Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
9C_90/2023, 9C_120/2023
Arrêt du 12 mars 2024
IIIe Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Parrino, Président, Moser-Szeless et Beusch.
Greffier : M. Feller.
Participants à la procédure
9C_90/2023
Service cantonal des contributions du canton du Valais,
avenue de la Gare 35, 1950 Sion,
recourant,
contre
A.A.________ et B.A.________,
représentés par Me Dominique Morand, avocat,
intimés,
et
9C_120/2023
A.A.________ et B.A.________,
représentés par Me Dominique Morand, avocat,
recourants,
contre
Service cantonal des contributions du canton du Valais,
avenue de la Gare 35, 1950 Sion,
intimé.
Objet
Impôts cantonaux et communaux du canton du Valais et impôt fédéral direct, période fiscale 2018 (commerce d'immeubles),
recours contre la décision de la Commission cantonale de recours en matière fiscale du canton du Valais du 23 juin 2022.
Faits :
A.
A.a. Les époux B.A.________ et A.A.________ (ci-après: les contribuables) sont assujettis aux impôts de manière illimitée dans le canton du Valais (U.________). Par acte authentique du 27 septembre 2004, A.A.________ a acquis aux enchères publiques une part de copropriété (ou quote-part) de 15% sur la parcelle n° xxx, sise dans la commune de V.________ (VS), aux côtés de cinq autres acquéreurs dont C.________ SA qui est active dans le domaine des projets immobiliers.
A.b. En séance du 12 décembre 2012, le Conseil Municipal de la commune de V.________ a délivré une autorisation notamment de "démolir le chalet existant - Construire un complexe résidentiel & hôtelier, [...]" sur la parcelle n° xxx, à la suite de la requête de D.________ SA.
A.c. Par acte authentique du 10 octobre 2017, les copropriétaires ont vendu la parcelle pour un prix de 20'000'000 fr. à deux sociétés, dont l'une des clauses avait notamment la teneur suivante:
« Si l'autorisation de construire modifiée n'est pas entrée en force le 30 avril 2018 ou si l'une ou l'autre des autorisations administratives nécessaires au projet (autorisation de démolir et de construire du 18.12.2012 et autorisation concernant la route et le défrichement du 19.09.2012) devait être annulée, déclarée nulle et de nul effet ou perdre sa validité en tout ou partie de toute autre manière, la présente vente sera caduque sans indemnité de part et d'autre [...] ».
A.d. En séance du 14 novembre 2017, le Conseil Municipal de la commune de V.________ a délivré une autorisation modifiant le dossier autorisé le 11 décembre 2012. Cette décision a été notifiée le 12 décembre 2017.
A.e. Le 30 décembre 2019, les époux B.A.________ et A.A.________ ont déposé leur déclaration fiscale pour l'année 2018, accompagnée d'une note explicative concernant le montant issu de la vente de la quote-part de 15% sur la parcelle n° xxx appartenant à A.A.________. Ils ont requis que ce montant soit qualifié de gain immobilier.
Par procès-verbal de taxation du 2 juillet 2020, le service cantonal des contributions du canton du Valais, Taxations des personnes physiques (ci-après: le SCC), a considéré que le gain (net) de 2'000'925 fr. (2'223'225 fr. - 222'300 fr), issu de la vente de la part de copropriété de 15% de A.A.________, était un revenu provenant d'une activité indépendante imposable. Le 5 novembre 2020, le SCC a partiellement admis la réclamation du 27 juillet 2020 des contribuables, en rectifiant le montant du revenu (net) provenant de l'activité indépendante à 1'914'991 fr. (2'124'991 fr. - 210'000 fr.) sur la base du nouveau décompte établi par les époux B.A.________ et A.A.________.
Par décision du 30 avril 2021, le SCC a rejeté la réclamation du 4 décembre 2020 des contribuables.
B.
Saisie d'un recours de B.A.________ et A.A.________, la Commission cantonale de recours en matière fiscale du canton du Valais (ci-après: la commission cantonale ou la commission de recours; depuis le 1er janvier 2024, Cour de droit fiscal du Tribunal cantonal) l'a admis très partiellement en ce qui concerne l'impôt fédéral direct (IFD) et l'impôt cantonal et communal (ICC), par décision du 23 juin 2022, notifiée le 22 décembre 2022. Elle a confirmé le caractère commercial de la parcelle litigieuse et la soumission à l'impôt sur le revenu du bénéfice réalisé lors de la vente de la part de copropriété de ladite parcelle. Elle a également annulé la reprise opérée en 2018 par le SCC s'agissant du bénéfice issu de la vente de la part de copropriété. Elle a rejeté le recours en tant qu'il concerne l'ICC "s'agissant de l'application de l'article 63 alinéa 3 LF".
C. B.A.________ et A.A.________ interjettent un recours en matière de droit public (cause 9C_120/2023). Ils concluent principalement à la réforme de la décision du 23 juin 2022 en ce sens que le bénéfice issu de la vente de la parcelle n° xxx n'est pas soumis à l'impôt sur le revenu tant en matière d'IFD que d'ICC. Subsidiairement, ils demandent à être soumis à l'impôt sur le bénéfice de liquidation en matière d'ICC. A titre plus subsidiaire, ils requièrent l'annulation de l'arrêt entrepris tant pour l'IFD que pour l'ICC ainsi que le renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour qu'elle statue à nouveau.
Le SCC, agissant séparément par la voie du recours en matière de droit public (cause 9C_90/2023), demande l'annulation de l'arrêt entrepris et la confirmation de sa décision sur réclamation du 30 avril 2021, en ce sens que le bénéfice réalisé à la suite de la vente de la part de copropriété de 15% de la parcelle n° xxx est imposable en 2018.
Chacune des parties recourantes conclut au rejet du recours de l'autre. L'Administration fédérale des contributions a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit :
I. Recevabilité, pouvoir d'examen et objet du litige
1.
1.1. Les recours en matière de droit public interjetés séparément par les contribuables et le SCC sont dirigés contre le même arrêt. Ils concernent les mêmes parties, le même objet, les mêmes questions juridiques et reposent sur le même complexe de faits, à savoir l'imposition du gain issu de la vente de la part de copropriété de 15% sur la parcelle n° xxx, sise dans la commune de V.________. Il est partant justifié, pour des motifs d'économie de procédure, de joindre les causes et de statuer dans un seul arrêt (art. 24 de Loi fédérale du 4 décembre 1947 sur la procédure civile fédérale [PCF; RS 273] en relation avec l'art. 71 LTF).
1.2. Les recours sont dirigés contre une décision finale (art. 90 LTF) qui a été rendue en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) ne tombant pas sous le coup de l'une des exceptions prévues à l'art. 83 LTF. Les recours dirigés contre cet arrêt sont donc recevables comme recours en matière de droit public (cf. art. 89 al. 1 LTF; voir aussi art. 146 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct [LIFD; RS 642.11]; art. 73 al. 1 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes [LHID; RS 642.14]; s'agissant du recours du SCC en matière d'ICC cf. également art. 89 al. 2 let. d LTF et art. 73 al. 2 LHID). Les recours ont par ailleurs été déposés en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et en la forme prévue (art. 42 LTF). Il convient dès lors d'entrer en matière, sous réserve de ce qui suit.
1.3. La juridiction cantonale a traité à la fois de l'IFD et de l'ICC pour la période fiscale 2018, ce qui est admissible (ATF 135 II 260 consid. 1.3.1). Partant, le dépôt d'un seul acte de recours est aussi autorisé, dans la mesure où la partie recourante s'en prend clairement aux deux catégories d'impôt (cf. ATF 135 II 260 consid. 1.3.2; arrêt 9C_713/2022 du 6 novembre 2023 consid. 1.2), ce qui est le cas en l'espèce tant pour les contribuables que pour le SCC.
2.
2.1. D'après l'art. 106 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral applique le droit d'office. Il examine en principe librement la conformité du droit cantonal harmonisé et de sa mise en pratique par les instances cantonales aux dispositions de la LHID, à moins que les dispositions de cette loi fédérale ne laissent une marge de manoeuvre aux cantons, auquel cas son pouvoir d'examen se limite aux griefs constitutionnels dûment invoqués (cf. ATF 144 II 313 consid. 5.3; 134 II 207 consid. 2).
2.2. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. La partie recourante ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 147 I 73 consid. 2.1; 145 V 188 consid. 2 et les références).
3.
Le litige porte tout d'abord sur la qualification du gain de 1'914'991 fr. réalisé par les époux B.A.________ et A.A.________, respectivement le contribuable lors de la vente de sa quote-part de 15% sur la parcelle n° xxx, selon l'acte de vente du 17 octobre 2017. En particulier, il convient de déterminer si c'est à bon droit que la juridiction cantonale a confirmé que ce gain devait être qualifié de revenu provenant d'une activité indépendante (commerce d'immeubles) au sens de l' art. 18 al. 1 et 2 LIFD (art. 14 al. 1 et 2 de la loi fiscale du canton du Valais du 10 mars 1976 [LF/VS; RS/VS 642.1]) et non pas de gain en capital exonéré de tout impôt au sens de l'art. 16 al. 3 LIFD (art. 12 al. 3 LF/VS), respectivement de gain immobilier (cf. art. 12 LHID; art. 44 ss LF/VS).
II. Impôt fédéral direct
1. Qualification du gain
4.
4.1. Les juges précédents ont considéré que le bénéfice réalisé lors de la vente de la quote-part de 15% sur la parcelle n° xxx, propriété du contribuable, devait être soumis à l'impôt ordinaire sur le revenu, au vu du caractère commercial de ladite parcelle. Ils se sont fondés sur divers évènements ayant précédé la vente en question. D'abord, la juridiction cantonale a retenu que la parcelle avait été acquise en 2004 par les copropriétaires conjointement avec C.________ SA, active dans le secteur de la construction et de l'immobilier. En outre, elle a constaté que le contribuable s'était associé avec des promoteurs en vue de réaliser une affaire immobilière. A cet égard, les juges précédents ont retenu que plusieurs démarches de nature commerciale avaient été entreprises par les copropriétaires en vue de la construction d'un complexe hôtelier et résidentiel avec l'adoption d'un plan d'aménagement. De plus, ils ont constaté que des paiements d'un montant total de 650'000 fr. avaient été accordés à un bureau d'architectes en lien avec le projet immobilier initié sur la parcelle n° xxx. La juridiction cantonale a encore relevé que des travaux de valorisation se sont poursuivis sur la parcelle n° xxx jusqu'en 2017, notamment par le paiement de la somme de 1'000'000 fr. à des particuliers pour des prestations de démarchages en vue de trouver des acquéreurs pour le projet immobilier, ainsi que divers montants à un bureau d'architectes, à un bureau d'aménagement du territoire d'urbanisme et d'architecture, à un avocat et à l'un des copropriétaires pour du travail de secrétariat. La juridiction cantonale a encore retenu que le contribuable avait des liens étroits avec le milieu immobilier, compte tenu de sa participation à un projet immobilier au cours des années 1997 et 1998, déjà en partenariat avec l'un des copropriétaires de la parcelle ici en cause.
4.2. Les contribuables recourants contestent que le bénéfice issu de la vente de la parcelle n° xxx serait de nature commerciale (revenu) et reprochent à la juridiction cantonale d'avoir occulté les indices allant dans le sens d'une qualification privée de ce gain. Ils soutiennent, en substance, que le caractère privé de la quote-part de 15% sur la parcelle n° xxx découlerait du fait que les critères applicables pour délimiter une activité lucrative indépendante de la simple administration de la fortune privée iraient dans le sens d'une qualification privée prépondérante. Ils font valoir que la parcelle n° xxx n'aurait jamais fait l'objet d'une comptabilisation et d'un quelconque amortissement, qu'elle aurait été détenue pendant plus de 13 ans, que son financement aurait été effectué en partie avec des fonds propres et en partie à travers la société E.________ SA ("quasi-fonds propres") dont le contribuable est actionnaire, que son acquisition se serait faite dans un but d'investissement sur le long terme, qu'elle aurait été acquise à des conditions intéressantes sans risques, qu'aucune "promotion classique" n'aurait été effectuée (construction et vente d'immeubles avec tous les risques liés) et que les contribuables ne disposeraient d'aucune connaissance professionnelle spécifique en lien avec l'immobilier, malgré la participation passive du contribuable à une promotion immobilière concernant une parcelle familiale. A cet égard, les recourants précisent que, contrairement à ce qu'affirmerait la juridiction cantonale, la seule participation à cette opération passée ne permettrait pas de considérer objectivement le contribuable comme un expert de l'immobilier. De plus, les démarches entreprises sur la parcelle n° xxx n'auraient aucun caractère commercial et auraient été uniquement effectuées dans le but de maintenir la constructibilité de celle-ci. Il en irait ainsi du montant de 432'000 fr. - et non de 650'000 fr. retenu par la juridiction cantonale -, qui avait été payé en 2012 à D.________ SA mais aurait été restitué aux contribuables en 2018.
5.
5.1. L'art. 16 LIFD prévoit que l'impôt sur le revenu a pour objet tous les revenus du contribuable, qu'ils soient uniques ou périodiques. En lien avec la liste exemplative des art. 17 à 23 LIFD, cette disposition exprime, pour l'imposition du revenu des personnes physiques, le concept de l'accroissement du patrimoine, respectivement de l'imposition du revenu global net ("Reinvermögenszugangstheorie"), ainsi que la règle selon laquelle tous les revenus du contribuable sont en principe imposables (ATF 143 II 402 consid. 5.1; 139 II 363 consid. 2.1), y compris les bénéfices en capital provenant de l'aliénation, de la réalisation ou de la réévaluation comptable d'éléments de la fortune commerciale (art. 18 al. 2 LIFD). Selon l'art. 16 al. 3 LIFD, les gains en capital réalisés lors de l'aliénation d'éléments de la fortune privée ne sont en revanche pas imposables. Cela signifie qu'un gain en capital n'est soumis à l'impôt fédéral direct que lorsque le bien aliéné fait partie de la fortune commerciale du contribuable, non pas lorsqu'il se rapporte à sa fortune privée (ATF 133 II 420 consid. 3.1; arrêts 9C_81/2023 du 18 septembre 2023 consid. 5.1; 9C_81/2021 du 18 février 2022 consid. 3.1 et les références).
5.2. De jurisprudence constante, la distinction entre un gain privé en capital (non imposable sur le revenu) et un bénéfice commercial en capital provenant de l'exercice d'une activité lucrative indépendante (imposable sur le revenu), dépend des circonstances concrètes du cas. La notion d'activité lucrative indépendante s'interprète largement, de telle sorte que sont seuls considérés comme des gains privés en capital exonérés de l'impôt sur le revenu ceux qui sont obtenus par un particulier de manière fortuite ou dans le cadre de la simple administration de sa fortune privée (arrêts 9C_81/2023 du 18 septembre 2023 consid. 5.2; 2C_918/2021 du 18 février 2022 consid. 3.1 et les références). En revanche, si l'activité du contribuable excède ce cadre relativement étroit et est orientée dans son ensemble vers l'obtention d'un revenu, l'intéressé est réputé exercer une activité lucrative indépendante dont les bénéfices en capital sont imposables. Une telle qualification peut se justifier, selon les cas, même en l'absence d'une activité reconnaissable pour les tiers et/ou organisée sur le modèle d'une entreprise commerciale, et même si cette activité n'est exercée que de manière accessoire ou temporaire, voire même ponctuelle (ATF 125 II 113 consid. 5e; arrêts 9C_81/2023 du 18 septembre 2023 consid. 5.2; 2C_918/2021 du 18 février 2022 consid. 3.2 et les références; voir aussi arrêt 9C_121/2023 du 18 septembre 2023 consid. 4.1 et les références).
5.3. C'est avant tout en lien avec les transactions effectuées par les particuliers sur des immeubles ou sur des titres que la jurisprudence a été amenée à dégager des critères permettant de tracer la limite entre les gains (privés) en capital et les bénéfices (commerciaux) en capital. Elle a notamment considéré que valent comme indices d'une activité lucrative indépendante dépassant la simple administration de la fortune privée les éléments suivants: le caractère systématique et/ou planifié des opérations (démarches augmentant la valeur du bien immobilier par le biais du morcellement parcellaire, de constructions, de publicités etc.; acquisition dans le but de revendre l'immeuble le plus rapidement possible en réalisant un bénéfice; utilisation des données du marché; cf. arrêt 9C_121/2023 du 18 septembre 2023 consid. 4.2), la fréquence élevée des transactions, la courte durée de possession des biens avant leur revente, la relation étroite entre l'activité indépendante (accessoire) supposée et la formation et/ou la profession (principale) du contribuable, l'utilisation de connaissances spécialisées, l'engagement de fonds étrangers d'une certaine importance pour financer les opérations, le réinvestissement du bénéfice réalisé ou encore la constitution d'une société de personnes (cf. ATF 125 II 113 consid. 6a; arrêts 9C_81/2023 du 18 septembre 2023 consid. 5.2; 2C_918/2021 du 18 février 2022 consid. 3.2 et les références). Chacun de ces indices peut conduire, en concours avec les autres voire même - exceptionnellement - isolément s'il revêt une intensité particulière, à la reconnaissance d'une activité lucrative indépendante (arrêts 9C_81/2023 du 18 septembre 2023 consid. 5.2; 2C_918/2021 du 18 février 2022 consid. 3.2 et les références). En tout état, les circonstances concrètes du cas sont déterminantes, telles qu'elles se présentent au moment de l'aliénation (cf. ATF 125 II 113 consid. 6a; arrêt 2C_918/2021 du 18 février 2022 consid. 3.2 et les références).
6.
6.1. Les recourants contribuables se contentent de reprocher à la commission de recours d'avoir occulté certains critères comme la durée de possession, le recours à des fonds propres ou encore l'absence de comptabilisation de la parcelle n° xxx pour qualifier la vente de ladite parcelle de privée, sans toutefois démontrer en quoi l'appréciation de la juridiction cantonale fondée sur d'autres critères serait arbitraire. En effet, il ne suffit pas pour remettre en cause le caractère commercial de l'opération mobilière litigieuse que les contribuables opposent leur propre interprétation de cette transaction à celle de la juridiction cantonale, sur la base de certains critères certes établis par la jurisprudence mais limités à ceux qu'ils estiment être déterminants. Au demeurant, chacun de ces éléments, considérés dans leur ensemble ou isolément, pourrait conduire à ce que la vente intervenue soit qualifiée de commerciale, respectivement d'activité lucrative indépendante (cf. consid. 5.2 supra). Il y a bien plus lieu, pour déterminer la prépondérance privée ou commerciale de la transaction immobilière, de prendre en compte l'ensemble des circonstances du cas d'espèce. A cet égard, les contribuables invoquent l'absence d'endettement important pour acquérir la part immobilière en cause. Ils indiquent cependant que l'acquisition de la parcelle n° xxx s'est faite pour une part par fonds propres et pour une part par un prêt, sans aucune précision quant à l'ampleur des fonds étrangers investis par rapport à leur propre fortune. Leur argumentation quant à l'absence de dettes importantes ne saurait convaincre compte tenu de l'achat effectué en partie grâce à des fonds étrangers, qu'ils ont manqué de chiffrer. En outre, les contribuables ne remettent nullement en cause que ladite acquisition s'est faite conjointement avec C.________ SA, active dans le domaine de l'immobilier, ce qui constitue un élément supplémentaire pour la qualification de la transaction litigieuse de commerciale. S'il est vrai que la participation du contribuable à une opération immobilière en 1997 et 1998 n'est pas suffisante pour le considérer comme un "expert" dans le domaine, il apparaît vraisemblable qu'il ait acquis certaines connaissances en la matière à cette occasion, par sa participation - active ou passive - à la transaction immobilière, lors de laquelle l'immeuble acquis avait été attribué à sa fortune commerciale; il ne pouvait du moins ignorer que l'association avec une société immobilière pour la construction d'un complexe hôtelier et résidentiel sur la parcelle n° xxx revêtirait un caractère commercial qui pourrait jouer un rôle dans la qualification de l'opération. De plus, la société E.________ SA, qui a financé en partie l'achat de la quote-part de 15% de la parcelle litigieuse par un prêt, est active dans le domaine de l'immobilier. Le contribuable en est le vice-président, comme il ressort de l'extrait du registre du commerce, de sorte qu'il prétend en vain ne pas disposer de connaissances dans le domaine immobilier.
6.2. En ce qui concerne les démarches de nature commerciale entreprises, les contribuables se contentent d'alléguer qu'ils auraient été remboursés par D.________ SA du montant de 432'000 fr., alors que le montant de 650'000 fr. retenu par la juridiction cantonale serait erroné. Il s'agit d'une simple affirmation qui ne repose pas sur des pièces qui démontreraient le versement effectif de la part du bureau d'architectes et que celui-ci n'aurait pas bénéficié de la différence entre les deux sommes en cause. Ensuite, l'argumentation selon laquelle les démarches entreprises auraient été effectuées seulement dans le but de maintenir la constructibilité de la parcelle litigieuse n'apparaît pas plausible compte tenu de la requête du bureau d'architectes en vue d'obtenir une autorisation de construire un complexe hôtelier et résidentiel en décembre 2012. Dès lors, il n'y pas lieu de remettre en cause l'appréciation de la commission de recours lorsqu'elle constate que des démarches ont été entreprises à des fins commerciales. A ce sujet, les contribuables ne contestent du reste pas qu'ils ont, jusqu'en 2017, versé avec les autres copropriétaires un total de 1'000'000 fr. à des particuliers pour qu'ils trouvent de potentiels acheteurs.
Pour ces motifs, les griefs des contribuables recourants sont mal fondés et le gain issu de la vente de la parcelle n° xxx doit être considéré comme un revenu soumis à l'impôt ordinaire, comme l'a dûment retenu la commission de recours.
2. Imposition dans le temps
7.
En second lieu, compte tenu du recours du SCC, il y a lieu d'examiner la période fiscale au cours de laquelle ce gain doit être imposé au regard des art. 40 al. 1 et 2 et 41 al. 1 LIFD.
8.
