Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
5A_951/2023
Arrêt du 10 juillet 2024
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président,
Bovey et Hartmann.
Greffière : Mme Achtari.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Ana Rita Perez, avocate,
recourant,
contre
B.________,
São Paulo, Brésil,
représentée par Me Pedro Da Silva Neves, avocat,
intimée.
Objet
séquestre, reconnaissance d'un jugement de divorce étranger,
recours contre l'arrêt de la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois du 30 octobre 2023 (KE22.038277-230046 153).
Faits :
A.
A.a.
A.a.a. Le 24 août 2022, invoquant le cas de séquestre de l'art. 271 al. 1 ch. 6 LP, B.________ a requis du Juge de paix des districts du Jura-Nord vaudois et du Gros-de-Vaud (ci-après: juge de paix), préalablement, de reconnaître le jugement du Tribunal de Justice de l'État de São Paulo du 4 juillet 2016, l'arrêt de la Cour de Justice de l'État de São Paulo du 22 mars 2017 ainsi que la décision du Tribunal de justice de l'État de São Paulo du 15 septembre 2017 et leur concéder force exécutoire, puis, principalement, d'ordonner le séquestre - à concurrence des montants de 194'374 fr. 43 plus intérêt à 12 % l'an dès le 1
er août 2022, de 85'679 fr. 64, de 54'808 fr. 30 plus intérêts à 12 % l'an dès le 1
er août 2022 et de 9'715 fr. 75 - de plusieurs biens appartenant à A.________ et d'ordonner au préposé de l'Office des poursuites du district de l'Ouest lausannois de procéder immédiatement au séquestre susmentionné.
Les quatre créances étaient réclamées au titre de liquidation du régime matrimonial, honoraires d'avocats et pénalités de retard, intérêts moratoires concernant la liquidation du régime matrimonial et honoraires d'avocat, pensions alimentaires et honoraires d'avocat, et intérêts moratoires sur les deux dernières créances précitées de pensions alimentaires et honoraires d'avocat.
A.a.a. Le 25 août 2022, le juge de paix a ordonné le séquestre requis pour les créances suivantes: 1) 194'374 fr. 43 plus intérêt à 12 % l'an dès le 1
er août 2022, 2) 85'679 fr. 64 sans intérêt, 3) 54'808 fr. 30 plus intérêt à 12 % l'an dès le 1
er août 2022 et de 4) 9'715 fr, 75 sans intérêt, et a dispensé la requérante de fournir des sûretés.
A.b. Par prononcé rendu sous forme de dispositif le 15 décembre 2022 et notifié aux parties le 19 décembre 2022, le juge de paix a rejeté l'opposition au séquestre formée par A.________ le 7 septembre 2022 et a confirmé l'ordonnance de séquestre du 25 août 2022.
B.
Par arrêt du 30 octobre 2023, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois a partiellement admis le recours interjeté par A.________ contre la décision précitée. En substance, elle a réformé le prononcé en ce sens que l'ordonnance de séquestre du 25 août 2022 a porté sur les créances de 54'808 fr. 30 plus intérêt à 12 % l'an dès le 1
er août 2022 (pensions alimentaires et honoraires d'avocat) et de 9'715 fr. 75 sans intérêt (intérêts moratoires).
C.
Par acte posté le 14 décembre 2023, A.________ interjette un recours en matière civile contre cet arrêt devant le Tribunal fédéral. Il conclut principalement à sa réforme en ce sens que l'ordonnance de séquestre du 25 août 2022 est annulée, la requête de séquestre étant rejetée, et subsidiairement à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants. En substance, il se plaint de la violation des art. 271 al. ch. 6
cum 80 LP, ainsi que de celle des art. 25 ss LDIP.
Le recourant requiert d'être mis au bénéfice de l'assistance judiciaire.
Des observations n'ont pas été demandées.
Considérant en droit :
1.
Le recours a été interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) à l'encontre d'une décision finale (art. 90 LTF) rendue en matière de poursuite pour dettes (art. 72 al. 2 let. a LTF) par une autorité cantonale supérieure statuant sur recours (art. 75 LTF). La valeur litigieuse atteint au moins 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF). Le recourant, qui a été en partie débouté de ses conclusions par l'autorité précédente, a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF).
2.
La décision sur opposition au séquestre rendue par l'autorité judiciaire supérieure (art. 278 al. 3 LP) porte sur des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF (ATF 135 III 232 consid. 1.2; parmi plusieurs: arrêt 5A_797/2023 du 7 juin 2024 consid. 2); la partie recourante ne peut donc se plaindre que d'une violation de ses droits constitutionnels (ATF 144 III 145 consid. 2). Le Tribunal fédéral n'examine un tel grief que si, conformément au principe d'allégation, il a été invoqué et motivé (art. 106 al. 2 LTF), à savoir expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée (ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1). Pour que la décision soit annulée, il ne suffit pas qu'une autre solution paraisse concevable, voire préférable, encore faut-il qu'elle se révèle arbitraire non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 148 III 95 consid. 4.1; 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1; 144 I 113 consid. 7.1, 170 consid. 7.3; 142 II 369 consid. 4.3).
3.
3.1. La procédure d'opposition au séquestre est une procédure sommaire au sens propre, en ce sens que le juge procède à un examen sommaire du bien-fondé juridique de la créance, c'est-à-dire un examen qui n'est ni définitif, ni complet, au terme duquel il rend une décision provisoire (ATF 138 III 232 consid. 4.1.1 et les références; arrêts 5A_328/2023 du 15 février 2024 consid. 6.2.1; 5A_810/2023 du 1
er février 2024 consid. 4.1.1).
Selon l'art. 272 al. 1 ch. 2 LP, le créancier doit rendre vraisemblable qu'il existe un cas de séquestre. Lorsque le séquestre est requis sur la base de l'art. 271 al. 1 ch. 6 LP et qu'est invoquée une décision étrangère non soumise à la Convention de Lugano, le juge du séquestre statue à titre incident sur le caractère exécutoire de cette décision et accorde le séquestre s'il est rendu vraisemblable que rien ne s'oppose, à première vue, à la reconnaissance et à l'exécution de ce titre de mainlevée étranger. Il procédera à un examen plus approfondi, toujours à titre incident, des conditions de la reconnaissance et des motifs de refus de celle-ci selon les art. 25 ss LDIP dans le cadre de la procédure d'opposition au séquestre (art. 278 LP). Tout au long de la procédure d'autorisation de séquestre, le juge n'examine la force exécutoire de la décision invoquée par le créancier séquestrant, comme motif de séquestre au sens de l'art. 271 al. 1 ch. 6 LP, qu'au degré de la simple vraisemblance des faits (
Glaubhaftmachung) et après un examen sommaire du droit. Il ne rend qu'une décision provisoire qui, par définition, n'acquiert pas force de chose jugée (ATF 144 III 411 consid. 6.3.1; 139 III 135 consid. 4.5.2; arrêt 4A_650/2023 du 13 mai 2024 consid. 3.1 et les autres références).
C'est dans la procédure de poursuite en validation du séquestre (art. 279 LP) qu'introduira le créancier qui a fait opérer un séquestre sans poursuite préalable, que seront examinées avec un plein pouvoir d'examen les conditions de la reconnaissance et de l'exequatur des art. 25 ss LDIP (arrêt 4A_650/2023 précité
loc. cit.).
3.2. Une décision est arbitraire (art. 9 Cst.) lorsqu'elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 144 I 170 consid. 7.3; 141 III 564 consid. 4.1).
4.
L'autorité cantonale a jugé que les jugements rendus par les autorités judiciaires brésiliennes ne semblaient pas condamner le recourant au paiement d'une somme déterminable à titre de liquidation du régime matrimonial et ne permettaient pas de déterminer le montant des dépens auxquels le recourant avait finalement été condamné. En conséquence, faute de titre de mainlevée définitive pour la créance invoquée au titre de liquidation du régime matrimonial et d'honoraires d'avocats ainsi que, par conséquent, pour les pénalités de retard et les intérêts moratoires liés à ces deux créances, le séquestre ne pouvait pas être prononcé pour garantir celles-ci.
En revanche, l'autorité cantonale a jugé que le recourant avait été condamné à payer une contribution mensuelle pour ses enfants correspondant à 7.01 du salaire minimum national brésilien, depuis l'entrée en force jugée du jugement sur appel le 11 août 2017, et qu'il était hautement vraisemblable que le montant du salaire minimum au Brésil pour les années 2019 à 2022 ressortant des décrets présidentiels produits par l'intimée correspondait à celui auquel le jugement de divorce se référait, de sorte qu'il était possible de calculer avec certitude le montant en capital de la contribution mensuelle à laquelle le recourant avait été condamné. Elle a précisé que le jugement brésilien ne prévoyait pas que les pensions devaient être réévaluées et qu'il ne statuait pas non plus sur l'intérêt moratoire dû en cas de retard. Toutefois, elle a jugé qu'en cas de retard dans le paiement d'une créance constatée judiciairement, la législation brésilienne prévoyait une correction monétaire de la dette et le versement d'un intérêt moratoire, puis que l'intimée avait produit les pièces nécessaires à calculer l'indexation et établi que le taux de l'intérêt moratoire était de 1 % par mois, de sorte que la mainlevée pourrait donc être accordée pour ces deux postes, accessoires de la créance principale prévus par la loi. Il résultait également de la législation brésilienne et de la décision du 15 septembre 2017 une majoration de la dette de 10 % et de 10 % des frais d'avocat en cas de retard déterminé, de sorte que l'intimée disposait également d'un titre de mainlevée définitive pour des honoraires d'avocat correspondant à 10 % du montant dû par le recourant à titre d'arriérés de contributions d'entretien pour les enfants. L'autorité cantonale a donc jugé que l'intimée était en possession de titres de mainlevée définitive pour une somme correspondant à 54'808 fr. 30 plus intérêt à 12 % l'an dès le 1
er août 2022 (contribution d'entretien et frais d'avocat) et pour une somme correspondant à 9'715 fr. 76 (intérêts moratoires courus jusqu'au 30 juillet 2022).
Analysant ensuite le grief du recourant relatif à la violation de l'ordre public suisse par les titres produits, l'autorité cantonale a jugé que le recourant critiquait vainement la méthode utilisée par les juges brésiliens pour fixer les contributions d'entretien et que celles-ci, oscillant entre 1'552 fr. 69 et 1'648 fr. 44 pour couvrir l'entretien de deux enfants, n'avaient en soi rien d'exorbitant. Elle a relevé que le recourant ne démontrait par ailleurs pas que ces sommes étaient totalement disproportionnées au regard de sa situation financière au moment où les jugements avaient été rendus.
5.
Le recourant se méprend sur la nature de la décision attaquée. Si, çà et là, il évoque des droits constitutionnels ("violation du droit d'être entendu", art. 5 et 8 Cst. ) ou se plaint de violation "manifeste" du droit, il ne présente aucune argumentation répondant aux réquisits du principe d'allégation précité (cf. art. 106 al. 2 LTF,
supra consid. 2).
C'est ainsi que, dans un premier grief, le recourant se plaint de la violation de l'ordre public suisse. Néanmoins, il ne dénonce aucune application arbitraire (art. 9 Cst.) d'une norme de la LDIP. Il évoque certes le principe de la légalité (art. 5 Cst.) ainsi que l'égalité de traitement (art. 8 Cst.) et le respect du droit d'être entendu, de même que la violation manifeste du droit, mais ceci uniquement pour se plaindre de la mauvaise application du droit brésilien dans la fixation des contributions d'entretien dues à ses deux enfants. En substance, le recourant estime que les décisions ont omis d'apprécier les besoins concrets des enfants et ses propres capacités contributives mais il n'expose même pas lesquels ils sont. Partant, même en supposant qu'il dénonce l'application arbitraire de l'art. 25 LDIP, le recourant ne fournit aucun élément permettant de déterminer si le résultat des décisions étrangères conduit à fixer des contributions d'entretien à ce point disproportionnées, compte tenu des besoins des enfants et de revenus du débirentier, que l'ordre public suisse s'en trouve manifestement violé. Son argument selon lequel ces contributions sont fixées sur la base d'un barème fluctuant dans le temps est en soi insuffisant à cet égard, étant donné que le seul paramètre de calcul susceptible d'évoluer est le salaire minimum national au Brésil, soit une réévaluation du montant nécessaire pour vivre dignement en fonction du coût de la vie. Dans un second grief, le recourant se borne à critiquer la notion de titre de mainlevée définitive (art. 80 LP) telle que retenue par l'autorité cantonale, toutefois sans dénoncer la violation d'un quelconque droit constitutionnel. Ce n'est que dans son préambule qu'il se plaint de la violation de l'art. 9 Cst.
cum art. 11 Cst.-VD au motif que l'autorité cantonale aurait à tort procédé à l'indexation des montants dus sans ce que cela ressorte des décisions brésiliennes. Cependant, dans sa critique sur ce point, il ne développe pas cette violation et ne s'attaque donc pas précisément, comme exigé par le principe d'allégation (cf.
supra consid. 2), à l'arrêt attaqué.
Il suit de là que le recours doit être déclaré irrecevable.
6.
En définitive, le recours est irrecevable. Le recours étant dénué de chance de succès, la requête d'assistance judiciaire déposée par le recourant est rejetée (art. 64 al. 1 LTF) et les frais judiciaires mis à sa charge (art. 66 al. 1 LTF). Aucune observation n'ayant été requise, des dépens ne sont pas dus (art. 68 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est irrecevable.
2.
La requête d'assistance judiciaire du recourant est rejetée.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois.
Lausanne, le 10 juillet 2024
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Herrmann
La Greffière : Achtari