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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_1154/2021  
 
 
Arrêt du 10 octobre 2022  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, Muschietti et Koch. 
Greffier : M. Dyens. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Tony Donnet-Monay, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
intimé. 
 
Objet 
Opposition à une ordonnance pénale (LCR); 
fiction de la notification; droit d'être entendu; 
arbitraire, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, du 15 juillet 2021 (n° 652 AM21.004976-DTE). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 6 janvier 2021, vers 09h05, à U.________, route principale V.________/W.________ (RC 601a), X.________, A.________ a circulé au volant d'un véhicule automobile à la vitesse de 111 km/h - marge de sécurité déduite -, dépassant ainsi de 31 km/h la vitesse maximale autorisée hors localité, à savoir 80 km/h. La vitesse a été mesurée au moyen d'un appareil de contrôle de la vitesse, sans poste d'interception.  
Par courrier du 13 janvier 2021, le Bureau du radar de la police cantonale vaudoise a informé A.________ qu'elle avait enfreint les prescriptions fédérales sur la circulation routière et lui a transmis un formulaire pour décliner son identité, un formulaire de renseignements généraux lui demandant de décliner sa situation financière, ainsi qu'un formulaire sur les droits et obligations d'une personne prévenue d'infraction. Celui-ci contenait en particulier l'indication qu'en cas de refus de répondre aux questions contenues dans le document, le ministère public pourrait délivrer un mandat de comparution et qu'elle pourrait être entendue en qualité de prévenue. 
Le 3 février 2021, A.________ a complété et signé les trois formulaires précités, indiquant notamment qu'elle acceptait de répondre aux questions, renonçait pour le moment à faire appel à un avocat, avait compris les droits et obligations mentionnés et reconnaissait être la conductrice fautive. 
 
A.b. A.________ a été condamnée à quatre reprises entre le 30 octobre 2014 et le 11 septembre 2018 à des peines de 60 à 150 jours-amende pour violation grave des règles de la circulation routière, violation des règles de la circulation routière, opposition ou dérobade aux mesures visant à déterminer l'incapacité de conduire (véhicule automobile), violation des obligations en cas d'accident, conduite en état d'incapacité (véhicule automobile, taux d'alcool qualifié dans le sang ou dans l'haleine), conduite d'un véhicule défectueux, omission de porter les permis ou les autorisations au sens de la Loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR; RS 741.01), contravention à l'Ordonnance réglant l'admission des personnes et des véhicules à la circulation routière du 27 octobre 1976 (OAC; RS 741.51) et conduite d'un véhicule automobile malgré le refus, le retrait ou l'interdiction de l'usage du permis.  
 
B.  
 
B.a. Par ordonnance pénale du 15 avril 2021, le Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois a condamné A.________ à une peine privative de liberté de 90 jours et a mis les frais à la charge de la condamnée, par 200 francs.  
Dite ordonnance a été expédiée par pli recommandé le 15 avril 2021 à l'adresse d'A.________ à la route de Y.________ xxx, à Z.________. Selon le suivi des envois de la Poste, le courrier n'a pas été réclamé au terme du délai de garde de sept jours, qui est arrivé à échéance le 23 avril 2021. 
Constatant que l'ordonnance précitée lui avait été retournée avec la mention "non réclamé", le procureur a, par pli simple du 28 avril 2021, procédé à un nouvel envoi. 
 
B.b. Le 7 mai 2021, A.________ a formé opposition à l'ordonnance pénale en cause, indiquant au ministère public qu'elle était absente lors de l'envoi par courrier recommandé, raison pour laquelle elle n'avait pas pu en prendre connaissance durant le délai d'opposition. Elle a reconnu les faits qui lui étaient reprochés, mais a requis le prononcé d'une sanction plus clémente, à savoir le prononcé d'un autre genre de peine.  
 
B.c. Le 27 mai 2021, le ministère public a transmis l'acte au Tribunal de police de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois, en indiquant qu'il estimait l'opposition tardive. Il a requis qu'à défaut de retrait de l'opposition, celle-ci soit déclarée irrecevable et que les frais soient mis à la charge de A.________.  
 
C.  
Par prononcé du 2 juin 2021, le Tribunal de police de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a constaté que l'opposition formée par A.________ le 7 mai 2021 était recevable et a retourné le dossier de la cause au ministère public pour qu'il donne suite à l'opposition en procédant conformément à l'art. 355 CPP
 
D.  
Statuant sur recours du Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a, par arrêt du 15 juillet 2021, admis ledit recours et réformé le dispositif du prononcé du 2 juin 2021 en ce sens que l'opposition formée par A.________ le 7 mai 2021 contre l'ordonnance pénale rendue le 15 avril 2021 par le Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois a été déclarée irrecevable et l'ordonnance en question définitive et exécutoire. 
 
E.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt rendu le 15 juillet 2021 par la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois. Elle conclut, avec suite de frais et dépens, principalement, à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause au Tribunal de police de la Broye et du Nord vaudois pour qu'il procède dans le sens des considérants. Subsidiairement, elle conclut à la réforme de l'arrêt attaqué, en ce sens que son opposition à l'ordonnance pénale du 15 avril 2021 est déclarée recevable, le dossier étant renvoyé au ministère public pour instruction dans le sens des considérants. 
 
F.  
Invités à se déterminer, la cour cantonale et le ministère public y ont renoncé, se référant aux considérants de l'arrêt attaqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
La recourante fait notamment grief à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 85 al. 4 let. a CPP en admettant, au contraire du premier juge, l'application de la fiction de notification prévue par cette disposition, avant de déclarer son opposition irrecevable. 
 
1.1. Selon l'art. 85 al. 4 let. a CPP, un prononcé est réputé notifié lorsque, expédié par lettre signature, il n'a pas été retiré dans les sept jours à compter de la tentative infructueuse de remise du pli, si la personne concernée devait s'attendre à une telle remise.  
La personne concernée ne doit s'attendre à la remise d'un prononcé que lorsqu'il y a une procédure en cours qui impose aux parties de se comporter conformément aux règles de la bonne foi, à savoir de faire en sorte, entre autres, que les décisions relatives à la procédure puissent leur être notifiées. Le devoir procédural d'avoir à s'attendre avec une certaine vraisemblance à recevoir la notification d'un acte officiel naît avec l'ouverture d'un procès et vaut pendant toute la durée de la procédure (ATF 130 III 396 consid. 1.2.3 p. 399). Il est admis que la personne concernée doit s'attendre à la remise d'un prononcé lorsqu'elle est au courant qu'elle fait l'objet d'une instruction pénale au sens de l'art. 309 CPP (ATF 146 IV 30 consid. 1.1.2; arrêts 6B_1135/2021 du 9 mai 2021 consid. 3.2; 6B_1391/2021 du 25 avril 2022 consid. 1.1 et les arrêts cités). Ainsi, un prévenu informé par la police d'une procédure préliminaire le concernant, de sa qualité de prévenu et des infractions reprochées, doit se rendre compte qu'il est partie à une procédure pénale et donc s'attendre à recevoir, dans ce cadre-là, des communications de la part des autorités, y compris un prononcé (arrêt 6B_1391/2021 précité consid. 1.1 et les arrêts cités). En revanche, un simple interrogatoire par la police en qualité de personne appelée à donner des renseignements ne suffit en général pas à créer un rapport juridique de procédure pénale avec la personne entendue. Il ne peut donc être considéré qu'à la suite d'un tel interrogatoire, celle-ci doit prévoir que des actes judiciaires lui seront notifiés (arrêts 6B_288/2020 du 16 octobre 2020 consid. 1.3; 6B_1032/2015 du 25 mai 2016 consid. 1.1; 6B_158/2012 du 27 juillet 2012 consid. 2.1 avec références aux ATF 116 Ia 90 consid. 2c/aa p. 93; 101 Ia 7 consid. 2 p. 9). 
De jurisprudence constante, celui qui se sait partie à une procédure judiciaire et qui doit dès lors s'attendre à recevoir notification d'actes du juge, est tenu de relever son courrier ou, s'il s'absente de son domicile, de prendre des dispositions pour que celui-ci lui parvienne néanmoins. A ce défaut, il est réputé avoir eu, à l'échéance du délai de garde, connaissance du contenu des plis recommandés que le juge lui adresse. Une telle obligation signifie que le destinataire doit, le cas échéant, désigner un représentant, faire suivre son courrier, informer les autorités de son absence ou leur indiquer une adresse de notification (ATF 146 IV 30 consid. 1.1.2; 141 II 429 consid. 3.1 p. 431 s.; 139 IV 228 consid. 1.1 p. 230 et les références citées). 
 
1.2. En l'espèce, il ressort du jugement attaqué qu'en première instance, le Tribunal de police a jugé l'opposition recevable après avoir considéré qu'aucun élément au dossier n'indiquait que la recourante était au courant de l'ouverture d'une instruction pénale à son encontre, qu'elle n'avait été entendue ni par la police, ni par le ministère public, qu'elle avait certes reçu du Bureau du radar de la Police cantonale vaudoise le formulaire "identité du conducteur responsable" qu'elle avait rempli et où elle avait reconnu les faits reprochés, soit être la conductrice du véhicule au moment de l'excès de vitesse, mais que cela n'équivalait pas encore à une information claire et précise au sujet du fait qu'une "instruction pénale" était ouverte à son encontre, avec les incombances qui en découlaient. Elle n'avait en particulier pas été amenée à prendre connaissance du formulaire usuel de rappel des droits du prévenu. Au demeurant, le formulaire du Bureau du radar indiquait que le conducteur responsable serait déféré à l'autorité compétente. La recourante n'avait donc pas été avisée clairement qu'une instruction était ouverte à son encontre avant que l'ordonnance pénale soit rendue. Dans ces circonstances, la recourante ne devait pas s'attendre à la remise immédiate d'une ordonnance pénale, si bien que les conditions d'une fiction de notification n'étaient pas remplies. A défaut de pouvoir établir précisément la date à laquelle l'intéressée avait pris connaissance de l'ordonnance pénale, on devait considérer que l'opposition formée le 7 mai 2021 était recevable. Le ministère public devait ainsi compléter son instruction, conformément à l'art. 355 CPP, la cause n'étant pas en état d'être jugée.  
La cour cantonale a pour sa part considéré que la recourante avait été informée qu'elle était prévenue et avait signé le formulaire mentionnant ses droits et obligations en cette qualité notamment, que le ministère public pourrait rendre un mandat de comparution à son endroit et qu'elle pourrait être entendue comme prévenue. S'ajoutait à cela, d'après les juges précédents, le fait que la recourante avait déjà été condamnée à quatre reprises par voie d'ordonnances pénales des infractions à la LCR. Selon eux, elle connaissait donc la procédure et savait qu'elle s'exposait à la notification d'une ordonnance pénale la condamnant. En remplissant trois formulaires pour décliner son identité, reconnaître qu'elle était la conductrice fautive et indiquer sa situation financière, elle devait savoir qu'une instruction pénale était ouverte contre elle et que ces informations seraient utilisées par le ministère public pour rendre une ordonnance pénale. Toujours selon la cour cantonale, la recourante ne se plaignait pas d'avoir été condamnée avant d'avoir été auditionnée, mais seulement qu'elle était absente à cette période, et demandait une peine plus clémente, en particulier un genre de peine qui atteindrait moins sa vie privée et professionnelle. Elle savait qu'une instruction pénale était ouverte contre elle, puisqu'elle se savait être prévenue dans le cadre de cette procédure. Au regard de ces éléments, la cour cantonale a considéré que l'ordonnance pénale était réputée lui avoir été valablement notifiée au terme du délai de garde de la poste, soit le 23 avril 2021, de sorte que le délai pour former opposition était arrivé à échéance le 3 mai 2021. L'opposition formée le 7 mai suivant s'en trouvait tardive et donc irrecevable. 
 
1.3. Les éléments mis en avant par les juges précédents pour infirmer la motivation du prononcé de première instance déclarant l'opposition recevable n'emportent pas la conviction.  
Est en l'espèce décisif, comme relevé à juste titre par le premier juge, le fait que la recourante n'a été entendue ni par la police, ni par le ministère public, contrairement à différents cas dans lesquels le Tribunal fédéral a été amené à confirmer l'application de l'art. 85 al. 4 let. a CPP (cf. p. ex. arrêts 6B_1135/2021 précité consid. 3.3; 6B_1391/2021 du 25 avril 2022 consid. 1.3 et 1.4; 6B_96/2021 du 6 septembre 2021 consid. 1.3; 6B_288/2020 précité consid. 1.3; 6B_723/2020 du 2 septembre 2020 consid. 1.3; 6B_934/2018 du 9 novembre 2018 consid. 2.2 et 2.3). En outre, les antécédents de la recourante, tels que décrits dans l'arrêt attaqué, ne permettent pas de retenir sans ambiguïté qu'elle aurait déjà été confrontée à une situation analogue sur le plan procédural. Il convient également de souligner que le courrier du Bureau du radar du 13 janvier 2021 visait en premier lieu à identifier le conducteur responsable, tout en indiquant que ce dernier serait déféré à l'autorité compétente. Bien que la recourante ait notamment signé le formulaire mentionnant ses droits et obligations en qualité de prévenue, le premier juge a considéré à juste titre que dans la présente configuration, une information claire et précise sur la situation procédurale faisait en l'occurrence défaut. On ajoutera encore que l'arrêt attaqué n'infirme pas le constat du premier juge selon lequel la recourante n'avait pas été amenée à prendre connaissance du formulaire usuel de rappel des droits du prévenu. Par conséquent, les circonstances ne permettaient pas, en l'absence de toute audition, y compris par la police, de retenir l'existence d'un rapport juridique de procédure pénale suffisamment claire pour qu'elle eût été censée s'attendre à se voir directement notifier une ordonnance pénale. L'application de la fiction de notification prévue par l'art. 85 al. 4 let. a CPP n'entrait donc pas en ligne de compte. 
Il s'ensuit que le grief soulevé par la recourante s'avère fondé, ce qui suffit à sceller le sort de la cause sans qu'il soit nécessaire d'examiner plus avant les autres griefs soulevés par cette dernière. 
 
2.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision au sens des considérants. La recourante, qui obtient gain de cause, ne supporte pas de frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Elle peut prétendre à de pleins dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral, à la charge du canton de Vaud (art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis, l'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. 
 
2.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.  
Le canton de Vaud versera à la recourante une indemnité de 3'000 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale. 
 
 
Lausanne, le 10 octobre 2022 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
Le Greffier : Dyens