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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1P.238/2005 /svc 
 
Arrêt du 7 juillet 2005 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Féraud, Président, 
Aemisegger et Fonjallaz. 
Greffier: M. Rittener. 
 
Parties 
X.________, 
recourant, représenté par Me Yves Nicole, avocat, 
 
contre 
 
Municipalité de Y.________, représentée par 
Me Jacques Haldy, avocat, 
Tribunal administratif du canton de Vaud, 
avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne. 
 
Objet 
construction agricole, ordre de démolition, 
 
recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Vaud du 24 février 2005. 
 
Faits: 
A. 
X.________, qui exploite un domaine agricole sur le territoire de la Commune de Y.________, est propriétaire de la parcelle no xxx du registre foncier, sise hors du village, en zone agricole, et sur laquelle sont édifiés une habitation et un bâtiment agricole. Deux silos à fourrage hauts d'une quinzaine de mètres ont également été construits sur cette parcelle, dépassant la hauteur maximale autorisée par le règlement communal sur le plan d'extension et la police des constructions (10,50 m). 
Le 30 mai 1995, X.________ a présenté un projet tendant notamment à construire un hangar et à remplacer les silos existants par deux nouveaux silos d'une capacité supérieure. La Municipalité de Y.________ (ci-après: la municipalité) a accordé le permis de construire le 5 octobre 1995, à condition que la hauteur des nouveaux silos ne dépasse pas celle des anciens. 
B. 
Constatant que les nouveaux silos dépassaient de 2,42 m la hauteur autorisée par le permis de construire, la municipalité a d'abord exigé leur mise en conformité avec le permis, avant d'inviter X.________ à constituer un dossier en vue d'une mise à l'enquête des silos tels que réalisés. Elle a refusé le permis de construire par décision du 15 juillet 1996, confirmée par arrêt du 9 mars 1999 du Tribunal administratif du canton de Vaud. Le 29 mars 1999, la municipalité a demandé à X.________ de réduire la hauteur des silos litigieux. Ce dernier a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif, invoquant une violation du principe de la proportionnalité. 
Le constructeur des silos a devisé la réduction de leur hauteur à 140'000 fr. environ, auxquels s'ajouteraient environ 30'000 fr. pour le démontage et le remontage du hangar adjacent, alors que selon le rapport de l'expert désigné par le Tribunal, une telle opération reviendrait à 108'000 fr. environ, y compris le démontage partiel et le remontage du hangar. Par arrêt du 24 février 2005, le Tribunal administratif a rejeté le recours, considérant que les conditions permettant de renoncer à ordonner la "mise en conformité" n'étaient pas réalisées et qu'une telle mesure respectait le principe de la proportionnalité. Le Tribunal a imparti à X.________ un délai au 31 décembre 2005 pour procéder aux modifications requises. 
C. 
Agissant par la voie du recours de droit public, X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt. Il se plaint d'une violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.). Invoquant la garantie de la propriété (art. 26 Cst.), il se plaint également d'une violation du principe de la proportionnalité en raison du coût important de la "mise en conformité" et de l'écoulement d'un temps exceptionnellement long depuis la construction des silos litigieux. Le Tribunal administratif et la Municipalité de Y.________ concluent au rejet du recours. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Dans un premier grief, le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu, en raison du fait qu'il n'a pas été invité, dans la procédure de recours, à se déterminer sur une étude effectuée en mai 1995 dans le cadre de l'élaboration d'un plan directeur régional et citant son exploitation comme "exemple de non-intégration au site". Selon lui, ce document aurait joué un rôle déterminant dans le cadre de l'appréciation par le Tribunal administratif de l'atteinte portée au paysage. 
Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment le droit pour l'intéressé de prendre connaissance du dossier, et celui de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 129 II 497 consid. 2.2 p. 504 s.; 127 I 54 consid. 2b p. 56; 126 I 15 consid. 2aa p. 16; 124 I 48 consid. 3a p. 51 et les arrêts cités). Le droit de consulter le dossier s'étend à toutes les pièces décisives (ATF 121 I 225 consid. 2a p. 227 et les références citées). 
En l'occurrence, le document litigieux n'a pas joué de rôle déterminant dans le cadre de l'appréciation du Tribunal administratif. Il ressort au contraire de l'arrêt attaqué que le Tribunal a forgé son opinion en procédant à des constatations sur place; il a ainsi relevé que les silos litigieux "saut[aient] littéralement aux yeux", qu'ils présentaient une "image agressive" et se détachaient sur la crête reliant Z.________ à Y.________, portant atteinte au paysage. Ainsi, la référence faite à l'étude de 1995 est seulement destinée à corroborer ces observations et n'a pas influé de manière déterminante sur la décision. Au demeurant, il ressort du dossier que le recourant connaissait l'existence de ce document depuis le début de la procédure administrative, dès lors que la municipalité s'y réfère dans sa décision du 15 juillet 1996 déjà. Il s'est d'ailleurs déterminé à son sujet dans son recours du 5 août 1996, affirmant que cette étude avait été menée après la démolition des anciens silos. Manifestement mal fondé, ce grief doit donc être rejeté. 
2. 
Dans un second moyen, le recourant se plaint d'une atteinte à la garantie de la propriété (art. 26 Cst.) et d'une violation du principe de la proportionnalité (art. 5 al. 2 Cst.). Il soutient, en substance, que l'atteinte à la réglementation n'est pas importante et que les frais de "mise en conformité" lui seraient insupportables, à tel point que la survie économique de son exploitation serait en jeu. A cet égard, il se prévaut également de l'écoulement d'un temps exceptionnellement long depuis la construction des silos litigieux, ce qui contribuerait à rendre la mesure disproportionnée. 
2.1 La garantie de la propriété (art. 26 al. 1 Cst.) peut être restreinte aux conditions de l'art. 36 Cst. A teneur de l'alinéa 3 de cette disposition, toute restriction d'un droit fondamental doit être proportionnée au but visé. Selon la jurisprudence, l'ordre de démolir une construction édifiée sans permis et pour laquelle une autorisation ne pouvait être accordée n'est en soi pas contraire au principe de la proportionnalité. L'autorité renonce à une telle mesure si les dérogations à la règle sont mineures, si l'intérêt public lésé n'est pas de nature à justifier le dommage que la démolition causerait au maître de l'ouvrage, si celui-ci pouvait de bonne foi se croire autorisé à construire ou encore s'il y a des chances sérieuses de faire reconnaître la construction comme conforme au droit (ATF 123 II 248 consid. 3bb p. 252; 111 Ib 213 consid. 6b p. 224s.; 102 Ib 64 consid. 4 p. 69). Même un constructeur qui n'est pas de bonne foi peut invoquer le principe de proportionnalité. Toutefois, celui qui place l'autorité devant un fait accompli doit s'attendre à ce qu'elle se préoccupe plus de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (ATF 123 II 248 consid. 4a p. 255; 111 Ib 213 consid. 6b p. 224 et la jurisprudence citée). 
2.2 En l'espèce, les silos litigieux dépassent la hauteur autorisée dans le permis de 2,42 m. Quoi qu'en dise le recourant, il ne s'agit pas d'une atteinte mineure à la réglementation, ce d'autant plus que la hauteur autorisée par la municipalité dépassait déjà la hauteur maximale prescrite par le règlement communal des constructions. En outre, l'intérêt public lié à la protection du paysage - élément qui n'est pas contesté par le recourant - et au respect des règles de la police des constructions apparaît prépondérant, quand bien même le coût de mise en conformité des silos est important. Le recourant n'a du reste pas cherché à prouver que ce coût de 108'000 fr. environ - estimation qu'il avait critiquée devant le Tribunal administratif mais qu'il ne qualifie pas d'arbitraire dans son recours de droit public - est de nature à mettre en cause la survie économique de son exploitation. 
De surcroît, c'est à juste titre que le recourant ne se prévaut pas de sa bonne foi, dès lors qu'il a poursuivi jusqu'à son terme la construction des silos litigieux en sachant qu'ils dépasseraient la hauteur autorisée. Il lui eût pourtant été loisible de chercher une solution pour respecter le permis de construire ou d'interrompre la construction. Plutôt que d'agir ainsi, il a préféré placer la municipalité devant le fait accompli; celui qui viole aussi délibérément la loi doit en assumer les conséquences. Pour le surplus, il n'y a aucune chance de faire reconnaître la construction litigieuse comme conforme au droit, le Tribunal administratif ayant confirmé le caractère non réglementaire de celle-ci dans son arrêt du 9 mars 1999. 
Concernant enfin l'argument tiré de l'écoulement d'un temps exceptionnellement long depuis la construction des silos, il convient de relever que, contrairement à ce qu'affirme le recourant, la mesure ordonnée n'a pas un caractère de sanction administrative. C'est donc en vain qu'il se réfère à la jurisprudence rendue en matière de circulation routière, selon laquelle la sanction peut être atténuée, voire abandonnée, à certaines conditions, lorsqu'un temps relativement long s'est écoulé depuis l'événement qui la fonde (cf. ATF 127 II 297 consid. 3d p. 300; 120 Ib 504 consid. 4b p. 507 et les arrêts cités). Quoi qu'il en soit, le recourant est malvenu de se prévaloir de la lenteur de la procédure, dans la mesure où il a bénéficié des capacités de stockage supérieures de la construction non réglementaire durant tout ce temps. Au demeurant, la relative lenteur de la procédure ne saurait conduire à renoncer par principe à la mise en conformité de la construction. 
Ainsi, la remise en état est possible et la restriction à la garantie de la propriété du recourant est proportionnée au but visé. Par conséquent, ce second moyen est également rejeté. 
3. 
Il s'ensuit que le recours de droit public doit être rejeté. Pour tenir compte de la durée de la procédure de recours devant le Tribunal fédéral, le délai imparti par le Tribunal administratif pour le remise en état est prolongé au 30 juin 2006. Le recourant, qui succombe, doit supporter les frais de la présente procédure (art. 153, 153a et 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens à la Municipalité de Y.________ (art. 159 al. 1 et 2 OJ). 
 
Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours de droit public est rejeté. 
2. 
Le délai fixé au chiffre 2 du dispositif de l'arrêt attaqué est prolongé au 30 juin 2006. 
3. 
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant. 
4. 
Il n'est pas alloué de dépens. 
5. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au mandataire de la Municipalité de Y.________ et au Tribunal administratif du canton de Vaud. 
Lausanne, le 7 juillet 2005 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: