Eidgenössisches Versicherungsgericht
Tribunale federale delle assicurazioni
Tribunal federal d'assicuranzas
Cour des assurances sociales
du Tribunal fédéral
Cause {T 7}
I 802/05
Arrêt du 7 juin 2006
IIIe Chambre
Composition
MM. les Juges Ferrari, Président, Lustenberger et Seiler. Greffier : M. Pellegrini
Parties
C.________, recourant, représenté par Me Jean-Marie Allimann, avocat, rue de la Justice 1, 2800 Delémont,
contre
Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura, rue Bel-Air 3, 2350 Saignelégier, intimé
Instance précédente
Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre des assurances, Porrentruy
(Jugement du 3 octobre 2005)
Faits:
A.
C.________ travaillait en qualité d'agriculteur indépendant. Il était aussi, jusqu'au 3 décembre 2003, président du conseil d'administration de l'entreprise X.________ SA, société qu'il a fondée en 1986. Depuis le 11 juin 1990, l'assuré s'est trouvé à de nombreuses reprises en arrêt de travail à des taux variables notamment à la suite d'un accident (cf. rapport du docteur P.________ du 12 août 1997). Le 5 juin 1997, il a présenté à l'Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura (ci-après: l'office AI) une demande de prestations de l'assurance-invalidité tendant en particulier à l'octroi d'une rente.
Procédant à l'instruction du dossier, l'office AI a recueilli les avis des médecins consultés par l'assuré. Il a aussi diligenté une première enquête économique pour les agriculteurs. Il en est résulté que l'intéressé présentait une incapacité de travail de 80 % dans sa profession (rapport du 25 mars 1998). Une expertise pluridisciplinaire a ensuite été confiée à la Clinique Y.________ fonctionnant en tant que Centre d'observation médical de l'AI (COMAI). Les experts, ont diagnostiqué des lombalgies communes chroniques avec irradiation pseudo-radiculaire au membre inférieur droit d'origine myofasciale, sur point gâchette de la musculature glutéale droite, une gonarthrose débutante, fémoro-patellaire et interne, prédominant à droite, avec chondrocalcinose, sur status après méniscectomie droite (1973) et méniscectomie partielle externe gauche (1994), un status après fracture du fémur gauche (1957) avec probable épiphysiodèse et un raccourcissement du membre inférieur gauche de 3 cm. De l'avis de ces médecins, l'intéressé était capable de travailler à raison de 80 % au moins dans une activité permettant l'alternance des positions, évitant le port de charges supérieures à 15 kilos, les travaux lourds, les déplacements prolongés sur des terrains accidentés et une sollicitation constante (supérieure à 2-3 heures) de ses genoux, telle qu'elle est exigée par la conduite d'engins de chantier (rapport des docteurs D.________, L.________ et B.________ du 2 novembre 2000, comprenant une consultation psychiatrique de la doctoresse U.________, psychiatre, du 27 avril 2000). Selon une nouvelle enquête économique pour les agriculteurs, l'assuré subissait, en tenant compte de la comptabilité pour l'année 2001, une perte économique de 61,8 %. Selon l'enquêteur, le revenu d'invalide s'élevait à 24'750 fr. et celui sans invalidité à 64'800 fr. (cf. rapport du 26 février 2003). Il a ramené ce dernier montant à 58'698 fr. dans un rapport complémentaire du 6 octobre 2003.
Par décision du 11 mai 2004, l'office AI a nié à C.________ le droit à une rente de l'assurance-invalidité, dès lors qu'il présentait un taux d'invalidité de 22 % (revenu sans invalidité: 58'698 fr., revenu avec invalidité: 46'031 fr.).
Saisi d'une opposition contre cette décision, l'office précité a confié un nouveau mandat d'expertise pluridisciplinaire au COMAI. Les doctoresses S.________, rhumatologue, et F.________, psychiatre et psychothérapeute, ont attesté des lombalgies chroniques et une gonarthrose interne droite et tricompartimentale gauche. Sur le plan psychiatrique, aucune pathologie invalidante n'a été mise en évidence. A leur avis, l'assuré était en mesure de travailler à plein temps, avec un rendement très légèrement diminué - le temps de changer de position ou de marcher un peu -, dans des activités tenant compte de limitations fonctionnelles similaires à celles mentionnées par leurs confrères de la Clinique Y.________ (rapport du 27 décembre 2004).
