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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
5A_727/2013  
   
   
 
 
 
Arrêt du 12 décembre 2013  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux von Werdt, Président, 
Hohl et Herrmann. 
Greffière: Mme de Poret Bortolaso. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Dominique Morard, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________, 
représentée par Me Jérôme Magnin, avocat, 
intimée. 
 
Objet 
servitude de passage, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Ie Cour d'appel civil, du 8 août 2013. 
 
 
Faits:  
 
A.   
B.________ est propriétaire de l'immeuble no 253 situé sur la commune de C.________. A.________ est propriétaire du bien-fonds voisin no 257. Ces deux immeubles bénéficient d'une servitude de passage sur l'art. 256, propriété de D.________, bien-fonds qui constitue une ruelle. 
 
B.  
 
B.a. Par ordonnance d'urgence du 4 décembre 2006, confirmée par ordonnance du 15 février 2007, B.________ a obtenu qu'interdiction soit provisoirement faite à A.________ d'installer une borne en granit à la limite de son bien-fonds.  
 
B.b.  
 
B.b.a. Le 5 juin 2007, B.________ a agi au fond devant le Tribunal civil de la Gruyère, concluant à ce qu'interdiction soit faite à A.________ et à tout propriétaire subséquent de l'art. 257 d'installer une borne en pierre ou toute construction analogue entre le bâtiment élevé sur sa propriété et la limite de celle-ci avec la ruelle constituant l'art. 256, dite interdiction devant être inscrite au registre foncier.  
 
 Par mémoire de réponse et demande reconventionnelle du 26 novembre 2007, A.________ a conclu au rejet de dite action (ch. 1), à ce qu'il soit constaté que l'art. 253 du registre foncier de la commune de C.________ ne bénéficie que d'un droit de passage à pied sur l'art. 256 (ch. 2) et à ce qu'elle soit libre de poser en limite de sa propriété une borne délimitant son fonds de l'art. 256 (ch. 3). 
 
B.b.b. Le 27 mars 2009, B.________ a déclaré retirer sa demande du 5 juin 2007.  
 
B.b.c. Par mémoire du 6 mai 2010, B.________ a conclu a l'irrecevabilité de la demande reconventionnelle, subsidiairement à son rejet.  
 
 Dans sa réplique du 7 septembre 2010, A.________ a modifié et complété ses conclusions: elle a repris ses conclusions initiales à titre principal et a conclu, subsidiairement, à ce qu'après constatation préjudicielle de l'absence de servitude foncière de passage pour tout véhicule à charge de l'art. 256 au profit de l'art. 253, interdiction soit signifiée à B.________ et à tous ses ayants-droit d'emprunter l'art. 256 autrement qu'à pied, sous la menace des peines de droit. 
 
 Par duplique du 28 février 2011, B.________ a conclu à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet des conclusions modifiées. 
 
B.b.d. Le 8 novembre 2011, le Tribunal civil de la Gruyère a pris acte du retrait de la demande principale, rayé cette cause du rôle et déclaré irrecevable la demande reconventionnelle. Les dépens ont été répartis à raison de 2/5 à charge de B.________ et de 3/5 à charge de A.________.  
 
B.c. Statuant le 8 août 2013 sur l'appel interjeté par A.________, la I e Cour d'appel civil du Tribunal cantonal a traité l'écriture comme un recours, l'admettant partiellement dans la mesure de sa recevabilité. Elle a ensuite réformé le dispositif du jugement attaqué en ce sens qu'il est pris acte du passe-expédient du 27 mars 2009 par lequel B.________ s'est désistée des conclusions de sa demande du 5 juin 2007, la cause étant partant rayée du rôle (ch. I.1), que la demande reconventionnelle déposée le 26 novembre 2007 par A.________ à l'encontre de B.________ est sans objet, dans la mesure de sa recevabilité (ch. I.2), la répartition des dépens étant confirmée (ch. I.3).  
 
 L'arrêt a été notifié aux parties le 29 août 2013. 
 
C.   
Le 30 septembre 2013, A.________ (ci-après la recourante) dépose un recours en matière civile et un recours constitutionnel subsidiaire devant le Tribunal fédéral. Principalement, la recourante conclut notamment à l'annulation des points I.2 et I.3 du dispositif de l'arrêt cantonal et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Subsidiairement, elle réclame la réforme de l'arrêt entrepris, le dispositif du jugement rendu le 8 novembre 2011 par le Tribunal civil de l'arrondissement de la Gruyère devant lui-même être réformé, notamment en ce sens que les conclusions subsidiaires de sa demande reconventionnelle sont recevables (ch. I.2), que les dépens du passe-expédient sont mis à la charge de B.________ (ci-après l'intimée; ch. I.3), la cause devant être renvoyée au Tribunal civil de l'arrondissement de la Gruyère pour suite de la procédure (ch. II). 
 
 La recourante invoque l'arbitraire dans l'application du droit cantonal. 
 
 Des observations n'ont pas été demandées. 
 
 
Considérant en droit:  
 
1.   
L'arrêt entrepris, rendu dans une affaire civile (art. 72 LTF), déclare sans objet, dans la mesure de sa recevabilité, la demande reconventionnelle déposée par la recourante le 26 novembre 2007. Il s'agit ainsi d'une décision finale au sens de l'art. 90 LTF
 
 Dans les affaires pécuniaires, le recours en matière civile n'est ouvert que si la valeur litigieuse minimale fixée par la loi, en l'espèce 30'000 fr., est atteinte (art. 74 al. 1 let. b LTF). La question de la valeur litigieuse peut néanmoins demeurer indécise en l'espèce dès lors que le grief invoqué par la recourante, à savoir l'application arbitraire du droit cantonal, est recevable et examiné avec la même cognition, dans le cadre du recours en matière civile - ouvert pour violation du droit fédéral, lequel comprend les droits constitutionnels (art. 95 let. a LTF; ATF 133 III 446 consid. 3.1, 462 consid. 2.3) - et dans le cadre du recours constitutionnel subsidiaire (art. 116 LTF). 
 
 Pour le surplus, la décision querellée a été prise par une autorité cantonale de dernière instance (art. 75 al. 1 et 114 LTF) et la recourante, qui a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 et 115 LTF), a agi en temps utile (art. 100 al. 1 et 117 LTF). 
 
2.  
 
2.1. La violation du droit cantonal en tant que telle ne peut être invoquée devant le Tribunal fédéral, mais il est en revanche possible de faire valoir qu'une mauvaise application du droit cantonal constitue une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à d'autres droits constitutionnels (ATF 138 I 143 consid. 2; 136 I 241 consid. 2.4).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral ne connaît de la violation des droits constitutionnels que si un tel moyen est invoqué et motivé par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée (ATF 134 I 83 consid. 3.2 et les arrêts cités). Si le recourant se plaint d'arbitraire, il ne peut se borner à critiquer la décision attaquée comme il le ferait en procédure d'appel, où l'autorité de recours jouit d'une libre cognition; il ne peut, en particulier, se contenter d'opposer sa thèse à celle de l'autorité précédente, mais il doit démontrer, par une argumentation précise, que cette décision se fonde sur une application de la loi cantonale insoutenable (ATF 133 II 396 consid. 3.2).  
 
3.   
La recourante reproche pour l'essentiel à la cour cantonale d'avoir jugé irrecevable sa conclusion reconventionnelle subsidiaire tendant à ce qu'interdiction soit signifiée à B.________ et à tous ses ayants-droit d'emprunter l'art. 256 autrement qu'à pied, sous la menace des peines de droit. 
 
3.1. La demande a été introduite avant l'entrée en vigueur du CPC le 1er janvier 2011, de sorte qu'elle est régie par l'ancien droit de procédure cantonale (art. 404 al. 1 CPC). Se fondant sur les art. 131 al. 1 et 130 al. 2 et 3 de l'ancien code de procédure civile fribourgeois (ci-après aCPC-FR), la cour cantonale a relevé que la recourante fondait la modification de sa demande reconventionnelle sur un fait nouveau, à savoir le retrait de la demande principale en date du 27 mars 2009. La modification était dès lors tardive en tant qu'elle était survenue le 7 septembre 2010, à savoir près de 18 mois après ledit retrait, sans qu'un tel retard fût excusable. La conclusion subsidiaire formulée par la recourante était ainsi irrecevable.  
 
3.2. La recourante affirme que, contrairement à ce qu'ont retenu les magistrats cantonaux, sa conclusion subsidiaire nouvelle ne serait nullement liée au désistement d'action de l'intimée, mais se fondait en réalité sur des faits déjà formulés auparavant, se maintenant ainsi dans les limites de l'état de fait primitif. En déclarant irrecevable sa conclusion subsidiaire au seul motif qu'aucun fait nouveau ne pouvait valablement être allégué à son appui, l'autorité cantonale aurait gravement violé l'art. 131 aCPC-FR, introduisant une restriction à la modification des conclusions que le législateur fribourgeois n'avait jamais prévue. La recourante précise toutefois qu'à supposer que sa conclusion subsidiaire litigieuse fût fondée sur le fait nouveau que constituait le désistement d'action, celui-ci avait été allégué à temps dès lors que les débats sur le fond n'avaient pas eu lieu; à défaut de prendre en compte le fait nouveau, la juridiction se devait enfin de rejeter dite conclusion plutôt que de la déclarer irrecevable.  
 
3.3.  
 
3.3.1. Aux termes de l'art. 131 al. 1 aCPC-FR, le demandeur peut modifier ses conclusions ou en prendre de plus amples, pourvu que les conclusions nouvelles soient en connexité juridique avec la demande primitive.  
 
 Si le demandeur modifie ses conclusions dans les limites de l'état de fait primitif, rien ne s'oppose à ce que cette modification ait lieu en tout état de cause (Deschenaux/Castella, La nouvelle procédure civile fribourgeoise, p. 89; Extraits des principaux arrêts du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg, 1961, p. 154 ss, p. 156). Lorsque la modification des conclusions se fonde sur des faits nouveaux, l'art. 131 al. 2 aCPC-FR précise en revanche que leur allégation n'est possible que dans les limites de l'art. 130 al. 2 et 3 aCPC-FR, à savoir jusqu'au début de l'administration des preuves - soit au cours du second échange d'écritures s'il a lieu ou encore dans l'instruction préparatoire et aux premiers débats (Deschenaux/Castella, op. cit., p. 88) - ou, subséquemment, si la production n'en était pas possible auparavant, si le retard est excusable ou si des faits nouveaux ressortent des preuves administrées d'office par le juge (art. 130 al. 2 aCPC-FR). 
 
3.3.2. En autorisant le demandeur à modifier ses conclusions, la loi de procédure entend ainsi ne pas figer l'objet du litige dès le début de l'instance, les demandes primitive et subséquente devant toutefois reposer sur le même fondement (arrêt 5P.268/1990 du 4 février 1991 consid. 5; Extraits des principaux arrêts du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg, 1957, p. 12 ss). La modification des conclusions ne saurait en effet conduire à modifier l'objet du litige, déterminé par les conclusions et par le complexe de faits invoqué (ATF 116 II 738 consid. 2). Les conclusions nouvelles sont ainsi inadmissibles lorsqu'elles sont fondées sur un état de fait totalement nouveau et sans aucun rapport ni avec les faits primitivement allégués, ni avec la demande primitive (Extraits des principaux arrêts du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg, 1957, p. 12 ss; Deschenaux/Castella, op. cit., p. 89 note 1).  
 
3.4.  
 
3.4.1. En admettant que la modification des conclusions soit fondée sur le désistement d'action de l'intimée, comme le soutient elle-même la recourante dans sa réplique devant le Tribunal civil, on ne saurait considérer, à l'instar de la cour cantonale, que dite modification serait intervenue tardivement: l'intéressée a en effet modifié ses conclusions reconventionnelles dans sa réplique, à savoir au cours du second échange d'écritures et, ainsi, avant le début de l'administration des preuves, en se référant de surcroît à un fait qui était connu de son adverse partie et du Tribunal. La motivation cantonale est en conséquence arbitraire à cet égard.  
 
3.4.2. Reste en revanche à déterminer si la modification des conclusions de la recourante repose sur le même fondement juridique que sa demande reconventionnelle initiale, condition générale à laquelle la modification reste soumise. La demande reconventionnelle avait pour objet de constater que l'art. 253 ne bénéficiait que d'un droit de passage à pied sur l'art. 256 (ch. 2) et de permettre à la recourante de poser, en limite de sa propriété, une borne délimitant son fonds de l'art. 256 (ch. 3). Vu les conclusions de la demande - interdire à la recourante d'installer dite borne - l'on peut se demander si ce dernier chiffre constituait des conclusions reconventionnelles au sens propre; quant à la conclusion en constatation, la cour cantonale a considéré qu'elle n'avait pas de portée propre, ce que la recourante ne remet nullement en cause. Les conclusions modifiées du 7 septembre 2010, qui tendent à interdire à l'intimée et à tous ses ayants-droit d'emprunter l'art. 256 autrement qu'à pied, ont dès lors pour conséquence de modifier l'objet du procès, celui-ci ne concernant plus désormais la liberté de la recourante d'installer une borne sur l'immeuble lui appartenant, mais l'interdiction à l'intimée de circuler en véhicule sur le fonds d'un tiers. Elles sont en conséquence irrecevables au regard de l'art. 131 al. 1 aCPC-FR.  
 
4.   
Le considérant qui précède conduit au rejet du recours, rendant sans objet les autres griefs soulevés par la recourante. 
 
 Les frais judiciaires sont mis à la charge de celle-ci (art. 66 al. 1 LTF); l'intimée, qui n'a pas été invitée à répondre, n'a droit à aucun dépens. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Fribourg, I e Cour d'appel civil.  
 
 
Lausanne, le 12 décembre 2013 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président: von Werdt 
 
La Greffière: de Poret Bortolaso