termes de leur " [a]rrangement de paiement relatif aux contrats de baux ". La portée de ce courrier sera également discutée dans les considérants de droit. 
Les 24 et 31 août 2018, en deux versements identiques, la locataire a versé le montant total de 15'084 fr. 50 (complètement selon l'art. 105 al. 2 LTF). 
Le 16 octobre 2018, sur formule officielle, la bailleresse a résilié les baux à loyer pour le 30 novembre 2018, précisant que le solde en sa faveur s'élevait à 33'065 fr. 60. 
 
B.  
Par requête de conciliation du 13 novembre 2018, la locataire a contesté les résiliations devant la Commission de conciliation en matière de bail pour les districts de la Gruyère, de la Glâne, de la Broye et de la Veveyse. 
Le 27 décembre 2018, la bailleresse a fait parvenir à la Commission de conciliation un courrier indiquant qu'elle avait déjà informé la locataire du retrait de la résiliation de bail, sollicitant de dite commission un délai de 30 jours pour lui faire parvenir une copie de l'accord extrajudiciaire qui était sur le point d'être signé. 
La procédure de conciliation a finalement échoué lors de l'audience du 10 janvier 2020. La locataire a alors déposé sa demande en contestation des résiliations devant le Tribunal des baux des mêmes districts le 7 février 2020. 
Par jugement du 20 décembre 2021, le Tribunal des baux a admis la demande et constaté que la résiliation des baux du 16 octobre 2018 était nulle. En bref, il a considéré que les résiliations étaient nulles pour trois motifs: premièrement, l'avis comminatoire portait sur un montant trop élevé; puis, par surabondance, deuxièmement, la bailleresse avait annulé l'avis comminatoire par courrier du 24 août 2018 et, troisièmement, par sa lettre du 27 décembre 2018 à la Commission de conciliation, la bailleresse avait renoncé aux congés. 
Statuant sur appel de la bailleresse le 19 août 2022, la II e Cour d'appel civil du Tribunal cantonal du canton de Fribourg l'a rejeté et a confirmé le jugement de première instance, par adoption des motifs des premiers juges et ajoutant, premièrement, que l'avis comminatoire n'était pas clair en tant qu'il invitait la locataire à payer un montant beaucoup trop élevé, et, secondement, que le courrier du 24 août 2018 avait accordé à la locataire des facilités de paiement.  
 
 
C.  
Contre cet arrêt, qui lui avait été notifié le 29 août 2022, la bailleresse a interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral le 28 septembre 2022. Elle conclut à sa réforme, en ce sens que la demande de la locataire soit rejetée. Subsidiairement, elle conclut à l'annulation de l'arrêt et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Elle se plaint d'omission de faits et d'appréciation arbitraire des preuves, de violation des art. 257d et 271 s. CO, tant en ce qui concerne l'avis comminatoire du 13 août 2018 que l'arrangement du 24 août 2018, les résiliations du 16 octobre 2018 et le courrier qu'elle a adressé à la Commission de conciliation le 27 décembre 2018. 
La locataire a conclu à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet. 
Les parties ont chacune déposé des observations complémentaires. 
La cour cantonale a fait savoir qu'elle n'avait pas d'observations à formuler. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
La locataire ayant quitté les locaux loués le 30 novembre 2019, la bailleresse recourante précise qu'elle conserve un intérêt au présent recours car la validité ou non des résiliations du 16 octobre 2018 influe sur les prétentions pécuniaires que les parties font valoir l'une envers l'autre dans le cadre d'une autre procédure. Quant à l'intimée, elle y adhère en précisant que, par son action en dommages-intérêts, elle entend être dédommagée pour les frais d'aménagement de ses nouveaux locaux, ce qu'elle ne pourrait obtenir, sous l'angle de la causalité, que si les résiliations du 16 octobre 2018 étaient déclarées nulles, respectivement étaient annulées judiciairement, cette dernière possibilité ne pouvant être admise que dans le cadre d'une action formatrice en annulation des résiliations. Un intérêt étant ainsi rendu suffisamment vraisemblable, il y a lieu d'entrer en matière. 
Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue sur appel par le Tribunal cantonal du canton de Fribourg, dans une action en contestation de la résiliation du bail intentée par la locataire (art. 72 al. 1 LTF), dont la valeur litigieuse dépasse le seuil de 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF), le recours est recevable. 
 
2.  
Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente ( art. 105 al. 1 LTF). Il peut rectifier ou compléter d'office les constatations de l'autorité précédente lorsque les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353 consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). 
Sous réserve de la violation des droits constitutionnels (art. 106 al. 2 LTF), le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF) à l'état de fait constaté dans l'arrêt cantonal ou, cas échéant, à l'état de fait qu'il aura rectifié. Il n'est toutefois lié ni par les motifs invoqués par les parties, ni par l'argumentation juridique retenue par l'autorité cantonale; il peut donc admettre le recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant, comme il peut le rejeter en procédant à une substitution de motifs (ATF 135 III 397 consid. 1.4 et l'arrêt cité). 
 
3.  
Les parties s'opposent au sujet de la validité des résiliations anticipées au sens de l'art. 257d CO données le 16 octobre 2018: la locataire soutient qu'elles sont nulles et, subsidiairement, annulables et la défenderesse soutient qu'elles sont parfaitement valables. 
 
3.1. Selon l'art. 257d CO, lorsque le locataire d'habitations ou de locaux commerciaux a du retard dans le paiement du loyer ou de frais accessoires échus, le bailleur peut lui adresser un avis comminatoire en lui fixant un délai de 30 jours au moins pour s'en acquitter et en le menaçant, à défaut de paiement, de la résiliation du bail (al. 1); si, à l'expiration du délai fixé, le locataire n'a pas payé, le bailleur peut résilier le bail moyennant un délai de 30 jours pour la fin d'un mois (al. 2).  
Cette réglementation de droit matériel mise en place par le législateur signifie que le locataire mis en demeure doit évacuer l'objet loué dans les plus brefs délais s'il ne paie pas le loyer et les frais accessoires en retard (arrêt 4A_385/2022 du 14 février 2023 consid. 3.1; sur la notification de l'avis comminatoire et de la résiliation, cf. arrêt 4A_234/2022 du 21 novembre 2022 consid. 4.1). La rigueur de la sanction prévue par cette réglementation présuppose, en particulier, que l'avis comminatoire soit suffisamment clair et précis. 
Selon la jurisprudence, l'avis comminatoire doit indiquer le montant arriéré à payer dans le délai de façon suffisamment claire et précise pour que le locataire puisse reconnaître clairement quelles dettes il doit payer pour éviter un congé. Le montant de l'arriéré doit être déterminé (par une indication chiffrée) ou, tout au moins, déterminable (arrêts 4A_436/2018 du 17 janvier 2019 consid. 4.1; 4A_306/2015 du 14 octobre 2015 consid. 2; 4A_134/2011 du 23 mai 2011 consid. 3). Ainsi, lorsque l'avis comminatoire désigne précisément les mois de loyers impayés, le montant de l'arriéré est déterminable (arrêts 4A_436/2018 précité consid. 4.1; 4A_306/2015 précité consid. 2; 4A_134/2011 précité consid. 3; 4C.123/2000 du 14 juin 2000 consid. 3b). Si les mois de loyers impayés ne sont pas mentionnés et que le montant de l'arriéré indiqué est sans rapport avec la somme effectivement en souffrance, l'avis comminatoire ne satisfait pas aux exigences de clarté et de précision permettant au locataire de reconnaître de combien de mois de loyers il doit s'acquitter dans le délai comminatoire (arrêts 4A_436/2018 précité consid. 4.1; 4A_134/2011 précité consid. 3 in fine). En revanche, l'indication d'un arriéré trop élevé n'entraîne pas nécessairement l'inefficacité de l'avis comminatoire: le locataire qui constate une erreur doit la signaler au bailleur, à défaut de quoi il ne mérite pas d'être protégé (arrêts 4A_550/2020 du 29 avril 2021 consid. 7.2; 4A_436/2018 précité consid. 4.1; 4A_330/2017 du 8 février 2018 consid. 3.1 et les arrêts cités).  
Cette jurisprudence repose sur l'interprétation de la volonté du bailleur et sur la compréhension qu'en a eue ou aurait dû en avoir le locataire. Autrement dit, comme pour toute manifestation de volonté unilatérale, la détermination du sens et de la portée de la déclaration s'effectue conformément aux principes généraux en matière d'interprétation des manifestations de volonté (ATF 121 III 6 consid. 3c; arrêts 4A_9/2021 du 12 janvier 2022 consid. 4.2.2 et les références citées; 4A_193/2018 du 27 juillet 2018 consid. 4.1.2; 4A_343/2017 du 1er mai 2018 consid. 2.1; 4A_347/2017 du 21 décembre 2017 consid. 5.2.1; 4A_321/2017 du 16 octobre 2017 consid. 4.3; 4A_196/2016 du 24 octobre 2016 consid. 3.1.2). Il en découle que la volonté subjective des parties a la priorité sur la volonté objective; si le destinataire de la manifestation de volonté l'a effectivement comprise ainsi que le voulait son auteur, la déclaration vaut dans le sens que lui ont donné les deux parties (volonté réelle ou subjective). Si le destinataire de la manifestation ne l'a pas comprise ainsi que le voulait son auteur, le sens compris ne correspond pas au sens voulu et il faut résoudre la difficulté en appliquant le principe de la confiance (arrêts 4A_9/2021 précité consid. 4.2.2 et les références citées; 4A_193/2018 précité consid. 4.1.2 et les références citées; sur l'interprétation des manifestations de volonté en général, cf. ATF 147 III 153 consid. 5.1; 144 III 93 consid. 5.2; arrêts 4A_50/2021 du 6 septembre 2021 consid. 3.2.4, non publié in ATF 147 III 475; 4A_643/2020 du 22 octobre 2021 consid. 4). Ce n'est qu'une fois que la déclaration a été interprétée que, cas échéant, pourra se poser la question de savoir si la résiliation doit être annulée parce que l'avis comminatoire contrevient aux règles de la bonne foi au sens de l'art. 271 al. 1 CO (ATF 140 III 591 consid. 1 et les arrêts cités; arrêts 4A_367/2022 du 10 novembre 2022 consid. 5.2.1; 4A_550/2020 précité consid. 8.2; 4A_436/2018 précité consid. 5.1). 
Les avis comminatoires et les circonstances étant spécifiques à chaque cas, il n'est guère possible de dégager des principes généraux des cas tranchés par la jurisprudence: tout dépend de la réception par le locataire de la volonté du bailleur. Ainsi, il a été notamment admis qu'une mise en demeure portant sur deux mois de loyers impayés, des intérêts de retard, des frais de poursuite et des frais d'intervention, chacun de ces postes étant chiffré, était valable puisque le montant chiffré de l'un des deux mois en question était exigible et impayé et que la locataire ne pouvait avoir le moindre doute au sujet du bien-fondé et de l'exigibilité de cette créance de la bailleresse, sans qu'il importe de savoir si l'avis était valable pour les autres créances (arrêt 4A_306/2015 précité consid. 4). 
 
