Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
8C_361/2022
Arrêt du 13 octobre 2022
Ire Cour de droit social
Composition
MM. les Juges fédéraux Wirthlin, Président,
Maillard et Abrecht.
Greffier : M. Ourny.
Participants à la procédure
SWICA Assurances SA,
Römerstrasse 37, 8401 Winterthur,
recourante,
contre
A.________,
représentée par Me Alexandre Guyaz, avocat,
intimée.
Objet
Assurance-accidents (rente d'invalidité; indemnité pour atteinte à I'intégrité; lien de causalité),
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 29 avril 2022 (AA 99/20 - 47/2022).
Faits :
A.
A.a. A.________, née en 1967, a travaillé comme caissière à la B.________ à partir du 1
er mars 2008. Le 23 juin 2013, elle a été victime d'un accident alors qu'elle circulait dans un minibus en tant que passagère. Sur une autoroute à hauteur de U.________ en Italie, le chauffeur a perdu la maîtrise du véhicule, qui a heurté une barrière de sécurité et fait plusieurs tonneaux. La prénommée, éjectée de l'habitacle et polytraumatisée, a été hospitalisée en urgence et s'est retrouvée dans le coma durant trois jours. Le 30 juin 2013, elle a été transférée à l'Hôpital C.________. SWICA Assurances SA (ci-après: SWICA), auprès de laquelle elle était assurée obligatoirement contre le risque d'accidents, a pris en charge le cas. Entre le 3 décembre 2013 et le 8 janvier 2014, l'assurée - qui a également développé des troubles psychiques ensuite de l'accident - a séjourné à la Clinique romande de réadaptation (CRR).
SWICA a confié une expertise pluridisciplinaire (médecine interne générale, orthopédie/traumatologie de l'appareil locomoteur, neurologie et psychiatrie) au centre d'expertise CEMEDEX. Dans leur rapport du 28 novembre 2016, les experts de ce centre ont estimé que les atteintes à la santé physique et psychique de l'assurée étaient dues à l'accident du 23 juin 2013 et que l'incapacité de travail était totale dans quelque activité professionnelle que ce soit. Ils ont en outre recommandé l'octroi d'une indemnité pour atteinte à l'intégrité (IPAI) de 50 %, soit 15 % pour les atteintes à l'épaule droite et 35 % pour les troubles psychiques résultant d'une atteinte cérébrale organique. Sur requête de SWICA, l'expert en orthopédie et traumatologie de l'appareil locomoteur de CEMEDEX a rendu un complément d'expertise le 10 octobre 2018. Ce spécialiste a estimé qu'en prenant en compte uniquement les atteintes orthopédiques, la capacité de travail de l'assurée était nulle dans sa profession de caissière; dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles, sa capacité de travail était en revanche de 80 %, avec une diminution de rendement de 20 %.
A.b. Par décision du 10 décembre 2018, SWICA a mis un terme à la prise en charge des frais de traitement médical pour les troubles psychiques avec effet au 25 décembre 2017, au motif qu'après cette date, ces troubles n'étaient plus en lien de causalité adéquate avec l'accident du 23 juin 2013. Par une autre décision du 19 décembre 2019, l'assureur a mis fin au paiement des frais médicaux et de l'indemnité journalière avec effet au 1
er octobre 2019, a alloué à l'assurée une rente d'invalidité fondée sur un taux de 33 %, correspondant à une rente mensuelle de 930 fr., et lui a octroyé une IPAI de 15 %. Ces deux décisions ont été confirmées sur opposition par décision du 1
er septembre 2020.
B.
Saisie d'un recours contre la décision sur opposition, la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud l'a admis par arrêt du 29 avril 2022. La décision sur opposition du 1
er septembre 2020 a été réformée en ce sens qu'une "rente entière d'invalidité" dès le 1
er octobre 2019 et une IPAI de 50 % ont été octroyées à l'assurée, la cause étant renvoyée à SWICA afin que celle-ci procède au calcul du montant de ces prestations et qu'elle fixe les modalités de leur allocation.
C.
SWICA interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt, en concluant à sa réforme dans le sens de la confirmation de sa décision sur opposition du 1
er septembre 2020. Elle requiert en outre l'octroi de l'effet suspensif.
L'intimée conclut au rejet du recours. La cour cantonale se réfère purement et simplement à son arrêt et l'Office fédéral de la santé publique a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit :
1.
1.1. Le recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) est recevable contre les décisions qui mettent fin à la procédure (art. 90 LTF), contre les décisions partielles (art. 91 LTF) ainsi que contre les décisions préjudicielles et incidentes qui sont notifiées séparément et qui portent sur la compétence ou sur une demande de récusation (art. 92 al. 1 LTF). Selon l'art. 93 al. 1 LTF, les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours si elles peuvent causer un préjudice irréparable (let. a) ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (let. b).
1.2. Les jugements qui renvoient la cause à l'autorité inférieure constituent des décisions incidentes car ils ne mettent pas fin à la procédure (ATF 142 II 20 consid. 1.2; 134 II 124 consid. 1.3). Toutefois, lorsque l'autorité inférieure à laquelle la cause est renvoyée ne dispose plus d'aucune marge de manoeuvre parce que le renvoi ne porte que sur l'exécution (par simple calcul) des injonctions de l'autorité supérieure, le jugement constitue matériellement une décision finale (ATF 145 III 42 consid. 2.1; 144 III 253 consid. 1.4 et les références). Tel étant le cas en l'espèce, le recours, déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi, est donc recevable.
2.
2.1. Au vu de l'arrêt entrepris et des conclusions de la recourante, le litige porte sur le point de savoir si la juridiction cantonale a violé le droit fédéral en admettant le lien de causalité adéquate entre l'accident du 23 juin 2013 et les troubles psychiques de l'intimée et en allouant à celle-ci une rente d'invalidité fondée sur un taux d'invalidité de 100 %, avec intérêts à 5 % l'an dès le 1
er octobre 2021, ainsi qu'une IPAI de 50 %, avec intérêts à 5 % l'an dès le 19 mars 2019.
2.2. S'agissant d'une procédure concernant l'octroi de prestations en espèces de l'assurance-accidents, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 3 LTF).
3.
3.1. Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose notamment, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette exigence est remplie lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout ou ne serait pas survenu de la même manière (ATF 142 V 435 consid. 1; 129 V 177 consid. 3.1). Le droit à des prestations de l'assurance-accidents suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate entre l'accident et l'atteinte à la santé. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de manière générale favorisée par une telle circonstance (ATF 143 II 661 consid. 5.1.2; 139 V 156 consid. 8.4.2; 129 V 177 consid. 3.2).
3.2. En présence d'un tableau clinique typique des lésions du rachis cervical par accident de type "coup du lapin", de traumatisme analogue ou de traumatisme cranio-cérébral sans preuve d'un déficit fonctionnel organique (maux de têtes diffus, vertiges, troubles de la concentration et de la mémoire, nausées, fatigabilité, troubles de la vue, irritabilité, dépression, modification du caractère, etc.), la situation dans laquelle les symptômes, qui peuvent être attribués de manière crédible au tableau clinique typique, se trouvent au premier plan doit être distinguée de celle dans laquelle l'assuré présente des troubles psychiques qui constituent une atteinte à la santé distincte et indépendante du tableau clinique caractéristique habituellement associé aux traumatismes en cause. Dans le premier cas, cet examen se fait sur la base des critères particuliers développés pour les cas de traumatisme de type "coup du lapin", lesquels n'opèrent pas de distinction entre les éléments physiques et psychiques des atteintes (cf. ATF 134 V 109 consid. 10.3; 117 V 359 consid. 6a). Dans le second cas, il y a lieu de se fonder sur les critères applicables en cas de troubles psychiques consécutifs à un accident, c'est-à-dire en excluant les aspects psychiques (cf. ATF 134 V 109 précité consid. 9.5; 127 V 102 consid. 5b/bb et les références).
3.3. En cas de troubles psychiques consécutifs à un accident, la jurisprudence a dégagé des critères objectifs qui permettent de juger du caractère adéquat du lien de causalité. Elle a tout d'abord classé les accidents en trois catégories, en fonction de leur déroulement: les accidents insignifiants ou de peu de gravité, les accidents de gravité moyenne et les accidents graves. Dans le cas d'un accident de gravité moyenne, il faut prendre en considération un certain nombre de critères, qui sont les suivants (cf. ATF 129 V 402 consid. 4.4.1; 115 V 133 consid. 6c/aa; 403 consid. 5c/aa) :
- les circonstances concomitantes particulièrement dramatiques ou le caractère particulièrement impressionnant de l'accident;
- la gravité ou la nature particulière des lésions physiques, compte tenu notamment du fait qu'elles sont propres, selon l'expérience, à entraîner des troubles psychiques;
- la durée anormalement longue du traitement médical;
- les douleurs physiques persistantes;
- les erreurs dans le traitement médical entraînant une aggravation notable des séquelles de l'accident;
- les difficultés apparues au cours de la guérison et des complications importantes;
- le degré et la durée de l'incapacité de travail due aux lésions physiques.
Tous ces critères ne doivent pas être réunis pour que la causalité adéquate soit admise (ATF 129 V 402 consid. 4.4.1; 115 V 133 consid. 6c/bb). De manière générale, lorsque l'on se trouve en présence d'un accident de gravité moyenne (stricto sensu), il faut un cumul de trois critères sur les sept, ou au moins que l'un des critères retenus se soit manifesté de manière particulièrement marquante (arrêt 8C_600/2020 du 3 mai 2021 consid. 3.3 et la référence).
4.
La cour cantonale a relevé que les experts de CEMEDEX avaient fait état d'un traumatisme cranio-cérébral sévère, avec hémorragie sous-arachnoïdienne et corticale, ainsi que de fractures multiples. Sous l'angle psychiatrique, ils avaient posé les diagnostics de trouble dépressif récurrent (épisode moyen à sévère), de trouble de l'adaptation chronique post-traumatique et de syndrome douloureux somatoforme persistant. Selon les experts, ces atteintes à la santé physique et psychique de l'intimée étaient en relation de causalité naturelle avec l'accident du 23 juin 2013. Les juges cantonaux ont constaté que la recourante avait toutefois nié le lien de causalité adéquate entre cet accident et les affections psychiques de l'intimée; se fondant uniquement sur les atteintes somatiques, elle avait considéré que l'intéressée disposait d'une capacité de travail de 80 %, avec une diminution de rendement de 20 %, dans une activité adaptée, ce qui conduisait à l'octroi d'une rente d'invalidité fondée sur un taux de 33 %.
Procédant à l'examen du lien de causalité adéquate entre l'accident et les troubles psychiques de l'intimée, les premiers juges ont retenu que la symptomatologie de cette dernière avait pris la forme d'une atteinte à la santé psychique propre, distincte du tableau clinique du traumatisme cranio-cérébral, de sorte qu'il convenait d'examiner le lien de causalité adéquate à l'aune des critères en matière de troubles psychiques. Ce faisant, le tribunal cantonal a indiqué que selon la recourante, l'accident de circulation du 23 juin 2013 était de gravité moyenne stricto sensu, ce que l'intimée n'avait pas remis en cause. Il a ensuite retenu que cinq critères jurisprudentiels étaient remplis, ce qui était suffisant pour admettre le lien de causalité adéquate. L'intimée, en incapacité totale de travail, avait ainsi droit à une "rente entière d'invalidité" et à une IPAI de 50 %, qui couvrait également ses affections psychiques. La juridiction cantonale a encore retenu que l'intimée pouvait prétendre à des intérêts moratoires de 5 % l'an sur la rente d'invalidité et l'IPAI, dès le 1
er octobre 2021 s'agissant de la rente d'invalidité et dès le 19 mars 2019 s'agissant de l'IPAI.
5.
5.1. La recourante soutient qu'il n'y aurait pas de lien de causalité adéquate entre l'accident du 23 juin 2013 et les troubles psychiques de l'intimée. Sans remettre en cause la classification de cet accident dans la catégorie des accidents de gravité moyenne stricto sensu (cf. consid. 3.3 supra), elle estime qu'un seul des critères définis par la jurisprudence serait rempli, à savoir celui des douleurs physiques persistantes.
5.2. On notera que les juges cantonaux ont considéré à bon droit que la relation de causalité adéquate devait être examinée à l'aune des critères en matière de troubles psychiques (cf. consid. 3.2 et 3.3 supra), ce que les parties ne contestent d'ailleurs pas. En procédant à l'examen concret des différents critères, ils ont toutefois eu recours aux critères applicables lorsque l'on ne fait pas de distinction entre les éléments physiques et psychiques des atteintes (pour le détail de ces critères développés pour les cas de traumatisme de type "coup du lapin", cf. arrêt 8C_220/2016 du 10 février 2017 consid. 6.1). Cela ne porte toutefois pas à conséquence, dès lors qu'un examen à l'aune des critères en cas de troubles psychiques - qui se recoupent en grande partie avec ceux en matière de traumatisme de type "coup du lapin" - aboutit au même résultat, comme le démontre ce qui suit.
5.3. La recourante estime que contrairement à ce qu'a retenu la cour cantonale, le critère - commun aux deux listes de critères - des circonstances concomitantes particulièrement dramatiques ou du caractère particulièrement impressionnant de l'accident ne serait pas rempli.
5.3.1. La raison pour laquelle la jurisprudence a adopté le critère précité repose sur l'idée que de telles circonstances sont propres à déclencher chez la personne qui les vit des processus psychiques pouvant conduire ultérieurement au développement d'une affection psychique. C'est le déroulement de l'accident dans son ensemble qu'il faut prendre en considération. L'examen se fait sur la base d'une appréciation objective des circonstances de l'espèce et non en fonction du ressenti subjectif de l'assuré, en particulier de son sentiment d'angoisse. Il faut en effet observer qu'à tout accident de gravité moyenne est associé un certain caractère impressionnant, lequel ne suffit pas pour admettre l'existence du critère en question. Il convient d'accorder à ce critère une portée moindre lorsque la personne ne se souvient pas de l'accident (arrêt 8C_816/2021 du 2 mai 2022 consid. 5.3.1 et les références).
5.3.2. La recourante conteste essentiellement le fait que l'intimée ait été consciente du début à la fin de l'accident, comme l'a retenu l'autorité précédente. Dans le questionnaire d'accident LAA, l'intimée a indiqué s'être réveillée brusquement, avoir vu le chauffeur endormi au volant, avoir crié et s'être levée pour protéger ses enfants installés à ses côtés, avant que le véhicule tape la barrière de sécurité et qu'elle soit éjectée de la voiture jusque dans un canal en contrebas. Contrairement à ce que soutient la recourante, rien ne permet de penser que ce questionnaire n'ait pas été rempli par l'intimée ou à tout le moins sous sa dictée. Il ressort en outre d'un rapport médical du 6 novembre 2013 émanant d'un spécialiste en neurologie que l'intimée se souvient du choc et des bruits qui l'ont accompagné, puis qu'elle a perdu connaissance jusqu'à son réveil à l'hôpital 72 heures plus tard. A teneur du rapport établi par la police italienne ensuite de l'accident, l'intéressée a été retrouvée en dehors du véhicule dans un état conscient ("in stato cosciente"). Selon un rapport du 16 janvier 2014 du service de psychosomatique de la CRR, l'intimée ne manifeste certes pas de réel phénomène de reviviscence car elle n'a pas de souvenir de l'accident, mais elle présente des cauchemars avec des réveils en sursaut, décrivant des images d'accident de voiture associées à un bruit de verre brisé. Au vu de ce qui précède, on peut conclure que l'intimée se souvient à tout le moins du choc et des instants qui l'ont précédé, d'une manière suffisante pour alimenter ses cauchemars. On ne saurait donc retenir qu'elle ne garde aucun souvenir de son accident.
5.3.3. Pour le reste, les circonstances de l'accident, qui ne sont pas contestées par la recourante, revêtent un caractère suffisamment impressionnant et dramatique pour que le critère litigieux soit admis. L'accident s'est produit sur l'autoroute, donc à une vitesse élevée, le rapport de police précisant à ce titre que le chauffeur roulait à une vitesse non modérée ("velocità non moderata") ne lui permettant pas de conserver la maîtrise du véhicule en toute circonstance. Ce rapport indique également que l'impact contre la barrière de sécurité a été très violent ("urto violentissimo"). Le minibus a effectué plusieurs tonneaux et l'intimée a été éjectée de l'habitacle à travers le pare-brise, entraînant un polytraumatisme et un coma d'une durée de trois jours. L'intimée a par ailleurs vécu l'accident d'une manière particulièrement intense, puisqu'elle a aperçu le chauffeur endormi alors qu'elle venait elle-même de se réveiller et qu'elle a crié. Comme relevé à juste titre par les premiers juges, elle était de surcroît accompagnée de ses enfants, qu'elle a voulu protéger dans un geste désespéré.
5.3.4. C'est donc à bon droit que la cour cantonale a considéré que le critère des circonstances concomitantes particulièrement dramatiques ou du caractère particulièrement impressionnant de l'accident était rempli.
5.4. La recourante conteste que le critère de la gravité ou de la nature particulière des lésions physiques - également commun aux deux listes de critères - soit rempli.
5.4.1. Pour être retenu, le critère de la gravité ou de la nature particulière des lésions physiques, compte tenu notamment du fait qu'elles sont propres, selon l'expérience, à entraîner des troubles psychiques, postule d'abord l'existence de lésions physiques graves ou, s'agissant de la nature particulière des lésions physiques, d'atteintes à des organes auxquels l'homme attache normalement une importance subjective particulière (par exemple la perte d'un oeil ou certains cas de mutilations à la main dominante; cf. arrêt 8C_235/2020 du 15 février 2021 consid. 4.3.2 et les références).
5.4.2. En l'espèce, les nombreuses et sérieuses lésions physiques de l'intimée doivent conduire à l'admission du critère en cause. Les experts de CEMEDEX ont en effet diagnostiqué un polytraumatisme sous la forme d'un traumatisme cranio-cérébral sévère et de multiples fractures (os propre du nez, partie distale de la clavicule gauche, apophyses épineuses C6 et C7, fractures alvéolaires avec perte de dents), ainsi qu'une capsulite rétractile de l'épaule gauche sur déchirure de la coiffe des rotateurs, des dorso-lombalgies chroniques, des cervicalgies post-traumatiques et une contusion pulmonaire. Ces lésions ont entraîné des douleurs persistantes sur toutes les parties du corps touchées par l'accident ainsi que des diminutions de flexion et de force à différents niveaux, ce qui limite considérablement la mobilité et induit d'importantes limitations fonctionnelles.
5.4.3. Il découle de ce qui précède que l'admission par les juges cantonaux du critère de la gravité ou de la nature particulière des lésions physiques ne prête pas non plus le flanc à la critique.
5.5. La recourante considère que le critère des douleurs physiques persistantes est également rempli et il n'y a pas lieu de s'écarter de cette appréciation, quand bien même la juridiction cantonale a admis la réalisation du critère de l'intensité des douleurs - similaire à celui des douleurs physiques persistantes - propre aux critères n'opérant pas de distinction entre les éléments physiques et psychiques des atteintes.
5.6. Dès lors que trois critères sur sept sont remplis, il n'est pas nécessaire de trancher le point de savoir si d'autres critères ont été retenus à tort par le tribunal cantonal (cf. consid. 3.3 in fine supra). C'est ainsi à bon droit que celui-ci a admis le lien de causalité adéquate entre l'accident du 23 juin 2013 et les troubles psychiques de l'intimée et qu'il a reconnu à cette dernière le droit à une rente d'invalidité fondée sur un taux d'invalidité de 100 %.
6.
6.1. La recourante reproche encore à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 26 al. 2 LPGA (RS 830.1) en allouant à l'intimée des intérêts moratoires sur la totalité de la rente d'invalidité, alors qu'une rente de 930 fr. par mois est versée depuis le 1
er octobre 2019.
6.2. Cette critique est fondée, les juges cantonaux n'ayant pas précisé que les intérêts à 5 % l'an dès le 1
er octobre 2021 devaient porter sur le montant correspondant à la rente d'invalidité de 100 % - dont le calcul doit encore être effectué par la recourante - encore dû après déduction de la rente de 930 fr. déjà versée depuis le 1
er octobre 2019. On remarquera par ailleurs que le dispositif de l'arrêt entrepris ne fait pas mention des intérêts moratoires dus à l'intimée, contrairement à ce qui a été retenu dans les considérants de l'arrêt en question. Il s'ensuit que le recours doit être partiellement admis en tant qu'il porte sur les intérêts moratoires et l'arrêt cantonal réformé et précisé sur ce point.
7.
Vu l'issue du litige, les frais judiciaires seront répartis entre les parties (art. 66 al. 1 LTF). L'intimée, qui obtient partiellement gain de cause, a droit à des dépens réduits à charge de la recourante ( art. 68 al. 1 et 2 LTF ). La recourante n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 3 LTF). La cause sera renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision sur les dépens de la procédure précédente (art. 68 al. 5 LTF). La cause étant tranchée au fond, la requête d'effet suspensif est sans objet.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est partiellement admis. L'arrêt de la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 29 avril 2022 est réformé en ce sens que l'intimée a droit à une rente d'invalidité de 100 % dès le 1
er octobre 2019, avec intérêts à 5 % dès le 1
er octobre 2021 sur le montant dû après déduction des rentes déjà versées par la recourante, ainsi qu'à une IPAI de 50 %, avec intérêts à 5 % l'an dès le 19 mars 2019. Le recours est rejeté pour le surplus.
2.
La requête d'effet suspensif est sans objet.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis pour 600 fr. à la charge de la recourante et pour 200 fr. à la charge de l'intimée.
4.
La recourante versera à l'intimée la somme de 2100 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral.
5.
La cause est renvoyée à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud pour nouvelle décision sur les dépens de la procédure antérieure.
6.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud et à l'Office fédéral de la santé publique.
Lucerne, le 13 octobre 2022
Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Wirthlin
Le Greffier : Ourny