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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6P.29/2005 
6S.104/2005 /rod 
 
Arrêt du 9 mai 2005 
Cour de cassation pénale 
 
Composition 
MM. les Juges Schneider, Président, 
Kolly et Karlen. 
Greffière: Mme Kistler. 
 
Parties 
X.________, 
recourant, 
 
contre 
 
Procureur général du canton de Genève, 
case postale 3565, 1211 Genève 3, 
Chambre d'accusation du canton de Genève, 
case postale 3108, 1211 Genève 3. 
 
Objet 
Ordonnance de classement; discrimination raciale, 
 
recours de droit public et pourvoi en nullité contre l'ordonnance de la Chambre d'accusation du canton de Genève, du 31 janvier 2005. 
 
Faits: 
A. 
X.________ a dénoncé Y.________ pour des propos tenus en public à Genève le 25 février 2004 sur un plateau de télévision lors d'une émission programmée à 21h50. La dénonciation pour discrimination raciale se fondait sur les propos tenus au sujet des relations entre l'Etat d'Israël et le régime d'apartheid en Afrique du Sud. Le 11 décembre 2004, le Procureur général du canton de Genève a décidé de ne pas donner suite à la dénonciation. 
 
X.________ a recouru devant la Chambre d'accusation genevoise. Celle-ci est entrée en matière sur le recours, mais l'a rejeté par ordonnance du 31 janvier 2005. 
B. 
Contre cette ordonnance, X.________ dépose un recours de droit public et un pourvoi en nullité au Tribunal fédéral. Il n'y a pas eu d'échange d'écritures. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
I. Recours de droit public 
1. 
Le Tribunal fédéral examine d'office et avec un libre pouvoir d'examen la recevabilité des recours dont il est saisi (ATF 129 IV 216 consid. 1 p. 217). La question de la qualité pour recourir est régie par le seul droit fédéral; le fait d'avoir eu la qualité de partie et la qualité pour recourir en vertu du droit de procédure cantonal est sans pertinence (ATF 128 IV 37 consid. 3 p. 38). 
1.1 Aux termes de l'art. 88 OJ, la qualité pour former un recours de droit public est reconnue aux particuliers ou aux collectivités lésés par les arrêtés ou décisions qui les concernent personnellement ou qui sont de portée générale. De jurisprudence constante, la personne lésée par une infraction ne peut pas se fonder sur cette disposition pour contester une décision de non-lieu, de classement ou d'acquittement, car le droit de punir appartient à l'Etat et qu'elle n'est dès lors pas atteinte dans un droit qui lui est propre. Elle ne peut invoquer que la violation de règles de procédure destinées à sa protection. Par exemple, elle peut faire valoir que son recours a été déclaré à tort irrecevable, qu'elle n'a pas été entendue, qu'on ne lui a pas donné l'occasion de présenter ses moyens de preuve ou qu'elle n'a pas pu prendre connaissance du dossier. Mais elle ne saurait se plaindre ni de l'appréciation des preuves, ni du rejet de ses propositions si l'autorité retient que les preuves offertes sont impropres à ébranler sa conviction, car ces griefs sont de manière indissociable liés à l'examen du fond (ATF 121 IV 317 consid. 3b p. 324). 
 
En l'espèce, le recourant se plaint uniquement d'une violation de l'interdiction constitutionnelle de l'arbitraire lors de l'appréciation des preuves et de l'établissement des faits. L'art. 88 OJ ne lui donne pas qualité pour le faire. 
1.2 Toutefois, la LAVI renforce les droits de procédure des personnes victimes d'une infraction en leur ouvrant, à certaines conditions, les mêmes recours qu'au prévenu, dont le recours de droit public (art. 8 al. 1 let. c LAVI). Mais seul celui qui a subi une atteinte directe à son intégrité corporelle, sexuelle ou psychique du fait de l'infraction dénoncée est une victime au sens de cette loi (art. 2 al. 1 LAVI). 
 
L'atteinte doit être directe. En ce qui concerne l'infraction de discrimination raciale (art. 261bis CP), la jurisprudence a jugé que la qualité de victime pouvait être reconnue à la personne qui était personnellement visée par l'acte prohibé; ainsi la victime pourra être la personne envers laquelle l'auteur a incité publiquement à la haine ou à la discrimination (art. 261bis al. 1 CP), celle qu'il aura rabaissée ou discriminée (art. 261bis al. 4 première partie CP), ou encore celle à qui il aura refusé une prestation destinée à l'usage public (art. 261bis al. 5 CP). Dans ces hypothèses, la personne est directement visée comme en cas d'acte attentatoire à l'honneur (art. 173 ss CP). En revanche, dans l'hypothèse d'une négation d'un génocide ou d'autres crimes contre l'humanité (art. 261bis al. 4 seconde partie CP), les individus appartenant au groupe de personnes ayant subi le génocide ou les crimes contre l'humanité ne peuvent pas se prévaloir de la qualité de victime, parce que l'infraction ne les vise pas directement; la norme pénale protège la paix publique et non pas, sinon éventuellement à titre indirect, l'intégrité psychique d'une personne déterminée. Il en a été déduit qu'en cas de négation de génocides ou de crimes contre l'humanité, il n'y avait pas de victime au sens de l'art. 2 LAVI (ATF 129 IV 95 consid. 3.1 et 3.2 p. 98 ss). 
 
