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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_666/2022  
 
 
Arrêt du 13 avril 2023  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
von Werdt et Schöbi. 
Greffière : Mme Gudit. 
 
Participants à la procédure 
A.A.________, 
représentée par Me Giuliano Scuderi, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Justice de paix du district de Morges, 
rue St-Louis 2, 1110 Morges, 
 
1. B.A.________, 
représenté par Me Lionel Zeiter, curateur, 
2. C.A.________, 
représenté par Me Loïka Lorenzini, curatrice, 
3. D.A.________, 
représentée par Me Julie André, curatrice, 
4. E.A.________, 
 
Objet 
mesures provisionnelles (retrait provisoire du droit de déterminer le lieu de résidence), 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre des curatelles du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 24 août 2022 (L822.008731-220719-220746 148). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. D.A.________, B.A.________ et C.A.________, nés respectivement en 2007, 2008 et 2010, sont les enfants de A.A.________ et de E.A.________, qui se sont séparés en 2013.  
 
A.b. Le 21 avril 2015, la Dre F.________, cheffe de clinique, a adressé à la Justice de paix du district de Morges (ci-après: Justice de paix) et au Service de protection de la jeunesse (ci-après: SPJ [actuellement Direction générale de l'enfance et de la jeunesse, ci-après: DGEJ]) un signalement de mineur en danger dans son développement concernant les trois enfants susnommés.  
Après s'être saisi du cas, le SPJ a mis un terme à son suivi au mois de janvier 2018. 
Par courrier du 24 mai 2019, la Dre G.________, pédopsychiatre FMH, et H.________, psychologue-psychothérapeute FSP, ont constaté certains débordements au niveau de la sexualité de C.A.________. 
Le 17 janvier 2022, I.________ a signalé la situation de D.A.________ à la Justice de paix et à la DGEJ. Il a notamment indiqué que, le 14 janvier 2022, l'adolescente avait relaté subir des relations sexuelles non consenties et récurrentes de la part de son frère cadet B.A.________ aux domiciles familiaux depuis environ trois ans. Le 21 janvier 2022, la DGEJ a adressé au Tribunal des mineurs du canton de Vaud une dénonciation pénale pour inceste concernant D.A.________ et B.A.________ relative aux faits rapportés dans le signalement. Il ressort notamment de la dénonciation pénale que B.A.________ a reconnu les faits, déclarant que cela s'était fait d'un commun accord avec sa soeur. 
 
A.c. Par ordonnance de mesures superprovisionnelles du 4 mars 2022, la Justice de paix a provisoirement retiré à A.A.________ et à E.A.________ le droit de déterminer le lieu de résidence de l'enfant D.A.________, confié un mandat provisoire de placement et de garde à la DGEJ, avec pour tâche de placer l'enfant au mieux de ses intérêts, institué une curatelle provisoire de représentation de mineur au sens des art. 314a bis et 445 CC en faveur de celle-ci et nommé Me Julie André, avocate, en qualité de curatrice, avec pour mission de représenter l'enfant dans le cadre de la procédure de placement.  
 
A.d. Par requête de mesures provisionnelles du 18 mars 2022, la DGEJ a conclu au retrait du droit de garde de A.A.________ et de E.A.________ sur leurs enfants B.A.________ et C.A.________, à ce qu'un mandat de placement et de garde au sens de l'art. 310 CC lui soit confié afin de placer les mineurs au mieux de leurs intérêts et à la mise en oeuvre d'une expertise familiale comprenant également une évaluation de chacun des parents.  
 
A.e. Par décisions du 23 mars 2022, la Justice de paix a institué une curatelle ad hoc de représentation de mineur au sens de l'art. 314a bis CC en faveur des enfants B.A.________ et C.A.________ et a nommé Me Lionel Zeiter, avocat, en qualité de curateur du premier, et Me Loïka Lorenzini, avocate, en qualité de curatrice du second, avec pour mission de représenter les enfants dans l'enquête en retrait du droit de déterminer le lieu de résidence.  
 
A.f. Par ordonnance de mesures provisionnelles du 18 mai 2022, la Justice de paix a notamment confirmé le retrait provisoire du droit de déterminer le lieu de résidence de A.A.________ et de E.A.________ sur leur fille D.A.________ (I), retiré provisoirement le droit de déterminer le lieu de résidence de A.A.________ et de E.A.________ sur leurs fils B.A.________ et C.A.________ (II), confirmé et désigné la DGEJ en qualité de détentrice du mandat provisoire de placement et de garde des trois enfants (Ill), dit que la DGEJ aurait pour tâches de placer les mineurs dans un lieu propice à leurs intérêts, de veiller à ce que leur garde soit assumée convenablement dans le cadre de leur placement et de veiller à ce qu'ils puissent entretenir des relations adéquates et sécures avec les membres de leur famille (IV) et invité la DGEJ à lui remettre un rapport sur son activité et sur l'évolution de la situation des enfants dans un délai de cinq mois dès notification de l'ordonnance (V).  
 
B.  
Par arrêt du 24 août 2022, la Chambre des curatelles du Tribunal cantonal du canton de Vaud a déclaré irrecevable le recours interjeté par E.A.________ contre l'ordonnance de mesures provisionnelles du 18 mai 2022, rejeté le recours de A.A.________ et confirmé l'ordonnance. 
 
C.  
Par acte du 6 septembre 2022, A.A.________ interjette un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral contre l'arrêt du 24 août 2022. Sous suite de frais et dépens, elle conclut principalement à ce que l'arrêt soit réformé en ce sens que le retrait provisoire du droit de déterminer le lieu de résidence des parents sur l'enfant D.A.________ soit confirmé, que la requête de la DGEJ tendant à retirer provisoirement le droit de déterminer le lieu de résidence des parents sur les enfants B.A.________ et C.A.________ soit rejetée, que la DGEJ soit confirmée et désignée en qualité de détentrice du mandat provisoire de placement et de garde de l'enfant D.A.________ et que la DGEJ soit invitée à remettre un rapport sur son activité et sur l'évolution de la situation de celle-ci dans un délai de cinq mois dès notification de l'ordonnance. Subsidiairement, elle conclut à l'annulation de l'arrêt entrepris et au renvoi de la cause à l'autorité inférieure pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
A.A.________ a sollicité le bénéfice de l'assistance judiciaire. Elle a en outre conclu à l'octroi de l'effet suspensif au recours. Invités à se déterminer sur cette requête, le père s'y est rallié, l'autorité précédente et la curatrice de D.A.________ s'en sont rapportés à justice et les curateurs des enfants B.A.________ et C.A.________, ainsi que la Justice de paix, s'y sont opposés. A.A.________ a déposé une réplique spontanée le 21 septembre 2022. La requête a été rejetée par ordonnance présidentielle du 28 septembre 2022. 
Entre le 3 novembre 2022 et le 7 mars 2023, la Justice de paix a transmis au Tribunal fédéral plusieurs copies de courriers, d'une expertise et d'autres documents établis dans le cadre de la procédure cantonale. 
Des déterminations sur le fond n'ont pas été requises. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans la forme légale (art. 42 al. 1 LTF) par une partie qui a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 let. a et b LTF), le recours est dirigé contre une décision rendue sur recours par une autorité supérieure statuant en dernière instance cantonale (art. 75 al. 1 et 2 LTF) dans une affaire non pécuniaire, portant sur des mesures provisoires prises dans le domaine de la protection de l'enfant (art. 445 al. 1 CC en lien avec l'art. 310 al. 1 CC), à savoir une décision incidente (art. 93 LTF) sujette au recours en matière civile (art. 72 al. 2 let. b. ch. 6 LTF). La décision attaquée, qui concerne le sort d'enfants, est en l'espèce susceptible de causer un préjudice irréparable (art. 93 al. 1 let. a LTF) puisque le droit de déterminer le lieu de résidence de ceux-ci a été provisoirement retiré à la recourante et qu'ils ont été placés, de sorte que même une décision finale ultérieure favorable à la mère ne pourrait pas compenser rétroactivement l'exercice des prérogatives parentales dont elle a été frustrée (arrêts 5A_524/2021 du 8 mars 2022 consid. 1; 5A_293/2019 du 29 août 2019 consid. 1; 5A_995/2017 du 13 juillet 2018 consid. 1.1). 
 
2.  
 
2.1. Comme la décision attaquée porte sur des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF, la partie recourante ne peut dénoncer que la violation de droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs que s'ils ont été invoqués et motivés par le recourant (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'ils ont été expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée (ATF 147 I 73 consid. 2.1; 146 III 303 consid. 2; 142 III 364 consid. 2.4). Le recourant qui se plaint de la violation d'un droit fondamental ne peut donc se borner à critiquer la décision attaquée comme il le ferait en instance d'appel, où l'autorité de recours jouit d'une libre cognition; il ne peut, en particulier, se contenter d'opposer sa thèse à celle de l'autorité cantonale, mais doit démontrer ses allégations par une argumentation précise (ATF 134 II 349 consid. 3; 133 II 396 consid. 3.2). Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 142 III 364 consid. 2.4; 140 III 264 consid. 2.3).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Dans l'hypothèse d'un recours soumis à l'art. 98 LTF, le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2), doit, sous peine d'irrecevabilité, satisfaire au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.1; ATF 147 I 73 consid. 2.2; 145 IV 154 consid. 1.1; 140 III 264 consid. 2.3).  
En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 147 V 35 consid. 4.2; 143 IV 500 consid. 1.1; 140 III 264 consid. 2.3). 
 
2.3. Selon l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente.  
Durant la procédure de recours devant le Tribunal fédéral, de nombreux documents ont été produits par divers intéressés, de même qu'une expertise du 28 février 2023. Dès lors qu'il n'a pas été motivé en quoi ces moyens de preuve satisferaient aux conditions de l'art. 99 al. 1 LTF, ils sont irrecevables, de même que les faits censés en découler. Font toutefois exception les documents produits en relation avec la requête d'assistance judiciaire de la recourante. 
 
3.  
Dans ses conclusions, la recourante requiert l'audition des parties. 
En tant que le Tribunal fédéral statue et conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (cf. supra consid. 2.2), il n'ordonne des mesures probatoires que de manière exceptionnelle (art. 55 LTF; ATF 136 II 101 consid. 2; arrêts 5A_987/2020 du 24 février 2022 consid. 2.4; 5A_699/2021 du 21 décembre 2021 consid. 2.2.2; 5A_171/2021 du 24 août 2021 consid. 2.2.2; 5A_1027/2020 du 16 juillet 2021 consid. 2.4 et les références).  
En l'espèce, la recourante ne motive pas sa requête et n'invoque aucun élément justifiant une mesure exceptionnelle d'instruction devant le Tribunal fédéral. La conclusion de celle-ci tendant à l'audition des parties est, partant, irrecevable. 
 
4.  
Le litige porte sur le retrait du droit de la recourante de déterminer le lieu de résidence de ses enfants B.A.________ et C.A.________ et le placement de ceux-ci. L'intéressée se plaint dans ce cadre de la violation des art. 13 al. 1 Cst. (protection de la sphère privée), 29 al. 2 Cst. (droit d'être entendu) et 9 Cst. (interdiction de l'arbitraire), en lien avec l'application de l'art. 310 CC
 
4.1. La cour cantonale a relevé qu'il ressortait du dossier que l'ensemble de la fratrie présentait des comportements sexuels inquiétants depuis 2013 à tout le moins. Le 21 avril 2015, la Dre F.________ avait signalé à la Justice de paix et à la DGEJ la situation des trois enfants, aux motifs notamment que D.A.________ avait mimé à une reprise un acte sexuel chez son père et qu'elle faisait régulièrement des crises le soir chez sa mère, criant pour ne pas avoir à aller se doucher, que B.A.________ embrassait les filles de sa classe et leur touchait les fesses, que C.A.________ tentait régulièrement de toucher les fesses et les seins de sa mère et qu'il avait joué à " croque-tomate ", jeu consistant à se " croquer le zizi ", avec un garçon de sept ans pendant les vacances d'été. Les deux frères se faisaient par ailleurs réciproquement des fellations. Dans un rapport médical du 17 juin 2015, la Dre J.________ avait en outre relevé les jeux sexuels inhabituels pour leur âge auxquels s'adonnaient B.A.________ et C.A.________. Un suivi par la DGEJ avait ainsi été organisé et avait pris fin en janvier 2018, la situation semblant alors s'être améliorée. Or, le 17 janvier 2022, I.________ avait signalé à la Justice de paix et à la DGEJ la situation de D.A.________, laquelle avait relaté entretenir depuis environ trois ans des relations sexuelles régulières non consenties avec son frère B.A.________ au domicile de chacun de leurs parents. Celui-ci avait reconnu les faits, sans sembler prendre conscience de la gravité de ses actes, déclarant que cela se serait fait d'un commun accord et qu'il aurait suffi que sa soeur dise qu'elle ne voulait pas pour qu'il arrête. A cela s'ajoutait le comportement de C.A.________, qui avait souffert d'encoprésie de six à neuf ans et présentait, en 2019 déjà et alors qu'il n'avait que neuf ans, une forte curiosité sexuelle. La juridiction cantonale a relevé que ces faits étaient d'une gravité rare et qu'il fallait considérer, au stade de la vraisemblance, qu'il ne s'agissait pas " que " d'un problème d'inceste, mais bien de dysfonctionnements familiaux graves et récurrents, qui mettaient en danger le développement des trois enfants. Par ailleurs, dans ce contexte, le fait que des abus sexuels intra- et extrafamiliaux existaient depuis plusieurs générations au sein de la famille maternelle interpellait, ce d'autant qu'il ressortait d'une audition de la mère du 22 mars 2022 qu'elle avait régulièrement, et depuis des années, mis en garde ses enfants contre de tels dangers, indiquant même qu'elle avait montré à sa fille comment se défendre vis-à-vis d'un homme qui l'attaquerait ou montrerait des envies sexuelles et encouragé ses enfants à fréquenter I.________ afin qu'ils puissent se confier à un éducateur au cas où un problème se produirait et qu'ils n'oseraient pas en parler à leurs parents. La cour cantonale a considéré que, compte tenu de ce qui s'était finalement passé, on ne pouvait que s'interroger sur l'attitude de la mère à cet égard. Certes, il n'était pas exclu que le comportement de B.A.________ soit exclusivement dû à un trouble psychique, comme semblait le penser la mère, mais cela paraissait toutefois peu probable compte tenu de ce qui avait été constaté sur C.A.________ également. La juridiction précédente a encore noté que, lors de son signalement du 21 avril 2015, la Dre F.________ avait déjà affirmé que les enfants présentaient des comportements très inquiétants et que, en l'absence de prise en charge adaptée et contenante, il était probable que la situation allait se péjorer. Or, c'était précisément ce qui s'était passé puisque les abus de B.A.________ sur sa soeur semblaient avoir débuté en 2019 alors que le suivi de la DGEJ avait cessé en 2018.  
Les juges cantonaux ont encore relevé que les parents n'avaient rien constaté à l'époque des faits les plus graves, malgré ce qui avait déjà été découvert en 2015 et qui aurait dû les rendre particulièrement attentifs. Il avait ainsi fallu attendre près de trois ans et que D.A.________ présente des insomnies, de la fatigue, une perte de poids et des angoisses pour que la situation soit signalée par des tiers. La mère tentait en outre de faire porter la responsabilité des événements aux professionnels, dont elle avait dit qu'ils n'avaient rien vu non plus. Si cette affirmation était certes exacte, le fait de consulter des thérapeutes ne déchargeait toutefois pas les parents de leur propre responsabilité et cette attitude ne rassurait pas sur leur capacité à discerner les éventuels problèmes. Le comportement des parents ensuite des révélations de D.A.________ était également parlant puisqu'ils semblaient avoir minimisé la gravité des actes subis par leur fille et lui avoir mis la pression pour passer par-dessus. Le père avait ainsi déclaré qu'une garde alternée n'était pas possible sur du long terme et la mère qu'ils étaient une famille et que B.A.________ était " quand même " son frère. La cour cantonale a retenu que l'on pouvait considérer, avec le Dr K.________, qu'il était normal que les parents ne puissent contenir et reconnaître à sa juste valeur l'impact de l'abus de leur fils aîné sur sa soeur. Cela étant, comme le relevait également ce médecin, cela leur rendait difficile de s'ajuster aux besoins de leurs enfants. Le fait que leur réaction soit normale dans un tel contexte était par ailleurs peu relevant, dès lors que seule la protection du développement des enfants était importante. Le travail avec les parents pour qu'ils soient aptes à répondre aux besoins de leurs enfants serait probablement long et il existait par ailleurs un fort conflit entre les parents, qui s'était particulièrement révélé lors d'une audience du 30 mars 2022, ceux-ci se reprochant mutuellement de minimiser les faits et ne parvenant pas à se mettre d'accord sur une solution, même alternative (garde au père ou chez la famille accueillante amie de la mère). Ce fort conflit, provisoirement mis entre parenthèses pour éviter le placement de leurs fils, n'aidait pas non plus à penser que les parents auraient les ressources pour faire face à la situation. Enfin, comme le soulignait le curateur de B.A.________ dans ses déterminations du 15 juin 2022 sur la requête d'effet suspensif, il semblait impossible pour des parents de s'occuper à la fois de la victime et de l'auteur des abus sexuels. 
La juridiction précédente a encore retenu que même si B.A.________ était le seul auteur des faits graves commis sur D.A.________, il était patent que les deux garçons avaient besoin, tout comme leur soeur, d'un important travail thérapeutique. En effet, C.A.________ avait également des attitudes qui inquiétaient les professionnels ayant relevé des comportements dysfonctionnels (fellations, encoprésie, forte curiosité sexuelle, régression, etc.) et devait par conséquent être protégé dans son développement. Les juges cantonaux ont considéré que les deux frères devaient pouvoir investir le travail thérapeutique chacun de leur côté dans un lieu neutre afin d'être en mesure de prendre conscience de la situation et de reconstruire leurs repères affectifs et sexuels sans que le cadre familial ne soit un frein. 
 
4.2. Dans leurs déterminations sur la requête d'effet suspensif de la mère, les curateurs des enfants B.A.________ et C.A.________ se sont tous deux prononcés, sur le fond, en faveur du retrait du droit de déterminer le lieu de résidence et du placement. Dans ses déterminations du 14 septembre 2022, le curateur de B.A.________ a notamment indiqué que l'enfant, tout comme ses parents, était opposé à un placement en foyer. Il a relevé que, parce qu'ils étaient partie prenante à la situation, les parents ne pouvaient objectivement pas trouver le bon équilibre pour aider l'enfant à gérer sa culpabilité. Le curateur a encore indiqué que les trois enfants rencontraient à l'évidence des difficultés avec la sexualité et que - malgré le fait que, selon lui, il n'y avait pas nécessairement de faute de la part des parents - il était évident que ces difficultés trouvaient leur origine dans des dysfonctionnements familiaux et que les ressources des parents étaient insuffisantes face à une situation aussi singulière. Le curateur a encore mentionné que c'était précisément parce que les problèmes avaient eu lieu au sein de la famille qu'il était impératif d'en extraire les enfants et a souligné que les problématiques sexuelles avaient déjà été relevées et traitées, sans résultats suffisants, ce qui confirmait la nécessité de choisir une autre mesure, plus énergique, soit le retrait de garde et le placement en foyer.  
Dans ses déterminations sur effet suspensif du 15 septembre 2022, le père s'est déclaré opposé au placement des enfants. 
Par déterminations du 16 septembre 2022, la curatrice de C.A.________ a notamment indiqué que l'enfant avait certes exprimé sa tristesse à l'idée de ne plus vivre chez sa mère, mais que les comportements sexuels observés chez les trois enfants depuis plusieurs années étaient néanmoins inquiétants. Selon la curatrice, la mesure de placement apparaissait à ce stade inévitable et consistait en la seule mesure apte non seulement à identifier les dysfonctionnements mais également à y remédier. L'intéressée a par ailleurs fait valoir qu'il était indispensable que les enfants soient placés dans un espace neutre permettant de libérer la parole, si nécessaire. 
 
4.3. Selon l'art. 445 al. 1, 1re phrase, CC - applicable à l'autorité de protection de l'enfant par renvoi de l'art. 314 al. 1 CC -, l'autorité de protection de l'adulte prend, d'office ou à la demande d'une personne partie à la procédure, toutes les mesures provisionnelles nécessaires pendant la durée de la procédure.  
Selon l'art. 310 al. 1 CC, lorsqu'elle ne peut éviter autrement que le développement de l'enfant ne soit compromis, l'autorité de protection retire l'enfant aux père et mère ou aux tiers chez qui il se trouve et le place de façon appropriée. Cette mesure de protection a pour effet que le droit de garde passe des père et mère à l'autorité, qui détermine dès lors le lieu de résidence de l'enfant et, partant, choisit son encadrement. La cause du retrait doit résider dans le fait que le développement corporel, intellectuel ou moral de l'enfant n'est pas assez protégé ou encouragé dans le milieu de ses père et mère ou dans celui où ceux-ci l'ont placé (arrêt 5A_778/2021 du 8 juillet 2022 consid. 4.2.2 et les références). Les raisons de la mise en danger du développement importent peu: elles peuvent être liées au milieu dans lequel évolue l'enfant ou résider dans le comportement inadéquat de celui-ci, des parents ou d'autres personnes de l'entourage. Le fait que les parents soient ou non responsables de la mise en danger ne joue pas non plus de rôle (arrêt 5A_286/2022 du 27 septembre 2022 consid. 3.3.2 et les références). 
 
4.4. Dans son recours, la mère conteste qu'il existerait des dysfonctionnements familiaux graves et récurrents qui mettraient en danger le développement des trois enfants et reproche à la cour cantonale d'avoir arbitrairement retenu que les parents ne disposeraient pas des ressources nécessaires pour faire face à la situation. Elle fait également grief à l'autorité précédente d'avoir considéré que ses deux fils avaient besoin de réaliser un travail thérapeutique chacun de leur côté dans un lieu neutre afin d'être en mesure de prendre conscience de la situation et de reconstruire leurs repères affectifs et sexuels sans que le cadre familial ne soit un frein.  
Dans sa réplique spontanée sur la question de l'effet suspensif, la recourante a confirmé et développé l'argumentation présentée dans son recours. 
 
4.5. De manière générale, force est de constater que, dans son argumentaire, la recourante se prévaut certes de quelques éléments censés plaider en sa faveur, ainsi par exemple le fait que la DGEJ aurait admis qu'elle n'avait pas constaté de manquements au niveau éducatif. Ces éléments ne sont toutefois pas suffisants pour contrebalancer le raisonnement de l'autorité cantonale et le résultat auquel celle-ci est parvenue. En définitive, l'argumentation de la recourante est en grande partie appellatoire et repose largement sur sa propre appréciation de la situation; elle ne s'en prend que partiellement à la motivation détaillée et circonstanciée de l'autorité cantonale, laissant ainsi intacts plusieurs pans de celle-ci. Au demeurant, et contrairement à ce que paraît penser la recourante, on ne saurait raisonnablement attendre de l'autorité cantonale qu'elle discute chaque déclaration ou autre élément de la procédure. Au stade des mesures provisionnelles, il convenait ainsi que cette autorité procède à une balance d'intérêts en prenant en compte les éléments les plus importants du dossier et la recourante ne parvient pas à démontrer que la juridiction précédente aurait arbitrairement omis de le faire.  
S'agissant en particulier des dysfonctionnements relevés par la cour cantonale, la recourante reproche en substance à celle-ci de ne pas avoir précisé l'origine, les conséquences et le traitement de ces défaillances. Cela étant, compte tenu de l'ampleur et de la complexité de la situation, de tels éléments ne peuvent être investigués d'emblée de manière complète, singulièrement au stade des mesures provisionnelles. La recourante perd par ailleurs de vue que c'est le caractère exceptionnellement inquiétant des comportements sexuels adoptés par les enfants qui doit prédominer dans l'appréciation des faits, et non l'identification précise de tous les paramètres impliqués, étant à cet égard précisé que c'est au demeurant dans le cadre des mesures prises - et auxquelles s'oppose la recourante - qu'une telle identification pourra intervenir. 
Pour ce qui est de la question des ressources des parents et du travail thérapeutique à effectuer, la recourante appuie largement son argumentation sur le fait qu'elle serait en mesure d'accueillir ses deux fils chez elle et que ceux-ci pourraient être traités en parallèle. Or, compte tenu de la gravité des comportements présentés par les enfants - également dans des interactions entre eux -, que la recourante ne parvient pas à remettre en cause, les considérations de l'arrêt querellé ne sont pas arbitraires en tant que la juridiction précédente considère que les enfants ne pourraient pas être efficacement traités en étant maintenus au domicile familial. 
 
4.6. La recourante se plaint de la violation de son droit d'être entendue. Selon elle, l'autorité cantonale n'aurait pas discuté les raisons pour lesquelles toute autre mesure ne pourrait pas atteindre le but visé et se serait, à tort, contentée d'affirmer ne pas voir quelle autre mesure que celle du retrait du droit des parents de déterminer le lieu de résidence de leurs enfants pourrait être envisagée. Par ailleurs et en tout état de cause, la juridiction cantonale aurait arbitrairement violé les principes de proportionnalité et de subsidiarité découlant de l'art. 310 CC.  
Selon la jurisprudence, l'autorité qui ne traite pas un grief relevant de sa compétence, motivé de façon suffisante et pertinent pour l'issue du litige, commet un déni de justice formel proscrit par l'art. 29 al. 1 Cst. (ATF 142 II 154 consid. 4.2; 135 I 6 consid. 2.1; arrêts 5D_118/2021 du 15 octobre 2021 consid. 4.1; 5A_183/2020 du 6 septembre 2021 consid. 3.1). De même, la jurisprudence a déduit du droit d'être entendu de l'art. 29 al. 2 Cst. l'obligation pour l'autorité de motiver sa décision, afin que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 III 65 consid. 5.2; 142 I 135 consid. 2.1; arrêts 5A_443/2022 du 3 mars 2023 consid. 6; 5A_612/2019 du 10 septembre 2021 consid. 3.1). 
Un retrait du droit de déterminer le lieu de résidence n'est envisageable que si d'autres mesures ont été vouées à l'échec ou apparaissent d'emblée insuffisantes (arrêt 5A_778/2021 du 8 juillet 2022 consid. 4.2.2 et les références). Une mesure de retrait du droit de déterminer le lieu de résidence de l'enfant n'est ainsi légitime que s'il n'est pas possible de prévenir le danger par les mesures moins incisives prévues aux art. 307 et 308 CC (principes de proportionnalité et de subsidiarité; arrêt 5A_286/2022 du 27 septembre 2022 consid. 3.3.2 et les références). 
En l'espèce, l'arrêt querellé constate que les premiers éléments inquiétants quant aux comportements sexuels des enfants sont apparus en 2013 déjà. Au vu de l'historique des événements, de leur gravité et du fait qu'un suivi avait déjà été mis en place, en vain, il ressort suffisamment - et de manière convaincante - de la motivation cantonale que la situation commande une mesure aussi radicale que celle du retrait du droit de déterminer le lieu de résidence des enfants et du placement de ceux-ci. On ne saurait donc voir une violation du droit d'être entendue de la recourante, pas davantage qu'une violation des principes de proportionnalité et de subsidiarité applicables au prononcé de la mesure litigieuse. 
 
4.7. La recourante soulève la violation de l'art. 13 al. 1 Cst., voire de l'art. 8 CEDH, sans toutefois fournir d'argumentation spécifique à cet égard. Son grief ne répond dès lors aucunement aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF et il est, partant, irrecevable. La recourante ne mentionne au demeurant pas en quoi les dispositions invoquées auraient une portée propre par rapport au moyen tiré de l'art. 9 Cst., qu'elle a précédemment soulevé en lien avec l'art. 310 CC.  
 
4.8. L'intéressée conteste en dernier lieu que l'urgence de la situation serait réalisée.  
 
4.8.1. Dans l'arrêt querellé, les juges cantonaux ont relevé que si l'ordonnance de première instance était certes maladroite lorsqu'elle retenait qu'il n'y avait pas de réelle urgence à la mise en oeuvre du placement des deux frères, dès lors que celui de D.A.________ était confirmé, il fallait comprendre cette décision en ce sens qu'il était dans l'intérêt des garçons d'éviter un placement en foyer d'urgence et de leur trouver une solution pérenne qu'ils pourraient investir. Or, c'était déjà le cas pour C.A.________, qui avait une place à L.________ à partir du mois d'août 2022. Pour le surplus, les enfants étant en danger, la situation ne pouvait être maintenue en l'état, faute de quoi elle risquait de se péjorer, voire de se cristalliser. L'autorité cantonale a en outre relevé que l'on ne pouvait pas non plus attendre le dépôt du rapport d'expertise puisqu'il le serait probablement dans de longs mois.  
 
4.8.2. En l'espèce, la recourante se contente essentiellement de réitérer ses critiques formées en appel s'agissant du point litigieux, critiques auxquelles la cour cantonale a toutefois déjà répondu. Par son argumentation appellatoire, elle ne présente aucun argument pertinent qui soit de nature à faire apparaître arbitraire le refus de l'autorité cantonale de surseoir à un placement des enfants ou à considérer, comme elle le soutient, que les juges cantonaux auraient violé son droit d'être entendue. Le grief doit ainsi être rejeté dans la mesure de sa recevabilité.  
 
4.9. Au final, les griefs sont infondés pour autant qu'ils sont recevables.  
 
5.  
En définitive, le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recours étant d'emblée voué à l'échec, la requête d'assistance judiciaire de la recourante ne saurait être agréée (art. 64 al. 1 LTF). Les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu à l'allocation de dépens à E.A.________, qui n'a pas été invité à se déterminer sur le fond et qui a succombé s'agissant de l'effet suspensif (art. 68 al. 1 LTF). Les curateurs de représentation des enfants doivent être indemnisés pour leur intervention en procédure fédérale. Les indemnités, qui doivent être intégrées aux frais judiciaires, sont fixées à 700 fr. pour les curateurs des enfants B.A.________ et C.A.________ et à 300 fr. pour la curatrice de l'enfant D.A.________. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
La requête d'assistance judiciaire de la recourante est rejetée.  
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'700 fr. (y compris les indemnités des curateurs de représentation des enfants), sont mis à la charge de la recourante. 
 
4.  
Les curateurs de représentation des enfants sont indemnisés par la Caisse du Tribunal fédéral à hauteur de 700 fr. pour le curateur de l'enfant B.A.________, de 700 fr. pour la curatrice de l'enfant C.A.________ et de 300 fr. pour la curatrice de l'enfant D.A.________. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, à la Justice de paix du district de Morges, à B.A.________, à C.A.________, à D.A.________, à E.A.________, à la Chambre des curatelles du Tribunal cantonal du canton de Vaud et à la Direction générale de l'enfance et de la jeunesse, ORPM de l'Ouest. 
 
 
Lausanne, le 13 avril 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : Gudit