Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
6B_235/2022
Arrêt du 13 avril 2022
Cour de droit pénal
Composition
M. le Juge fédéral Denys, Juge présidant.
Greffier : M. Vallat.
Participants à la procédure
1. A.A.________,
2. B.A.________,
3. C.A.________,
recourants,
contre
Ministère public de l'Etat de Fribourg, case postale 1638, 1701 Fribourg,
intimé.
Objet
Irrecevabilité du recours en matière pénale;
qualité pour recourir; motivation insuffisante
(o rdonnance de non-entrée en matière [vol, etc.]),
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal
de l'Etat de Fribourg, Chambre pénale,
du 28 janvier 2022 (502 2021 258).
Considérant en fait et en droit :
1.
Dans le cadre du conflit de voisinage persistant qui les oppose à D.D.________, qui habite la propriété contiguë à celle de B.A.________ et C.A.________, le fils de ceux-ci, A.A.________, a porté plainte contre celui-là le 19 mai 2021 pour vol, appropriation illégitime, dommages à la propriété, violation de domicile, calomnie, menaces et déplacement de bornes. Le 13 septembre 2021, A.A.________ a encore porté plainte contre leur voisin et l'épouse de ce dernier, notamment pour injures, calomnies, contraintes et dénonciation calomnieuse.
Par ordonnance du 10 décembre 2021, le ministère public a refusé d'entrer en matière sur les plaintes de A.A.________.
2.
La Chambre pénale du Tribunal cantonal fribourgeois a été saisie d'un recours déposé par A.A.________ et B.A.________ conjointement.
Pendente lite, le ministère public a encore transmis à la cour cantonale une "plainte pénale" déposée le 20 décembre 2021 par B.A.________, dans laquelle ce dernier revenait sur l'ordonnance de non-entrée en matière.
Par arrêt du 28 janvier 2022, la cour cantonale a, avec suite de frais, rejeté, dans la mesure où il était recevable, le recours interjeté par A.A.________ et l'a déclaré irrecevable en tant qu'il était interjeté par B.A.________, l'ordonnance du 10 décembre 2021 étant entièrement confirmée.
3.
Par acte daté du 13 février 2022, remis à la poste le lendemain, A.A.________ recourt en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 28 janvier 2022. Dans cet acte, rédigé à la première personne du singulier, le recourant indique "Je représente les intérêts des propriétaires de la Route X.________", mention suivie de la signature "pour accord" de B.A.________ et C.A.________ en qualité de copropriétaires puis, encore une fois du paraphe de B.A.________ "propriétaire lésé". Informés par courrier du 16 février 2022 de la teneur de l'art. 40 al. 1 LTF, soit des restrictions prévalant en matière pénale quant à la représentation des parties devant le Tribunal fédéral, C.A.________ et B.A.________, ont eux-mêmes déposé un recours contre l'arrêt du 28 janvier 2022, par acte daté du 17 février 2022, remis à la poste le jour suivant. Au terme de l'écriture datée du 13 février 2022, A.A.________ conclut à la condamnation de ses voisins E.D.________ et D.D.________ ainsi que du procureur F.________ "sur les délits cités dans [son] mémoire". Il demande aussi l'annulation de l'ordonnance de non-entrée en matière du 10 décembre 2021 et de l'arrêt du 28 janvier 2022. Dans leur écriture datée du 17 février 2022, C.A.________ et B.A.________ concluent de même, sans toutefois demander l'annulation de l'ordonnance de non-entrée en matière. Tous requièrent le bénéfice de l'assistance judiciaire.
4.
Par acte du 1er avril 2022, daté du jour précédent, A.A.________ a encore produit 6 vidéos réalisées selon lui le 23 février 2022. Cet envoi est manifestement postérieur à l'échéance du délai de recours de 30 jours. Il est tardif et donc irrecevable pour ce premier motif, en tant qu'il s'agit de compléter les écritures de recours ( art. 42 al. 1 et 2 LTF en corrélation avec l'art. 48 al. 1 et l'art. 100 al. 1 LTF). Les vidéos, que le recourant allègue avoir été réalisées postérieurement à la date à laquelle a été rendue la décision de dernière instance cantonale, sont irrecevables (art. 99 al. 1 LTF).
5.
Les deux écritures émanant des trois recourants sont dirigées contre la même décision de dernière instance cantonale. Les recours ont trait aux mêmes complexes de faits matériels et soulèvent des questions procédurales connexes et similaires. Il est expédient de les traiter dans un seul arrêt (art. 24 al. 2 PCF et 71 LTF).
6.
Selon l'art. 81 al. 1 LTF, a qualité pour former un recours en matière pénale quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a) et a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (let. b). Cet intérêt juridique doit être personnel, l'atteinte portée à un tiers ne suffisant pas (ATF 131 IV 193 consid. 1). Le ch. 5 de cette disposition mentionne ainsi que la partie plaignante qui a participé à la procédure de dernière instance cantonale est habilitée à recourir au Tribunal fédéral, si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles. Constituent de telles prétentions celles qui sont fondées sur le droit civil et doivent en conséquence être déduites ordinairement devant les tribunaux civils. Il s'agit principalement des prétentions en réparation du dommage et du tort moral au sens des art. 41 ss CO. En vertu de l'art. 42 al. 1 LTF, il incombe à la partie recourante d'alléguer les faits qu'elle considère comme propres à fonder sa qualité pour recourir. Lorsque le recours est dirigé contre une décision de non-entrée en matière ou de classement de l'action pénale, la partie plaignante n'a pas nécessairement déjà pris des conclusions civiles. Quand bien même la partie plaignante aurait déjà déclaré des conclusions civiles (cf. art. 119 al. 2 let. b CPP), il n'en reste pas moins que le procureur qui refuse d'entrer en matière ou prononce un classement n'a pas à statuer sur l'aspect civil (cf. art. 320 al. 3 CPP). Dans tous les cas, il incombe par conséquent à la partie plaignante d'expliquer dans son mémoire au Tribunal fédéral quelles prétentions civiles elle entend faire valoir contre l'intimé. Comme il n'appartient pas à la partie plaignante de se substituer au ministère public ou d'assouvir une soif de vengeance, la jurisprudence entend se montrer restrictive et stricte, de sorte que le Tribunal fédéral n'entre en matière que s'il ressort de façon suffisamment précise de la motivation du recours que les conditions précitées sont réalisées, à moins que l'on puisse le déduire directement et sans ambiguïté compte tenu notamment de la nature de l'infraction alléguée (ATF 141 IV 1 consid. 1.1 p. 4).
7.
L'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 6 LTF confère également au plaignant la qualité pour recourir, pour autant que la contestation porte sur le droit de porter plainte.
8.
Par ailleurs, indépendamment des conditions posées par l'art. 81 al. 1 LTF, la partie plaignante est habilitée à se plaindre d'une violation de ses droits de partie équivalant à un déni de justice formel, sans toutefois pouvoir faire valoir par ce biais, même indirectement, des moyens qui ne peuvent être séparés du fond (ATF 141 IV 1 consid. 1.1 p. 5). En relation avec de tels moyens, il sied de rappeler que selon l'art. 42 al. 1 LTF, les mémoires de recours au Tribunal fédéral doivent indiquer notamment les motifs du recours, lesquels doivent exposer succinctement en quoi la décision attaquée viole le droit aux yeux du recourant (cf. art. 42 al. 2 LTF). Pour satisfaire à cette exigence, il appartient au recourant de discuter au moins brièvement les considérants de la décision litigieuse (ATF 140 III 86 consid. 2 p. 88 ss et 115 consid. 2 p. 116 s.); en particulier, la motivation doit être topique, c'est-à-dire se rapporter à la question juridique tranchée par l'autorité cantonale (cf. ATF 146 IV 297 consid. 1.2; arrêt 6B_763/2020 du 23 mars 2022 consid. 1). En outre, les griefs de violation des droits fondamentaux sont soumis à des exigences de motivation accrues (art. 106 al. 2 LTF), le recourant devant alors citer les principes constitutionnels qui n'auraient pas été respectés et expliquer de manière claire et précise en quoi ces principes auraient été violés (ATF 146 I 62 consid. 3).
9.
La décision de dernière instance cantonale n'a, tout d'abord, pour objet ni une éventuelle poursuite pénale contre un procureur, ni la récusation de celui-ci ni une quelconque amende infligée à A.A.________. Les conclusions formulées en ce sens sont irrecevables (art. 80 al. 1 LTF). Il en va de même des développements y relatifs, qui ne sont pas topiques.
10.
Quant à la qualité pour recourir des intéressés, C.A.________ ne paraît pas avoir déposé plainte pénale. Elle ne figure pas comme partie à la procédure de dernière instance cantonale et il ne ressort d'aucune manière des écritures de recours qu'elle se plaindrait d'avoir été ainsi ignorée. Elle n'a dès lors pas qualité pour recourir en matière pénale (art. 81 al. 1 let. a LTF). Son recours est irrecevable.
11.
La cour cantonale a ensuite déclaré le recours irrecevable en tant qu'il avait été interjeté par B.A.________, faute pour ce dernier d'avoir porté plainte les 19 mai et 13 septembre 2021 et d'avoir été partie à la procédure. On ne perçoit pas en quoi A.A.________ pourrait justifier d'un intérêt juridique personnel (v.
supra consid. 6) à discuter ce point de la décision cantonale et l'intéressé n'allègue rien à ce sujet. Sa qualité pour recourir n'est pas établie à satisfaction de droit.
12.
On ne distingue, par ailleurs, dans l'écriture datée du 13 février 2022, aucune mention de cette irrecevabilité, ni discussion quant à la personne ayant déposé plainte. Quant à l'écriture datée du 17 février 2022, elle indique tout au plus que "Le procureur F.________ viole le code de procédure pénale pour donner suite à la plainte de B.A.________ concernant le délit du 23 octobre 2021". Ces derniers faits ne peuvent toutefois pas avoir fait l'objet des plaintes des 19 mai et 13 septembre 2021 et il ressort aussi des pièces produites à l'appui du recours que la "plainte" concernant les faits survenus le 23 octobre 2021 a été déposée par B.A.________ le 20 décembre 2021, soit postérieurement à l'ordonnance du 10 décembre 2021. Il s'ensuit que le seul reproche, adressé au procureur, d'avoir violé le code de procédure pénale pour donner suite à la plainte concernant les faits du 23 octobre 2021, n'est manifestement pas de nature à démontrer que la cour cantonale aurait violé le droit fédéral en jugeant irrecevable le recours en tant qu'il émanait de B.A.________. Ces moyens, dont la motivation est manifestement insuffisante, ne sont ainsi de nature à démontrer ni l'existence d'une violation du droit à la plainte (v.
supra consid. 7), ni celle d'un droit procédural équivalant à un déni de justice formel (v.
supra consid. 8) en lien avec l'objet de la décision de dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'examiner plus avant la question de l'irrecevabilité du recours cantonal interjeté par B.A.________ ou au nom de ce dernier.
13.
La cour cantonale a rejeté le recours de A.A.________ "dans la mesure de sa recevabilité". Il ressort des considérants de l'arrêt du 28 janvier 2022 que la cour cantonale a, en particulier, retenu que A.A.________ n'est pas le propriétaire de la parcelle sur laquelle il vit avec ses parents, qu'il n'avait pas qualité pour recourir contre le refus d'entrer en matière sur l'accusation de menaces qui auraient été formulées à l'encontre de son père, ni en ce qui concernait l'endommagement d'une haie. Elle a jugé, au demeurant, sur ce dernier point, que supposé recevable, le recours devrait, de toute manière, être rejeté.
14.
Faute d'intérêt personnel au recours sur ce point (v.
supra consid. 6), B.A.________ n'a manifestement pas qualité pour contester l'irrecevabilité du recours de son fils. Quant à ce dernier, il ne soulève aucun grief intelligible sur cette question de procédure (art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF). Tout au plus a-t-il indiqué dans l'écriture du 13 février 2022 "représenter les intérêts des propriétaires de la Route X.________". Mais, une telle représentation est exclue dans le recours en matière pénale (art. 40 al. 1 LTF). Il suffit, dès lors, de renvoyer, sur ce point également, à ce qui a été exposé ci-dessus à propos de l'exigence d'un intérêt personnel au recours (v.
supra consid. 6).
15.
On recherche, enfin, en vain dans les deux écritures de recours une quelconque indication relative à d'éventuelles conclusions civiles de A.A.________, qui ne démontre donc pas à satisfaction de droit non plus avoir qualité pour recourir en matière pénale au regard de l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF et discuter le fond de la cause. Quant à B.A.________, il suffit de rappeler que l'unique question tranchée en dernière instance cantonale le concernant est celle de la recevabilité de son recours (v.
supra consid. 2 et 11). C'est, dès lors, le seul point qui aurait été susceptible de faire l'objet d'un recours en matière pénale (art. 80 al. 1 LTF) de sa part. On renvoie, à cet égard à ce qui a déjà été exposé à ce sujet (v.
supra consid. 12). Par surabondance et en tant que de besoin, on recherche inutilement dans les écritures de recours toute indication relative à d'éventuelles conclusions civiles le concernant, si bien que sa qualité pour recourir sur le fond n'est, de toute manière, pas donnée non plus.
16.
Il résulte de ce qui précède que les trois recours sont irrecevables, ce qui est manifeste et doit être constaté dans la procédure prévue par l' art. 108 al. 1 let. a et b LTF . Les recours étaient dénués de chances de succès, ce qui conduit au refus de l'assistance judiciaire ( art. 64 al. 1 et 3 LTF ). Les recourants succombent. Ils supportent conjointement, solidairement et à parts égales, les frais de la procédure, qui seront fixés en tenant compte de leur situation (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 et al. 5 LTF).
Par ces motifs, le Juge présidant prononce :
1.
Les causes sont jointes.
2.
Les recours interjetés par A.A.________, B.A.________ et C.A.________ sont irrecevables.
3.
Les demandes d'assistance judiciaire présentées par A.A.________, B.A.________ et C.A.________ sont rejetées.
4.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge des recourants conjointement.
5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, Chambre pénale.
Lausanne, le 13 avril 2022
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Juge présidant : Denys
Le Greffier : Vallat