3.2. En l'espèce, l'avis comminatoire (intitulé " mise en demeure ") du 13 août 2018 listait 28 postes de loyers avec la mention " échu " (soit plusieurs loyers du rez-de-chaussée à 4'356 fr. 25, de l'autre local au rez-de-chaussée à 218 fr., du 1er étage à 2'788 fr. et de chacune des trois places de parking à 60 fr.) et six postes de loyers pour les différents locaux et places de parking pour le mois de septembre 2018 avec la mention " 30 jours ", en indiquant le montant total à payer de 40'607 fr. 85. L'invitation à payer dans les 30 jours portait sur l'intégralité de ce montant, à défaut de quoi le bail serait résilié (complètement selon l'art. 105 al. 2 LTF).  
La cour cantonale, qui a fait siennes, par adoption de motifs, les considérations des premiers juges, a jugé que l'avis comminatoire était nul car il souffrait d'un manque de clarté évident: il indiquait, sous menace de résiliation, un montant global à payer de 40'607 fr. 85, en caractères gras et soulignés; il ne distinguait pas clairement entre les postes échus et les postes à 30 jours, en indiquant par exemple le solde intermédiaire dû pour les montants échus, soit 33'065 fr. 60. La cour cantonale en a conclu que le montant réclamé était 20 % supérieur au montant échu. 
En adoptant une approche abstraite, la cour cantonale ne s'est prononcée ni sur la façon dont la locataire avait effectivement compris l'avis comminatoire, ni, à défaut de preuve, sur la façon dont elle aurait dû de bonne foi le comprendre. La Cour de céans peut toutefois se dispenser de lui renvoyer la cause pour procéder à cet examen, le recours devant de toute façon être rejeté pour le motif qui suit. 
À cet égard, il sied encore de rappeler que, lorsque le locataire est mis en demeure conformément à l'art. 257d al. 1 CO, il doit, s'il entend invoquer une contre-créance en compensation avec des loyers échus, pouvoir la prouver sans délai (arrêts 4A_385/2022 précité consid. 3.1; 4A_140/2014 / 4A_250/2014 du 6 août 2014 consid. 5.2). Il doit faire une déclaration de compensation avant l'échéance du délai de grâce de l'art. 257d al. 1 CO (ATF 119 II 241 consid. 6b/bb et cc; arrêts 4A_385/2022 précité consid. 3.4; 4A_157/2021 du 15 juin 2021 consid. 7.2; 4A_422/2020 du 2 novembre 2020 consid. 4.2). 
 
4.  
Les parties divergent également en ce qui concerne la portée du courrier du 24 août 2018. 
 
4.1. Il découle de la liberté contractuelle que les parties peuvent, une fois l'avis comminatoire reçu par le locataire, décider d'en modifier les conditions, en prévoyant notamment d'autres modalités de paiement. Il ne faut toutefois pas confondre une renonciation à exiger le paiement du montant effectif échu dans les 30 jours et une renonciation au droit de résilier de l'art. 257d CO pour de futurs retards dans le paiement du loyer ou des frais accessoires.  
 
4.2. En l'espèce, la bailleresse a adressé à la locataire un courrier le 24 août 2018, intitulé " Arrangement de paiement relatif aux contrats de baux ", qui fait référence à un entretien qui a eu lieu entre la représentante de la locataire et un représentant de la bailleresse (complètement selon l'art. 105 al. 2 LTF) et qui confirme à la locataire les points suivants:  
 
" 1. Nous avons bien reçu vos versements des 3 et 25 avril 2018 d'un total de CHF 12'187.90 qui ont servi à la mise à jour de vos loyers du mois d'avril (partiel) et mai 2018. 
2. La somme de CHF 15'084.50, correspondant à 2 loyers de CHF 7'542.25, sera versée d'ici la fin du mois d'août 2018. 
3. Le solde des arriérés sera versé sitôt conclue la vente de votre propriété privée. " 
 
4.2.1. La cour cantonale a considéré, à titre subsidiaire (soit si la résiliation n'avait pas été nulle), que, selon la doctrine, la résiliation serait annulable au sens des art. 271 et 271a al. 1 CO, soit dans le cas où le bailleur, après fixation du délai comminatoire, a promis au locataire des facilités de paiement pouvant être interprétées comme une renonciation au droit de résilier. Elle a jugé qu'en l'espèce, il fallait admettre que le courrier du 24 août 2018 avait accordé à la locataire des facilités de paiement et donc que la bailleresse avait renoncé au droit de résilier.  
La recourante y voit une violation des art. 271 et 271a al. 1 let. a CO, une résiliation ne pouvant être annulée que dans des circonstances tout à fait exceptionnelles. Selon elle, cet arrangement avait pour but de laisser à la locataire une dernière chance, mais certainement pas de lui éviter une résiliation; si la locataire ne respectait pas cet accord, la mise en demeure du 13 août 2018 continuait de produire tous ses effets. Considérer qu'elle aurait renoncé à son droit de résilier serait insoutenable. 
 
4.2.2. Il faut effectivement, comme le soutient la recourante, interpréter le courrier du 24 août 2018 pour en dégager la volonté des parties.  
Il est évident, à la lecture de ce courrier de la bailleresse confirmant l'entretien des parties, que la volonté réelle de la bailleresse était de renoncer à exiger le paiement de l'arriéré échu de 33'065 fr. 60 dans les 30 jours, à deux conditions: que la locataire lui " vers[e] " (1) le montant de 15'084 fr. 50 d'ici la fin du mois d'août 2018 et (2) le solde des arriérés au moment de la vente de " sa " propriété privée. C'est précisément dans ce sens que la cour cantonale l'a interprété lorsqu'elle retient que ce courrier du 24 août 2018 intitulé " Arrangement de paiement relatif aux contrats de baux " doit être interprété comme accordant des facilités de paiement; même si elle a parlé de renonciation au droit de résilier, il est clair qu'elle entendait par là le droit de la bailleresse tel qu'exercé par courrier du 13 août 2018 et non le droit de celle-ci de résilier en cas de nouveaux retards. 
La recourante méconnaît le système de l'art. 257d CO voulu par le législateur: l'avis comminatoire doit être donné pour des montants échus. Si, par la suite, de nouveaux loyers viennent à échéance et demeurent impayés, un nouvel avis comminatoire doit être notifié pour ceux-ci. L'arrangement du 24 août 2018 n'a eu d'effets que sur l'avis du 13 août 2018. 
En ce qui concerne la condition no 1, il sied de relever qu'elle impose à la locataire de " vers[er] " le montant de 15'084 fr. 50 d'ici la fin du mois d'août 2018. Or, la locataire s'est acquittée de ce montant. La recourante soutient que celle-ci ne s'en est pas acquittée à temps, mais avec trois jours de retard, ce qui ne serait pas insignifiant. Cette opinion ne peut être suivie: d'une part, selon son texte, cette condition exige que la somme soit " versée " et pouvait donc tout à fait être comprise comme n'exigeant pas que la somme soit reçue par la bailleresse avant ce terme. Il ne s'agit pas du paiement du loyer selon les conditions du bail, mais du paiement du montant selon le texte de ce courrier du 24 août 2018. Au demeurant, la bailleresse recourante n'indique même pas, ni ne prouve en vertu de quelle disposition contractuelle, le loyer, auquel elle veut assimiler le paiement dû en vertu du courrier du 24 août 2018, devait lui parvenir avant la fin du mois. Or, la locataire a bien versé le solde du montant litigieux le vendredi 31 août 2018. 
Quant à la condition n o 2, elle ne fixe ni un délai de 30 jours à compter de la notification de l'avis comminatoire, ni d'ailleurs aucun autre délai pour la conclusion de la vente de la propriété. Ce défaut de précision d'une condition rédigée par la bailleresse elle-même lui est imputable. Elle ne saurait légitimement soutenir, ce qu'elle ne fait d'ailleurs pas, que cette vente, dont le prix devait servir à payer le solde d'arriérés qui lui était dû, devait intervenir dans le délai de 30 jours à compter de l'avis comminatoire. Certes, le juge devrait déterminer dans quel délai la condition n o 2 devrait être exécutée; il est toutefois impossible qu'il puisse coïncider avec le délai de 30 jours fixé dans l'avis du 13 août 2018. Au demeurant, cette condition ne vise que le solde des arriérés, ce qui n'empêchait donc nullement la bailleresse de notifier un nouvel avis comminatoire pour des loyers ultérieurs impayés. La recourante ne peut faire revivre l'avis du 13 août 2018 en arguant que l'arrangement n'a pas été respecté et que la vente de la propriété privée n'a eu lieu qu'en juin 2020.  
Pour ce motif, le recours doit être rejeté. Il est ainsi superflu d'examiner les autres griefs de la recourante, comme d'ailleurs ceux de l'intimée. 
 
5.  
Les frais judiciaires et les dépens de la procédure fédérale doivent être mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 et art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'500 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 5'500 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la II e Cour d'appel civil du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg.  
 
 
Lausanne, le 7 mars 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jametti 
 
Le Greffier : Douzals