Par décision sur opposition du 26 janvier 2005, l'office AI a confirmé sa précédente décision.
B.
Saisie d'un recours formé par l'assuré contre cette décision sur opposition, la chambre des assurances du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura l'a rejeté par jugement du 3 octobre 2005.
C.
C.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont il demande l'annulation, en concluant, sous suite de frais et dépens, à l'octroi d'une rente entière de l'assurance-invalidité. Il conclut aussi à l'octroi d'une rente correspondant à un taux d'invalidité de 61,8 %, assortie de rentes complémentaires, avec effet au 5 juin 1997.
L'office AI conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales n'a pas présenté de déterminations.
Considérant en droit:
1.
Le litige porte sur le droit du recourant à une rente de l'assurance-invalidité.
2.
Le jugement entrepris expose correctement les règles légales et jurisprudentielles applicables au présent litige, si bien qu'il suffit d'y renvoyer.
3.
Se fondant principalement sur le rapport d'expertise pluridisciplinaire du COMAI du 27 décembre 2004, les premiers juges ont considéré que le recourant était totalement apte au travail dans une activité adaptée à son handicap. Dans le calcul de la comparaison des revenus, ils ont fixé le revenu annuel sans invalidité à 58'698 fr. conformément aux conclusions de l'enquête économique complémentaire du 6 octobre 2003. Quant au revenu annuel de personne invalide, il a été arrêté sur la base des statistiques salariales pour l'année 2002 à 49'216 fr après déduction de 10 % (le salaire de référence s'élevant à 4'557, valeur standardisée, toutes activités confondues exercées par un homme, niveau 4; ESS 2002, TA1 p. 43). Cela étant, la juridiction cantonale a retenu un taux d'invalidité arrondi de 16 % et a nié au recourant le droit à une rente de l'assurance-invalidité.
De son côté, C.________ estime que l'expertise du COMAI du 27 décembre 2004 ne présente pas un caractère de crédibilité suffisant, dès lors que les conclusions vont à l'encontre de celles des enquêtes économiques pour les agriculteurs des 25 mars 1998 et 26 février 2003, cette dernière enquête mettant en exergue une perte économique de 61,8 %. De plus, les experts ne se déterminent pas de manière suffisante sur les activités qui sont encore exigibles de sa part. A cet égard, il relève que la surveillance de travaux et de bétail évoquée par ces praticiens sont des tâches qui ne sont pas offertes sur le marché du travail.
4.
En l'occurrence, la juridiction cantonale a exposé de manière pertinente les motifs qui l'ont conduit à reconnaître pleine valeur probante à l'expertise du COMAI du 27 décembre 2004. De même, elle a expliqué les raisons pour lesquelles les conclusions convaincantes des auteurs de cette expertise ne pouvaient être mises en doute ni par les enquêtes économiques pour les agriculteurs des 25 mars 1998 et 26 février 2003 ni par le rapport du docteur A.________ du 4 août 2004. Aussi, le recourant est-il renvoyé aux considérants du jugement entrepris sur ces points.
On précisera néanmoins que si les médecins du COMAI n'ont pas dressé une liste des activités exigibles du recourant existant sur le marché du travail, ils ont toutefois indiqué de manière précise ses limitations fonctionnelles, ce qui est suffisant en l'espèce pour trancher le litige (cf. jugement attaqué, p. 17, paragraphe 3).
Certes, la juridiction cantonale a ignoré l'expertise pluridisciplinaire de la Clinique Y.________, du 2 novembre 2000, selon laquelle l'intéressé dispose d'une capacité de travail de 80 % d'un temps complet dans une activité adaptée. Il n'est toutefois pas nécessaire de confronter ici ces deux expertises, dès lors que, comme on le verra ci-après, le taux d'invalidité est insuffisant pour ouvrir le droit à une rente de l'assurance-invalidité, même en retenant une capacité de travail de 80 %.