8.1. En ce qui concerne la période fiscale à laquelle le revenu réalisé lors de la vente de la quote-part en cause devait être attribué, les juges précédents ont considéré que les contribuables avaient acquis une prétention ferme lors de la signature du contrat de vente immobilière le 10 octobre 2017 et non durant l'année 2018, comme retenu par le SCC. La juridiction cantonale s'est fondée sur le dépôt en 2017 d'un montant de 10'000'000 fr. par les acquéreuses auprès d'un notaire, sur le fait qu'en 2017 des travaux avaient été entrepris par les mêmes acquéreuses et que l'autorisation de construire complémentaire, entrée en force en 2018, avait été octroyée en décembre 2017 et que la seule opposition déposée contre cette autorisation avait manifestement été déclarée irrecevable.
8.2. Se plaignant d'une violation des art. 16 LIFD et 41 LIFD, le SCC conteste que l'imposition du gain issu de la vente de la parcelle n° xxx doive être effectuée en 2017. Il soutient, en substance, que les parties auraient exprimé la volonté de soumettre la validité du contrat de vente du 10 octobre 2017 à deux évènements futurs et incertains. Selon le SCC, le contrat n'aurait pu déployer des effets que si l'autorisation de construire initiale du 12 décembre 2012 avait encore été valable le 30 avril 2018 et que l'autorisation complémentaire était entrée en force avant cette même date. Or la demande d'autorisation complémentaire aurait été requise uniquement quelques jours avant la signature du contrat de vente, soit le 6 octobre 2017; même si elle a été délivrée en 2017, il subsistait un risque qu'elle fût contestée par la voie légale et elle n'était de toute manière entrée en force qu'en 2018. En outre, le SCC estime qu'il existait un risque que le permis de construire initial fût échu après cinq ans, dès lors que les parties n'avaient pas effectué de travaux importants au sens de la législation cantonale en matière de construction avant 2018.
9.
9.1. L'impôt sur le revenu est fixé et prélevé pour chaque période fiscale (art. 40 al. 2 LIFD). La période fiscale correspond à l'année civile (art. 40 al. 1 LIFD). Le revenu imposable est déterminé d'après les revenus acquis pendant la période fiscale (art. 41 al. 1 LIFD). Selon le principe de la périodicité de l'impôt sur le revenu exprimé à l'art. 41 al. 1 LIFD, un revenu est attribué à la période fiscale au cours de laquelle il a été réalisé (arrêts 9C_391/2023 du 5 janvier 2024 consid. 4.5, destiné à la publication; 2C_285/2020 du 20 septembre 2020 consid. 5.2 et les références).
9.2. Selon la jurisprudence constante, la conclusion du contrat de vente, y compris d'un immeuble, donne en principe naissance à un droit ferme générateur d'un revenu imposable dans la mesure où son exécution ne paraît pas incertaine (cf. ATF 113 Ib 23 consid. 2e; 105 Ib 238 consid. 4b; arrêts 2C_339/2020 du 5 janvier 2021 consid. 8.2; 2C_1009/2017 du 28 septembre 2018 consid. 8.1). La prétention est ferme lorsque le créancier peut en réclamer l'exécution au débiteur et que tant l'existence de la créance que son étendue sont certaines, cette exigence étant réalisée lorsque son ampleur peut être déterminée selon des critères objectifs. Le créancier ne peut pas réclamer l'exécution d'une créance non exigible, parce qu'avant l'exigibilité, l'exécution de la créance ne peut pas être exigée et le débiteur ne doit pas s'exécuter (ATF 149 II 400 consid. 4.3; 148 III 145 consid. 4.2.1.1). C'est pourquoi, en règle générale, une créance dans le domaine privé ne peut être imposée au plus tôt comme revenu qu'au moment où intervient l'exigibilité. Par ailleurs, selon la jurisprudence, lorsqu'une prétention est assortie d'une condition suspensive (cf. art. 151 CO), elle n'est réalisée qu'au moment où cette condition s'accomplit. Cela ne vaut cependant que si l'exécution est incertaine, ce qui n'est pas le cas lorsque la réalisation de la condition suspensive ne constitue qu'une formalité (arrêt 9C_713/2022 du 6 novembre 2023 consid. 5.2 et la référence).
9.3. Il ressort de l'acte authentique du 10 octobre 2017 que les parties à ce contrat ont entendu faire dépendre l'exigibilité et l'exécution du contrat de l'entrée en force au 30 avril 2018 de l'autorisation de construire modifiée. En effet, en prévoyant la "Caducité de l'acte" en cas d'absence d'entrée en force de l'autorisation de construire modifiée à la date du 30 avril 2018 ou en cas d'absence de validité de "l'une ou l'autre des autorisations administratives nécessaires au projet" (dont l'autorisation de démolir et de construire du 12 décembre 2012), elles ont soumis la validité du contrat à des événements incertains au moment de sa conclusion. L'exécution de la prestation (en paiement) des deux sociétés acquéreuses était ainsi dépendante de la condition que l'autorisation de construire complémentaire soit délivrée et entrée en force au plus tard le 30 avril 2018. Jusqu'à ce moment-là, le contribuable ne pouvait pas, au vu des clauses contractuelles, réclamer l'exécution du paiement du prix de vente, parce que la créance n'était pas exigible. Si la somme de 10'000'000 fr. avait été déposée auprès d'un notaire en 2017 déjà, la seconde moitié du prix de vente n'était due qu'après l'entrée en force de l'autorisation de construire complémentaire "et pour autant que l'autorisation de construire délivrée en 2012 soit toujours valable à ce moment-là, mais le 30 avril 2018 au plus tard" (p. 5 de l'acte authentique). En d'autres termes, la créance du contribuable n'était pas exigible déjà au moment de la signature du contrat de vente le 10 octobre 2017, mais liée à l'avènement de deux conditions futures; le prix de vente ne pouvait pas être réclamé avant la délivrance de l'autorisation de construire complémentaire, octroyée en définitive le 12 décembre 2017 et entrée en force 30 jours plus tard, soit en 2018. A l'inverse de ce qu'a retenu la commission de recours, la conclusion du contrat en cause n'a donc pas eu pour effet de créer un droit ferme, générateur de revenu. Par conséquent, sous l'angle du droit fiscal et conformément à l'art. 41 al. 1 LIFD et la jurisprudence y relative, le contribuable n'a pas obtenu un avantage économique ou réalisé un revenu avant le mois de janvier 2018 au plus tôt. Partant il y a lieu d'admettre le recours du SCC sur ce point.
III. Impôt cantonal et communal
10.
La jurisprudence rendue en matière d'IFD concernant l'imposition du revenu et la distinction entre un bénéfice provenant de l'exercice d'une activité lucrative indépendante et un gain privé en capital est également déterminante en ce qui concerne l'ICC, puisque les art. 7 al. 1 et 8 al. 1 et 2 LHID, repris aux art. 12 al. 1 et 14 al. 1 et 2 LF/VS, correspondent à l'art. 18 al. 2 LIFD (arrêt 9C_81/2023 du 18 septembre 2023 consid. 7 et la référence). Il peut ainsi être renvoyé dans cette mesure à la motivation développée en matière d'impôt fédéral direct. Le recours doit par conséquent aussi être rejeté en tant qu'il concerne l'ICC pour l'année fiscale 2018.
Il en va de même s'agissant de l'imposition dans le temps (art. 16 al. 1 LHID; art. 61 al. 1 LF/VS; arrêt 9C_713/2022 du 6 novembre 2023 consid. 7). Le recours du SCC est bien fondé en matière d'ICC.
11.
11.1. Pour répondre à une conclusion subsidiaire des contribuables, la commission de recours a retenu que selon sa jurisprudence, l'art. 63 al. 3 LF/VS ne s'appliquait pas à eux. Les deux premières phrases de cette disposition prévoient qu'en cas de cessation complète ou partielle de l'assujettissement ou lorsque le contribuable renonce à l'exercice de son activité lucrative indépendante, toutes les réserves latentes touchées par cet état de fait, qui n'ont pas été soumises à l'impôt jusque-là font l'objet d'un impôt annuel entier perçu au taux correspondant au montant total de ces seuls revenus. Un abattement de 50 pour cent est accordé sur l'impôt frappant ces bénéfices.
Selon les juges précédents, l'art. 63 al. 3 LF/VS ne concernait que l'activité lucrative indépendante régulière, exercée le plus souvent à titre principal, et non pas une activité lucrative à caractère ponctuel comme celle qui était en cause pour l'activité immobilière examinée.
11.2. Les contribuables font valoir que si le gain issu de la vente de la parcelle n° xxx devait être qualifié de commercial, il conviendrait d'appliquer l'art. 63 al. 3 LF/VS pour l'imposition privilégiée au niveau cantonal et communal. Ils reprochent à la juridiction cantonale d'avoir arbitrairement interprété cette disposition en retenant qu'elle ne s'appliquait qu'aux personnes ayant cessé leur activité indépendante exercée de manière régulière et non pas à celles l'ayant exercé de manière ponctuelle. Selon les contribuables, cette solution s'écarterait de manière choquante du texte légal, qui parlerait de renonciation à l'exercice d'une activité lucrative, alors que rien ne justifierait une telle différence de traitement entre des personnes exerçant une activité à titre principal ou à titre accessoire.
11.3. Avec les contribuables recourants, il y a lieu de constater que la commission de recours se limite à nier l'application de l'art. 63 al. 3 LF/VS à leur situation en affirmant que l'abattement prévu ne concernerait que l'activité lucrative indépendante à titre principal et non accessoire ou ponctuel. Pour toute explication, les juges précédents renvoient à une décision ultérieure (non publiée), qui est elle-même dénuée de toute motivation (cf. décision de la commission de recours du 19 janvier 2011 en l'affaire F.________; en annexe). Quand bien même il s'agit de l'application du droit cantonal, cela ne libère pas la commission de recours d'exposer, à tout le moins brièvement, les motifs sur lesquels elle fonde son raisonnement. Dès lors qu'elle n'a pas procédé à une interprétation de la norme litigieuse, ni expliqué pour quelles raisons il conviendrait d'appliquer l'abattement de 50% uniquement aux personnes cessant une activité lucrative indépendante principale, son raisonnement apparaît arbitraire et le recours doit être admis sur ce point. La cause est renvoyée à la juridiction cantonale pour qu'elle examine l'application de l'art. 63 al. 3 LF/VS aux personnes dont l'activité lucrative indépendante (accessoire) a consisté en la vente d'un immeuble, ici la parcelle n° xxx et motive à satisfaction sa solution. Le cas échéant, elle prendra également en considération l'art. 33b al. 2 LF/VS (en annexe) (en lien avec l'art. 11 al. 5 LHID), avant de rendre une nouvelle décision.
IV. Conséquence, frais et dépens
12.
Il découle de ce qui précède que le recours des contribuables doit être rejeté s'agissant de la qualification du gain réalisé lors de la vente de leur quote-part de 15% sur la parcelle n° xxx, tant en matière d'IFD que d'ICC. Le recours des contribuables doit en revanche être partiellement admis en tant qu'il concerne l'application de l'art. 63 al. 3 LF/VS en matière d'ICC.
Le recours du SCC, qui concerne la période fiscale au cours de laquelle le bénéfice provenant de la vente de la parcelle n° xxx doit être imposé en matière d'IFD et d'ICC, doit être admis.
Compte tenu de l'issue du recours, les frais judiciaires sont répartis entre les contribuables recourants et le Canton du Valais ( art. 66 al. 1 et 5 LTF ). Des dépens sont alloués aux contribuables ( art. 68 al. 1 et 2 LTF ).
Il appartiendra à la juridiction cantonale de se prononcer à nouveau sur les frais et dépens de la procédure cantonale, au regard également de l'issue de la procédure fédérale.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours des contribuables est rejeté en tant qu'il concerne l'impôt fédéral direct.
2.
Le recours des contribuables est partiellement admis en tant qu'il concerne les impôts cantonaux et communaux. Les ch. 3, 4 et 5 du dispositif de la décision de la Commission cantonale de recours en matière fiscale du canton du Valais du 23 juin 2023 sont annulés. La cause est renvoyée à la Cour de droit fiscal du Tribunal cantonal pour qu'elle procède dans le sens des considérants puis statue à nouveau. Le recours est rejeté pour le surplus.
3.
Le recours du Service cantonal des contributions du canton du Valais est admis en tant qu'il porte sur l'impôt fédéral direct. Le chiffre 1 (deuxième tiret) du dispositif de la décision de la Commission de recours en matière fiscale du canton du Valais du 23 juin 2022 est réformé en ce sens que la reprise opérée en 2018 par l'autorité de taxation est confirmée.
4.
Le recours du Service cantonal des contributions du canton du Valais est admis en tant qu'il porte sur les impôts cantonaux et communaux. Le chiffre 2 (deuxième tiret) du dispositif de la décision de la Commission de recours en matière fiscale du canton du Valais du 23 juin 2022 est réformé en ce sens que la reprise opérée en 2018 par l'autorité de taxation est confirmée.
5.
Les frais judiciaires arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge des recourants à raison de 3'000 fr., solidairement entre eux, et à la charge du canton du Valais à raison de 1'000 fr.
6.
Les contribuables ont droit à une indemnité de dépens réduite, fixée à 1'000 fr, à la charge du canton du Valais.
7.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du Valais, Cour de droit fiscal, et à l'Administration fédérale des contributions.
Lucerne, le 12 mars 2024
Au nom de la IIIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Parrino
Le Greffier : Feller