Eidgenössisches Versicherungsgericht
Tribunale federale delle assicurazioni
Tribunal federal d'assicuranzas
Cour des assurances sociales
du Tribunal fédéral
Cause {T 7}
I 876/05
Arrêt du 9 novembre 2006
IIe Chambre
Composition
Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Borella et Kernen. Greffière : Mme Berset
Parties
B.________, recourant, représenté par Me Alain Schweingruber, avocat, avenue de la Gare 49, 2800 Delémont,
contre
Office AI Berne, Chutzenstrasse 10, 3007 Berne, intimé
Instance précédente
Tribunal administratif du canton de Berne, Berne
(Jugement du 26 octobre 2005)
Faits:
A.
B.________, né en 1973, a travaillé en qualité de mécanicien sur machines au service de l'entreprise X.________ SA. Le 6 juin 2001, il a sollicité des prestations de l'assurance-invalidité en raison d'une atteinte rhumatismale chronique, d'une aphtose bipolaire ainsi que d'une maladie de Behçet (atteintes remontant à 1999).
Entre autres mesures d'instruction, l'Office AI du canton de Berne a recueilli l'opinion des médecins traitants de l'assuré, les docteurs D.________, interniste (rapports des 19 mars, 11 avril et 10 octobre 2001, ainsi que du 23 octobre 2002) et M.________, rhumatologue (rapport du 30 août 2001). Par ailleurs, il a confié une expertise pluridisciplinaire au Centre d'observation médicale de l'assurance-invalidité (COMAI) à la Policlinique Y.________ (rapport du 30 décembre 2003). Il ressort des conclusions des médecins du COMAI que l'activité de mécanicien sur machines est trop exigeante physiquement et que l'intéressé est apte à exercer une activité légère adaptée à raison de 70 %.
Par décision du 18 août 2004, confirmée sur opposition le 14 janvier 2005, l'Office AI a rejeté la demande de prestations au motif que la comparaison du revenu sans invalidité de 57'200 fr. et du revenu d'invalide de 35'888 fr., calculé sur la base des statistiques salariales, conduisait à une invalidité de 37 %.
B.
Par jugement du 26 octobre 2005, le Tribunal administratif du canton de Berne a rejeté le recours formé par l'assuré contre cette décision.
C.
B.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont il requiert l'annulation, sous suite de frais et dépens. A l'appui de ses conclusions, qui tendent implicitement à l'octroi d'une rente d'invalidité entière, le recourant produit un rapport du 23 janvier 2005 du docteur C.________, spécialiste en médecine générale. Par ailleurs, il sollicite le bénéfice de l'assistance judiciaire gratuite.
L'office AI conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit:
1.
Le litige porte sur le droit du recourant à une rente de l'assurance-invalidité, singulièrement sur le taux d'invalidité à la base de cette prestation.
1.1 Le jugement entrepris porte sur des prestations de l'assurance-invalidité. Selon l'art. 132 al. 1 OJ dans sa version selon le ch. III de la loi fédérale du 16 décembre 2005 portant modification de la LAI (en vigueur depuis le 1er juillet 2006), dans une procédure concernant l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, le Tribunal fédéral des assurances peut aussi examiner l'inopportunité de la décision attaquée et n'est pas lié par la constatation de l'état de fait de l'autorité cantonale de recours. En vertu de l'art. 132 al. 2 OJ, ces dérogations ne sont cependant pas applicables lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne les prestations de l'assurance-invalidité. Selon le ch. II let. c de la loi fédérale du 16 décembre 2005, l'ancien droit s'applique aux recours pendants devant le Tribunal fédéral des assurances au moment de l'entrée en vigueur de la modification. Dès lors que le recours qui est soumis au Tribunal fédéral des assurances était pendant devant lui au 1er juillet 2006, son pouvoir d'examen résulte de l'art. 132 OJ (dans sa teneur en vigueur jusqu'au 30 juin 2006).
1.2 Les premiers juges ont exposé correctement les dispositions légales et les principes jurisprudentiels relatifs à la notion d'invalidité (art. 8 al. 1 LPGA et 4 LAI), à son évaluation chez les assurés actifs (art. 16 LPGA et 28 al. 2 LAI), à l'échelonnement des rentes selon le taux d'invalidité (art. 28 al. 1 LAI dans sa version antérieure et postérieure au 1er janvier 2004), ainsi qu'à la valeur probante des rapports et expertises médicaux (ATF 125 V 352 consid. 3a et les références). Il convient donc de renvoyer à leurs considérants, en précisant que les principes développés jusqu'alors par la jurisprudence en matière d'évaluation de l'invalidité demeurent applicables, que ce soit sous l'empire de la LPGA ou de la 4ème révision de la LAI (ATF 130 V 348 consid. 3.4; arrêts P. du 17 mai 2005, I 7/05, consid. 2, et M. du 6 septembre 2004, I 249/04, consid. 4).