5.
5.1 Reste à examiner le calcul de la comparaison des revenus. A cet égard, il convient de se placer au moment de la naissance possible du droit à la rente, les revenus avec et sans invalidité étant par ailleurs déterminés par rapport au même moment (ATF 129 V 223 consid. 4.2). En l'occurrence, les documents du dossier ne permettent pas de déterminer précisément le moment à partir duquel le recourant a présenté une incapacité de travail susceptible d'ouvrir droit à une rente au sens de l'article 29 al. 1 let. b aLAI. Cependant, le recourant ne requiert une rente qu'à partir de juin 1997. Ainsi, la comparaison des revenus doit se faire au regard de la situation existant à cette date.
5.2 La juridiction cantonale a fixé le revenu de personne valide à 58'698 fr. en se fondant sur le rapport de l'enquête économique pour les agriculteurs du 6 octobre 2003. L'enquêteur avait arrêté ce montant en indiquant qu'il s'agissait du revenu agricole qui pouvait être tiré d'une exploitation agricole de plaine de la dimension de celle du recourant au jour du rapport, soit le 6 octobre 2003, sans handicap et en poursuivant l'activité agricole en production laitière.
Si l'on ne connaît pas les revenus agricoles réalisés par l'intéressé en 1997, on doit admettre qu'ils étaient en tout cas inférieurs au montant retenu par l'enquêteur, dès lors qu'en 1994, il a abandonné la production laitière en raison de son état de santé pour orienter son activité agricole vers la garde de vaches allaitantes. En 1993, avant sa reconversion, son revenu agricole s'élevait à 41'860 fr. après déduction du capital investi (cf. rapport complémentaire du 6 octobre 2003 de l'enquête économique pour les agriculteurs).
Dans ces circonstances, on peut retenir, à l'instar des premiers juges, le montant de 58'698 fr. au titre de revenu sans invalidité - au demeurant non contesté -, dès lors que même dans ce cas, le taux d'invalidité n'est pas suffisant pour ouvrir droit à une rente.
5.3 Quant au revenu d'invalide, il doit être fixé sur la base des données statistiques ressortant de l'enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) publiée par l'Office fédéral de la statistique (cf. ATF 126 V 75). Le salaire de référence est celui auquel peuvent prétendre les hommes effectuant des activités simples et répétitives (niveau 4) dans le secteur privé, à savoir 51'528 fr. par année (ESS 1996, TA1, p. 17). Adapté à l'évolution des salaires selon l'indice des salaires nominaux pour les hommes de l'année 1997 (0,5 %; La Vie économique 11/99, p. 28, B10.2), ce montant doit être porté à 51'785 fr 64. Du moment que ce salaire brut standardisé tient compte d'un horaire de travail de 40 heures par semaine et que les experts du COMAI ont estimé que le recourant pouvait travailler huit heures par jour (rapport du 27 décembre 2004), il n'y a pas lieu de l'adapter. Par ailleurs, l'abattement de 10 % retenu par les premiers juges, non contesté par le recourant, paraît approprié aux circonstances du cas particulier. Ainsi, le gain annuel d'invalide se monte à 46'607 fr. lorsque l'activité est exercée à plein temps.
Il s'ensuit que la comparaison des revenus abouti, dans l'hypothèse la plus favorable à l'assuré, soit en retenant une capacité de travail de 80 %, à un taux d'invalidité de 36,48 % (37'285,60 [80 % de 46'607] / 58'698), arrondi à 36 % (ATF 130 V 121), soit un taux inférieur à la limite de 40 % ouvrant droit à un quart de rente (cf. art 28 al. 1 aLAI).
6.
Mal fondé, le recours doit être rejeté. La procédure est gratuite, dès lors qu'elle porte sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurance (art. 134 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.
3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre des assurances, et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 7 juin 2006
Au nom du Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre: Le Greffier: