Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
5A_973/2021
Arrêt du 8 août 2022
IIe Cour de droit civil
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président,
Marazzi et von Werdt.
Greffier : M. Piccinin.
A.________,
représentée par Me Pierre Gabus, avocat,
recourante,
contre
B.________,
représenté par Me Julien Pacot, avocat,
intimé.
entretien des enfants (nés hors mariage),
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, du 12 octobre 2021 (C/28896/2018, ACJC/1360/2021).
Faits :
A.
A.a. B.________ et A.________ sont les parents non mariés de C.________, né en 2007, et de D.________ né en 2013.
Les parents se sont séparés fin 2013.
A.b. Le 14 mai 2019, le père a introduit une demande devant le Tribunal de première instance de Genève tendant à ce que la garde sur les enfants s'exerce de manière partagée entre les parents à raison d'une semaine chacun, à ce que l'entretien convenable de C.________ soit fixé à 715 fr. par mois et celui de D.________ à 535 fr. par mois, à ce que chaque parent soit condamné à prendre à sa charge l'entretien courant des enfants lorsque ceux-ci seraient chez lui, le père s'engageant à prendre à sa charge la majeure partie de l'entretien des enfants en payant directement toutes leurs charges fixes et à prendre directement à sa charge les frais d'entretien extraordinaires de ceux-ci jusqu'à la somme annuelle de 3'000 fr., à ce qu'aucune contribution d'entretien en faveur des enfants ne soit due et à ce que les allocations familiales soient réparties par moitié entre les parents.
La mère a conclu au déboutement des conclusions du père, à l'attribution de la garde des enfants en sa faveur, sous réserve d'un large droit aux relations personnelles au père, et au versement de contributions d'entretien mensuelles de 1'050 fr. en faveur de C.________ et de 850 fr. en faveur de D.________, les frais d'entretien extraordinaires des enfants devant être assumés par le père conformément à son engagement.
B.
B.a. Par jugement du 27 janvier 2021, le Tribunal de première instance a, entre autres, ordonné l'instauration d'une garde alternée sur les enfants s'exerçant une semaine sur deux et la moitié des vacances scolaires chez chaque parent, condamné le père à verser chaque mois en mains de la mère, à titre de contributions d'entretien en faveur des enfants, 300 fr. chacun jusqu'à l'âge de 10 ans et 500 fr. dès l'âge de 10 ans jusqu'en août 2025, puis dès septembre 2025, 300 fr. chacun jusqu'à l'âge de 18 ans, voire au-delà en cas d'études régulières et suivies mais au plus tard jusqu'à l'âge de 25 ans, à charge pour la mère de s'acquitter de l'ensemble des factures des enfants, et dit que les frais extraordinaires des enfants sont répartis à concurrence de deux tiers à la charge du père jusqu'en septembre 2025, puis partagés par la moitié entre les parties dès septembre 2025.
B.b. Statuant sur appel de chaque parent par arrêt du 12 octobre 2021, la Cour de justice du canton de Genève a réformé le jugement de première instance, en condamnant le père à verser en mains de la mère, à titre de contributions d'entretien mensuelles, du 1er janvier 2019 au 31 janvier 2021, la somme de 500 fr. en faveur de C.________ et la somme de 300 fr. en faveur de D.________; du 1er février 2021 au 31 août 2025, les sommes de 200 fr. par enfant jusqu'à l'âge de 10 ans et de 300 fr. dès l'âge de 10 ans; du 1er septembre 2025 et jusqu'à la majorité, voire au-delà en cas d'études sérieuses et régulières, la somme de 100 fr. par enfant, à charge pour la mère de s'acquitter de l'ensemble des factures concernant les enfants pour chacune de ces périodes.
C.
Par acte du 25 novembre 2021, A.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Elle conclut principalement à l'annulation de l'arrêt querellé et à sa réforme en ce sens que le père soit condamné à payer chaque mois en ses mains pour chaque enfant, du 1er février 2021 au 31 août 2025, la somme de 468 fr. jusqu'à l'âge de 10 ans et la somme de 568 fr. dès l'âge de 10 ans, puis, dès le 1er septembre 2025 et jusqu'à la majorité de chaque enfant, voire au-delà en cas d'études sérieuses et régulières, la somme de 500 fr. Elle sollicite en outre le bénéfice de l'assistance judiciaire pour la procédure fédérale.
Invités à déposer une réponse, la cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt et l'intimé conclut au rejet du recours.
La recourante a répliqué et l'intimé dupliqué.
Considérant en droit :
1.
Le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans la forme légale (art. 42 al. 1 LTF), contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue sur recours par une autorité cantonale de dernière instance ( art. 75 al. 1 et 2 LTF ), dans une affaire civile (art. 72 al. 1 LTF) de nature pécuniaire. La valeur litigieuse requise est atteinte (art. 51 al. 1 let. a et al. 4, 74 al. 1 let. b LTF). La recourante a pris part à la procédure devant l'autorité précédente et a un intérêt digne de protection à l'annulation ou la modification de la décision attaquée ( art. 76 al. 1 let. a et b LTF ). Le recours est ainsi recevable au regard de ces dispositions.
2.
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être lié ni par les motifs de l'autorité précédente, ni par les moyens des parties; il peut donc admettre le recours en se fondant sur d'autres arguments que ceux invoqués par le recourant, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.2; 145 V 215 consid. 1.1; 144 III 462 consid. 3.2.3). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l' art. 42 al. 1 et 2 LTF , il n'examine en principe que les griefs soulevés; il n'est pas tenu de traiter, à l'instar d'une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui peuvent se poser, lorsqu'elles ne sont plus discutées devant lui (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4 et la référence). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée par le recourant (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1; 142 II 369 consid. 2.1).
2.2. En vertu du principe de l'épuisement des griefs, le recours n'est ouvert qu'à l'encontre des décisions rendues par une autorité cantonale de dernière instance (art. 75 al. 1 LTF), ce qui signifie que les voies de droit cantonales doivent avoir été non seulement utilisées sur le plan formel, mais aussi épuisées sur le plan matériel (ATF 146 III 203 consid. 3.3.4; 145 III 42 consid. 2.2.2; 143 III 290 consid. 1.1 et les références). Lorsque l'autorité de dernière instance cantonale peut se limiter à examiner les griefs régulièrement soulevés, le principe de l'épuisement matériel veut que les griefs soumis au Tribunal fédéral aient déjà été invoqués devant la juridiction précédente (arrêts 5A_564/2021 du 21 février 2022 consid. 2.3; 4A_40/2021 du 10 juin 2021 consid. 3.2 et les références, publié
in SJ 2021 I p. 451).
3.
3.1. Dans un premier grief, la recourante fait valoir que la méthode de calcul dite " concrète en deux étapes " n'a pas correctement été appliquée. Elle relève que si la cour cantonale a, à juste titre, arrêté les ressources de la famille et les besoins des enfants, elle a en revanche omis de procéder au calcul de l'excédent de la famille et de partager celui-ci, alors que la famille disposait encore de ressources après couverture du minimum vital élargi de chacun de ses membres. Cette omission allait à l'encontre de l'ATF 147 III 265 qui prévoyait une répartition de l'excédent par " grandes et petites têtes ", le juge pouvant déroger à cette répartition à condition de motiver sa décision. L'arrêt querellé contrevenait ainsi au droit, en particulier aux art. 276 et 285 CC , privant ainsi les enfants d'un sixième de l'excédent des parents qui aurait dû être inclus dans les contributions d'entretien en leur faveur.
3.2. Dans la réponse du 30 avril 2021 sur l'appel du père que la recourante a déposé devant la cour cantonale (p. 20 et 21), celle-ci avait indiqué que le Tribunal de première instance avait correctement appliqué la méthode du minimum vital avec répartition de l'excédent, en relevant que la méthode retenue par celui-ci pour fixer les contributions d'entretien dues aux enfants ne violait ni les dispositions légales ni la jurisprudence récente en la matière. Or, le premier juge avait condamné le père à verser des contributions mensuelles arrêtées en équité à 300 fr. par enfant jusqu'à l'âge de 10 ans et à 500 fr. dès l'âge de 10 ans jusqu'en septembre 2025, puis dès septembre 2025 à 300 fr., en répartissant les charges des enfants (fixées à 610 fr. pour l'aîné et, pour le cadet, à 460 fr., puis à 660 fr. dès l'âge de 10 ans) entre les parents en fonction du solde disponible de ceux-ci. Il en résulte que le jugement de première instance fixait déjà les contributions d'entretien en faveur des enfants de manière à couvrir uniquement les charges mensuelles des enfants, sans prendre en compte une part de l'excédent des parents. Dès lors que la recourante n'a soulevé aucune critique en appel sur cette manière de procéder - et qu'elle l'a même approuvée -, son grief formulé pour la première fois devant le Tribunal fédéral est irrecevable, faute de respecter le principe de l'épuisement matériel des instances (cf.
supra consid. 2.2).
4.
4.1. Dans un second grief, la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir retenu, dans les charges mensuelles du père, un montant de 564 fr. au titre de ses cotisations de prévoyance à un 3ème pilier. Elle relève qu'une telle charge ne peut être prise en compte dans le calcul du minimum vital élargi du droit de la famille que pour les travailleurs indépendants. Dans la mesure où le père était employé, il n'y avait pas lieu de retenir cette charge dans son minimum vital. Le solde disponible de celui-ci était ainsi plus élevé que celui retenu dans l'arrêt querellé, ce qui augmentait proportionnellement la part de l'excédent à prendre en considération dans les contributions d'entretien en faveur des enfants.
4.2. Pour déterminer les besoins, respectivement l'entretien convenable, il faut partir des " Lignes directrices pour le calcul du minimum vital du droit des poursuites selon l'art. 93 LP " établies par la Conférence des préposés aux poursuites et faillites de Suisse. Dans la mesure où les ressources financières le permettent, l'entretien convenable doit être élargi au minimum vital du droit de la famille, auquel chacun peut alors prétendre. Le minimum vital élargi de chaque parent (père et mère) comprend typiquement les impôts, un forfait pour les télécommunications et un forfait d'assurances, des frais de formation continue nécessaires, des frais de logement correspondant au train de vie, et non ceux prévus par le droit des poursuites, les frais encourus pour l'exercice du droit aux relations personnelles et, à la rigueur, un certain amortissement de dettes. En cas de situation financière assez favorable, il est possible d'ajouter encore d'autres charges, notamment les primes d'assurance-maladie excédant l'assurance de base obligatoire et, s'il y a lieu, la constitution d'une prévoyance privée pour indépendants (ATF 147 III 265 consid. 7.2; arrêt 5A_593/2021 du 29 octobre 2021 consid. 3.2). Pour un salarié, les cotisations des assurances de troisième pilier n'ont en revanche pas à être prises en compte dans le calcul du minimum vital (arrêt 5A_608/2011 du 13 décembre 2011 consid. 6.2.3). En tant que ces assurances servent à la constitution de l'épargne, il peut néanmoins en être tenu compte au moment de répartir l'excédent (voir ATF 147 III 265 consid. 7.2 et 7.3).
4.3. En l'espèce, il ressort effectivement de l'arrêt querellé que le père est salarié et que ses cotisations de prévoyance 3ème pilier ont été prises en compte dans le calcul de ses charges mensuelles, ce qui n'est pas conforme à la jurisprudence précitée. Cela étant, la recourante tire toutefois uniquement comme conséquence de cette violation que la part de l'excédent des parents à prendre en compte dans les contributions d'entretien en faveur des enfants aurait dû être supérieure. Or, vu que la recourante n'a pas contesté en appel que les contributions d'entretien en faveur des enfants fixées dans le jugement de première instance ne comprenaient pas une part de l'excédent (cf.
supra consid. 3.2), elle ne saurait se prévaloir devant le Tribunal fédéral (cf.
supra consid. 2.2) du fait que cette part devait être supérieure. Partant, son second grief doit être rejeté.
5.
Vu ce qui précède, le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable, aux frais de la recourante (art. 66 al. 1 LTF), qui versera en outre une indemnité de dépens à l'intimé ( art. 68 al. 1 et 2 LTF ). Dès lors que le recours était d'emblée dénué de chances de succès, la requête d'assistance judiciaire de la recourante est rejetée (art. 64 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
La requête d'assistance judiciaire de la recourante est rejetée.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
4.
Une indemnité de 2'500 fr., à verser à l'intimé à titre de dépens, est mise à la charge de la recourante.
5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 8 août 2022
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Herrmann
Le Greffier : Piccinin