2.
2.1 Se fondant sur les conclusions des médecins du COMAI, la juridiction cantonale a considéré que le recourant disposait d'une capacité résiduelle de travail de 70 % dans une activité adaptée (soit une occupation physiquement peu exigeante, permettant l'alternance des positions, offrant un horaire adéquat, excluant le port de charges de plus de 10 kilos et les travaux lourds et tenant compte de la motivation du recourant ainsi que de sa personnalité). Pour sa part, le recourant conteste la valeur probante du rapport d'expertise estimant que ses atteintes le rendent incapable d'exercer une quelconque activité.
2.2 L'examen rhumatologique auquel a procédé la doctoresse P.________ n'a rien révélé de particulier, en dehors d'une probable spondylarthropathie et une suspicion de maladie de Behçet. Par ailleurs, aucune atteinte n'a été mise en évidence par les deux médecins internistes du COMAI. Selon la doctoresse O.________, spécialiste en psychiatrie, l'assuré ne présentait pas non plus d'affection psychique susceptible d'influencer sa capacité de travail. L'importante immaturité affective constatée ne semblait pas avoir eu de répercussion sur sa capacité de travail avant sa maladie. En revanche, ce trouble de la personnalité préexistant avait très probablement contribué à l'absence de reprise professionnelle lorsque des contraintes logistiques (comme la garde de ses enfants) s'étaient ajoutées à l'atteinte physique.
2.3 Cette expertise remplit toutes les conditions auxquelles la jurisprudence soumet la valeur probante d'un tel document. Quoi qu'en dise le recourant, dans le cadre de l'appréciation des preuves, le tribunal administratif a soigneusement analysé les rapports médicaux, dont il se prévaut pour soutenir qu'il ne présente aucune capacité résiduelle de travail (rapports des docteurs D.________ [du 11 avril 2001], M.________ [du 30 août 2001] ainsi que S.________, spécialiste en médecine interne/ maladies rhumatismales [du 29 janvier 2002]. La juridiction cantonale a donné les motifs pertinents pour lesquels elle a considéré que les conclusions de ces médecins n'étaient pas aptes à faire naître le moindre doute en ce qui concerne la valeur probante de l'expertise du COMAI, sur laquelle s'était appuyée l'administration. A défaut d'éléments véritablement contradictoires ressortant du dossier médical, les premiers juges étaient dès lors fondés, sans qu'il fût nécessaire de mettre en oeuvre une mesure d'instruction complémentaire, à retenir les conclusions des médecins du COMAI. En tout état de cause, le recourant ne relève aucune circonstance particulière ou élément concret permettant de douter de l'objectivité de l'expertise du COMAI. En particulier, le bref rapport du docteur C.________, joint au recours, ne saurait modifier cette appréciation, au motif principal que ce médecin a omis de se prononcer sur la capacité de travail de son patient.
3.
Pour le surplus, le recourant allègue que la question de sa capacité résiduelle de travail n'a pas été examinée de manière concrète et que les instances précédentes ne se sont pas prononcées sous l'angle du rendement.
En réalité, les experts ont examiné cette question de manière précise et détaillée. Il résulte de leur analyse que le recourant est à même d'exercer une activité légère adaptée sans formation complémentaire. Compte tenu du large éventail d'activités non qualifiées que recouvrent les secteurs de la production et des services énumérés dans l'Enquête suisse sur la structure des salaires 2002 (tabelle 1), un certain nombre d'entre elles sont nécessairement légères, permettent l'alternance des positions, excluent le port de charges de plus de 10 kilos, ne comportent pas de travaux lourds et sont donc adaptées aux problèmes physiques du recourant, tels qu'ils ont été décrits par les experts (cf. Plädoyer, 2002/6 p. 64, consid. 4b; SVR 2002 IV no 24 p. 76 consid. 3). Les experts n'avaient pas à se prononcer plus longuement sur l'activité exigible.
On ajoutera que dans la mesure où les experts du COMAI n'ont émis aucune restriction en ce qui concerne le rendement de l'intéressé, on doit admettre que celui-ci est entier dans une activité adaptée exercée à 70 %.
4.
4.1 S'écartant des montants retenus par l'office intimé, les premiers juges ont admis que sans invalidité, le recourant aurait pu réaliser un revenu annuel de 66'648 fr. en 2002 (année de référence vu l'incapacité de travail attestée depuis le 23 avril 2001). Ils se sont appuyés à cet égard sur le décompte de paie de l'entreprise X.________ SA de juin 2002 lequel incluait, en sus du revenu annuel brut proprement dit, les primes pour le travail en équipe.
Par ailleurs, eu égard au fait que l'assuré disposait de connaissances professionnelles spécialisées, ils ont fixé le revenu d'invalide à 43'292 fr., en se fondant sur un salaire tiré de l'Enquête sur la structure des salaires 2002, dans le secteur de la production, de niveau 3.
La comparaison des deux revenus précités les a conduits à retenir un taux d'invalidité de 35 %, voire de 39 % avec un abattement de 15 % (cf. consid. 4.3.2 in fine du jugement cantonal). Ils en ont conclu que le recourant présente un taux d'invalidité n'ouvrant pas le droit à une rente.
4.2 Le point de vue de la juridiction cantonale ne saurait être suivi. En effet, le recourant est au bénéfice d'un CFC dans la profession de mécanicien qu'il ne peut désormais plus exercer. Cela ne signifie pas pour autant qu'il dispose de connaissances professionnelles spécialisées dans une activité adaptée à son handicap. S'agissant du revenu réalisable dans une activité exigible à l'heure actuelle, on doit plutôt retenir le niveau de qualification 4 (activités simples et répétitives), compte tenu du trouble de la personnalité relevé par les experts. Si dans le futur, la situation se stabilisait et si le recourant retrouvait un équilibre émotionnel et psychique, il incomberait à l'office intimé d'examiner quelle incidence cette circonstance pourrait avoir sur le revenu exigible de la part de cet assuré.
Le salaire de référence est donc celui auquel peuvent prétendre les hommes effectuant une activité simple et répétitive dans le secteur privé, soit 4'557 fr. par mois (Enquête suisse sur la structure des salaires 2002 [ESS], p. 43, TA1; niveau de qualification 4). Plusieurs adaptations sont toutefois nécessaires, afin de prendre en considération, soit la durée moyenne du travail dans les entreprises en 2002 (41.7 heures: Annuaire statistique de la Suisse 2004, tableau 3.2.3.5, p. 200), la capacité résiduelle de travail du recourant de 70 % ainsi que les circonstances personnelles et professionnelles (cf. ATF 126 V 78 ss consid. 5). Ces circonstances ne justifient pas en l'espèce une déduction supérieure à celle appliquée par la juridiction cantonale (10 %). Après avoir procédé aux adaptations nécessaires, on obtient un revenu hypothétique de 35'904 fr. par an, pour une activité exercée à 70 %.
De la comparaison d'un revenu d'invalide de 35'904 fr. avec un gain sans invalidité de 66'648 fr., il résulte un taux d'invalidité arrondi (cf. ATF 130 V 121) de 46 %. Ce taux donne droit à un quart de rente, dès le 1er avril 2002 sous réserve du cas pénible (art. 28 al. 1bis LAI dans sa version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2003; let. d des dispositions finales de la modification du 21 mars 2003 [4ème révision de l'AI]). Il incombera à l'office intimé, auquel le dossier est renvoyé pour le calcul de la rente, d'examiner cette question. Le recours est dès lors partiellement bien fondé.
5.
Vu l'issue du litige, le recourant a droit à une indemnité de dépens réduite.
Le recourant a demandé à bénéficier de l'assistance judiciaire. Dans la mesure où elle viserait aussi la dispense de payer les frais de procédure, cette requête est sans objet au regard de l'article 134 OJ. En revanche, les conditions d'octroi de l'assistance judiciaire sont réalisées pour la part des honoraires d'avocat qui excède l'indemnité de dépens réduite à laquelle il a droit (art. 159 OJ). Toutefois, le recourant est rendu attentif au fait qu'il devra rembourser la caisse du Tribunal s'il devient ultérieurement en mesure de le faire (art. 152 al. 3 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:
1.
Le recours est partiellement admis et le jugement du Tribunal administratif du canton de Berne du 26 octobre 2005, ainsi que la décision sur opposition du 14 janvier 2005, sont annulés; le recourant a droit à une rente de l'assurance-invalidité, au sens des considérants, fondée sur un degré d'invalidité de 46 %.
2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.
3.
L'office intimé versera au recourant une indemnité de dépens de 1'500 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) pour l'instance fédérale.
4.
L'assistance judiciaire est accordée au recourant. Les honoraires de Me Alain Schweingruber, avocat à Delémont, non couverts par les dépens, sont fixés à 1'000 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) pour la procédure fédérale et seront supportés par la caisse du tribunal.
5.
Le Tribunal administratif du canton de Berne est invité à statuer sur les dépens de la procédure cantonale, compte tenu de l'issue définitive du litige.
6.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à Winterthur Assurances, Direction Suisse Romande, Lausanne, au Tribunal administratif du canton de Berne et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 9 novembre 2006
Au nom du Tribunal fédéral des assurances
La Présidente de la IIe Chambre: p. la Greffière: