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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_740/2021  
 
 
Arrêt du 10 juin 2022  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
Marazzi et Bovey. 
Greffier : M. Piccinin. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Yves Nicole, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
B.________, 
représenté par Me Jean-Michel Henny, avocat, 
intimé. 
 
Objet 
droit des cohéritiers au gain (succession), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour d'appel civile 
du Tribunal cantonal du canton de Vaud, 
du 6 août 2021 (PT16.057214-210826 376). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par acte de " cession en lieu de partage " du 29 septembre 2000, C.________, D.________ et A.________ ont cédé à B.________ leur part respective dans la succession de E.________, avec pour conséquence que B.________ est devenu l'unique propriétaire de l'exploitation agricole familiale. Cette exploitation comprenait la parcelle n° 1 à U.________ et sur laquelle la ferme est érigée, ainsi que trois autres parcelles nos 2, 3 et 4 sises sur la Commune de V.________. 
L'acte de cession prévoyait un prix global de 102'308 fr., correspondant aux cinq sixièmes de la valeur de rendement des quatre immeubles cédés. Il précisait par ailleurs que, dans la mesure où les immeubles étaient attribués sur la base d'une estimation inférieure à leur valeur vénale, chacun des trois cédants aurait droit à une part du gain réalisé, proportionnellement à sa part héréditaire, en cas d'aliénation des immeubles, en tout ou en partie, dans un délai de vingt-cinq ans dès le jour de la conclusion de l'acte. 
 
B.  
Par jugement du 11 décembre 2020, la Chambre patrimoniale cantonale du canton de Vaud a rejeté la demande du 28 décembre 2016 de A.________ tendant à ce que B.________ lui paie un montant à chiffrer en cours d'instance, mais d'au moins 262'200 fr., au motif que les conditions du droit au gain étaient réalisées. 
Par arrêt du 6 août 2021, la Cour d'appel civile du canton de Vaud a rejeté l'appel formé par A.________ contre ce jugement. 
 
C.  
Par acte du 14 septembre 2021, A.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Il conclut principalement à la réforme " du jugement de première instance en ce sens que ses conclusions sont admises ". À titre subsidiaire, il requiert que l'arrêt entrepris soit annulé et la cause renvoyée à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Des déterminations n'ont pas été requises. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF), prise en dernière instance cantonale et sur recours par un tribunal supérieur (art. 75 LTF), dans une contestation civile de nature pécuniaire, dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF); il a par ailleurs été déposé à temps (art. 100 al. 1 et 46 al. 1 let. b LTF), par la partie qui a succombé dans ses conclusions devant l'instance précédente (art. 76 LTF). Le recours en matière civile est ainsi recevable au regard de ces dispositions. 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4 et la référence). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée par le recourant (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF; ATF 142 II 369 consid. 2.1; 142 III 364 consid. 2.4).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 144 II 246 consid. 6.7; 143 I 310 consid. 2.2 et la référence), ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des conclusions insoutenables (ATF 143 IV 500 consid. 1.1 et la référence). Le recourant ne peut se borner à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves; il doit indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont arbitraires (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3). Une critique des faits qui ne satisfait pas à cette exigence est irrecevable (art. 106 al. 2 LTF; ATF 145 IV 154 consid. 1.1; 141 IV 249 consid. 1.3.1).  
 
3.  
Le recourant se prévaut exclusivement d'une application erronée des art. 28 ss LDFR sur le droit des cohéritiers au gain, et plus particulièrement d'une violation de l'art. 29 al. 1er let. d LDFR. 
 
3.1.  
 
3.1.1. Aux termes de l'art. 28 al. 1 LDFR, si une entreprise ou un immeuble agricoles sont attribués à un héritier dans le partage successoral à une valeur d'imputation inférieure à la valeur vénale, tout cohéritier a droit, en cas d'aliénation, à une part du gain proportionnelle à sa part héréditaire. L'art. 29 al. 1 let. d LDFR (dont le texte, adopté lors de l'entrée en vigueur de la LDFR le 1er janvier 1994, a été complété le 1er janvier 2004 par la précision qu'il n'y a pas de changement d'affectation en cas de cessation de l'exploitation, lorsque l'héritier, qui l'avait reprise selon l'art. 28 et exploitée lui-même durant dix ans au moins, garde un appartement faisant partie de l'entreprise) qualifie d'aliénation au sens de l'art. 28 les changements d'affectation, qu'il définit comme le passage d'un usage agricole à un usage non agricole.  
 
3.1.2. Selon la doctrine, pour qu'un changement d'affectation soit qualifié d'aliénation, l'utilisation non agricole doit atteindre une certaine ampleur, qui s'évalue au cas par cas en fonction de la durée et de l'intensité de l'utilisation, de même que de l'augmentation du rendement que le changement d'utilisation permet de procurer (ALFRED KOLLER, Der Grundstückkauf, 3e éd. 2017, no 111 p. 300; THOMAS MEYER, Der Gewinnanspruch der Miterben im bäuerlichen Bodenrecht (Art. 28 ff. BGBB), 2004, nos 661 ss [ci-après: Der Gewinnanspruch]; IDEM, in Handkommentar zum Schweizer Privatrecht, Erbrecht, Art. 457-640 ZGB, 3e éd. 2016, no 4 ad art. 29 CC; STREBEL/HENNY, Kommentar zum BGBB, 2e éd. 2011, nos 18 à 18b et 22 ad art. 29 LDFR).  
Pour illustrer un changement d'affectation, des auteurs prennent l'exemple de l'exploitation d'importants gisements de gravier sur un terrain agricole (PAUL-HENRI STEINAUER, Le droit au gain selon le nouveau droit foncier rural, RDS 1994, p. 20 et STREBEL/HENNY, op. cit., no 18b ad art. 29 LDFR qui se réfèrent à l'ATF 97 II 309 consid. 3b rendu sous l'ancien droit), d'une maison d'habitation ultérieurement constituée en propriété par étages, les unités d'étages que l'agriculteur n'utilise pas à des fins d'habitation sortant du champ d'application de la LDFR (YVES DONZALLAZ, Commentaire de la loi fédérale du 4 octobre 1991 sur le nouveau droit foncier rural, Sion 1993, no 327; JEAN-MICHEL HENNY, Le droit foncier rural, Commentaire de la loi fédérale sur le droit foncier rural du 4 octobre 1991, 1998, no 19 ad art. 29 LDFR; voir également STEINAUER, op. cit., p. 20, pour qui cet exemple présente plutôt une analogie avec le classement dans une zone à bâtir prévu à l'art. 29 al. 1 let. c LDFR) ou de la transformation d'une ferme en bâtiment locatif que l'agriculteur loue ensuite à des tiers, le rural pouvant être loué comme entrepôt et les installations utilisées à d'autres fins (HENNY, op. cit., no 19 ad art. 29 LDFR). Si la location d'un logement de l'exploitation à des tiers est susceptible de constituer un changement d'affectation, savoir si tel est le cas doit être examiné au cas par cas, en fonction de l'ampleur de la location (MEYER, Der Gewinnanspruch, op. cit., no 672; STREBEL/HENNY, op. cit., no 18a ad art. 29 LDFR). On ne saurait par exemple considérer que la mise en location d'un studio dans un bâtiment utilisé à des fins agricoles revêt une intensité suffisante du point de vue spatial et du type d'utilisation pour constituer un tel changement, alors que cela sera en principe le cas si l'agriculteur loue un bâtiment d'habitation ou d'exploitation dans son entier (MEYER, op. cit., no 663; voir cependant ANDREAS WASSERFALLEN, in Handbuch zum Agrarrecht, 2017, no 139 p. 377 qui considère, sans fournir d'explications et en renvoyant aux exemples de MEYER, qu'il y a toujours changement d'affectation lorsqu'un ou plusieurs logements ou parties de bâtiments sont loués à des tiers pour un usage non agricole).  
 
 
3.2. Selon l'arrêt querellé, le recourant s'était plaint en appel de l'appréciation des preuves opérée par les premiers juges, en soutenant que l'intimé avait bel et bien désaffecté la parcelle no 1 située à U.________. La cour cantonale a relevé en substance que, si les constatations du détective privé mandaté par le recourant et celles de la commission de salubrité n'avaient pas à être remises en cause, elles n'étaient pas suffisantes pour établir une désaffectation permanente de la parcelle n° 1 et l'irréversibilité d'un éventuel changement. En effet, d'une part, les constatations du détective, selon lesquelles notamment un nombre important de véhicules se garaient sur le parking situé à gauche de l'ancienne ferme familiale et dans les garages ou entrepôts voisins, avaient été effectuées sur une très brève durée, soit quatre jours. D'autre part, le rapport de la commission de salubrité du 31 janvier 2017 n'évoquait qu'une location très partielle de la grange, tout en relevant que le type d'affectation des locaux était respecté et que le rural et la dépendance servaient à l'entreposage de machines et outillages destinés à l'activité agricole. De plus, les experts judiciaires n'avaient pas constaté d'usage non agricole des installations, ni d'activités non agricoles exercées par l'intimé.  
Le recourant devait toutefois être suivi sur le fait que l'intimé et sa compagne, employée agricole, n'étaient pas domiciliés dans la partie habitable de l'ancienne ferme familiale, mais vivaient dans un bâtiment érigé sur la parcelle no 5 voisine. L'appartement d'habitation du premier étage de l'ancienne ferme était loué à un couple et celui du rez-de-chaussée était inhabité. En réponse à l'argument du recourant selon lequel la location de l'appartement à des tiers étrangers à l'exploitation agricole constituait une utilisation non agricole de la parcelle en question et, par conséquent, impliquait un changement d'affectation de celle-ci, la cour cantonale a relevé que la motivation des premiers juges était convaincante. Il fallait en effet considérer que, malgré la location de l'appartement représentant 5,5 unités de logement, l'intimé faisait un usage agricole de la parcelle litigieuse conforme aux limites que lui imposait la taille de son exploitation. Sur ce point, il importait peu que les locataires de l'appartement n'étaient pas employés agricoles. D'une part, un échange de logements entre l'appartement où vivait l'intimé et celui loué pouvait avoir lieu. D'autre part, la parcelle n° 1 ne disposait d'une capacité d'accueil que de 10 unités de logement, et non de 14 unités comme cela était nécessaire, selon la réglementation sur le droit foncier rural, pour une exploitation totalisant 51,38 hectares de surface en propre ou en fermage et 59,20 UGB (unités de gros bétail), de sorte que l'intimé devait de toute manière utiliser une partie des locaux de la parcelle no 5 pour atteindre cette limite. La cour cantonale a ajouté qu'au surplus, pour qu'il y ait désaffectation, il fallait notamment analyser la différence de revenu, laquelle devait être sensible, entre l'usage agricole et l'usage non agricole de la parcelle. En l'occurrence, ce critère n'était pas réalisé puisque si l'intimé et sa compagne occupaient les logements du bâtiment sis sur la parcelle n° 1, ils pourraient louer celui de la parcelle n° 5 où ils habitaient pour un montant du même ordre, de sorte qu'il n'existait pas, dans cette hypothèse, de différence significative de revenu. Concernant le déplacement du bétail à l'extérieur du village il y a une vingtaine d'années, l'expert avait constaté que les anciens locaux abritaient du matériel et des machines agricoles et qu'en outre la parcelle n° 1 avait toujours un usage agricole par le fait qu'elle comptait environ 29 ares de surface déclarée en tant que prairie extensive et abritait une vingtaine d'arbres hautes tiges donnant droit à des paiements directs agricoles. 
Quant à l'allégation du recourant selon laquelle l'intimé était de mauvaise foi puisqu'il avait mis en veille, le temps de la procédure, le changement irréversible d'affectation opéré en 2016, la cour cantonale a jugé qu'aucun élément au dossier ne permettait d'établir à la fois un changement permanent et irréversible d'affectation et la mauvaise foi de l'intimé. 
 
3.3. Le recourant mentionne d'abord que c'était à juste titre que la cour d'appel avait écarté les témoignages de proches de l'intimé et s'était fondée sur le rapport et le témoignage du détective privé F.________. Le rapport confirmait clairement qu'au moment des constats, l'immeuble de l'intimé n'avait plus d'affectation agricole puisqu'il était mis à disposition de nombreux tiers non-agriculteurs et lui procurait un revenu, à tout le moins théorique, nettement supérieur au revenu agricole sur la base duquel la valeur de rendement avait été calculée au moment de l'attribution.  
Le recourant expose ensuite que la cour cantonale, faisant apparemment sien l'avis doctrinal d' HENNY ( op. cit., p. 364), avait néanmoins considéré que, pour que l'on soit en présence d'une désaffectation au sens de l'art. 29 al. 1 let. d LDFR, il fallait un changement d'affectation " permanent " et " irréversible ". Or, cette double condition ne ressortait pas du texte légal et le Tribunal fédéral ne s'était apparemment jamais prononcé sur cette question. Selon STEINAUER ( op. cit., p. 20), il y avait lieu d'écarter l'existence d'une désaffectation uniquement dans l'hypothèse d'un usage non agricole qui ne serait qu'occasionnel, cet auteur donnant l'exemple, inspiré par le Message du Conseil fédéral (FF 1988 III 946), d'un champ utilisé quelques jours ou quelques semaines comme un hippodrome. D'après le recourant, cette seconde approche devait être préférée car l'exigence du caractère permanent et irréversible du changement d'affectation reviendrait à vider l'art. 29 al. 2 let. d LDFR de sa substance; l'héritier qui s'était vu attribuer des biens à la valeur de rendement et qui laissait la jouissance des terrains et des locaux agricoles à des tiers non-agriculteurs pourrait en principe presque toujours soutenir avec succès qu'il peut être mis fin à ces mises à disposition (par exemple, en résiliant les baux) et prendre des dispositions en ce sens, au besoin en cours de procédure, comme cela était d'ailleurs le cas de l'intimé en l'espèce.  
S'agissant plus spécifiquement du logement du premier étage de l'ancienne ferme, dont il était soutenu que l'affectation avait clairement changé puisque le logement était loué à des tiers non-agriculteurs et sans aucun lien avec l'exploitation de l'intimé, il apparaissait, à la lecture de l'art. 29 al. 1 let. d LDFR, que, pour apprécier une désaffectation, c'était bien l'utilisation effective d'un immeuble qui était déterminante et non l'utilisation agricole que l'on pouvait en faire. Or, la cour cantonale avait constaté que les logements de la ferme n'étaient pas occupés par des personnes actives sur le domaine de l'intimé et que leur affectation avait ainsi clairement été modifiée. 
Le recourant termine en relevant qu'en tout état de cause, même à supposer qu'il faille démontrer le caractère permanent et irréversible du changement d'affectation, il y aurait de toute manière eu lieu de réserver l'existence d'un abus de droit, comme le relevait d'ailleurs implicitement HENNY sur qui la cour cantonale s'était basée pour admettre cette exigence. Or, en l'occurrence, on se trouvait clairement dans une situation d'abus de droit, dès lors que l'intimé s'était efforcé de redonner un caractère agricole à son immeuble en cours de procédure. Il fallait ainsi considérer que l'intimé avait bien désaffecté la parcelle no 1 au sens de l'art. 29 al. 1 let. b LDFR, de sorte qu'il était tenu de lui verser le tiers du gain net réalisé. 
 
3.4.  
 
3.4.1. Le recourant se livre à sa propre compréhension des faits, lorsqu'il invoque que l'immeuble n'avait plus d'affectation agricole et était mis à disposition de tiers sans lien avec l'exploitation en se fondant sur le rapport du détective privé F.________. Il ressort de l'arrêt querellé que les constatations du détective, si elles n'avaient pas à être remises en doute, n'avaient été effectuées que sur une brève durée, soit sur quatre jours. Le rapport de la commission de salubrité n'évoquait qu'une location très partielle de la grange et précisait que le type d'affectation des locaux était respecté. Les experts judiciaires n'avaient, de plus, pas constaté d'usage non agricole des bâtiments d'exploitation; s'agissant des entrepôts situés au 1er étage du bâtiment no 6 en particulier, un des experts avait observé que ces locaux étaient toujours considérés comme des locaux agricoles par l'ECA, qu'ils figuraient comme tels au registre foncier et qu'ils ne pouvaient pas servir de lieu de stockage pour quelque matériel que ce soit et être loués à des tiers. La parcelle en tant que telle avait en outre toujours un usage agricole par le fait qu'elle comptait environ 29 ares de surface déclarée en tant que prairie extensive et abritait une vingtaine d'arbres hautes tiges. Au vu de ces éléments - que le recourant ne remet pas en cause en soulevant un grief d'arbitraire (cf. supra consid. 2.2) -, il n'apparaît pas que la cour cantonale ait considéré comme établi le fait que l'intimé faisait un usage non agricole des bâtiments d'exploitation et de la parcelle en tant que telle. Or, étant donné que l'existence d'un changement d'affectation suppose le passage d'une utilisation agricole à une utilisation non agricole (cf. supra consid. 3.1.1), on ne discerne pas - et le recourant ne l'explique pas - en quoi le fait que la cour cantonale utilise les notions de " désaffectation permanente " ou d' " irréversibilité d'un éventuel changement " dans l'arrêt querellé serait déterminant pour juger du cas d'espèce.  
 
De surcroît, contrairement à ce qu'expose le recourant, on ne saurait déduire du fait que STEINAUER indique qu' "il n'y a pas non plus désaffectation lorsque l'usage non agricole n'est qu'occasionnel " ( op. cit., p. 20) que cet auteur considère qu'il y aurait lieu d'écarter une désaffectation uniquement lorsque celle-ci n'est pas occasionnelle; celui-ci relève d'ailleurs dans sa contribution - comme d'ailleurs HENNY dans son commentaire en français de la LDFR ( op. cit., p. 36 4), la notion de " permanent " mentionnée dans ce commentaire reprenant la teneur du Message du Conseil fédéral (FF 1988 III 889 ss, spéc. p. 94 8) - qu'il y a aliénation au sens de l'art. 29 al. 1 let. d LDFR si la désaffectation est durable. Cet avis est en outre partagé par plusieurs autres auteurs (en particulier, STREBEL/HENNY, op. cit., no 22 ad art. 29 LDFR; DONZALLAZ, op. cit., no 325 p. 108; MEYER, Der Gewinnanspruch, op. cit., no 662; BRUNO BEELER, Bäuerliches Erbrecht gemäss dem Bundesgesetz über das bäuerliche Bodenrecht [BGBB] vom 4. Oktober 1991, 1998, p. 369). C'est donc de manière mal fondée que le recourant tente d'opposer STEINAUER à HENNY sur le caractère durable, respectivement permanent et irréversible, que doit revêtir une désaffectation pour être qualifiée d'aliénation. On ne voit par ailleurs pas pour quel motif il se justifierait de comprendre la notion de " permanent " figurant dans le Message du Conseil fédéral autrement que par " durable ", étant relevé que dans le cadre des discussions au Conseil national du projet de LDFR, il était question de changement d'affectation de " plusieurs années " (BO, CN 1991, p. 863).  
 
 
3.4.2. Concernant le logement du premier étage de la ferme, la remarque générale du recourant selon laquelle il faudrait tenir compte de l'utilisation effective d'un immeuble et non de l'utilisation agricole que l'on pourrait en faire pour apprécier une désaffectation n'est aucunement explicitée et ne précise pas plus avant à quel motif ou pan de la motivation de l'arrêt querellé elle se rapporte. Par ailleurs, en tant qu'il soutient que les juges cantonaux ont retenu que les logements de la ferme n'étaient pas occupés par des personnes actives sur le domaine et qu'ainsi ils ont admis que leur affectation avait changé, le recourant confond manifestement la notion de " changement d'affectation " avec celle de " changement d'utilisation "; une utilisation non agricole n'est susceptible de constituer un changement d'affectation au sens de l'art. 29 al. 1 let. d LDFR que si elle revêt une ampleur suffisante au regard des critères précédemment énoncés (cf. supra consid. 3.1.2). Cela étant, le recours ne permet pas de démontrer en quoi la cour cantonale aurait méconnu le droit ou abusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que, malgré la mise à disposition de l'appartement du premier étage de la ferme à des tiers non-agriculteurs, l'intimé faisait un usage conforme aux limites que lui imposait la taille de son exploitation et qu'il n'y avait pas de différence sensible de revenus entre cet usage et un usage agricole.  
 
3.4.3. Enfin, les allégations du recourant selon lesquelles, au cours de la procédure, l'intimé a pris des mesures pour mettre fin à la cession de l'usage de la chose à des tiers non-agriculteurs ou s'est efforcé de redonner un caractère agricole à son immeuble, ne sont aucunement étayées et, partant, purement appellatoires, le recourant n'indiquant pas sur quels éléments il fonde celles-ci. En tant qu'elle prend appui sur ces allégations, sa critique d'abus de droit apparaît ainsi dénuée de tout fondement, étant de surcroît relevé que la cour cantonale avait déjà retenu qu'aucun élément ne permettait d'établir la mauvaise foi de l'intimé invoquée par le recourant dans son appel, sans que celui-ci ne s'en prenne à cette motivation.  
 
Il résulte de ce qui précède qu'autant recevable, le grief de violation de l'art. 29 al. 1 let. d LDFR doit être rejeté. 
 
4.  
En conclusion, le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. Les frais judiciaires sont mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens à l'intimé, qui n'a pas été invité à se déterminer (art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 6'500 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 10 juin 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
Le Greffier : Piccinin