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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_939/2023  
 
 
Arrêt du 8 juillet 2024  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président, Bovey et De Rossa. 
Greffière : Mme Dolivo. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Sébastien Fanti, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Autorité de protection de l'enfant et de l'adulte des districts de Martigny et de St-Maurice, 
Objet 
curatelle de représentation et de gestion, 
 
recours contre l'arrêt de la Présidente de l'Autorité de recours en matière de protection de l'enfant et de l'adulte du Tribunal cantonal du canton du Valais du 6 novembre 2023 (C1 22 247). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, né en 1998, fait l'objet d'une mesure de curatelle de représentation et de gestion au sens des art. 394 al. 1 et 395 al. 2 CC, dont il a requis la mainlevée. Par décision du 14 octobre 2022, l'Autorité de protection de l'enfant et de l'adulte des districts de Martigny et de St-Maurice (APEA) a rejeté sa requête. 
Par arrêt du 6 novembre 2023, le recours formé par l'intéressé contre cette décision a été rejeté par la Présidente de l'Autorité de recours en matière de protection de l'enfant et de l'adulte du Tribunal cantonal du canton du Valais (ci-après: la Présidente). 
 
B.  
Agissant le 11 décembre 2023 par la voie du recours en matière civile, A.________ conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Il demande aussi que les frais de la procédure de première et de deuxième instance soient mis à la charge du canton du Valais et qu'une indemnité de dépens lui soit allouée pour ces deux procédures ainsi que pour la procédure de recours au Tribunal fédéral. 
Invitée à se déterminer, la Présidente a indiqué qu'elle n'avait pas d'observations à formuler et qu'elle se référait aux considérants de son arrêt. L'APEA a informé la Cour de céans qu'elle renonçait à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) à l'encontre d'une décision finale (art. 90 LTF) prise dans le domaine de la protection de l'adulte (art. 72 al. 2 let. b ch. 6 LTF), dans une affaire non pécuniaire (arrêt 5A_32/2024 du 2 avril 2024 consid. 1 et la référence), par une autorité cantonale de dernière instance ayant statué sur recours (art. 75 al. 1 et 2 LTF). La personne concernée, qui a participé à la procédure devant la juridiction précédente et a un intérêt digne de protection à l'annulation ou la modification de la décision attaquée, a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF).  
 
1.2. En tant que le recourant se plaint notamment d'une violation de son droit d'être entendu, ses conclusions purement cassatoires sont recevables. En effet, si le Tribunal fédéral accueillait le recours sur ce point, il ne serait pas en mesure de statuer lui-même sur le fond du litige (ATF 137 III 313 consid. 1.3; 134 III 379 consid. 1.3; 133 III 489 consid. 3.1).  
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF; ATF 147 I 73 consid. 2.1; 146 III 303 consid. 2; 142 III 364 consid. 2.4).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Relèvent de ces faits tant les constatations relatives aux circonstances touchant l'objet du litige que celles concernant le déroulement de la procédure conduite devant l'autorité précédente et en première instance, c'est-à-dire les constatations ayant trait aux faits procéduraux (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Le Tribunal fédéral ne peut s'écarter des constatations de l'autorité précédente que si ces faits ont été constatés de façon manifestement inexacte, c'est-à-dire arbiraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 148 IV 39 consid. 2.3.5; 147 I 73 consid. 2.2; 144 II 246 consid. 6.7) ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1).  
 
3.  
En premier lieu, il convient d'examiner le grief de violation du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) soulevé par le recourant en lien avec le fait que l'ensemble des pièces versées au dossier après la reddition de la décision de l'APEA ne lui auraient pas été communiquées par la Présidente, partant, qu'il n'aurait pas pu s'exprimer à leur sujet avant que la décision querellée soit rendue. 
 
3.1. Conformément aux art. 29 al. 2 Cst. et 6 par. 1 CEDH, les parties ont le droit d'être entendues. Compris comme l'un des aspects de la notion générale de procès équitable, le droit d'être entendu comprend en particulier le droit, pour une partie à un procès, de prendre connaissance de toute argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à son propos, que celle-ci contienne ou non de nouveaux éléments de fait ou de droit et qu'elle soit ou non concrètement susceptible d'influer sur le jugement à rendre. Il appartient aux parties, et non au juge, de décider si une prise de position ou une pièce nouvellement versée au dossier contient des éléments déterminants qui appellent des observations de leur part. Toute prise de position ou pièce nouvelle versée au dossier doit dès lors être communiquée aux parties pour leur permettre de décider si elles veulent ou non faire usage de leur faculté de se déterminer (ATF 146 III 97 consid. 3.4.1 et les références; 138 I 154 consid. 2.3.3; parmi plusieurs, 5A_210/2023 du 28 septembre 2023 consid. 3.4).  
En principe, la violation du droit d'être entendu entraîne l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond. Toutefois, le droit d'être entendu n'est pas une fin en soi; il doit permettre d'éviter qu'une procédure judiciaire ne débouche sur un jugement vicié en raison de la violation du droit des parties de participer à la procédure, notamment à l'administration des preuves. Lorsqu'on ne voit pas quelle influence la violation du droit d'être entendu a pu avoir sur la procédure, il n'y a pas lieu d'annuler la décision attaquée (ATF 143 IV 380 consid. 1.4.1; arrêt 4A_216/2021 du 2 novembre 2021 consid. 4.2). 
 
3.2. En l'espèce, la juridiction précédente a confirmé le refus de l'APEA de lever la mesure de curatelle en se fondant notamment sur des faits postérieurs à la décision de cette autorité (i.e. le 14 octobre 2022). Elle a ainsi apprécié de nombreuses pièces datées de 2023, qu'elle a listées et résumées sur une page et demie dans la partie "faits" de son arrêt, et dont elle a tenu compte dans son raisonnement juridique (cf. arrêt cantonal, consid. 3.2 p. 8 et p. 4 et 5 de l'arrêt entrepris, let. D), à savoir: un rapport du curateur pour l'exercice 2022, transmis par ledit curateur à l'APEA le 26 janvier 2023; un courrier du curateur du 1er février 2023, signalant que A.________ s'était fait notifier, le 31 janvier 2023, un mandat de répression par la Commune de U.________ pour des actes commis entre 2018 et 2022; plusieurs courriels que l'intéressé avait adressé au curateur; le procès-verbal de l'audience qui s'est tenue devant l'APEA le 11 mai 2023, séance lors de laquelle il avait été proposé d'alléger la mesure par le biais d'une restitution à l'intéressé de l'exercice de ses droits civils sur une période de trois mois, avant de réévaluer la situation au mois d'août 2023, une décision sur ce point devant toutefois encore être rendue après la séance; un courrier du 2 juin 2023 adressé par un employé de la Banque B.________ au curateur, l'avertissant que celui-ci se serait présenté comme courtier et/ou gestionnaire de fortune auprès de clients de la banque, ainsi qu'une carte de visite; un commandement de payer que s'était vu notifier l'intéressé le 21 juillet 2023 pour une somme de 20'000 fr., qui se fondait sur une reconnaissance de dette du 17 février 2023; une pièce du 23 août 2023 dans laquelle le curateur était interpellé en raison de plusieurs plaintes émanant du propriétaire du logement que l'intéressé occupe ainsi que de la copropriété; un courriel du 5 septembre 2023 dans lequel Me C.________ a interpellé le curateur en lui transmettant un message dans lequel A.________ se serait photographié avec une importante liasse de billets et laissant entendre qu'il aurait effectué "deux investissements pour 100'000 fr." et qu'il aurait acquis un véhicule immatriculé au nom d'un tiers; un autre courriel adressé par le curateur à l'APEA le 18 septembre 2023; de nombreux courriers adressés par A.________ à l'APEA, dans lesquels il demandait notamment l'ouverture d'une procédure judiciaire contre sa mère en alléguant qu'elle lui aurait soustrait de l'argent; enfin, un courrier adressé par l'APEA à l'intéressé le 18 septembre 2023, l'informant qu'elle entendait le citer à une audience et évaluer la nécessité d'ordonner une nouvelle expertise psychiatrique. Sur la base de ces pièces, qui témoignaient selon elle d'une incapacité à anticiper et éviter des actes ayant des conséquences néfastes sur sa situation, la cour cantonale a considéré que la situation de l'intéressé s'était dégradée. Ces documents faisaient craindre au surplus, à court terme, une mise en danger évidente de ses intérêts patrimoniaux au vu de l'importance des montants en jeu. La collaboration de A.________ avec son curateur devait être qualifiée de mauvaise, son attitude étant parfois ouvertement provocante. En outre, la mise en place d'un suivi socio-éducatif à domicile afin d'encourager sa prise d'autonomie avait été refusée par l'intéressé, comme cela ressortait de la pièce 1091, soit le procès-verbal de l'audience qui s'était tenue le 11 mai 2023 devant l'APEA. L'autorité précédente a jugé que dans de telles circonstances, un allègement de la mesure était impossible.  
 
3.3. Le recourant soutient que ces documents, qui ont été ajoutés au dossier de première instance après qu'il a interjeté recours contre la décision de l'APEA, ne lui ont jamais été formellement transmis par l'autorité de recours cantonale pour qu'il puisse se déterminer à leur propos avant que la décision querellée soit rendue. La Présidente, qui s'est limitée à se référer aux considérants de son arrêt, ne réfute pas ces allégations.  
Le recourant ne peut être totalement suivi. En effet, il ressort du dossier cantonal qu'il a lui-même adressé à la Présidente, par courrier du "11 juin 2022" (recte: 2023) parvenu au greffe du Tribunal cantonal le 13 juin 2023, une copie du rapport du curateur daté du 26 janvier 2023 (fait complété d'office selon l'art. 105 al. 2 LTF). Il ne pouvait dès lors ignorer que ce document pouvait être pris en considération par l'autorité de recours et a eu le loisir de se déterminer à son égard, ce qu'il a d'ailleurs fait en indiquant, dans son courrier précité, que dans ce rapport, le curateur "déclare que tout va bien et que tout c'est améliorer (sic) et que j'ai mes capacités de discernement". 
Aucun élément du dossier ne permet cependant de démontrer que les nombreuses autres pièces postérieures au premier jugement prises en considération dans l'arrêt querellé auraient été communiquées au recourant, comme l'imposait le respect de son droit d'être entendu. La seule invitation qui lui a été faite de "consulter le dossier des causes" au greffe du Tribunal cantonal, dans un courrier que la Présidente a adressé à son conseil le 18 septembre 2023 (fait complété d'office selon l'art. 105 al. 2 LTF), est insuffisante à cet égard; en effet, le simple fait que A.________ (ou son conseil) ait eu accès au dossier ne remplace pas la communication desdites pièces (ATF 137 I 195 consid. 2.6; arrêts 5A_210/2023 du 28 septembre 2023 consid. 3.4-3.5 et les références; 5A_535/2012 du 6 décembre 2012 consid. 2.3). Enfin, dès lors que le rejet de la demande de curatelle repose notamment sur l'appréciation que la juridiction précédente a faite de ces pièces, on ne se trouve pas dans une situation où l'on ne verrait pas quelle influence celles-ci ont pu avoir sur la procédure (cf. supra consid. 3.1 in fine), étant de surcroît relevé que le recourant a exposé, dans son recours fédéral, quels arguments il aurait fait valoir s'il avait pu s'exprimer et en quoi ceux-ci auraient été pertinents (cf. à cet égard arrêt 5A_210/2023 précité consid. 3.4, 2e §). 
L'admission du présent grief scelle le sort du recours. La cause doit être renvoyée à la juridiction précédente pour qu'elle transmette au recourant les pièces du dossier postérieures à la décision de l'APEA (hormis le rapport du curateur du 26 janvier 2023) et lui permette de se déterminer à leur sujet, avant de rendre une nouvelle décision. 
 
4.  
En définitive, le recours est admis pour violation du droit d'être entendu, sans possibilité de réparer les vices en instance fédérale (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1; 137 I 195 consid. 2.7 et la jurisprudence citée). La décision attaquée doit être annulée et l'affaire renvoyée à la juridiction précédente pour instruction et nouvelle décision, au sens des considérants. La cause lui est aussi renvoyée pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale (art. 67 et 68 al. 5 LTF). Le canton du Valais, qui n'a pas à supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF), versera une indemnité de dépens au recourant qui l'emporte (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis, l'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à la Présidente de l'Autorité de recours en matière de protection de l'enfant et de l'adulte du canton du Valais pour instruction et nouvelle décision, dans le sens des considérants. 
 
2.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.  
Une indemnité de 1'500 fr., à verser au recourant à titre de dépens, est mise à la charge du canton du Valais. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué au recourant, à l'Autorité de protection de l'enfant et de l'adulte des districts de Martigny et de St-Maurice et à la Présidente de l'Autorité de recours en matière de protection de l'enfant et de l'adulte du Tribunal cantonal du canton du Valais. 
 
 
Lausanne, le 8 juillet 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : Dolivo