Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
5A_934/2022
Arrêt du 12 janvier 2023
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président, Bovey et De Rossa.
Greffière : Mme Hildbrand.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me François Roullet, curateur,
recourant,
contre
Office cantonal des poursuites de Genève, rue du Stand 46, 1204 Genève.
Objet
effet suspensif (exécution d'une saisie),
recours contre l'ordonnance de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites, du 22 novembre 2022 (DCSO/473/22).
Faits :
A.
A.a. A.________, âgé de 72 ans et bénéficiant d'une mesure de curatelle de représentation sans limitation de ses droits civils ( art. 394 et 395 CC ), dispose de deux résidences, l'une dans le canton de Genève (chemin U.________ à V.________) et l'autre dans le canton de Neuchâtel ( rue W.________ à X.________).
A.b. Il a fait l'objet entre 2020 et 2022 d'une poursuite n° yyy diligentée à son encontre par l'Office des poursuites du canton de Neuchâtel, dans le cadre de laquelle la rente de deuxième pilier qu'il perçoit a été saisie à compter du mois de novembre 2021.
Dans le cadre de cette poursuite, il a contesté devant les autorités de surveillance inférieure et supérieure du canton de Neuchâtel, ainsi que devant le Tribunal fédéral, la compétence à raison du lieu de l'Office des poursuites neuchâtelois pour exécuter la saisie, soutenant être domicilié dans le canton de Genève. Statuant en dernier lieu par arrêt 5A_539/2022 du 13 septembre 2022, le Tribunal fédéral a confirmé l'appréciation des juridictions neuchâteloises selon laquelle, au moment de l'avis de saisie (soit entre le 31 août et le 8 septembre 2021), le poursuivi était domicilié à X.________.
A.c. A.________ fait également l'objet de la poursuite n° zzz, diligentée à son encontre par l'Office cantonal des poursuites genevois (ci-après: l'Office) sur réquisition de l'État de Genève. Dans le cadre de cette poursuite, l'Office a adressé le 29 septembre 2021 un avis de saisie au poursuivi. Une saisie, portant sur la rente de deuxième pilier perçue par le poursuivi, a été exécutée le 2 décembre 2021. Par avis au tiers débiteur (art. 99 LP) du 29 avril 2022, l'Office a informé la Caisse de pension du poursuivi qu'elle devrait désormais s'acquitter en ses mains de la quotité saisissable de la rente, arrêtée à 2'426 fr. 40.
A.d. Par acte adressé le 21 novembre 2022 à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la Chambre de surveillance), A.________, représenté par son curateur, a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre l'avis au tiers débiteur du 29 avril 2022, dont il explique avoir reçu communication de la part de sa Caisse de pension le 11 novembre 2022. Il a conclu à l'annulation de la saisie et, plus généralement, à la constatation de la nullité des actes de poursuite accomplis par l'Office à son encontre depuis le mois d'octobre 2020. Il a requis à titre préalable que l'effet suspensif soit octroyé à sa plainte.
A.e. Par ordonnance du 22 novembre 2022, le président de la Chambre de surveillance a rejeté la requête d'effet suspensif assortissant la plainte.
B.
Par acte posté le 5 décembre 2022, A.________, représenté par son curateur, exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'ordonnance du 22 novembre 2022. Il conclut à son annulation et à sa réforme en ce sens que l'effet suspensif est accordé à sa plainte déposée le 21 novembre 2022.
Des déterminations sur le fond n'ont pas été requises.
C.
Par ordonnance présidentielle du 15 décembre 2022, la requête d'effet suspensif assortissant le recours a été admise en ce sens que l'exécution de la décision de l'Office du 29 avril 2022 est suspendue pendant la procédure fédérale.
Considérant en droit :
1.
1.1. La décision querellée constitue une décision incidente visée par l'art. 93 al. 1 LTF dès lors que, portant sur l'effet suspensif (art. 36 LP), elle ne conduit pas à la clôture définitive de l'instance (ATF 137 III 475 consid. 1; 134 II 192 consid. 1.3; arrêt 5A_431/2021 du 13 juillet 2021 consid. 1.1 et les autres arrêts cités). Hormis les décisions mentionnées à l'art. 92 al. 1 LTF, sur des questions non pertinentes en l'espèce, une décision préjudicielle ou incidente ne peut être entreprise immédiatement que si elle peut causer un préjudice irréparable (art. 93 al. 1 let. a LTF) ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (art. 93 al. 1 let. b LTF; arrêt 5A_1026/2015 du 8 mars 2016 consid. 1.1). La pratique du Tribunal fédéral est d'entrer en matière sur un recours dirigé contre un refus d'effet suspensif contre une décision d'exécution forcée (arrêt 5A_431/2021 précité loc. cit. et les arrêts cités).
Le président de la Chambre de surveillance n'a pas statué sur recours mais en qualité d'instance cantonale unique sur l'effet suspensif requis dans le cadre d'une procédure de plainte LP; le présent recours est cependant admissible en vertu de l'art. 75 al. 1 LTF (ATF 138 III 41 consid. 1.1; 137 III 424 consid. 2.2; arrêt 5A_1026/2015 précité loc. cit.).
1.2. Le recours contre une décision incidente est soumis à la même voie de droit que celle qui est ouverte contre la décision principale (ATF 137 III 380 consid. 1.1). En l'occurrence, il s'agit d'une décision prise dans le cadre d'une procédure de plainte (art. 17 LP), soit en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 72 al. 2 let. a LTF). Elle est donc susceptible du recours en matière civile, sans égard à la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. c LTF). Le recours a en outre été interjeté dans le délai (art. 100 al. 2 let. a LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi, par une partie qui a pris part à la procédure devant l'autorité précédente et qui a un intérêt à l'annulation ou à la modification de l'arrêt entrepris (art. 76 al. 1 LTF). Le recours en matière civile est donc en principe recevable au regard des dispositions qui précèdent.
2.
2.1. La décision portant sur l'effet suspensif est une mesure provisionnelle au sens de l'art. 98 LTF (ATF 137 III 475 consid. 2). Seule peut donc être invoquée la violation des droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs que s'ils ont été invoqués et motivés ("principe d'allégation"; art. 106 al. 2 LTF), à savoir expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée (ATF 142 II 369 consid. 2.1; 142 III 364 consid. 2.4). La partie recourante doit ainsi indiquer quelle disposition constitutionnelle aurait été violée et démontrer, par une argumentation précise, en quoi consiste la violation (ATF 139 I 229 consid. 2.2; 137 II 305 consid. 3.3; 135 III 232 consid. 1.2, 397 consid. 1.4
in fine). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références).
En particulier, pour qu'une décision soit considérée comme arbitraire au sens de l'art. 9 Cst., il faut qu'elle soit manifestement insoutenable, méconnaisse gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité, cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat. Elle ne l'est en revanche pas du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable (ATF 143 IV 500 consid. 1.1; 142 II 369 consid. 4.3).
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Dans l'hypothèse d'un recours soumis à l'art. 98 LTF, le recourant qui entend invoquer que les faits ont été établis de manière manifestement inexacte ne peut obtenir la rectification ou le complètement des constatations de fait de l'arrêt cantonal que s'il démontre la violation de droits constitutionnels, conformément au principe d'allégation susmentionné (cf.
supra consid. 2.1). Le recourant ne peut se limiter à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves; il doit indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3). Une critique des faits qui ne satisfait pas à cette exigence est irrecevable (art. 106 al. 2 LTF; ATF 141 IV 249 consid. 1.3.1; 140 III 264 consid. 2.3 et les références).
Il suit de là que la partie intitulée "En fait" du recours (p. 3-6) où le recourant se borne, sans présenter de critiques répondant aux réquisits précités, à exposer sa version des faits en offrant des preuves est irrecevable, en tant qu'elle s'écarte des faits de l'ordonnance attaquée.
3.
3.1. L'octroi ou le refus de l'effet suspensif selon l'art. 36 LP relève du pouvoir d'appréciation de l'autorité de surveillance (ATF 100 III 11 et les références). La décision dépend d'une pesée des intérêts entre la continuation de la procédure d'exécution et le maintien des choses telles qu'elles existaient avant que la décision attaquée ne soit rendue. En règle générale, l'effet suspensif sera ordonné lorsque la plainte ou le recours ne semble pas dénué de chances de succès et pour autant que la mise en oeuvre immédiate de la mesure querellée, parallèlement à la procédure de plainte ou de recours, risque d'avoir pour conséquence de rendre inopérante la décision à rendre par l'autorité de surveillance qui annulerait ou modifierait ladite mesure (arrêts 5A_431/2021 précité consid. 3.2.2.1 et la référence; 5A_940/2019 du 29 juin 2020 consid. 2.1 et les références).
L'octroi de l'effet suspensif suppose que le requérant rende vraisemblable que sa plainte n'est pas manifestement infondée et qu'il est menacé d'un préjudice difficilement réparable, ce qui doit être évalué en fonction de l'état actuel de la procédure de poursuite (ABBET, Pratique valaisanne récente en matière de LP, in BlSchK 2020 p. 197 ss, 199 et la référence; cf. aussi arrêt 5A_940/2019 précité loc. cit.).
3.2. Le président de la Chambre de surveillance a refusé l'effet suspensif au motif que le plaignant n'expliquait pas en quoi l'exécution de la mesure contestée pendant la procédure de plainte lui causerait un dommage difficilement réparable dans l'hypothèse où il obtiendrait gain de cause. En particulier, il ne prétendait pas que la saisie exécutée sur sa rente de deuxième pilier dans la continuité de la saisie exécutée par l'office des poursuites du canton de Neuchâtel, venue à expiration en novembre 2022, le priverait des ressources nécessaires à la couverture de ses besoins vitaux.
3.3. Le recourant fait grief au juge précédent de ne pas avoir procédé à une pesée des intérêts et d'avoir considéré qu'il n'avait pas démontré que l'exécution de la mesure contestée pendant la procédure de plainte lui causerait un dommage difficilement réparable et spécialement en quoi la saisie opérée le priverait des ressources nécessaires à la couverture de ses besoins vitaux, alors même qu'il avait produit un calcul de son minimum vital opéré par l'Office des poursuites de Neuchâtel (pièce n° 11) prouvant que la saisie complète de sa rente portait atteinte à son minimum vital. Il reproche au juge cantonal de s'être contenté de rejeter la requête d'effet suspensif sans examiner les éléments qui lui avaient pourtant été soumis et d'avoir ainsi procédé à une appréciation arbitraire des faits conduisant à un résultat arbitraire qui le privait de ses besoins vitaux. Si ledit magistrat s'était livré à une pesée des intérêts, il aurait dû considérer que l'intérêt du poursuivi à couvrir ses besoins vitaux était bien supérieur à celui du créancier d'obtenir le produit de la saisie, étant rappelé que la rente était déjà saisie partiellement par l'Office des poursuites de Neuchâtel.
3.4. C'est à raison - et partant sans arbitraire - que le juge cantonal a examiné s'il était en l'espèce rendu vraisemblable que le maintien durant la procédure de la mesure dont est plainte était susceptible de causer un préjudice difficilement réparable au plaignant (cf.
supra consid. 3.1). C'est également sans arbitraire qu'il a constaté que la plainte était déficiente sur ce point. En effet, à lire cette écriture, versée au dossier cantonal, on ne trouve aucun allégué ni aucune motivation appuyant la conclusion tendant à l'octroi de l'effet suspensif à la plainte. En particulier, contrairement à ce qui figure pour la première fois dans le présent recours, il n'y est aucunement allégué que la saisie litigieuse priverait le recourant des ressources nécessaires à la couverture de ses besoins vitaux. L'allégué pour lequel la pièce n° 11 est offerte à titre de preuve se borne en effet à indiquer que " [l]e 20 octobre 2021 un calcul du minimum vital [du poursuivi] a été opéré par l'Office des poursuites de La Chaux-de-Fonds fixant le montant saisissable à CHF 1'650.-- par mois ". S'il est vrai que, selon l'art. 20a al. 2 ch. 2 LP - dont la violation arbitraire n'est quoi qu'il en soit même pas soulevée -, la maxime inquisitoire s'applique à la procédure de plainte LP, il n'apparaît pas encore insoutenable de considérer qu'une telle allégation est insuffisamment circonstanciée et étayée pour être admissible sous l'angle du devoir de collaboration du plaignant à l'établissement de l'atteinte au minimum vital que causerait la saisie de rente LPP litigieuse (sur le devoir de collaboration à l'établissement des faits essentiels: ATF 123 III 328 consid. 3; 112 III 79 consid. 2; arrêts 5A_324/2022 du 17 octobre 2022 consid. 2.3 et les arrêts cités; 5A_764/2019 du 10 mars 2020 consid. 6.1 non publié aux ATF 146 III 303; 5A_405/2017 du 14 novembre 2017 consid. 2.3 et les références; 5A_253/2015 du 9 juin 2015 consid. 4.1 et les arrêts cités), étant au demeurant précisé que le recourant ne prétend pas avoir indiqué à l'autorité cantonale que ladite saisie de rente consacre une telle atteinte. Dans ces conditions, on ne voit pas que le président de la Chambre de surveillance ait versé dans l'arbitraire en jugeant que le recourant n'avait pas exposé à satisfaction en quoi la mesure attaquée lui causerait un préjudice difficilement réparable si elle n'était pas suspendue durant la procédure de plainte, de sorte que la requête d'effet suspensif pouvait être rejetée pour ce motif.
4.
Il suit de là que le recours est rejeté, aux frais de son auteur (art. 66 al. 1 LTF). Aucuns dépens ne sont dus (art. 68 al. 3 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué au recourant, à l'Office cantonal des poursuites de Genève et à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 12 janvier 2023
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Herrmann
La Greffière : Hildbrand