En outre, l'atteinte doit avoir une certaine gravité. Il ne suffit pas que la victime ait subi des désagréments, qu'elle ait eu peur ou qu'elle ait senti quelques douleurs (ATF 129 IV 216 consid. 1.2.1 p. 218). Une atteinte à l'honneur ne cause en principe pas de telles atteintes (ATF 129 IV 206 consid. 1 p. 207, 128 I 218 consid. 1.2 p. 221). En présence d'infractions contre la réputation, telle la calomnie ou la diffamation, la qualité de victime ne sera admise que si les circonstances sont suffisamment graves pour entraîner une atteinte significative à l'intégrité psychique du lésé (ATF 120 Ia 157 consid. 2d/aa p. 162; Cédric Mizel, La qualité de victime LAVI et la mesure actuelle des droits qui en découlent, JT 2003 IV 38, spéc. ch. 47, p. 62). Pour juger du caractère significatif de l'atteinte, il faut se placer d'un point de vue objectif et non en fonction de la sensibilité personnelle et subjective du lésé (ATF 120 Ia 157 consid. 2d/cc p. 164; arrêt 1P.459/2003 du 21 août 2003 consid. 1.3, cité par Mizel, op. cit., note 143 ad ch. 66, p. 68; cf. aussi arrêts 1A.70/2004 consid. 2.2 et 6S.351/2004 consid. 2.3.2). 
 
Ces critères s'appliquent aussi en cas de discrimination raciale. La qualité de victime ne sera admise que dans les cas particulièrement graves, par exemple lorsque les propos raciaux seront tenus à l'encontre d'un ancien détenu d'un camp de concentration et réveilleront chez ce dernier un traumatisme induisant une grave atteinte à l'intégrité psychique. La Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale du 21 décembre 1965 (RS 0.104), entrée en vigueur pour la Suisse le 29 décembre 1994 (RO 1994, p. 1164 ss), n'implique pas d'admettre plus largement la qualité pour recourir ni, par conséquent, d'interpréter plus largement l'art. 2 LAVI dans le domaine de la discrimination raciale (arrêt 6P.137/2004, consid. 1, du 20 janvier 2005, prévu pour publication; ATF 128 I 218 consid. 1.5 p. 223 s.). 
 
En l'espèce, les propos litigieux, qui consistaient en une critique de la politique suivie par l'Etat d'Israël, n'étaient pas dirigés contre la personne du recourant. Au surplus, ils ne sauraient, d'un point de vue objectif, être considérés comme normalement susceptibles de causer une atteinte significative à l'intégrité psychique d'une personne même ayant des liens avec l'Etat d'Israël; le recourant n'allègue d'ailleurs aucune atteinte concrète. Partant, il ne saurait lui être reconnu la qualité de victime. Il ne peut donc se prévaloir de cette qualité pour interjeter un recours de droit public. 
 
 
II. Pourvoi en nullité 
2. 
Le recourant a également interjeté un pourvoi en nullité, dans lequel il mélange au demeurant des critiques relatives à la procédure et des critiques qui concernent l'application du droit pénal fédéral et des conventions internationales. Or le pourvoi n'est ouvert qu'aux victimes au sens de la LAVI (art. 270 let. e PPF), qualité que le recourant n'a pas. En outre, la discrimination raciale étant poursuivie d'office et par le Ministère public, le recourant n'a ni la qualité de plaignant au sens de l'art. 28 CP (art. 270 let. f PPF; ATF 127 IV 185 consid. 2 p. 188 s.) ni celle d'accusateur privé (art. 270 let. g PPF; ATF 128 IV 39 consid. 2 p. 40 s.). Le pourvoi est donc aussi irrecevable faute de qualité pour recourir. 
3. 
Le recourant supporte les frais de la procédure (art. 156 OJ et art. 278 PPF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours de droit public est irrecevable. 
2. 
Le pourvoi est irrecevable. 
3. 
Un émolument judiciaire de 2'000 francs est mis à la charge du recourant. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant, au Procureur général et à la Chambre d'accusation du canton de Genève. 
Lausanne, le 9 mai 2005 
Au nom de la Cour de cassation pénale 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: