Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
2C_802/2022
Arrêt du 11 octobre 2022
IIe Cour de droit public
Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Hänni.
Greffière : Mme Vuadens.
Participants à la procédure
A.________,
recourante,
contre
Administration fédérale des contributions, Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI,
Eigerstrasse 65, 3003 Berne,
intimée.
Objet
Assistance administrative (CDI CH-FR),
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif
fédéral, Cour I, du 6 septembre 2022 (A-1578/2021).
Considérant en fait et en droit :
1.
1.1. Le 11 mai 2016, la Direction générale des finances publiques française (ci-après: l'autorité requérante ou l'autorité française) a déposé une demande d'assistance administrative en matière fiscale auprès de l'Administration fédérale des contributions (ci-après: l'Administration fédérale ou l'AFC) fondée sur l'art. 28 de la Convention du 9 septembre 1966 entre la Suisse et la France en vue d'éliminer les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir la fraude et l'évasion fiscales (ci-après: CDI CH-FR, RS 0.672.934.91). L'autorité requérante indiquait qu'une enquête diligentée en Allemagne par le parquet de Bochum et des visites domiciliaires effectuées dans les succursales allemandes de la banque B.________ AG (ci-après: la Banque) avaient abouti à la saisie de données concernant des contribuables français en lien avec des comptes ouverts auprès de ladite banque. Il était précisé que ces informations avaient été fournies le 3 juillet 2015 sur requête du 20 avril 2015 de l'autorité française à l'administration fiscale allemande en application de la Directive 2011/16/UE du 15 février 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal. La demande d'assistance administrative concernait les années 2010 à 2014 pour l'impôt sur le revenu et les années 2010 à 2015 pour l'impôt de solidarité sur la fortune et se fondait sur des listes (liste B relative à l'année 2006 et liste C relative à l'année 2008) contenant des numéros de comptes bancaires liés à des personnes inscrites sous un code "domizil" français. Elle visait à obtenir les nom, prénom, date de naissance et l'adresse la plus actuelle disponible des titulaires, ayants droit économiques selon le formulaire A, et de toute autre personne venant aux droits et obligations de ces derniers auprès de la Banque.
1.2. Donnant suite à une demande de production du 10 juin 2016, la Banque a transmis à l'Administration fédérale les informations demandées entre juin 2016 et juillet 2017. Informée par la Banque du risque de non-respect du principe de spécialité par l'autorité requérante, l'Administration fédérale a obtenu des autorités compétentes françaises, dans le cadre d'un échange de lettres du 11 juillet 2017 et par un courrier de l'autorité requérante du même jour, l'assurance que les informations transmises ne seraient communiquées qu'aux personnes et autorités mentionnées à l'art. 28 par. 2 CDI CH-FR et ne seraient utilisées qu'aux fins qui y sont énumérées.
1.3. Le 9 février 2018, l'Administration fédérale a, dans huit décisions finales rendues à l'encontre de certaines personnes concernées, ainsi qu'à la Banque (dont le Tribunal administratif fédéral avait reconnu la qualité pour recourir in arrêt A-4974/2016 du 25 octobre 2016), accordé l'assistance administrative à l'autorité française. Par arrêt du 30 juillet 2018, le Tribunal administratif fédéral a admis le recours formé par la Banque et annulé les décisions finales du 9 février 2018. Cette décision a été annulée, sur recours de l'Administration fédérale, par le Tribunal fédéral, dans un arrêt du 26 juillet 2019 (cause 2C_653/2018 partiellement publiée in ATF 146 II 150), qui a confirmé la validité des décisions finales du 9 février 2018. A la suite de cet arrêt, l'Administration fédérale a repris le traitement des procédures qui avaient été suspendues jusqu'à droit connu sur la position du Tribunal fédéral.
1.4. Le 25 septembre 2020, A.________ a transmis ses observations à l'Administration fédérale.
Par décision finale du 1er mars 2021 notifiée à A.________, l'Administration fédérale a accordé l'assistance administrative à l'autorité requérante.
A.________ a recouru contre cette décision finale auprès du Tribunal administratif fédéral, qui, par arrêt du 6 septembre 2022, a rejeté le recours.
1.5. A l'encontre de cet arrêt, A.________ forme un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Sous suite de frais et dépens, elle lui demande, principalement, d'annuler l'arrêt du 6 septembre 2022 du Tribunal administratif fédéral, de déclarer irrecevable la demande d'assistance administrative du 11 mai 2016 la concernant, de refuser toute forme d'assistance administrative aux autorités françaises et de ne leur communiquer aucune information la concernant; subsidiairement à ce dernier point, de renvoyer la cause au Tribunal administratif fédéral ou à l'Administration fédérale pour nouvelle décision, en lui ordonnant 1) de demander à l'autorité requérante des garanties quant à l'utilisation conforme des renseignements et de révoquer le courrier du 2 janvier 2020 de l'autorité requérante et tout accord en découlant, 2) d'interpeller l'autorité requérante sur la prescription des périodes visées par la demande, 3) de mentionner, lors de la transmission des renseignements, les montants qui ont été soumis à l'Accord sur la fiscalité de l'épargne dans sa teneur en vigueur avant le 1er janvier 2017, 4) de mentionner les soldes bancaires corrects du compte bancaire concerné, le cas échéant en obtenant de la Banque une rectification des renseignements fournies à l'Administration fédérale; plus subsidiairement, de renvoyer la cause au Tribunal administratif fédéral ou à l'Administration fédérale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.
2.
Selon l'art. 83 let. h LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions en matière d'entraide administrative internationale, à l'exception de l'assistance administrative en matière fiscale. Il découle de l'art. 84a LTF que, dans ce dernier domaine, le recours n'est recevable que lorsqu'une question juridique de principe se pose ou lorsqu'il s'agit, pour d'autres motifs, d'un cas particulièrement important au sens de l'art. 84 al. 2 LTF.
2.1. D'après la jurisprudence, la présence d'une question juridique de principe suppose que la décision en cause soit importante pour la pratique; cette condition est en particulier réalisée lorsque les instances inférieures doivent traiter de nombreuses causes analogues ou lorsqu'il est nécessaire de trancher une question juridique qui se pose pour la première fois et qui donne lieu à une incertitude caractérisée, laquelle appelle de manière pressante un éclaircissement de la part du Tribunal fédéral (ATF 139 II 404 consid.1.3; arrêt 2C_289/2015 du 5 avril 2016 consid. 1.2.1 non publié in ATF 142 II 218; arrêt 2C_54/2014 du 2 juin 2014 consid. 1.1, in StE 2014 A 31.4. Nr. 20). Comme le Tribunal fédéral n'a pas pour fonction de trancher des questions abstraites (cf. en matière d'assistance administrative, ATF 142 II 161 consid. 3), la question soulevée doit se poser concrètement dans le cas d'espèce et être déterminante pour l'issue du litige (cf. notamment arrêts 2C_556/2022 du 14 juillet 2022 consid. 2.1; 2C_267/2022 du 12 avril 2022 consid. 2.2). Dans le contexte de l'art. 84a LTF, la question juridique de principe doit concerner le domaine de l'assistance administrative en matière fiscale, c'est-à-dire l'application de normes spécifiques à ce domaine, qu'elles soient de rang international ou qu'il s'agisse de dispositions du droit interne (arrêt 2C_315/2022 du 6 mai 2022 consid. 3.1 et les références; 2C_651/2021 du 13 septembre 2021 consid. 6.1 et les références).
Il appartient au recourant de démontrer de manière suffisante en quoi les conditions de recevabilité de l'art. 84a LTF sont remplies (art. 42 al. 2 LTF; ATF 145 IV 99 consid. 1.5; 139 II 340 consid. 4; 404 consid. 1.3), à moins que tel ne soit manifestement le cas (cf. ATF 146 II 150 consid. 1.2.1; 139 II 340 consid. 4 et 5; 404 consid. 1.3).
2.2. La recourante fait d'abord valoir que le solde du compte bancaire est erroné et demande à ce qu'il soit corrigé avant transmission, en obtenant au besoin une rectification de la part de la Banque. Elle ne formule toutefois ici aucune question juridique et n'indique pas même quelles règles ou principes propres à l'assistance administrative internationale en matière fiscale seraient concernés ni en quoi ceux-ci devraient entraîner une entrée en matière en vertu de l'art. 84a LTF.
2.3. La recourante soutient ensuite que la présente cause soulève une question juridique de principe liée aux principes de spécialité et de confidentialité. Elle soutient que l'Administration fédérale et l'autorité requérante auraient convenu, dans un accord de janvier 2020, que les renseignements transmis en exécution de la demande d'assistance administrative du 11 mai 2016 pourraient également être utilisés contre des tiers dans un contexte fiscal, en violation de la jurisprudence du Tribunal fédéral, qui proscrit une telle utilisation. La question juridique de principe porterait sur le point de savoir si l'Administration fédérale peut conclure un accord international qui n'est pas conforme à la jurisprudence. En outre, comme, dans la décision finale du 1er mars 2021, l'Administration fédérale a limité le droit d'utiliser les renseignements transmis aux personnes concernées par l'état de fait décrit dans la demande d'assistance administrative, se poserait aussi la question juridique de principe de la relation (primauté) entre une décision finale rendue par l'Administration fédérale dans un cas d'espèce et cet accord.
La question soulevée repose sur la prémisse selon laquelle l'Administration fédérale et l'autorité requérante auraient conclu un " accord international " en janvier 2020, ce qui ne ressort nullement de l'arrêt attaqué, qui n'évoque que des garanties fournies par l'autorité requérante au sujet de l'utilisation des renseignements transmis. La question soulevée repose sur des éléments ne figurant pas dans l'arrêt attaqué et se fonde sur des conjectures (cf. déjà arrêt 2C_774/2022 du 27 septembre 2022 consid. 2.2).
Au surplus, dans plusieurs arrêts, le Tribunal fédéral a précisé que, dans sa dimension personnelle, le principe de spécialité proscrivait l'utilisation de renseignements reçus par la voie de l'assistance administrative à l'encontre de tiers, sauf si cette possibilité résulte des lois des deux Etats et que l'autorité compétente de l'Etat qui fournit les renseignements autorise cette utilisation (ATF 147 II 13 consid. 3.4; 146 I 172 consid. 7.1.3; 2C_545/2019 consid. 4.7; 2C_687/2019 consid 5.2.1). La question de l'utilisation des renseignements transmis trouve donc des réponses dans la jurisprudence, étant au surplus précisé qu'il ressort des faits constatés (arrêt attaqué consid. 6.3.1) que, dans la décision finale du 1er mars 2021, l'Administration fédérale a, conformément à la jurisprudence précitée, dûment rappelé à l'autorité requérante les limites découlant du principe de spécialité. On ne voit donc pas en quoi la présente cause soulèverait une question juridique de principe concernant la conception qu'a l'Administration fédérale du principe de spécialité, qui n'apparaît ni incohérente ni contraire à la jurisprudence (cf. aussi arrêt 2C_774/2022 du 27 septembre 2022 consid. 2.2).
2.4. La recourante fait également valoir que la présente cause soulève une question juridique de principe liée au fait que certaines périodes fiscales concernées par la demande d'assistance administrative du 11 mai 2016 ne pourraient plus faire l'objet de rectifications en France en raison de la prescription. Compte tenu de la durée de la procédure dans le cas d'espèce, initiée en mai 2016, elle se demande si la Suisse ne devrait pas examiner la condition de la pertinence vraisemblable des renseignements requis en tenant compte du temps écoulé depuis la demande. Il ne s'agirait pas d'examiner la condition de la pertinence vraisemblable à la lumière du droit interne de l'Etat requérant, mais d'analyser la " correspondance " entre les termes de la demande du 11 mai 2016, particulièrement ancienne, et les informations à remettre en septembre 2022.
Quoi qu'en dise la recourante, la question qu'elle soulève revient bien à se demander si la prescription alléguée d'une période fiscale qui fait l'objet d'une demande d'assistance administrative est susceptible d'affecter le caractère vraisemblablement pertinent d'un renseignement concernant cette période (cf. déjà arrêt 2C_774/2022 du 27 septembre 2022 consid. 2.3). Or, le Tribunal fédéral s'est déjà prononcé sur la portée d'objections liées à d'éventuels obstacles procéduraux qui, en application du droit interne de l'Etat requérant, empêcheraient l'utilisation des renseignements obtenus, et notamment sur l'exception de la prescription (ATF 144 II 206 consid. 4.3; cf. encore, parmi de nombreux autres, arrêts 2C_662/2021 du 18 mars 2022 consid. 5.4.1 et 5.4.2 et les références; 2C_800/2020 du 7 octobre 2020 consid. 6.3; 2C_588/2018 du 13 juillet 2018 consid. 4.3). La question posée est donc tranchée.
2.5. La recourante soutient finalement que la présente cause soulève la question juridique de principe de savoir si l'Administration fédérale est tenue de communiquer aux autorités françaises le montant des intérêts payés selon l'Accord sur la fiscalité de l'épargne dans sa teneur applicable pour les périodes concernées, afin d'éviter tout risque de double imposition.
Il ne suffit pas d'imaginer des questions de manière abstraite et de les qualifier de questions juridiques de principe pour que le Tribunal fédéral doive entrer en matière. Il faut au contraire démontrer que la situation d'espèce, telle qu'elle ressort de l'arrêt attaqué, remplit les conditions de l'art. 84a LTF, ce qui n'est manifestement pas le cas de la question formulée en l'espèce. La recourante n'expose du reste même pas quelles dispositions spécifiques au domaine de l'assistance administrative seraient concernées (cf. déjà arrêt 2C_774/2022 du 27 septembre 2022 consid. 2.4).
3.
Il découle de ce qui précède que le recours doit être déclaré irrecevable en application de la procédure prévue aux art. 107 al. 3 et 109 al. 1 LTF, étant précisé que, comme l'arrêt attaqué émane du Tribunal administratif fédéral, la voie du recours constitutionnel subsidiaire ne saurait entrer en considération (art. 113 a contrario LTF). Succombant, la recourante doit supporter les frais de justice devant le Tribunal fédéral (art. 66 al. 1 LTF). Il ne sera pas alloué de dépens ( art. 68 al. 1 et 3 LTF ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est irrecevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, à l'Administration fédérale des contributions, Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI, et au Tribunal administratif fédéral, Cour I.
Lausanne, le 11 octobre 2022
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : F. Aubry Girardin
La Greffière : S. Vuadens